PACIFISME :
A la fin du XIXe siècle, nationalisme et internationalisme rivalisent. La puissance du sentiment nationaliste, qui s’était traduit dans la seconde moitié du XIXe Siècle en Europe par des conflits de nationalité et la création d’État-nations, demeure forte au début du XXe siècle, attisé par rivalités coloniales et les crises balkaniques. Sous la IIIe République, l’opinion publique, alimentée par certains milieux politiques et intellectuels, conserve ce sentiment de revanche à l’encontre de l’Allemagne au profit de laquelle elle a perdu l’Alsace et la Lorraine en 1870.
Cependant, au début du XXe siècle, on distingue l’essor d’un double courant pacifiste : d’une part, celui de la paix par le droit et d’autre part, celui du socialisme international. Le premier qui trouve ses théories par mi les intellectuels et les juristes (Théodore Ruyssen, d’Estournelle de Constant, Léon Bourgeois), entend soumettre les États à une réglementation des rapports internationaux et au niveau de la diplomatie des Etats. Le second, inspiré des thèses marxistes, récuse le principe des conflits internationaux comme produit d’un impérialisme bourgeois, pour lui substituer une autre forme de combat : la lutte des classes (« prolétaires de tout pays, unissez-vous ! »). Mais le pacifisme socialiste recouvre de multiples contradictions et distingue essentiellement deux tendances. Les uns alimentent leur pacifisme d’antimilitarisme et d’antipatriotisme, l’armée et la patrie étant considérées comme deux symboles de la domination bourgeoise. Les autres pensent pouvoir concilier pacifisme et patriotisme. Il en est ainsi de la majorité des socialistes français, qui, emmenés par Edouard Vaillant, Jean Jaurès et Jules Guesde, profèrent un pacifisme à la fois antimilitariste et patriote.
Au sein de la IIe Internationale, dont la lutte contre la guerre est un combat majeur, le socialisme français et la social-démocratie allemande, plus divisée et plus perméable au nationalisme germanique, ne parviennent pas à se concilier. Aussi, l’unité du mouvement ouvrier international, pourtant résolument pacifiste, ne résiste pas au déclenchement de la Première Guerre mondiale et à l’Union sacrée. Les appels à l’union internationale des travailleurs contre la guerre, aussi bien à la veille que pendant le conflit, ne rencontrent qu’une audience marginale. La tourmente de 1914 emporte, avec la voix de Jaurès assassiné le 31 juillet au Café du Croissant, les espoirs des pacifistes. La SFIO et la CGT se rallient à la défense nationale.
Cette défaite du pacifisme, qui ne relèvent ni les manifestations d’opposition à la guerre, lors des conférences de Zimmerwald (septembre 1915) et de Kienthal (avril 1916), ni les mutineries et mouvements d’opinion de 1917, explique la déconfiture de la IIe Internationale proclamée dès 1915 par Lénine, qui crée en mars 1919 la IIIe Internationale. Au Congrès de Tours en décembre 1920, les problèmes de la guerre et de la défense divisent encore une fois les socialistes. A l’encontre de la SFIC (Section française de l’Internationale communiste), la SFIO ne récuse pas la défense nationale, tout en s’affirmant comme le parti de la paix.
Entre les deux guerres, le pacifisme semble consubstantiel de l’esprit du temps. La vérité est plus nuancée. Le pacifisme n’est ni permanent ni universel. En particulier, dans les années d’immédiat après-guerre, le climat est tendu, incitant gouvernements et opinions à la fermeté de part et d’autre. De même, dans les mois précédents la Seconde Guerre mondiale, les limites du pacifisme sont atteintes. Entre ces deux périodes, il faut distinguer un pacifisme d’après guerre, fondé sur la volonté d’éviter la répétition de la Grande Guerre, et un pacifisme d’avant-guerre, né de la menace que font peser les dictatures sur la paix.
Cette période pacifiste qui s’étend du début des années 1920 à la conférence de Munich en 1938 est marqué, dans sa première phase, par « l’esprit de Genève » et son bras institutionnel, la Société des Nations (SDN). Celle-ci, née en 1919 de la volonté du président américain Wilson, consacre le pacifisme juridique, en fondant une réglementation des rapports internationaux. Ce pacifisme institutionnel auquel adhère l’opinion française (notamment par le biais d’associations), se trouve renforcé par la politique de concorde internationale et de négociations pour le désarment que mènent les principaux dirigeants européens, notamment Aristide Briand. Alimentant cette veine de fraternité universelle, les Eglises en particulier le Vatican, ainsi que les associations confessionnelles, déploient une intense activité en faveur de la paix et du désarmement. Quant à l’Internationale communiste, elle fait profession de pacifisme qui permet à la fois le combat anti-impérialiste et la confusion entre la cause communiste et la lutte pour la paix.
D’intensité variable selon la période, le pacifisme est aussi loin d’être universel. Dominant chez les intellectuels, artistes et écrivains, souvent mêlé d’antimilitarisme et d’antipatriotisme, il constitue dans les franges de l’opinion proche de la gauche un pacifisme de conviction. Socialistes, communistes et syndicats combattent les engrenages conduisant à la guerre : politique d’armement et diplomatie d’alliances. La division du mouvement ouvrier est pourtant permanente, même sur ce sujet d’intérêt commun. Farouchement antimilitaristes et antipatriotes, les communistes renvoient dos à dos partisans de la sécurité et du désarmement, les socialistes français sont les champions du pacifisme humanitaire et de « l’esprit de Genève ». La droite française, mis à part l’extrême droite, est plus portée vers un pacifisme sécuritaire.
Au total, si l’opinion française est acquise aux thèses de la sécurité collective, le pacifisme lui-même est loin de la submerger au début des années 1930. Une pétition pour le désarmement et la paix, lancée par la Ligue des droits d l’homme en 1930, ne reçoit qu’une centaine de milliers de signatures pour un chiffre attendu d’un million. Attachés à la paix, les Français n’en demeurent pas moins vigilants, imprégnés du souvenir des invasions germaniques.
Paradoxalement, c’est avec l’émergence des régimes totalitaires en Europe que le pacifisme devient profond et généralisé, en France comme dans les démocraties occidentales. Les menaces toujours plus précises que font peser ces régimes sur la paix internationale, l’effondrement de la SDN qui n’ pas les moyens de s’y opposer, provoquèrent un sentiment aigu de rejet et s’un conflit dont l’éventualité se précise. Un pacifisme transcendant les générations, les couches sociales et les clivages politiques gagne en profondeur l’opinion des démocraties européennes et en particulier française.
En France comme au Royaume-Uni, il y a convergence des pacifismes pour repousser à tout prix l’affrontement, paralysant les diplomaties face aux exigences des dictateurs. C’est le cas lors de la remilitarisation de la Rhénanie ou de l’Anschluss. Seuls les communistes professent, dans le cadre de la IIIe Internationale, l’intransigeance face à l’encontre du nazisme et du fascisme. Une attitude qui contribue à renforcer encore le champ des pacifistes à tout prix, les anticommunistes y trouvant un motif supplémentaire d’opposition.
Ainsi, la suprême reculade des démocraties occidentales face à Hitler lors de la Conférence de Munich en 1938 est accueillie avec soulagement par l’opinion. Mais le pacifisme a atteint ses limites, et l’opinion se résout, non sans douleur, à prendre conscience de l’inéluctabilité de la guerre. Et c’est brutalement que le revirement s’opère. Le coup de Prague en mars 1939 et l’invasion de la Pologne quelques mois plus tard achèvent de convaincre de la vanité du pacifisme face aux régimes nazi et fasciste. Les socialistes y trouvent la résolution du dilemme entre le pacifisme et l’attachement aux valeurs démocratiques qui les tiraillait depuis la guerre d’Espagne en 1936. Un revirement qui trouve aux yeux de tous les anticommunistes sa justification dans le pacte germano-soviétique d’août 1939. Le pacifisme frileux des années 1930 est finalement surmonté.
BARBIER (J-B) : Le Pacifisme dans l’histoire de France, Barbier, 1966.
BILIS (Michel) : Socialistes et pacifistes ou l’impossible dilemme des socialistes français, 1933-1939, Paris, Syros, 1979.
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VAÏSSE (Maurice) : Le Pacifisme en Europe des années 1920 aux années 1950, Bruxelles, Bruylant, 1993.
PAGANON (Joseph), 1880-1937 : Docteur et homme politique. Né à Vourey (Isère) le 19 mars 1880, Joseph Paganon, docteur en médecine, devient directeur du cabinet de Jules Pams à l’Agriculture, puis à l’Intérieur. Député du cartel des gauches, il est nommé, du 3 juin au 17 décembre 1932, sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères dans le troisième cabinet Herriot. Du 31 janvier 1933 au 8 février 1934, il est nommé ministre des Travaux publics dans les cabinets successifs de Daladier (premier cabinet), Sarraut (premier ministère), Chautemps (deuxième cabinet) et Daladier (second ministère). Ce franc-maçon garde ce poste du 1er au 6 juin 1935 dans le ministère Bouisson. Il refuse alors toute nationalisation des chemins de fer. Il est nommé une dernière fois au gouvernement comme ministre de l’Intérieur du 7 juin 1935 au 23 janvier 1936 dans le quatrième cabinet Laval. Il décède à Paris le 2 novembre 1937.
PAINLEVÉ (Paul), 1863-1933 : Mathématicien et homme politique. Né à Paris le 5 décembre 1863, Paul Painlevé est le fils d’un dessinateur lithographe. Il est reçu, à vingt ans, à l’École normale supérieure puis devient agrégé. Docteur ès sciences en 1887, il devient professeur de mathématiques à l’université de Lille puis titulaire d’une chaire de mathématiques générales à la Sorbonne et à l’école polytechnique. En 1900, il est élu membre de l’Académie des sciences. Ses travaux le situent comme l’un des plus brillants mathématiciens de son temps. Sa thèse porte sur l’étude globale des équations différentielles dont il fonde la théorie analytique. Il s’intéresse aussi à la mécanique générale (mécanique des fluides), ce qui l’entraîne à ce préoccuper d’aviation. Face à une opinion assez sceptique, il montre la possibilité qu’offre l’avion en participant, en 1908, comme passager, aux trajets initiaux des aviateurs Wilbur Wright et Henri Farman.
A l’origine, rien ne semble prédisposer cet illustre savant à embrasser la politique. Comme pour tant d’autres, c’est l’affaire Dreyfus qui détermine son engagement. C’est en 1910 qu’il fait son entrée dans la politique active en gagnant un siège de député de Paris, lors des élections législatives. Il s’inscrit, en décembre 1911, au groupe des républicains socialistes et s’occupe à la Chambre des questions militaires. Réélu en 1914, il est une personnalité politique qui compte à gauche, dans le sillage de Briand.
La Guerre lui permet d’occuper des responsabilités ministérielles importantes. Du 29 octobre 1915 au 15 novembre 1915, il exerce les fonctions de ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts dans le cinquième gouvernement Briand, domaine vite élargi aux Inventions intéressant la Défense nationale jusqu’au 11 défense nationale. Le 11 septembre 1917, il est appelé par Ribot dans son cinquième cabinet pour s’occuper du ministère de la Guerre : il est le premier civil à s’occuper de telles fonctions depuis 1914. Il passe pour être l’homme de Pétain et de Foch et se montre réservé sur l’offensive Nivelle. Lorsque l’échec du généralissime devient patent, il fait nommer Pétain commandant en chef des armées du Nord et confie à Foch les fonctions de chef d’état major général de l’armée. Attaqué par les députés socialistes, il défend les méthodes de Pétain tout en manifestant sa compréhension à l’égard des soldats. Son habileté politique accroît son influence et accélère sa carrière. Surtout Painlevé doit affronter les effets politiques des mutineries du printemps 1917 en les calmant, il double l’artillerie, fait construire les trois mille premiers chars et renforce l’aviation par la création de nouvelles escadrilles. Enfin, il supervise le transport et l’intégration des premiers contingents américains. L’ampleur de l’œuvre accomplie attire sur lui une incontestable popularité qui contraste avec celle du cabinet Ribot, empêtré dans l’affaire Malvy. Le cabinet Ribot démissionnaire le 11 septembre, le président de la République Raymond Poincaré fait appel à Painlevé. Le 12 septembre 1917, il constitue le gouvernement. Painlevé conserve le portefeuille de la Guerre tandis que les Affaires étrangères sont confiées à Ribot, ce qui entraine le refus des socialistes d’entrer au gouvernement. La droite et les modérés lui apportent leur soutien. Les dissensions dans l’Union sacrée sont telles depuis quelques temps qu’elle ne peut résister à la crise. Le gouvernement, composé de radicaux et de républicains socialistes doit affronter bien des difficultés. Il lutte contre toute tentative de démoralisation, contre la propagande allemande, notamment dans la presse, et contre l’idée que la poursuite de la guerre n’est due qu’à la seule volonté française. Le cabinet souffre de son manque de personnalités d’envergure et des suites de l’affaire Malvy qui continue à empoisonner le climat politique. Les socialistes lui reprochent de ne pas exploiter toutes les voies d’une diplomatie plus pacifique. Lors de leur congrès d’octobre 1917, les radicaux eux-mêmes revendiquent un gouvernement de gauche dont ils auraient la responsabilité. Face à ces critiques, Paul Painlevé ne montre pas toujours ni la détermination ni la persévérance attendues. En ces « mois troubles », il cherche à gagner du temps. Sa fébrilité inquiète et agace. Le 19 octobre, en dépit de l’attaque de Laval, alors député socialiste, la Chambre lui renouvelle sa confiance. Mais, soixante-douze heures plus tard, Painlevé présente une première fois sa démission. Poincaré, soucieux de calmer le jeu, la refuse.
Au début du mois de novembre, les couloirs de l’Assemblée bruissent de la rumeur d’un probable renversement du gouvernement au profit de Clemenceau. Le 13 novembre, rentré d’Italie où il s’était rendu après la défaite de Caporetto, Painlevé, de plus en plus mal soutenu par une majorité qui s’effrite, subit à l’Assemblée une interpellation cinglante d’Abel Ferry. Il l’emporte encore mais le vote suivant, provoqué à la suite d’une nouvelle séance houleuse, entraîne cette fois sa chute le 15 novembre 1917.
Retrouvant son banc de député, Painlevé devient le président du parti républicain socialiste en 1919. Réélu député de Paris la même année, il n’exerce aucune responsabilité ministérielle sous le Bloc national. En revanche, il est l’un des acteurs principaux de la Ligue de la République qui prépare, en 1921-1922, le Cartel des gauches. La majorité radicale et socialiste qui a été élue au printemps 1924 à la Chambre des députés le porte à la présidence et le choisit comme candidat à l’élection présidentielle consécutive à la démission forcée d’Alexandre Millerand, le 11 juin 1924. Il échoue car les forces anticartellistes du Sénat et de la Chambre réunissent à imposer Gaston Doumergue.
Le 17 avril 1925, Painlevé retrouve la responsabilité du gouvernement à la démission d’Edouard Herriot. Il se réserve la Guerre et il contribue à favoriser la rentrée politique de Joseph Caillaux en le nommant au ministère des Finances. Le 21 avril, Painlevé réoriente ou infléchit certains choix du Cartel et, dans sa déclaration inaugurale, il affiche son ambition de sauvegarder les équilibres financiers, promet d’abandonner l’impôt sur le capital et de créer une caisse d’amortissement. Viennent s’ajouter la refonte générale des lois militaires, la renonciation à supprimer l’ambassade de France auprès du Vatican, l’abandon de l’extension des lois laïques en Alsace et en Lorraine complètent un programme jugé beaucoup plus modéré que celui de Herriot.
Les questions coloniales dominent d’emblée l’activité politique, à commencer par la guerre du Rif. Pour matter l’insurrection, Painlevé envoie 100 000 hommes en renfort et confie le commandement militaire à Pétain, ce qui entraîne la démission de Lyautey, remplacé le 11 octobre par Théodore Steeg comme résident général. Dès juillet, un autre foyer s’allume avec le déclenchement de la révolte des Druses. La riposte française lui vaut des admonestations de la SDN qui rappelle que la France n’est que mandataire en Syrie.
Concernant l’évolution des rapports franco-allemands, Painlevé soutient pleinement la politique d’apaisement prônée par Briand. Cette dernière se concrétise à Locarno en octobre 1925 par la signature d’un accord tripartite entre la France, la Belgique et l’Allemagne de tresemann entérinant leurs frontières respectives et la démilitarisation de la Rhénanie.
En dépit de ses écrasantes responsabilités, Painlevé n’a pas complètement renoncé à la science. On le voit souvent quitter l’Assemblée vers 16 heures pour préparer le cours qu’il prononce aux alentours de 20 heures à la Sorbonne avant de s’entretenir à nouveau avec ses ministres et ses collaborateurs. Sa capacité de travail fait l’étonnement de ses proches tandis que sa légendaire distraction fait les délices de la presse politique : il lui arrive par exemple de se présenter à un déjeuner qu’il avait refusé, puis, au cours du repas, de s’apercevoir qu’il est attendu ailleurs et de partir à la hâte. Des attaques d’une tout autre violence sont lancées par l’extrême droite qui stigmatise la manque de fermeté du « PPPPP » : Pauvre Président Prudent Paul Painlevé.
En refusant le prélèvement sur le capital pour régler le déficit budgétaire, Joseph Caillaux impose l’orthodoxie financière que réprouvent les socialistes associés à certains radicaux. Dès lors, se prépare la rupture du Cartel puisque le politique gouvernementale s’éloigne des propositions socialistes. Painlevé engage, de fait, une stratégie de concentration républicaine.
Cette politique crée de sérieuses tensions, même au sein du Parti radical. Le 28 octobre 1925, comprenant qu’il va être renversé, Painlevé démissionne pour mieux se succéder à lui-même le lendemain. Sacrifiant Caillaux, c’est Painlevé lui-même qui prend en charge les Finances. Et crée pour l’assister un ministère du Budget. Herriot, mécontent de ne pas figure en première position dans le cabinet, refuse d’y participer, ce qui condamne à court terme la combinaison, finalement plus faible que la précédente. Painlevé tente de revenir à une politique économique plus radicale et conforme à l’esprit du Cartel en annonçant des hausses d’impôts dans l’espoir de combler les déficits et, à terme, de relancer la consommation par le biais de l’Etat. Mais les divergences de vue s’aggravent. Le projet indispose les radicaux qui s’inquètent de l’émoi des petits rentiers et des paysans aisés, tandis que les modérés et les droites hurlent à la spoliation. Le gouvernement, vivement attaqué, est renversé dès 29 novembre 1925. La démission de Painlevé marque la dislocation de fait du Cartel des gauches.
Sa carrière politique se poursuit dans différentes fonctions. Il demeure trois ans ministre de la Guerre du 28 novembre 1925 au 22 juin 1926, dans les huitième et neuvième cabinets Briand et du 19 juillet 1926 au 2 novembre 1929 dans le deuxième gouvernement Herriot, les quatrième et cinquième cabinets Poincaré et le onzième cabinet Briand. Il met en aplication ses idées sur une réorganisation des armées dans une optique purement défensive et au moyen de trois lois : sur l’organisation de l’armée en temps de guerre, sur le recrutement et sur les cadres. Il y prend une série de mesures intéressantes comme la réduction de la durée du service militaire à un an et l’esquisse de la ligne fortifiée du Nord-Est, la « ligne Maginot ». Il appartient à des équipes centristes qui pratiquent la concentration républicain. Il devient ministre de l’Air dans les gouvernements stegg (13 décembre 1930 au 26 janvier 1931) et Herriot (3 juin au 29 décembre 1932) de « second Cartel des gauches ». Il pose ainsi la première pierre du ministère de l’Air en bordure du terrain d’aviation historique d’Issy-les-Moulineaux. Il dénonce aussi le scandale de l’Aéronautique, monté de toutes pièces à partir de fausses lettres pour faire croire qu’un des directeurs du ministère avait été acheté par la société aéronautique. A la mort de Paul Doumer, président de la République, les gauches le pressentent, à nouveau, pour être leur candidat. Mais il s’efface devant le modéré Albert Lebrun.
Les qualités personnelles de Paul Painlevé peuvent rendre compte d’une carrière ministérielle exceptionnelle. Pourtant, il incarne la République parlementaire dont il est devenu un des personnages essentiels. La place de son parti sur l’échiquier politique lui permet de participer à des combinaisons variées qui excluent la droite pure. Parti charnière, parti appoint qui offre une palette d’hommes de talent, le parti républicain socialiste de Painlevé exprime la force et la faiblesse de la IIIe République dans l’entre-deux-guerres. A la veille de son décès, ce savant dictait encore une traduction de Goethe. Il meurt foudroyé par une crise cardiaque au Palais-Bourbon le 29 octobre 1933. Populaire et respecté il est honoré de funérailles nationales et inhumé au Panthéon.
BERNSTEIN (Serge) : Histoire du Parti radical, tomes 1 et 2, Paris, FNSP, 1982.
JEANNENEY (Jean-Noël) : Leçon d’histoire pour une gauche au pouvoir, Paris, Le Seuil, 1977.
MIQUEL (Pierre) : Poincaré, Paris, Fayard, 1981.
OUDIN (Bernard) : Aristide Briand, Paris, Laffont, 1988.
PAINLEVE (P.) : Comment j’ai nommé Foch et Pétain : la politique de guerre de 1917 ; le commandement unique interallié, Paris, F. Alcan, 1923.
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HESSE (G.-A.) : Painlevé, grand savant, grand citoyen, Paris, éditions R.A. Corréa, 1933.
PAISANT (André, Marie, Victor, Albert), 1868-1926 : Avocat et homme politique. Né à Senlis (Oise) le 11 août 1868, André Pesant est avocat républicain. Du 17 janvier 1921 au 14 janvier 1922, il est nommé sous-secrétaire d’Etat aux Finances dans le septième cabinet Briand. Il décède à Montmorency (Seine-et-Oise) le 7 avril 1926.
PALMADE (Maurice), 1886-1955 : Professeur et homme politique. Né à Rochefort-sur-Mer (Charente-Inférieure) le 4 octobre 1886, Maurice Palmade est professeur agrégé de droit puis, se fait élire député de l’union des gauches. Il est rapporteur du budget des Finances, quand il est nommé ministre du Budget du 21 février au 1er mars 1930 dans le premier cabinet Chautemps. Il prône alors la rigueur financière et tente de revenir à un rigoureux équilibre budgétaire. Il garde le même poste dans le cabinet Steeg du 13 décembre 1930 au 26 janvier 1931. Du fait de la crise mondiale, la situation est de plus en plus difficile. La chute du cabinet ne lui permet pas de faire passer son budget. Du 3 juin au 17 décembre 1932, dans le troisième cabinet Herriot, il retrouve le même poste et présente un plan déstiné à retruver l’équilibre budgétaire : réduction des dépenses militaires et administratives, augmentation des tarifs postaux, des impôts mobiliers et des taxes sur les opérations de la Bourse, ainsi qu’une modification de l’impôt sur le revenu. Il fait aussi voter en session etraordinaire la loi sur la conversion des rentes destinée à ne pas trop pénaliser les porteurs. Il décèdera en 1955.
PAJOT (Georges), 1842-1904 :
Né à Paris en 1842, Georges Pajot est d'origine bourgeoise, il est le condisciple de Zola au lycée Saint-Louis. Il obtient le baccalauréat ès sciences en 1859, et prépare sans succès le concours d'entrée à l'École polytechnique pendant un an. Il est ensuite aide-préparateur au laboratoire de M. Payen au Conservatoire des arts et métiers, et suit les cours de l'École des mines, comme auditeur libre. ~ Il travailla en 1863-1864 comme dessinateur à l'usine Gouin, aux Batignolles, à Paris, qui construisait de grosses machines; puis, en 1865, à la Compagnie des houillères de Commentry et des forges et fonderies de Fourchambault comme chef des études de chaudronnerie. De retour à Paris, il entra, en janvier 1867, à la préfecture de police où il fut successivement secrétaire, officier de paix, puis, de 1880 à sa retraite en 1898, commissaire de police. ~ Jusqu'en 1867, il fut très lié au jeune Zola et à ses amis Pissarro, Baille, Cézanne, Solari. Il écrivit des poésies (dont une, «A l'impératrice Eugénie», en 1859, en collaboration avec Emile Zola), des articles de journaux (1864, 1867). Il peignit aussi. Ce goût pour la peinture qui semble être devenu une passion et l'absorbait trop aux yeux de ses supérieurs, nuisit à son avancement
PALAMINY (Marquis Frédéric, Marie, Samuel, Elmar de), 1866-1951 : Homme politique. Né à Palaminy (Haute Garonne) le 21 novembre 1866, Frédéric de Palamy est l’animateur des comités royalistes du Languedoc. Délégué régional du duc d’Orléans, puis du duc de Guise, il est le ferme soutien de l’Action française dans cette partie de la France méridionale. Il joue un rôle important dans L’Express du Midi, le quotidien royaliste et catholique de Toulouse dans l’entre-deux-guerres. Il défend la politique du maréchal Pétain et est décoré de la Francisque. Il décède à Palaminy le 15 octobre 1951.
PALÉOLOGUE (Maurice), 1859-1944 : Ambassadeur et romancier. Né à Paris, le 13 janvier 1859, descendant de la lignée d’empereurs de Byzance et Constantinople, Maurice Paléologue entre au ministère des Affaires étrangères en 1880. Après avoir été secrétaire d’ambassade successivement à Tanger, à Pékin et à Rome, il fait un passage par le cabinet du ministre avant d’être nommé ministre plénipotentiaire en 1901 puis se vit confier entre 1907 et 1912 la légation de Sofia.
En janvier 1914, il fut nommé ambassadeur à Saint-Pétersbourg. À ce poste, il devait jouer un rôle de premier plan dans les négociations liées au premier conflit mondial. Remplacé après la chute du régime tsariste, il occupa encore, avant de se retirer des affaires publiques, les fonctions de secrétaire général du ministère des Affaires étrangères dans le cabinet Millerand. Ce diplomate de haut rang, aux talents de négociateur reconnus, possédait un réel don d’écrivain. Collaborateur à la Revue des deux mondes, Maurice Paléologue est également l’auteur de romans et d’essais sur l’art et la littérature : La Russie des Tsars pendant la Grande Guerre, Alexandra Feodorovna, impératrice de Russie, Cavour, un grand réaliste, Vauvenargues, Dante, essai sur son caractère et son génie, Le Cilice, Entretiens avec l’impératrice Eugénie, L’Art chinois. Maurice Paléologue fut élu à l’Académie française le 7 juin 1928. Il meurt le 18 novembre 1944.
PAMPRES ET LYS : Publication mensuelle prônant le fédéralisme, publiée à Paris, en français et en occitan. Parue en 1927 et disparue peu avant la Seconde Guerre mondiale, elle est dirigée par Eugène Ousset, que seconde Georges Rigoir, rédacteur en chef.
PAMS (Jules), 1835-1930 : Avocat et homme politique. Né à Perpignan (Pyrénées-Orientales), Jules pams, avocat de grande culture, se fait élire député radical. Spécialiste des questions agricoles à la Chambre, il est remarqué par Monis qui le choisit comme ministre de l’Agriculture, poste qu’il conserve dans les deux cabinets suivants Caillaux et Poincaré, soit du 2 mars 1911 au 17 janvier 1913. Il doit faire face à la crise entre les viticulteurs de la Marne et de l’Aube à la suite de la loi de 1909 limitant géographiquement l’appellation « champagne ». Cela entraîne de nombreuses manifastations, une enquête sur place et l’occupation militaire de tout le département de la Marne. Il fait voter une loi supprimant les délimitations géographiques et permattent aux syndicats viticoles de poursuivere les abus d’appellation. Grand ami de Clemenceau, celui-ci fait appel à lui du 16 novembre 1917 au 19 janvier 1920 dans son deuxième cabinet comme ministre de l’Intérieur où il lutte contre le défaitisme. Il soutient alors le mieux possible la politique militaire du chef du gouvernement. Après la victoire, il défend le projet de célébration nationale américaine de l’ « independance day » en l’honneur des alliés. Il décède à Paris le 12 mai 1930.
PANAMA (scandale de) : L'idée, fort ancienne, d'ouvrir une route distincte entre l'Atlantique et le Pacifique en creusant un canal à travers l'étroite bande de terre qui sépare les deux Amériques, ne prit corps que dans la seconde moitié du XIXe siècle. En 1876, alors que la commission du canal interocéanique nommée par le président Grant s'occupait de rechercher un tracé, il se constitua à Paris, sous la présidence du général Türr, un syndicat d'études à l'effet de faire explorer l'isthme de Panama par une mission que dirigea le lieutenant de vaisseau en retraite Louis Napoléon Bonaparte Wyse, secondé par un autre officier de notre marine, Armand Reclus.
Ferdinand de Lesseps, auréolé par la réussite du canal de Suez, se proposa de récidiver dix ans plus tard, en 1879, avec le percement de l'isthme de Panama, entre l'océan Pacifique et l'océan Atlantique. L'isthme faisait alors partie de la Colombie. Le 15 mai 1879, un Congrès international d'études du tunnel transocéanique se réunit à Paris sous la présidence de Lesseps et examina divers projets plus ou moins farfelus (tunnel, chemin de fer pour bateaux, canal à 120 écluses,...).
C'est finalement Lesseps qui l'emporta avec le projet d'un canal de soixante quinze kilomètres de long, sans écluses comme celui de Suez. La construction est prévue pour durer douze ans et coûter 600 millions de francs. Comme pour Suez, Lesseps créa, le 20 octobre 1880, une société anonyme en vue de collecter les fonds et conduire le projet, la Compagnie universelle du canal interocéanique de Panama. Les travaux débutèrent l'année suivante.
Mais l'isthme américain est traversé par une cordillère montagneuse très élevée et les premiers travaux se soldent par d'immenses difficultés. On fait venir d'abord des ouvriers chinois puis des Noirs de la Jamaïque. C'est bientôt l'hécatombe : épidémie de fièvre jaune, accidents de terrain, etc. L'absurdité du projet fait reculer les banques.
Ferdinand de Lesseps lance alors plusieurs souscriptions auprès du public français. Mais il utilise les premiers fonds pour «arroser» la presse afin de cacher la réalité. En 1887, il a déjà englouti 1400 millions de francs en ayant seulement déblayé la moitié du terrain (il prévoyait au départ une dépense totale de 600 millions).
Dans l'impasse, il fait appel à l'ingénieur Gustave Eiffel, célèbre en raison de sa tour qui sera inaugurée à la faveur de l'Exposition universelle de 1889. Celui-ci n'hésite pas à engager son prestige au service du vieil entrepreneur et remet à plat le projet en prévoyant notamment des écluses. Il faut encore trouver de l'argent... Or, la France entre dans une longue période de dépression économique et les épargnants sont peu enclins à se laisser séduire par l'aventure. Ferdinand de Lesseps arrose selon une pratique courante à l'époque dont témoigne Émile Zola dans son roman L'Argent. Émile de Girardin, député et journaliste réputé, fondateur de La Presse, a d'abord attaqué avec violence le projet avant de s'y rallier et pour cause : il entre au conseil d'administration de la Compagnie !
Ferdinand de Lesseps corrompt aussi une centaine de ministres et de parlementaires, les «chéquards», pour obtenir des lois sur mesure et notamment le droit d'émettre un emprunt à lots. Quatre millions de francs sont distribués aux uns et aux autres. Il est servi dans son entreprise de corruption par un affairiste d'origine juive, Cornélius Herz, et un intermédiaire lui aussi israélite, un certain Jacques Reinach, qui s'affuble d'une particule abusive et porte haut le titre de baron attribué à sa famille au siècle précédent par le roi de Prusse. Son cousin Théopraste Reinach, conservateur du musée du Louvre, est à l'origine d'une escroquerie à la tiare de Saitapharnès. Malgré l'autorisation officielle d'émettre un emprunt à lots, le 9 juin 1888, la déconfiture de la Compagnie s'avère inéluctable dès l'année suivante. Le tribunal de la Seine prononce sa mise en liquidation judiciaire le 4 février 1889 ce qui entraîne la ruine de 85.000 souscripteurs.
Les conséquences du scandale sont importantes : Ferdinand de Lesseps sombre dans la sénilité et s'éteint tristement en 1895. En 1892, Édouard Drumont, auteur du pamphlet antisémite La France juive (1886), dénonce le scandale de Panama dans son journal, La libre parole. Il dénonce 104 parlementaires et souligne l'implication de trois banquiers israélites qui auraient servi d’intermédiaire et relance de ce fait l'antisémitisme en France. Les hommes compromis sont écartés pour un temps de la vie politique et leur effacement provisoire permet la venue d’hommes nouveaux comme Poincaré, Barthou, Leygues. Désabusés, les épargnants français vont désormais renoncer aux investissements industriels et leur préfèreront les placements de «père de famille» (comme les emprunts russes qui se solderont en définitive par une déconfiture aussi retentissante !). Il appartiendra finalement aux Américains de percer l'isthme de Panama. Le canal - avec d'énormes écluses comme il se doit - sera inauguré le 3 août 1914,... le jour même de la déclaration de guerre de l'Allemagne à la France.
PARIS :
PÂRIS (Auguste, Joseph) , 1826-1896 : Avocat et homme politique. Né à Saint-Omer (Pas-de-Calais) le 12 novembre 1826, Auguste Pâris est avocat et sénateur de centre droit. Ministre des Travaux publics du 17 mai au 22 novembre 1877 dans le ministère de Broglie, il rappelle aux préfets qu’il a le pouvoir de révoquer les employés des compagnies de chemins de fer et se dit prêt à « user de ses pouvoirs à l’égard des agents qui mettraient au service d’une propagande hostile au gouvernement l’influence qu’ils tirent de leur fonction ». La chute du gouvernement, consécutives aux élections, met naturellement fin à sa carrière politique. il décède à Arras (Pas-de-Calais) le 18 décembre 1896.
PARIS-CENTRE : Quotidien de droite fondé en 1909 et disparu à la Libération. Il paraît à Nevers et a comme directeur le marquis de Tracy que seconde le journaliste d’hocquelus.
PARIS-SOIR : Paris-Soir a été un grand journal quotidien parisien de 1923 à 1944. Son premier numéro est sorti le 4 octobre 1923. Une édition de dimanche, Paris-Soir dimanche a été publié du 22 décembre 1935 au 16 septembre 1939. Après le 11 juin 1940, et l'occupation allemande, son éditeur, Jean Prouvost, a continué sa publication en zone non-occupée, à Clermont-Ferrand, à Lyon, à Marseille, et à Vichy, tandis qu'à Paris, il est publié sous contrôle allemand à partir du 22 juin 1940.
Le repli du journal avait été étudié avant la rupture du front, en mai 1940, vers Nantes. Le repli de la presse parisienne est ordonnée le 10 juin, et Paris-Soir est évacué, après sa dernière édition le 11, à 15h30. Toutes la presse fait de même, à l'exception du Matin. L'édition de Nantes paraît jusqu'au 18, puis disparaît devant les Allemands. Nantes étant menacée dés le 11, la direction est allée directement vers Clermont-Ferrand. Là, une édition paraît du 10 au 17 juin. Elle est installée dans les locaux du Moniteur, qui appartiennent à Pierre Laval. Le 17, la rédaction reçoit Kessel, alors correspondant de guerre, qui parle d'armistice. Pierre Laval, qui ne fait pas encore parti du gouvernement, appelle son ami le maire de Bordeaux et confirme. La rédaction accompagnée de Pierre Laval part pour Bordeaux.
Avec les nouvelles de l'armistice, certains veulent cesser l'activité, d'autres résister, ou encore collaborer. Laval y prépare la chute de Paul Reynaud, et l'armistice. Le 19 juin, les négociations d'armistice démarrent, et Bordeaux est bombardée. Le 25 juin, est déclaré l'armistice. Le 29, Bordeaux est occupée, Paris-Soir, où ce qu'il en reste, part vers la zone libre. La rédaction principale va à Lyon, et à Marseille et Toulouse sont publiés deux éditions. Le 12 juillet, Prouvost rejoint Lyon, et assure la direction du journal : un quotidien et deux hebdomadaires, Sept Jours et Marie-Claire.
PARNASSE : Le Parnasse ne fut pas une école – il n’y a pas de manifeste parnassien – et la fortune du mot relève trop souvent du malentendu ou de l’anachronisme. Lorsque Louis-Xavier de Ricard et Catulle Mendès lancent en 1866, chez Alphonse Lemerre, le projet du Parnasse contemporain, le mot Parnasse ne signifie rien d’autre que poésie, et l’ambition des promoteurs de la revue qui porte en sous-titre Recueil de vers nouveaux est de proposer le plus large panorama de la poésie contemporaine.La guerre franco-prussienne de 1870 puis la Commune ont brisé dans leur élan parnassiens et naturalistes. Face à eux, une nouvelle génération revendique une poésie neuve, dégagée de l'impassibilité parnassienne et de sa poétique "impeccable". Autour de La Renaissance littéraire et artistique puis de La République des Lettres, dans une mouvance oecuménique qui réunit Parnassiens et Romantiques confondus dans une même admiration pour Victor Hugo, Émile Blémont puis Catulle Mendès rassemblent les énergies dispersées. La République des Lettres accueille une génération partagée entre le modèle du romancier naturaliste (Zola y publie la suite de L'Assommoir) et du poète moderne que réclame l'époque. Cette période d'une grande diversité est marquée par les rebellions. Après Les Chants de Maldoror, Isidore Ducasse publie ses deux livraisons de Poésies ; le cercle Zutique de l'Hôtel des Etrangers réunit Arthur Rimbaud, Paul Verlaine, Germain Nouveau. L'esprit est à la parodie et à la transgression. Cette attitude de révolte se prolongera dans le groupe des Vivants (Jean Richepin, Raoul Ponchon, Maurice Bouchor) qui explore les ressources poétiques de la chanson et du folklore français. La scission dans le groupe Parnassien est consommée avec le troisième volume du Parnasse contemporain (1876). Les refusés, Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine, Charles Cros participent aux Dixains réalistes où l'on moque François Coppée et l'académisme. La génération montante qui se réclame du "modernisme" et de l'école naturaliste cherche de nouvelles formes d'expression et déjà de médiatisation à travers les revues et les cercles littéraires (les Hydropathes,1878 - les Hirsutes, 1882). Au Quartier latin puis à Montmartre, des cercles prolongeront l'esprit du célèbre salon de Nina de Villard et des dîners des Vilains-Bonshommes qui du Second-Empire à la IIIe République ont réunis écrivains et artistes. Fertile en revues et journaux littéraires, cette époque voit la création du cabaret artistique avec Le Chat-Noir (1882) qui tente de conjurer le pessimisme par le "fumisme" et les "rires fin de siècle" (Daniel Grojnowski).
Dominique Parodi, (Gênes 1870- Paris 1955), était un philosophe français
Le problème moral et la pensée contemporaine. Alcan, 1921.
La Philosophie contemporaine de la France - Essai de classification des doctrines. Alcan, 1925
En quête d'une philosophie : La conduite humaine et les valeurs idéales. Alcan, 1939.
Le problème politique et la démocratie. PUF, 1945.
Bibliographie [modifier]
André Lalande. Dominique Parodi (1870-1955). Revue de Métaphysique et de Morale, numéro 4, Octobre-Décembre 1955.
Jean Nabert. Dominique Parodi (1870-1955). Les Études philosophiques, 1956, n° 1, p. 86-91
PARTI COLONIAL : Le parti colonial, sans avoir jamais été, sauf à de rares moments, approuvé par l’ensemble du pays, est l’une des forces agissantes de la Troisième République. Au début de cette dernière, la parti colonial represente plus un groupe de pression qui reste le principal inspirateur de la politique extérieure de la France entre 1890 et 1911 et, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale encore, le plus inlassable propagandiste du mythe impérial.
Depuis que la France a renoué, au XIXe siècle, avec sa tradition d’expansion coloniale, se sont affirmés des partisans de cette politique, ceux qu’on appelait des « colonistes » dans les décennies 1830 et 1840. Mais, même renforcés par quelques coloniaux installés outre-mer ou revenus en métropole, ceux-ci ne suffisent pas à former un parti.
Ce n’est qu’en 1883 que la Société française de colonisation, forte de 800 adhérents, imagine de demander l’appui moral et politique des parlementaires procoloniaux et offre en 1886 à Jules Ferry de devenir son président. Bien que soutenue par une centaine de députés et de sénateurs, la Société se révéle impuissante à créer un parti colonial. Jules Ferry, chassé du pouvoir en 1885 n’est pas même tenté de se servir de cette société comme d’un moyen d’action sur l’opinion ou sur le Parlement. Contrairement à la légende accréditée par les manuels d’histoire, il n’est pas l’initiateur du renouveau de la politique d’expansion coloniale. Il se borne à suivre la direction indiquée par le prestigieux chef du parti républicain, Gambetta, et est le premier exécutant du vaste dessein patriotique de celui-ci destiné à rendre à la noble patrie vaincue de 1871 sa puissance et son rayonnement dans le monde.
En 1889, un publiciste colonial, Henri Mager, pouvait écrire « qu’il n’existait encore en France, ni un parti colonial, ni un parti anticolonial ». Or quelques années plus tard, les « gambettistes » et les coloniaux de Paris se désignaient eux-mêmes sous le nom de « parti colonial » et l’un de leurs journaux, La Quinzaine coloniale, employait couramment le sigle « PCF », abréviation désignant le Parti colonial français.
On appelle alors « parti » tout groupe de parlementaires ou de notables qui s’efforce d’exercer une influence politique au Parlement et dans le pays. En tant que groupe parlementaire, le parti colonial naît le 15 juin 1892, jour où est fondé un « groupe colonial » de quarante-deux députés. Un an plus tard, ils sont cent treize. Désormais, à chaque législature nouvelle, le groupe colonial de la Chambre des députés, bientôt doublé par le « groupe de politique extérieure et coloniale » du Sénat, regroupe tous les élus coloniaux ou métropolitains favorables à une politique d’expansion outre-mer.
En 1892, ils appartiennent à toutes les tendances politiques, des monarchistes à l’extrême gauche, la grande majorité étant toutefois constituée de républicains modérés. Après les élections de 1893, sur 129 députés du groupe colonial, on comptait 8 monarchistes, 8 ralliés, 2 boulangistes, 83 républicains du centre et 28 radicaux. En 1902, s’inscrivent 36 députés radicaux et un socialiste, 75 républicains du centre, 13 d’étiquette droitière et 15 députés sans appartenance. Le groupe colonial est devenu, en dix ans le plus important de la Chambre après le groupe agricole.
Son président, constamment réélu de 1892 à 1914, Eugène Étienne, député de l’Oranie s’impose comme fondateur et leader incontesté. Bien qu’il ait été plusieurs fois ministre, Étienne n’a pas laissé le souvenir d’un homme d’État. Pourtant, il est jusqu’à sa mort, en 1921, l’un des personnages clés de la République. « Étienne a dans ses mains le sort du cabinet, écrit Théophile Delcassé en 1903. Son groupe constitue l’appoint qui est indispensable à celui-ci pour vivre. »
Il est le grand « décideur » en matière de politique coloniale et extérieure. Il entraîne la Chambre à exiger la conquête de Madagascar, il fait aboutir l’« Entente cordiale » (1904), ainsi que le protectorat français le Maroc. Pour les coloniaux, il est le patron, voire la Providence : « Notre-Dame des coloniaux », ou « Jupiter dans le ciel colonial, disposant de la foudre ».
Lyautey, saluant en 1926 la mémoire « notre cher et grand Étienne », le reconnaissait humblement comme « le chef de ce groupement d’hommes enthousiastes, passionnément convaincus que la reconstitution d’une France extérieure était une condition essentielle de sa force et de sa richesse ». Félix Faure, Raymond Poincaré, Paul Deschanel, Gaston Doumergue, Paul Doumer et Albert Lebrun sont tous des ténors du groupe colonial, avant d’accéder un jour à la présidence de la République. On peut citer aussi Théophile Delcassé, Gabriel Hanotaux, Georges Leygues, Alexandre Ribot, Charles Jonnart, Pierre-Étienne Flandin, Albert Sarraut...
Le parti colonial, si riche est-il en personnalités, apparaît plutôt aux contemporains comme une nébuleuse d’associations. A l’origine de celles-ci, on trouve le plus souvent des sociétés savantes et de géographie. Le public s’intéresse depuis les années 1860 à ce qu’on appelle alors le « mouvement géographique », qui enregistre les progrès de la découverte de la Terre. Et les sociétés de géographie se multiplièrent pour satisfaire la curiosité du public, sur le modèle de la célèbre Société de géographie de Paris. Elles répandent tout à la fois le goût de l’exploration, la volonté de découverte des régions inconnues et l’ambition des conquêtes coloniales. Au point que l’on peut dire que le parti colonial apparaît le jour où certains géographes, quelques coloniaux en chambre et quelques authentiques explorateurs décident que l’Afrique occidentale, « à l’ouest d’une perpendiculaire Tunisie-Tchad-Congo », devait être française.
Puisque le 1er juillet 1890, Anglais et Allemands se partagent à l’amiable l’Afrique orientale, ils jugent urgent de réaliser par la conquête du Tchad le rêve commun de l’explorateur Crampel et du journaliste Hippolyte Percher : « Unir à travers le Soudan central nos possessions d’Algérie-Tunisie, au Sénégal et au Congo, et fonder ainsi en Afrique le plus grand empire colonial. » Telle est l’origine du Comité de l’Afrique française (CAF), une « noble initiative », selon Maurice Barrès. Fondé le 24 novembre 1890 avec les encouragements discrets d’Eugène Étienne et les subsides de quelques grands seigneurs, comme le prince d’Arenberg ou le vicomte Melchior de Vogüe, ce comité organise surtout des expéditions, des missions de reconnaissance et de conquête.
Mais, simultanément, le CAF se fait le zélateur de l’idée coloniale auprès de l’élite politique du pays. Il avait repris les méthodes d’action des sociétés de géographie : souscriptions publiques et adhésions individuelles ou collectives, conférences publiques et lettres confidentielles, déjeuners ou dîners-débats. « Le parti colonial, écrivaient les journalistes, c’est le parti où l’on dîne. » Les affaires importantes étaient traitées dans des réunions plus discrètes. Les républicains pro-coloniaux, presque tous francs-maçons, agissaient selon les habitudes des loges ; ils comptaient plus sur le dévouement de leurs « frères » que sur l’opinion, et ils savaient qui ils pouvaient faire agir au ministère des Colonies ou dans les autres ministères. D’où la difficulté pour l’historien de reconstituer le cheminement de projets qui aboutissaient mystérieusement.
Le Comité de l’Afrique française s’efforçe de créer des sociétés filiales, tels le Comité de l’Éthiopie (fondé en 1892), le Comité de l’Égypte (1895), le Comité de l’Asie française (1901) et le Comité du Maroc (1904). Leurs buts éyant d’étendre l’influence ou le protectorat français sur l’Éthiopie ou le Siam, défendre l’Égypte contre les Anglais, préparer la France au Break up of China et à l’extension territoriale de l’Indochine, enfin faire du Maroc une colonie française.
Ces comités civils, auxquels il faudrait ajouter les réseaux informels de militaires coloniaux - tel celui qui déclenche, avec l’alliance des coloniaux politiques, l’expédition Marchand sur Fachoda -, ne constituaient toutefois que de petits groupes de pression travaillant auprès des centres de décision politique. Pour étendre leur action est créée en 1903 l’Action coloniale et maritime, qui se voulait un parti de masse. C’est l’échec : en 1911, elle n’avait pas suscité plus de 1.200 adhésions.
Autre échec : la Ligue coloniale française, mise sur pied par Eugène Étienne en 1907. Alors qu’elle s’inspirait de la puissante Kolonialgesellschaft allemande, forte de 33.000 membres, ses effectifs ne dépassaient pas 2.600 adhérents en 1913-1914. Un chiffre d’autant plus faible qu’une association (sans objectif colonial) comme la Ligue maritime en comptait dix fois plus en 1913. Les responsables de la Ligue coloniale française proposent alors la fusion des deux associations et, en 1921, naissait la très populaire Ligue maritime et coloniale. C’est la première organisation de masse du parti colonial (45.217 adhérents en 1921, peut-être 100.000 en 1930).
Tous ces groupements coloniaux, comités de notables à cotisations élevées et à effectifs restreints (rarement plus de 1.000 à 1.500 adhérents et souscripteurs), ou ligues qui cherchaient à rassembler un vaste public en ne demandant que de faibles cotisations avaient en commun leurs motivations politiques et leur style patriotique, voire chauvin.
Tous prétendaient étendre la puissance nationale par la conquête de nouveaux territoires coloniaux. Ils voulaient édifier, à l’instar de la Greater Britain, la « Plus Grande France », la « France des cinq parties du monde », toutes formules alors couramment employées, celles d’Empire colonial ou d’Empire restant suspectes aux yeux de ces républicains. Seuls des buts patriotiques expansionnistes rapprochaient les nombreux professeurs, officiers, publicistes, géographes qui peuplaient ces organisations.
A côté de ces comités d’action ou de propagande coloniale, plus ou moins efficaces et bruyants, prennent place très tôt d’autres associations, souvent moins connues du public, qui étaient surtout représentatives des intérêts économiques ou commerciaux suscités par l’impérialisme colonial.
Ainsi, le parti colonial est souvent tiraillé entre ces deux tendances, patriotique ou affairiste :« Les coloniaux ne savent faire que deux choses, ironisaient les journalistes : « manger ou se manger entre eux. » La crise de Fachoda, à l’automne 1898, révèle ces tensions et oppose les jusqu’au-boutistes, menés par les militaires et appuyés par Eugène Étienne, aux modérés, conduits par Delcassé et approuvés par les hommes d’affaires de l’Union coloniale française.
Lorsqu’elle est créée en juin 1893, à l’initiative d’un négociant marseillais, l’Union coloniale française se veut simplement « une chambre syndicale du commerce colonial ». Très vite pourtant, elle est une sorte d’office colonial privé, une agence de renseignements pour les candidats à l’émigration ou les gens intéressés par le commerce outre-mer. Fondée un an avant que ne soit le ministère des Colonies, elle est elle-même le « véritable ministère », selon le mot du général Archinard, parce que mieux organisée et mieux informée.
L’Union coloniale, qui exige des cotisations élevées, proportionnelles au capital et au chiffre d’affaires des sociétés, est riche et sort vite de son rôle de syndicat représentatif des intérêts coloniaux.
Placée sous la direction de J. Chailley-Bert, un influent publiciste du parti colonial, elle se dote d’un service d’information et de propagande. Grâce à ses moyens financiers importants, elle sait, mieux encore que les associations politiques, organiser la diffusion de l’idée coloniale. En dix ans, de 1894 à 1903, elle dépense un million de francs-or pour la seule propagande coloniale, soit une somme supérieure à tout ce que reçoit le Comité de l’Afrique française, entre 1891 et 1914.
L’Union coloniale organise elle aussi des dîners-débats mensuels et des banquets annuels. Elle monte des conférences, suscitait de grands congrès coloniaux tous les deux ou trois ans. Elle édite des ouvrages spécialisés et des brochures de propagande et finançait des cours libres d’enseignement colonial. Elle publie un périodique, La Quinzaine coloniale, et subventionne un quotidien, La Politique coloniale. Bien entendu, elle intervient aussi comme groupe de pression économique auprès des différents ministères intéressés - en matière de droits de douane, d’emprunts, de concessions foncières.
Se rendant indispensables à l’administration, certains de ses membres siégent selon leur spécialisation dans diverses commissions d’études. Il leur arrive de rédiger, à l’usage de la rue Oudinot (le ministère des Colonies), des projets de lois ou de décrets. Plusieurs gouverneurs généraux se croient obligés de soumettre d’abord leurs propositions à l’Union coloniale, et tel ministre demande avec une respectueuse courtoisie l’avis de la même UCF. Jamais sans doute elle n’est plus influente ou plus écoutée que dans les années 1920 à 1930. Les investissements coloniaux prennent une grande ampleur du fait de la montée des taux de profit. Et l’Union coloniale obtient presque toujours satisfaction pour des demandes où l’intérêt général était souvent sacrifié aux intérêts de quelques grandes maisons de Bordeaux ou de Marseille.
D’autre part, l’UCF a acquis après 1919 un rôle bien peu connu d’agence de presse. Elle envoie gratuitement à 90 quotidiens de Paris et de province, deux fois par semaine, des études ou des articles, qui sont le plus souvent reproduits intégralement sans mention d’origine, sous la signature du rédacteur habituel du journal. Un rôle efficace et discret qui explique l’anomalie d’une presse coloniale relativement modeste.
En réalité, les coloniaux pensent à juste raison que c’est la grande presse d’information qu’il faut toucher pour convaincre les Français. Mais influencer dans un sens favorable la grande presse, surtout sensible aux scandales coloniaux, est une tâche ardue dont la réussite est mitigée jusqu’en 1927-1928. La presse parisienne, qui élimine comme invendable l’information coloniale, découvre alors brusquement le reportage colonial, lancé par quelques grands journalistes comme Albert Londres ou Louis Roubaud.
Le plus difficile est en effet de sensibiliser l’opinion à l’idée coloniale. Malgré tous les raisonnements patriotiques ou mercantilistes du parti, les Français d’avant 1914, gens casaniers et méfiants, patriotes qui vivaient l’oeil fixé sur la « ligne bleue des Vosges », redoutent cette boulimie de conquêtes qui risque de disperser les forces nationales. Gens économes, ils s’effraient des dépenses entraînées par la colonisation. « Nos colonies sont un débouché non pour notre industrie et notre commerce, mais pour l’argent de nos contribuables », expliquent la plupart des économistes libéraux. La bourgeoisie, beaucoup moins colonialiste qu’on ne l’a dit, refuse d’investir ses capitaux dans les colonies françaises : à peine 8,8 % du total des investissements de la France en 1914. Elle préfère prêter aux États étrangers jugés plus « sûrs », tel l’Empire des tsars ou celui des sultans ottomans.
Inlassablement, le parti colonial se donne pour tâche de faire « l’éducation coloniale du pays », selon une formule constamment répétée entre 1900 et 1936, en montrant que les colonies ne sont pas seulement des terres à scandales tout juste bonnes pour les fils de famille qui ont mal tourné.
Il sait s’adapter aux nouveaux médias et utiliser très tôt le cinéma ou la radio. Dès 1927-1928, les coloniaux ont acquis droit de cité dans les programmes de la TSF. C’est là le grand public cultivé qui est visé : on lui démontre que la colonisation n’est pas l’affaire des coloniaux, mais celle de la France tout entière : on lui parle profits et prestige, sans souffler mot des responsabilités.
Pour les masses populaires, le parti colonial recourut d’abord aux expositions fixes ou ambulantes, organisées surtout dans les grands ports ou à Paris. L’exposition coloniale de Vincennes, en 1931, n’est que la plus connue d’entre elles. Toutes cultivent l’exotisme facile et les affirmations simplistes. Leur imagerie naïve peut impressionner l’imagination des enfants, mais Lyautey est le premier à admettre en 1932 que « si l’exposition de Vincennes fin un succès inespéré, elle n’avait en rien modifié la mentalité des cerveaux adultes, ni ceux des gens en place qui n’étaient pas par avance convaincus.
Pour concentrer la propagande, le puissant Institut colonial français (40.000 adhérents en 1935) imagine de consacrer un « jour colonial », puis une « semaine coloniale », chaque année à diverses manifestations : conférences, films, expositions d’art ou de produits coloniaux. Sous son influence sont créées des collections d’ouvrages spécialisés comme les monographies de La Dépêche coloniale ou les biographies intitulées « Nos gloires coloniales » éditées par Le Petit Parisien.
Enfin, toute une littérature est destinée au public des écoles. Elle doit persuader la jeunesse de l’avenir et des bienfaits de la colonisation. Plus tard, elle doit célébrer la nécessité et la grandeur de l’Empire. Toute une série d’associations travaillent à l’éducation coloniale de la jeunesse scolaire. Une floraison de manuels de géographie et d’histoire indiscrètement tendancieux y pourviennent. Tous ces groupes font aussi campagne pour une réforme de l’enseignement et des programmes, au profit de l’enseignement de la géographie et de l’histoire coloniales.
Cette éducation s’apparente étroitement à de la propagande. Pour célébrer le centenaire del’Algérie, 1.200.000 brochures sont remises aux écoles et aux bibliothèques. La Ligue de l’enseignement se voit offrir des appareils de projection et des « boîtes de vues coloniales » destinés aux instituteurs. Des journaux pour enfants, des almanachs, des albums, des images et des buvards sont distribués dans les classes : il fallait sensibiliser les enfants à l’existence d’une « France des cinq parties du monde » pour créer un jour une opinion publique procoloniale.
Le mouvement le plus efficace dans cette voie est sans doute la Ligue maritime coloniale, qui vise le grand public, mais atteint seulement le monde scolaire. Cette association, qui se borne à une propagande simpliste dans son journal Mer et colonies, distribué presque gratuitement dans la plupart des écoles et des collèges, a une influence certaine et durable.
On a parfois douté, dans l’historiographie anglo-saxonne, que le parti colonial français a dépassé le terme fatidique de 1932, sous prétexte que le groupe colonial n’a pas été déclaré dans la Chambre élue à cette date. En réalité, après un éclatement très provisoire, le groupe colonial se reconstitue en mars 1937 et rassemble 250 députés. La Chambre du Front populaire (mai 1936) est donc plus coloniale que la Chambre bleu horizon, élue au lendemain de la Première Guerre mondiale (167 députés inscrits au groupe colonial en 1920). Elle est à coup sûr la plus imprégnée par le mythe de l’Empire de toutes celles qui se succédent sous la IIIe République.
D’autre part, jamais les groupes coloniaux et associations ne sont plus nombreux que dans la décennie 1930-1939. On en dénombre plus d’une centaine en 1938, contre 58 en 1914 (le nombre d’adhérents ayant au moins doublé). Face à cette multiplication de comités ou de ligues, les leaders du parti colonial s’efforcent d’obtenir un regroupement.
Le régime de Vichy ayant annoncé, dans une loi du 6 décembre 1940, que tout organisme visant à représenter ou à défendre des intérêts économiques coloniaux serait dissous, les comités politiques pouvaient seuls survivre. C’est pourquoi l’Union coloniale se déclare « association à caractère non professionnel », puis décide de s’unir à l’Institut colonial français et au Comité de l’Indochine.
Charles-Robert Ageron a publié de nombreux ouvrages sur la France coloniale et sur l’Algérie, parmi lesquels
AGERON (C.-R.) : Histoire de la France coloniale, t. II, Paris, A. Colin, 1990.
PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS (PCF) :
Le parti communiste français est né en décembre 1920 lors du Congrès de Tours du parti socialiste SFIO. Cette naissance est une des conséquences de la Première Guerre mondiale et des déceptions de l’après-guerre. Le ralliement du parti socialiste à l’Union sacrée en 1914 a suscité l’émergence d’un opposition, d’abord minoritaire, puis de plus en plus puissante à cette ligne, opposition qui devient majoritéiare en 1918. Elle est renforcée par cette génération des mobilisés, les « nés de la guerre », qui s’éveillent à la politique du fait du conflit et qui voient dans un socialisme désormais vigoureux pacifiste le parti capable d’exprimer leurs aspirations. Pour ces nouveaux venus, l’exemple de la révolution bolchévique en Russie apparaît comme un modèle à imiter, alors que les socialistes de tradition sont méfiants envers les pratiques de Lénine. Mais le fait décisif est sans doute le double échec du parti socialiste en 1919 et 1920 : la déception des élections de novembre 1919, qui voient la parti socialiste endurer un grave revers en perdant la moitié de son effectif parlementaire de 1914, alors qu’il s’attendait à une victoire ; l’échec des grèves des printemps 1919 et 1920 qui ferme la voie révolutionnaire. Pour sortir de l’impasse, les principaux dirigeants du parti, Frossard, son secrétaire général, et Cachin, directeur de L’Humanité, après un voyage à Moscou, préconisent l’adhésion à la IIIème Internationale, afin de se placer dans le sillage de la révolution victorieuse. Quant aux 21 conditions conditions posées par Lénine pour cette adhésion (centralisation démocratique du futur parti, doté d’une discipline de fer, soumission au Comité central des parlementaires, de la presse et des services d’édition, création d’une direction clandestine, rejet du réformisme et explusion du parti des réformistes avérés, nommément désignés, épurations périodiques des éléments petits-bourgeois, agitation dans l’armée et les campagnes, noyautage des syndicats, soutien aux mouvements d’anticipation des colonies), ils y voient une simple clause de style, inapplicable en France. C’est sur ces bases que le 29 décembre 1920, 68% des mandats se prononcent pour la transformation de la SFIO en Section française de l’Internationale communiste (SFIC), les minoritaires avec Paul Faure, Léon Blum, Jean Longuet refusant de s’incliner et maintenant un parti socialiste SFIO. La parti communiste SFIC compte au lendemain de son congrès fondateur 190.000 adhérents, quand le SFIO n’en regroupe plus que 50.000. Cette rupture historique au sein de la gauche se répercute dans le syndicalisme, puisqu’en 1921, la majorité de la Confédération générale du Travail (CGT) exclut sa minorité révolutionnaire qui fonde la Confédération générale du Travail unitaire (CGTU) vite dominée par les communistes. Celle-ci jouera un rôle décisif pour le recrutement ouvrier du parti. La SFIC conserve le vieux quotidien socialiste L’Humanité qui devient, pour le parti communiste, le seul moyen de matérialiser son audience.
Les débuts du parti sont difficiles : la nouvelle formation est profondément divisée, en particulier ce qui concerne l’application concrète des vingt et une conditions de l’Internationale communiste et la stratégie dite de front unique. De nombreux militants ou dirigeants refusent de se soumettre aux directives de Moscou : le 1er janvier 1923, le fondateur et secrétaire général Louis-Oscar Frossard démissionne entraînant avec lui d’autres responsables, est remplacé par Louis Sellier jusqu’en juillet 1924 suivi de Pierre Sémard. Ses virulentes campagnes contre l’occupation française de la Ruhr puis contre la guerre du Rif isolent le jeune parti qui subit la répression gouvernementale. Aux élections législatives du printemps 1924, distancé par la SFIO, le PCF obtient moins de 900.000 voix et 26 députés. Devant un tel comportement, le ministre de l’Intérieur Albert Sarrault, recueille un large assentiment en 1926 en s’écriant à Constantine : « Le communisme, voilà l’ennemi ! »
De 1924 à 1927, l’Internationale impose au parti communiste français la « bolchevisation » qui revêt trois aspects : la substitution de cellules d’usines aux sections géographiques afin d’ouvriériser le parti ; l’élimination systématique des opposants qui résistent aux mots d’ordre ; l’ « unité idéologique », c’est à dire l’obéissance absolue absolue à la ligne officielle de l’Internationale. A partir de la fin 1927 et au début 1928, conformément aux ordres de Moscou, le parti communiste français se lance dans la politique de « classe contre classe » qui l’amène à lutter, dans la perspective d’une révolution iminente, contre la bourgeoisie, l’impérialisme mais aussi et surtout les socialistes. Il pousse en avant les JC (Jeunesses communistes, alors dirigées par Jacques Doriot, également député de Saint-Denis) pour mettre en œuvre cette ligne ultra sectaire. Henri Barbé devient secrétaire du Parti, après Pierre Sémard. Aux élections de 1928, le PCF obtient 11 % des voix, mais, en raison de son isolement, ne compte que 14 élus contre 25 sortants. Jacques Duclos, vainqueur de Léon Blum dans le 20e arrondissement de Paris, est l'un des 14 rescapés.
Enfin, à partir de 1931, en son sein et à l’initiative directe de l’Internationale communiste, émergent des cadres d’origine ouvrière qui domineront le parti et versent avec facilité dans l’ouvriérisme. Ainsi, les jeunes militants qui imposent la direction, plus scolarisés que la moyenne des travailleurs français, sont véritablement formés par l’Internationale à laquelle ils doivent tout, à l’instar du secrétaire du bureau politique Maurice Thorez, qui, après l’élimination d’Henri Barbé et Pierre Célor décidée à Moscou, dirige le parti. Affaiblie par les multiples départs de dirigeants du parti, frappé par la répression, il devient une secte regroupant à peine 20.000 membres en 1932. Pour faire face à la situation critique dans laquelle se trouvait le parti communiste français, un changement d’orientation est opéré à l’automne 1931 sous l’impulsion de Maurice Thorez, épaulé notamment par Benoît Frachon et Jacques Duclos. Les communistes ne comptent, aux élections législatives de 1932, que 12 députés (794 883 voix soit 270 000 voix de moins qu’au scrutin de 1928). Cependant, le PCF dispose désormais d’une structure indéfectible, de militants zélés et de cadres sélectionnés. Grâce à la CGTU et à diverses associations, il influence les fractions ouvrières et réussit sur le thème de la paix à mobiliser des intellectuels de renom comme Romain Rolland.
Trois éléments nouveaux bouleversent la conjoncture des années 1930 : la crise économique, les événements du 6 février 1934 et l’arrivée d’Hitler au pouvoir. La crise économique qui touche la France en 1931 provoque une forte hausse du chômage et une déstabilisation en profondeur du monde ouvrier : le PCF et la CGTU déploient aussitôt des efforts intenses d’aide et de solidarité dans les entreprises, les quartiers, les villes, au Parlement ou dans la rue. Les évènements du 6 février 1934 suscitent une mobilisation de tous les militants de la gauche en faveur de l’unité contre les dangers du fascisme. Enfin, à la suite de la victoire d’Hitler en Allemagne en 1933, l’URSS modifie sa politique étrangère et œuvre pour une alliance antifasciste internationale. En mai 1934, l’Internationale communiste envisage de se rapprocher des socialistes et autres démocrates après avoir rejeté cette perspective et éliminé l’un des responsables du PCF, Jacques Doriot, qui s’en était fait le porte-parole. La France offre l’un des meilleurs terrains d’expérimentation de cette nouvelle politique des fronts populaires que Maurice Thorez applique. Ainsi, après le pacte d’unité d’action avec la SFIO, signé le 27 juillet 1934, il en appelle, à l’automne au « Rassemblement populaire » c’est à dire à l’élargissement de l’accord au parti radical qu’il accepte dès l’été 1935 et à la constitution d’un « Front populaire du travail, de la liberté et de la paix » qui devrait déboucher sur un programme et un accord électoral. Le PCF veut rassembler large contre les « deux cent familles » et tend même la main aux catholiques. De la sorte, il se réconcilie avec ses partenaires de la gauche mais aussi avec la France. En 1935, après le pacte d’assistance mutuelle franco-soviétique, le PCF se rallie à la défense nationale. La combinaison d’antifascisme, de défense des ouvriers, soviétiques et nationaux est, cette fois-ci, plus harmonieuse et donne d’excellents résultats. Le PCF voit ses effectifs passer de 32.000 adhérents en 1932 à 235.000 en 1936 puis, la même année, le nombre d’élus aux élections législatives passe de 11 en 1932 à 72. Le tirage de L’Humanité triple entre 1930 et 1936. Après la victoire du front populaire, le Komintern interdit au PCF de participer au gouvernement Blum. De 1936 à 1938, le parti communiste vote systématique aux gouvernements du Front populaire (Blum, Chautemps et Daladier). Très présents dans les grèves de mai-juin 1936, tout en empêchant qu’elles dégénèrent, actifs dans l’organisation du soutien à la République espagnole, les communistes bénéficient pleinement en mars 1936 de la réunification de la CGT avec la CGTU venant consolider leurs assise, en particuliers chez les travailleurs manuels qualifiés mais aussi auprès des intellectuels antifascistes.
Le parti communiste prend vivement parti contre les accords de Munich le 30 septembre 1938. A la Chambre, avec seulement trois autres députés, les soixante douze communistes rejetèrent les accords. Dès novembre 1938, les radicaux quittent le Comité national du Rassemblement populaires en raison des attaques injurieuses des communistes envers Daladier, mettant ainsi fin au Front populaire. Le 30 novembre de la même année, la grève générale que les communistes ont organisée avec la CGT et les socialistes est un demi échec. Isolé, le parti communiste est, à tous égards, en reflux. La dégradation de la situation internationale (victoire franquiste en Espagne, ocupation de Prague par l’Allemagne, déclenchement de l’offensive italienne contre l’Albanie, les revendications allemandes contre la Pologne et italiennes à l’égard de la France) au printemps permet au parti communiste de rompre son isolement : ses positions antimunichoises sont progressivement beaucoup mieux comprises à la lumière des évènements survenus dans les mois précédents.
La signature du pacte germano-soviétique le 23 août 1939 provoque une crise profonde dans ses rangs, générant de nombreuses démissions, crée le malaise de beaucoup d’adhérants qui passe de 270.000 avant la déclaration de guerre à 10.000 pendant la drôle de guerre. Le 26 août, L’Humanité est interdite et une campagne anticommuniste se développe, des militants sont arrêtés. Après l’invasion de la Pologne, le parti communiste est dissout par la gouvernement le 26 septembre. Les poursuites lancées en octobre 1939 contre les députés qui ont demandé, dans une lettre à Edouard Herriot, président de la Chambre, que s’ouvrent des négociations avec Hitler, vont à certains égards, masquer la crise. L’arrestation, puis le procès en 1940, de certains députés communistes pour intelligence avec l’ennemi, l’expulsion des communistes de la CGT, la disparition dans la clandestinité de certains dirigeants comme Maurice Thorez, vont faire jouer un « patriotisme de parti » qui sauve la formation. Il reste, au moment ou s’achève la Troisième République, le parti communiste n’est plus qu’une organisation clandestine, pourchassée par la police, qui préconise la paix avec l’Allemagne, renvoyant dos-à-dos, dans un réflexe neutraliste, les nazis et les capitalistes de la City.
Au lendemain de la défaite française de 1940, la parti communiste demeure fidèle à une analyse qui voit dans ce désastre militaire la preuve de l’impéritie da la bourgeoisie française qui conduit à la disparition d’une grande partie de la classe dirigeante traditionnelle peuvent offrir au parti communiste des potentialités révolutionnaires, à condition que ces dirigeants sachent exploiter les circonstances. Tout en rejettant l’asservissement de la France par les impérialistes étrangers, le parti communiste clandestin réserve cependant sescoups à Vichy, comme le montre l’appel dit du 10 juillet 1940, rédigé par Jacques Duclos.
BERNARD (P.) : La fin d'un monde, 1914-1929, Paris, Editions du Seuil, 1975.
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TARTAKOWSKY (D.) : Le « Tournant » des années trente
WOLIKOW (S.) : Le PCF et le Front populaire
PARTI DÉMOCRATE POPULAIRE (PDP) :
Le Parti démocrate populaire (PDP) crée en 1924 et disparu en 1944 est le premier véritable parti d’inspiration démocrate-chrétienne en France, sans en prendre l’appellation et en dehors de toute référence confessionnelle. Il s’inscrit dans un faisceau de traditions complexes : démocratie chrétienne, catholicisme social, catholicisme libéral. C’est aussi un héritage des organisations autour de ces courants (Sillon, Action libérale) que le PDP rassemble dans sa période de gestation en 1919-1924. Il regroupe, en vue d’un effort politique, une aile « gauche » du catholicisme social et une « aile droite » de la démocratie chrétienne qui refuse de suivre Marc Sangnier et la Jeune République. L’échec de la Ligue nationale de la démocratie avec la Jeune République, les efforts du Bureau d’action civique conduisent à la création du parti en novembre 1924, suivant celle d’un groupe de treize députés après les élections de printemps. Il s’organise comme un parti moderne, sur le modèle des partis de gauche. Mais ses structures correspondent à une force assez limitée : effectifs toujours inférieurs à 20 000 adhérents, moyens financiers précaires malgré quelques appuis. Néanmoins une implantation du parti s’opère, par un reseau de fédérations départementales, certaines parvenant à une relative puissance. Il privilégie une action par la presse : hebdomadaire Le Petit Démocrate, réseau de presse sympathisante avec l’Ouest Éclair à Rennes, et dans les années 1930, L’Aube. Son programme se veut nettement « centristre » sur tous les plans : évolutionniste dans le domaine social, hostile au nationalisme de la droite sur le terrain international. Il s’inscrit dans un « environnement doctrinal » assez riche, autour de revues de réflexion comme Politique où Marcel Prelot développe les thèmes du « popularisme démocratique » de Sturzo, Les Cahiers de la nouvelle journée, où Paul Archambault défend le « personnalisme démocratique ». Le problème des « influences corporatistes » se pose dans les années 1930, mais le PDP ne va guère au-delà des thèses classiques sur « l’organisation professionnelle ». Une élite de dirigeants conduit le parti (Auguste Champetier de Ribes, président depuis 1926, Robert Cornilleau, directeur du Petit Démocrate, Raymond-Laurent, secrétaire général, Ernest Pezt, Louis-Alfred Pagès, Paul Simon, etc.), avant un renouvellement dans les années 1930 et l’arrivée d’une nouvelle génération (Georges Bidault, P-H Teitgen, Robert Schuman…).
Le Parti démocrate populaire connaît d’abord une période d’affirmation relative » de 1924 à 1932. Il doit alors se « classer » au milieu des forces politiques existantes et tente de se démarquer de la « droite classique » de la Fédération républicaine, en se trouvant plus proche du « centre droit » de l’Alliance démocratique, voire des radicaux. Il entame des contacts avec ce qu’on appelle à ce moment les « jeunes équipes », pendant que Cornilleau adresse en direction des socialistes son « pourquoi pas ? » pour une éventuelle collaboration. Mais il est gêné face à la gauche par la persistance des problèmes religieux et scolaires, même s’il avait voulu abolir ces clivages avec des projets sur le plan scolaire. Il obtient un succès relatif aux élections de 1928 (18 élus), surtout dans l’Ouest face aux tendances monarchistes et d’Action française qu’il combat vigoureusement. Il lutte contre le Cartel des gauches, puis soutient l’Union nationale, mais en s’opposant souvent à la droite classique et à l’extrême droite où on le qualifie de « parti rouge chrétien ». Toutefois, les contacts vers la gauche au sein des « jeunes équipes » se révèlent vite sans landemain, même si le parti développe des attitudes sur le plan social : appui aux assurances sociales, aux allocations familiales, et, sur le terrain international : soutien rapide àà la politique de Briand, au rapprochement des partis économiques d’inspiration chrétienne, qui le démarque de la droite traditionnalle. Les années 1934-1940 sont marquées par un certain piétinement. Cette phase d’affrontements politiques plus violents contrarie sa volonté centriste, malgré le soutient théorique apporté à ce qu’il appelle la « concentration » avec les radicaux. Mais son hostilité à la droite extrême et autoritaire se manifeste toujours, ainsi en février 1934. Un tassement électoral, déjà visible en 1932, se vérifie en 1936 à nouveau, et il se classe dans une opposition calme au Front populaire. Il appuie un essai d’ « union nationale » en 1938 et devient un des constituants idéologiques de « la France de Daladier » en 1939. Il se rapproche davantage des radicaux et tente d’aboutir à un règlement d’ensemble du problème religieux avec Champetier de Ribes. Mais une crise du parti et des divisions internes se manifeste davantage, aggravées par les relations avec L’Aube et la création des « Nouvelles équipes françaises ». Sur les problèmes extérieurs, il se dirige vers la fermeté dès 1933-1934, face au « néo-pacifisme » d’une partie de la droite. Au moment des accords de Munich et dans la « montée des périls », il témoigne d’une attitude « pré-résistante ». Cela ne sera pas étranger à l’orientation d’une grande partie de ses membres vers la Résistance, dès 1940, dans des mouvements auxquels il a apporté sa tonalité (Liberté, Témoignage chrétien) et au rôle de certains de ses leaders (Bidault, Teitgen), même s’il a pu y avoir au début, pour certains une « tentation vychiste ». Cette action n’emêche pas sa disparition en 1944. Le PDP a ainsi connu un impact limité dans la politique française de la IIIème République. Il n’en a pas moins joué un rôle dans le système des partis, en contribuant à poser la question du centre, et pour l’amélioration du climat politico-religieux.
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PARTI JEUNE RÉPUBLICAIN : Fondé en 1934 par Félix Morel, un représentant en encre d’imprimerie qui venait de passer plusieurs années aux Etats-Unis, il est l’un des anciens dirigeants des Franscistes. Après la dissolution de ce parti, il crée le parti jeune républicain. Les dirigeants étaient Félix Morel, chef du parti et E. Parmentier, secrétaire général. Le parti disparaît en 1935. Félix Morel se présente ensuite aux élections dans l’Indre en 1936 où il est battu.
PARTI RADICAL :
Les 21, 22 et 23 juin, se tient à Paris, dans la grande salle des sociétés savantes, le premier Congrès du Parti républicain, radical et radical-socialiste. Des représentants des journaux républicains (La Dépêche de Toulouse), des délégués de cercles et de comités provinciaux ou parisiens, de loges maçonniques (notamment du Grand-Orient), comme les dirigeants politiques qui ont convoqué cette réunion, se proposent de construire une « organisation électorale permanente qui restera l’exécutrice de ses volontés ». Un grand absent : Clemenceau qui refuse d'y participer. Ainsi est crée le Parti républicain, radical et radical-socialiste, premier des partis politiques français rassemblant 78 sénateurs, 201 députés, 476 comités, 155 loges maçonniques, 849 maires, conseillers généraux et conseillers d’arrondissement, 215 journaux, etc. Sa vocation est de rassembler tous les républicains en vue des élections de 1902, qu’ils soient ou non radicaux. C’est la raison pour laquelle l’organisation ne se réclame que d’un programme vague susceptible de convenir à tous et ne se donne qu’une organisation très lâche, empiétant le moins possible sur l’autonomie des comités. Il s'inspire du modèle anglais. De structure pyramidale, il va des comités communaux au comité exécutif siégeant à Paris. Il est constitué à la base de petites associations et non pas d'individus adhérant isolément. La Dépêche de Toulouse le qualifie de « groupement d'un certain nombre de personnes unies par une libre communauté de vues sur un certain nombre de points » ou « d'ensemble d’électeurs qui se groupent autour d'un programme ». Quelle que soit la dénomination adoptée, les élus radicaux viennent essentiellement de régions qui ont en commun une certaine indifférence religieuse : le Bassin Parisien au sens large du terme, le Bas-Languedoc, la région alpine, le Centre, le Massif Central, le Centre-Est, le Vaucluse et la Drôme, la Charente-Inférieure, le Lot, le Gers, les Hautes-Pyrénées, l'Ariège et la région de Toulouse. Les critiques sur ce congrès sont nombreuses : "On a bien parlé, on a bien écrit au congrès radical, il ne reste plus qu'a bien faire" écrit Clemenceau et Le Temps de renchérir « Des discours ! Ce furent tous les travaux de cette assemblée à grandes prétentions ».
La fondation du parti crée une dynamique dont les effets apparaissent comme un « age d’or » pour le radicalisme. Les élections législatives de 1902 puis celles de 1906 offrent d’amples succès aux candidats qui s’affichent radicaux. Ces candidatures progressent aussi au sein des municipalités. Les principaux gouvernements de 1880 à 1913, sont animés sinon dirigés par des radicaux. Entre 1902 et 1905, le Bloc des gauches que coordonne Emile Combes associe radicaux et socialistes au nom du combat laïque. Surtout, la Délégation des gauches cherche à discipliner une coalition majoritaire autour d’un projet républicain. Si, avec le temps, s’esquisse une démarche sociale (assistance aux vieillards et aux infirmes, réduction de la journée du temps de travail) et si le radicalisme garde une évidente sympathie pour la démocratie sociale, les radicaux excluent la révolution et la lutte des classes. Toutefois, la formation de l’Alliance républicaine démocratique, puis, en 1905, celle du Parti socialiste SFIO rendent vains les espoirs des radicaux de rassembler tous les républicains. Les relations finissent par s’envenimer et se rompre au début du ministère Clemenceau (25 octobre 1906 au 20 juillet 1909). En effet, le Parti radical prétend limiter les excès du capitalisme sans le renverser et construire un réseau de « filets protecteurs » pour assurer la solidarité nationale. Mais il rejette l’idée qu’une transformation sociale profonde peut adoucir le sort des plus modestes. S’il cherche à promouvoir une forme « d’État providence », le radicalisme réformateur tend à laisser la place à un radicalisme de gestion. Si bien qu’en 1906, ils décident de se donner un programme précis qui affirmera leur identité et de se doter de structures solides. A Nancy, en 1907, les radicaux se dotent d’un programme qui est celui d’un radicalisme centriste et gouvernemental, assez éloigné du programme radical des débuts de la IIIème République et qui repose sur trois piliers :
-L’attachement aux « institutions républicaines » c’est à dore celles-là mêmes qui étaient vilipendées après 1875, mais qui ont fait désormais leurs preuves et que les radicaux assimilent à la République elle-même ;
-Le réformisme social progressif qui jette la lutte des classes comme le libéralisme et préconise les nationalisations et l’intervention de l’État dans le cadre d’une politique sociale de correction modérée des inégalités de revenus ;
-Enfin, une politique étrangère fondée sur le patriotisme et la défense nationale et qui bâtit ses espoirs sur l’institution d’un droit international, les conflits étant réglés par un tribunal faisant respecter ce droit et une « Société des Nations » constituant une sorte d’assemblée internationale permanente où seraient discutés les problèmes mondiaux.
En ce qui concerne l’anticléricalisme, il serait plus juste de dire qu’il est un état d’esprit résultant à la fois de la philosophie positiviste, dont se réclament la plupart des radicaux, et du rôle d’adversaire de la République joué par le catholicisme à la fin du XIXème siècle et surtout au cours de l’affaire Dreyfus. L’athéisme est partie intégrante du comportement radical, l’anticléricalisme un fait conjoncturel. Le débat ouvert entre les combistes qui ont conduit une politique anticléricale fougueuse entre 1902 et 1905 et les hommes de gouvernement qui ont inspiré le programme de Nancy va être tranché en 1913, lorsque la nouvelle génération s’impose. Joseph Caillaux, élu président du parti radical contre Camille Pelletan, champion du combisme est l’homme de la paix et de l’impôt progressif sur le revenu, nouvel adhérent incarne bien une des tendances nouvelles d’un radicalisme qui conserve, encore, une forte sensibilité populaire. Mais au delà de ce débat, le radicalisme connaît un remarquable succès comme parti représentatif de toute une classe traditionnellement de gauche dont il articule les aspirations et les valeurs, dans le droit fil de l’héritage de la Révolution française qu’il revendique. Il est le champion de la démocratie libérale à forme parlementaire qui paraît comme la traduction institutionnelle de l’idéal révolutionnaire. Il s’affirme le défenseur des petits et promet aux Français l’avènement d’une démocratie de petits propriétaires dans laquelle le salariat sera aboli et la promotion sociale ouverte aux plus méritants. Il se présente comme un parti patriote non cocardier, soucieux de défendre à la fois, la nation et la paix. Egalement éloigné de la réaction et de la révolution, il est la formation dans laquelle peuvent se reconnaître tous les Français soucieux d’une gestion pondérée et progressiste de la République. Parti-consensus, il est la formation de la légitimité républicaine, celui dont la place normale est au pouvoir.
Vers 1909-1912, le radicalisme est à son apogée. S’il est le principal parti politique français, le Parti radical est d’abord le lieu de rassemblement des républicains. Tous les radicaux n’adhèrent pas, tandis que la double appartenance demeure possible. Ses effectifs (près de 200 000 adhérents en 1914) comme ses modes d’organisation démocratique (congrès, comité exécutif, secrétariat, présidence) en font un parti moderne qui, repose sur le militantisme des comités. Ceux-ci qui s’enracinent dans le spetites villes de province mais aussi dans les quelques grandes villes aux structures sociales complexes, recrutent leurs adhérents dans la petite bourgeoisie traditionnelle.
Parallèlement, l’image traditionnelle que reflète le parti radical va profondément souffrir de la Première Guerre mondiale. La mobilisation vide les comités, le caractère très lâche des structures, fait que l’organisation partisane se disloque littéralement une fois le conflit déclenché. En bref, le parti radical n’existe plus que par ses parlementaires ; or ceux-ci se ralliemt massivement à l’union sacrée, poussant ainsi les radicaux à adopter une idépologie qui se réclame davantage des idées défendues par la droite que celles dont se réclamait le parti radical. Il y a plus : dans le contexte de l’union sacrée, on vilipende l’esprit partisan qui divise les Français et qu’on impute aux partis de gauche, contestataires de l’ordre établi. Si le parti socialiste est profondément visé, les radicaux ont leur part de ce discédit, d’autant que c’est dans leurs rangs que se recrutent les chefs de file parlementaires des partisans de la paix sans annexion ni indemnité. L’arrestation puis le passage en Haute Cour de Caillaux et Malvy font du parti radical celui des défaitistes, voires des traitres, et les dirigeants du parti sont soumis à la malveillance de Clemenceau qui ne leur pardonnen guère sa chute de 1909.
Même si la Première Guerre mondiale le fait participer sans discontinuité à toutes les conbinaisons ministérielles de l’Union sacrée pour gérer des postes essentieles (ministère de l’Intérieur, de la Guerre, des Affaires étrangères ou des colonies, ou encore de l’Instruction publique), c’est donc un parti discrédité, affaibli, moribond qui affronte dans des conditions difficiles les élections de 1919, puisqu’en dépit d’une loi électorale qui favorise les rassemblements, il doit se présenter seul, les socialistes ayant, par la motion Bracke, refusé toute allaince avec les partis bourgeois, préférant le « splendide isolement ». Il y perd la moitié de ses élus de 1914. Aussi, ne faut-il pas s’étonner qu’il soit l’objet de tentatives d’absorption de la part de forces centristes qui songent à s’enrichir de ses dépouilles. C’est le cas par exemple de l’Alliance démocratique qui offre aux radicaux la fusion au sein d’un Parti républicain démocratique et social. Ce sera la tache d’Edouard Herriot, élu président du parti radical en 1919, de déjouer ces tentatives et de procéder à la reconstruction du vieux parti. Reconstruction qui s’opère dans des conditions mêmes de l’avant-guère, avec un programme flou, des structures lâches et une très large liberté laissée aux parlementaires par rapport aux militants. C’est aussi la volonté de revenir aux traditions antérieures qui conduit Herriot à souhaiter redonner à son parti son identité d’avant-guerre, en rompant tous les liens avec la droite rassemblée dans un Bloc nationaliste héritier de l’Union sacrée. Mais il ne parvient à ses fins qu’en 1923 lorsqu’il peut s’appuyer sur des militants qui ont trouvé le chemin des comités contre les parlementaires liés aux modérés. A cette date, les radicaux quittent la majorité du Bloc national. Les mécontents dans le pays nourrissent la rupture de 1922-1923. La défense de la laïcité, de la sécurité collective, la politique fiscale offrent autant d’occasions de souligner les divergences avec les gouvernements. Obligé de redéfinir une stratégie politique et électorale, le parti radical se rallie au Cartel des gauches avec les socialistes. Les intérets des deux organisations se rejoignent pour cristalliser les déceptions. Mais cette coalition ne manque pas d’ambiguités car, si elle répond aux vœux des militants privinciaux, elle impose, en raison, aux dirigeants et à la plupart des parlementaires.
Le Cartel emporte une victoire nette au printemps 1924. Le parti radical semble retrouver son influence politique dans une démarche d’ « authenticité de gauche ». La reconstitution du parti, engagée par Herriot, semble réussir, d’autant plus que l’ossature s’est renforcée par rapport à 1914. Pourtant la situation de 1924 ne ressemble pas à celle de 1914. Si l’alliance à gauche remporte les élections, le gouvernement du Cartel s’avère un échec. Les choix politiques apparaissent vite inadaptés, tandis qu’éclate l’impuissance de la coalition à mettre en œuvre les réformes proposées. Le retour à une politique laïque militante s’avère impossible, tandis que les projets de réforme fiscale divisent radicaux et socialistes. Les querelles internes renforcent les perturbations : les débats Caillaux-Herriot tendent à paralyser le parti. Après quelquues mois de gestion, le parti radical doit admettre que les programmes et les méthodes de l’avant-guerre n’ont plus l’efficacité souhaitable. Cette expérience est lourde de conséquences. Elle provoque d’abord au sein des jeunes adhérents du parti radical l’idée que le radicalisme est une doctrine vétuste qu’il est nécessaire de moderniser. Cette prise de conscience donne naissance au mouvement « Jeune radical », ironiquement baptisé « Jeune-Turc », qui propose un réaménagement complet de la doctrine radicale sur la base d’un renforcement du pouvoir exécutif, d’une meilleure représentation des intérêts économiques (par une assemblée économique consultative ou un renforcement du Conseil économique et social), voire par l’économie dirigée (prposée par Bertrand de Jouvenel) ou une organisation corporative ; enfin, sur le plan international, par la création d’une fédération européenne. Le mouvement « Jeune-Turc » est le fait de jeunes intellectuels comme Émile Roche, Bertrand de Jouvenel, Jacques Kayser, Robert Lange, Gaston Riou, Jean Mistler auxquels se joignent de jeunes députés comme Pierre Cot, Pierre Mendès France ou Jean Zay. Mais il atteint peu les dirigeants du parti. Édouard Herriot (qui a dû abandonner la présidence du parti radical en 1926 devant l’instigation des militants qui n’acceptent pas de le voir ministre d’un gouvernement de droite), Maurice Sarraut, Joseph Caillaux tirent de l’expérience du Cartel une autre conclusion : tout accord avec les socialistes marxistes est impossible ; le parti radical doit accepter de se comporter en parti du centre.
En 1926, la solution de l’Union nationale s’impose, tant l’impasse où est enfermé le Cartel des gauche est évidente. En rejettant à la fois « la révolution » et « la réaction », les radicaux participent, à nouveau, à des combinaisons ministérielles sans les diriger. Mais le républicanisme de Raymond Poincaré ne se discute pas, tandis que l’attachement de Briand à la sécurité collective est une certitude. En revanche, la dévaluation du franc touche les classes moyennes, clientèles du radicalisme. L’impatience monte à nouveau chez les militants et s’exprime à l’occasion des élections du printemps 1928. Pourtant la conjoncture politique dominée par le poincarisme complique la tactique du parti qui perd sa primauté à gauche (le groupe parlementaire socialiste est à peine moins nombreux), tandis que les « poincaristes » emportent la majorité absolue de la Chambre des députés. Ce nouvel échec sonne la fin provisoire de l’union nationale. Le Congrès d’Angers, à l’automne 1928, dégage une majorité pour abandonner l’expérience ; mais des combinaisons de même type vont se maintenir au pouvoir.
ALLAIN (Jean-Claude) : Joseph Caillaux, 2 volumes, Paris, Imprimerie nationale, 1978-1981
BAAL (Gérard) : Histoire du radicalisme, Paris, La Découverte, 1994
BERNSTEIN (Serge) : Histoire du parti radical, 2 volumes, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1980-1982
BERNSTEIN (Serge) : Édouard Herriot ou la République en personne, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1985
DELFAU (Gérard) : Radicalisme et République. Les temps héroïques (1869-1914), Balland, 2001.
DU RÉAU (Élisabeth) : Edouard Daladier, Paris, Fayard, 1993
NICOLET (Claude) : Le radicalisme, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1974
NORDMANN (J. Th.) : Histoire des radicaux (1820-1973), Paris, La Table Ronde, 1976.
PARTI RÉPUBLICAIN :
L’anotion de parti républicain est couramment utilisée dès le début de la IIIème République, alors qu’il n’existe aucun parti organisé, pour désigner les diverses tendances qui défendent l’idée d’un régime républicain. En fait, jamais les Républicains n’avaient formé un groupe unique, rassemblé sur l’ensemble des objectifs à atteindre puisque l’Assemblée nationale élue en 1871 ne comporte pas moins de quatre (et bientôt cinq) groupes qui se réclament de la République : celui de l’extrême-gauche conduit par Louis Blanc qui rassemble les démocrates les plus intransigeants, partisans de solutions hardies sur le plan social. Celui des radicaux, dont le chaf de file est Clemenceau, assez proche du premier sur le plan des idées, mais qui représente une génération d’hommes plus jeunes, venus à la République par opposition à l’Empire. Celui de l’Union républicaine, rassemblé autour de Gambetta passé à l’opportunisme ; celui de la Gauche républicaine, encore plus modéré, dirigé par Jules Grévy, puis Jules Ferry et dont Jules Simon est l’une des illustrations ; et enfin, à partir de 1873, le groupe du centre-gauche qui rassemble autour de Thiers des orléanistes ralliés à la République tels que léon Say, Dufaure ou Casimir-Périer. Mais au-delà de ces divisions et clivages, le « parti républicains » à une incontestable réalité qui constitue son ciment : celle-ci consiste non seulement dans la volonté d’établir et de consolider le régime, mais encore dans l’attachement à des institutions représentatives qui préservent la France du pouvoir personnel, qu’il soit monarchique ou césarien, dans l’attachement aux libertés publiques, dans l’héritage de la philosophie des Lumières avec sa foi dans la Raison et le progrès qui rend les Républicains naturellement hostiles à l’Église, considérée comme une force d’obscurantisme et dont ils souhaitent supprimer l’emprise sur la société et l’éducation.
La victoire de la République en 1879 permet tout à la fois au parti républicain de mettre en œuvre son programme sous la houlette de Jules Ferry et, en même temps, ébranle sa cohésion puisque, le régime consolidé, les clivages qui existent entre républicains peuvent désormais voir le jour. Il il s’en faut beaucoup que la notion de parti républicain s’en trouve pour autant effacée. Durant les crises qui affectent le régime entre 1875 et 1900, on le voit se reconstituer contre chacune des menaces qui pèsent sur la République. Ainsi en va-t-il des élections de 1885 où, la division des Républicains ayant favorisé au premier tour de l’élection de nombreux « conservateurs » (c'est-à-dire des monarchistes), on voit naître pour le second tour la tactique (qui durera jusqu’à la fin de la IIIème République) de la « discipline républicaine », c'est-à-dire du désistement de tous les candidats républicains en faveur de celui d’entre eux arrivé en tête du premier tour. Ainsi en va-t-il encore lors de la crise boulangiste, puis celle de Panama, enfin à la fin du siècle, durant l’affaire Dreyfus. Il existe donc bien un « parti républicain » dépassant et englobant les divers groupes séparés par leurs options idéologiques, politiques ou sociales.
C’est d’ailleurs à rassembler, les diverses branches du parti républicain dans une organisation structurée et disciplinée, que s’attachent en 1901 les créateurs du parti républicain, radical et radical-socialiste. L’entreprise échoue pour une double raison. D’une part parce qu’avec l’affaire Dreyfus l’acceptation même du terme « Républicain » a changé. Il ne s’agit plus seulement d’un partisan du régime, comme c’était le cas jusqu’à la fin du siècle, mais un homme qui a choisi le camp dreyfusard dans la crise de la fin du siècle et qui se réclame des valeurs de ce camp (l’attachement à la prépondérance du Parlement, la laïcité de l’État avec une n uance anticléricale, la défense des droits de l’individu contre la raison de l’État, etc.). Du coup, et selon cette nouvelle acceptation, seule la gauche est « républicaine » et le « parti républicain » récuse désormais toux ceux qui ne partagent pas ces vues, qu’il s’agisse des progressistes qui ont choisi le camp antidreyfusard à l’image de Jules Méline, Charles Péguy ou Charles Benoist, ou des partisan d’une république de style autoritaire à l’image de Barrès. Toute une fraction des partisans du régime républicain se trouve donc désormais exclue du « parti républicain ». la seconde raison tient à la constitution des diverses branches du « parti républicain » en partis structurés, organisés, se donnant une doctrine précise, des chefs, recensant leurs adhérents. En fondant l’Alliance républicaine démocratique, les progressistes waldeckistes refusent de laisser les radicaux prendre la tête du « parti républicain ». Lorsque se crée la SFIO en 1905, c’est en fait de tout espoir de rassembler le parti républicain en une structure unique. En réalité, dans ces débuts du XXème siècle, la République s etrouvant consolidée et n’ayant plus d’adversaires vraiment dangereux, la notion même de « parti républicain » a fait son temps, laissant désormais jouer les multiples clivages qui séparent les Républicains entre eux. Toutefois la notion demeure à l’état virtuel dans le vocabulaire et les comportements jusqu’à la fin de la IIIème République. En raison de ses ambitions d’origine et également pour affirmer qu’il incarne mieux que tout autre l’héritage républicain, la parti radical se désigne fréquemment comme « le parti républicain » jusqu’en 1940. Par ailleurs, lors des consultations électorales au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, la « discipline républicaine » entre partis de gauche joue jusqu’à la fin du régime. Lors de la sénace du 10 juillet 1940 de l’Assemblée nationale réunie à Vichy et qui met fin au régime, le radical Astier évoquera pour la dernière fois le souvenir du « parti républicain » en s’écvriant « vive la République quand même ! ».
PARTI SOCIAL FRANÇAIS (PSF) :
Le Parti social français est créé le 10 juillet 1936 par le colonel de La Rocque, après les décrets du 18 juin 1936, portant la dissolution des ligues. Il succède donc aux Croix-de-feu, revendique, dès septembre 1936, 600 000 adhérents et, en novembre de la même année, quelques 4500 sections. En 1937, selon le colonel de La Rocque, le PSF entraînerait plus de deux millions de personnes. Ces chiffres sont vraisemblablement exagérés, les résultats du PSF le démontrent. Ils témoignent cependant du succès considérable du premier parti conservateur nationaliste de masse que l’histoire de France a connu. Le parti dispose d’une solide organisation, d’une presse (Le Flambeau, auquel s’ajoute Le Petit journal, acquis en 1937 par La Rocque).
Le PSF veut d’abord incarner l’indispensable rassemblement national capable de s’opposer à la révolution bolchevique dont il annonce quotidiennement l’imminence. Face au gouvernement du Front populaire, accusé d’être le fourrier de cette révolution, le PSF, s’il met une sourdine aux exercices paramilitaires de ses militants, entend toujours occuper la rue et montrer sa force. Entre le 19 juin et le 15 juillet 1936, c’est un mot d’ordre du colonel La Roque qui provoque dans certains quartiers des villes un grand pavoisement tricolore. Le 1er octobre, le PSF appelle à une réunion de masse au Vélodrome d’Hiver. La réunion ayant été interdite par crainte d’affrontements, le parti se mobilise alors pour s’opposer au meeting du parti communiste organisé le 4 octobre au parc des Princes. La contre-manifestation réunit 15 000 militants du PSF selon le ministre de l’Intérieur, 40 000 selon les affirmations du colonel de La Rocque. Les forces de l’ordre parvinrent à limiter les affrontements, mais dans la mythologie du parti le 4 octobre 1936 symbolisa désormais le début du reflux communiste grâce à la vigoureuse réaction des nationaux du deux fois lauréat de l’Académie, professeur à la Sorbonne, PSF.
Le nouveau parti se proclame légaliste et républicain. Les plus extrémistes des Croix-de-feu quittent l’organisation (sachant que les départs ont commencé dès 1935) et rejoignent le Parti populaire français (PPF) créé par Jacques Doriot en juillet 1936. D’ailleurs, c’est de l’extrême droite (Action française et PPF) que viennent les attaques les plus vives contre La Rocque et le PSF. Le leader des Croix-de-feu est même accusé par le duc Joseph Pozzo di Borgo d’avoir émargé aux fonds secrets à l’époque de Tardieu. Dès le mois d’octobre 1936, le PSF, en signant un accord, qui doit éviter le « bolchevisation du pays », avec l’Union nationale des combattants, dont Jean Goy est le président, situe son rôle dans un cadre républicain : « l’action qui pourra être envisagée ne devra jamais avoir pour conséquence, sous une forme ou sous une autre, de mettre en cause le régime républicain, ni de porter atteinte aux droits légitimes des travailleurs ». Le PSF entend « dénoncer l’action de Moscou » et « désarmer ceux qui préparent la guerre civile ». Il refuse d’ailleurs d’adhérer au Front de la liberté constitué autour de Doriot et de Taittinger. Le colonel de La Rocque, selon une politique constante, entend conserver la totale liberté de son mouvement.
Mais le PSF, fort de son implantation dans le pays, n’est guère représenté à l’Assemblée, où seuls une petite dizaine de députés, comme Jean Ybarnégaray, se réclament d lui. Certes, le PSF enregistre quelques succès aux élections partielles : ainsi en novembre 1938, dans le Ixe arrondissement de Paris, Charles Vallin, directeur de la propagande du PSF, l’emporte sur le général Niessel, candidat de la Fédération républicaine, soutenu par l’Action française et le PPF. Mais sur trente quatre élections partielles depuis les élections de 1936 jusqu’en 1939, le PSF ne l’emporte que deux fois (Paris et Remiremont). Les résultats obtenus sont difficiles à interpréter. Faut-il souligner que le PSF, qui obtient 3,57% des voix aux élections partielles entre août 1936 et avril 1938, atteint 9,3% des suffrages entre mai 1938 et août 1939 ou remarquer, comme le fait François Goguel, que les candidats PSF n’obtiennent jamais de résultat supérieurs à ceux des candidats modérés en avril 1936. Il est en tout cas difficile de penser que le parti, qui vit dans l’échéance électorale de 1940 et s’oppose vivement à la propagande de la Chambre, pourrait compter, en cas d’élections générales, la centaine de députés auxquels il prétend.
D’autant plus qu’après la dislocation du Front populaire, le positionnement du part est moins facile. La croissance des effectifs est vraisemblablement beaucoup moins rapide en 1938-1939 qu’en 1936-1937. Comment défendre, face à Daladier, une union nationale que le président du Conseil radical prétend lui-même incarner ? Le PSF est dorénavant plus en situation de concurrence que l’affrontement direct face à des radicaux qui ne sont plus ceux du Front populaire. D’ailleurs, les députés PSF ont voté l’investiture de Daladier, et le parti cherche à gagner la clientèle traditionnelle des radicaux, paysans et classes moyennes.
Au moment de Munich, le colonel de La Rocque approuve l’action de Daladier ; l’immeuble du Petit Journal pavoise au retour du président du Conseil. Mais le PSF conformément à l’opinion de la majorité des Français, ne croit guère qu’à un répit et ne partage nullement les positions de ceux qui souhaiteraient une entente à tout prix avec l’Allemagne.
Le PSF se différencie aussi de l’ultra-droite en réaffirmant son refus de l’antisémitisme. Certes, le parti participe à la xénophobie ambiante de cet avant guerre, mais le colonel de La Rocque s’oppose aux section PSF d’Alsace-Lorraine qui souhaiteraient exclure les juifs. La position est plus nuancée en Algérie, où le PSF affronte la concurrence du PPF. En effet, de La Rocque dénonce « l’afflux d’Israélites apatrides » mais rappelle que des « Juifs patriotes » ont « versé leur sang mélangé avec le nôtre sur les champs de bataille de 1914-1918 ». La cible majeure reste la franc-maçonnerie.
Enfin, patriote, paternaliste, autoritaire et chrétien, le PSF, qui en appelle au renouvellement des élites, nécessaires afin que soient encadrées les masses, annonce avant même la guerre l’idéologie vichyste. L’expression « révolution nationale » appartient à son vocabulaire. A plusieurs reprises, lors de l’été 1939, Le Petit Journal affirme en manchette : « l’ordre français a toujours reposé sur trois éléments : Travail, Famille, Patrie ». En 1940, le PSF devient Le Progrès social français, le colonel de La Rocque demande au mouvement de se ranger sans réticence derrière le maréchal Pétain mais il refuse d’adhérer au parti unique de Déat (août 1940).
RÉMOND (René), BOURDIN (Janine) : Edouard Daladier, chef de gouvernement et la France et les Français en 1938-1939, Paris, FNSP, 1977 et 1978.
RUDEAUX (Philippe) : Les Croix-de-feu et le PSF, Paris, Ed. France-Empire, 1967.
PASCAL (Ernest), ?-1913 : Fonctionnaire et homme politique. Ancien préfet, Ernest Picard est nommé sous-secrétaire d’Etat à l’Intérieur du 9 avril au 18 mai 1873 dans le premier cabinet Dufaure.
PASQUET (Louis), 1867-1931 : Employé et homme politique. Né à Tarascon (Bouches-du-Rhône) le 17 octobre 1867, Louis Pasquet quitte l’école à 13 ans pour devenir facteur. Il grimpre très vite les échelons de la hiérarchie des PTT et obtient le poste de secrétaire général de cette administration en 1916. Ses brillantes qualités et ses hautes fonctions le font désigner comme conseiller d’Etat. Spécialistes des affaires sociales (aux PTT, il a créé des statuts du personnel très appréciés) et, alors qu’il est inscrit au groupe de la gauche démocratique au Sénat, il se penche sur la question des assurances et des retraites. Il est ainsi rapporteur du budget du Travail pendant plusieurs années. Nommé ministre du Travail dans le deuxième cabinet Herriot du 19 au 22 juilet 1931, il est renversé avant même sa présentation devant la Chambre. Il décède à Parisle 29 avril 1931.
PASSY (Frédéric), 1822-1912 : Auditeur au Conseil d’Etat et homme politique. Auditeur au Conseil d’Etat et ardent Pacifiste, Frédéric Passy est l’un des apôtres de l’arbitrage international des débuts de la Troisième République. Il fonde la Ligue internationale de la paix et préside une association pour l’arbitrage des nations. Il a la joie d’assister au succès de son apostolat et de voir l’arbitrage entre nations entrer dans la pratique courante. Elu député de la Seine de 1881 à 1889 et membre de l’Académie des Sciences morales à partir de 1877. Avec Dunant, il reste le fondateur de la Croix-Rouge et reçoit le prix Nobel de la paix en 1901.
PASSY (Louis, Charles, Paulin), 1830-1913 : Homme politique. Né à Paris le 4 décembre 1830, Louis Passy est le neveu d’hippolyte Passy, ministre sous la monarchie de Juillet. Ancien élève de l’Ecole des chartes et docteur en droit, il est élu député orléaniste sous le second Empire. Réélu en 1871, il entre au gouvernement comme sous-secrétaire d’Etat aux Finances du 2 août 1874 au 9 mars 1875 dans le cabinet Cissey puis, du 15 mars 1875 au 16 mai 1877 dans les cabinets successifs de Buffet, Dufaure et Simon. Il travaille alors à la réforme postale, puis à la réorganisation des services financiers de la Ville de Paris. Il décède à Gisors (Eure) le 31 juillet 1913.
PASTEUR (Louis), 1822-1895 : Chimiste et biologiste. Pasteur a obéi toute sa vie à l’idéal le plus pur, à un idéal supérieur de science. « L’avenir le rangera dans la radieuse lignée des apôtres du bien et de la vérité. » C’est avec ces mots que Poincaré accompagne la dépouille mortelle de Louis Pasteur, en ce 5 octobre 1895. La France pleure alors un de ses plus grands scientifiques.
Né le 27 décembre 1822, Louis Pasteur fréquente l’école puis le collège d’Arbois. Elève doué, il s’installe en octobre 1838 dans une pension du Quartier Latin qui prépare à l’entrée à l’Ecole Normale. Mais le jeune homme supporte difficilement cette nouvelle vie et rentre à Arbois pour y finir sa rhétorique et poursuivre ses études au collège royal de Besançon. Il est bachelier ès lettres en 1840 puis passe l’option qui lui permet d’obtenir le baccalauréat ès mathématiques deux ans plus tard. Conforté par ses réussites scolaires, Pasteur s’installe de nouveau à Paris et est reçu quatrième au concours de l’Ecole Normale Supérieure en 1843. Il passe alors ses dimanche après-midi avec le préparateur du célèbre chimiste Jean-Baptiste Dumas. Il y acquiert de nombreuses connaissances tant en chimie qu’en physique et en cristallographie. Il soutiendra d’ailleurs deux thèses en 1847, l’une en chimie et l’autre en physique. Ses recherches se portent alors sur la polarisation de la lumière par les cristaux. Il découvre que certains cristaux de structures identiques ne dévient pas la lumière de la même façon. Certains la dévient vers la droite, d’autres vers la gauche. Pasteur vient de mettre en évidence l’isomérie.
Après avoir enseigné à Dijon puis à Strasbourg, Pasteur est nommé professeur et doyen de la nouvelle faculté des sciences de Lille. Il y établit de nombreuses relations avec l’industrie et fait une découverte capitale : les levures sont des êtres vivants à part entière responsables de la fermentation et non des sous-produits de celle-ci, comme de nombreux chimistes le croient. En octobre 1857, Pasteur devient administrateur de l’Ecole Normale Supérieure et directeur des études scientifiques. Il demande alors la mise à sa disposition d’une partie du grenier de l’école afin d’y installer son propre laboratoire et de pouvoir multiplier les conditions d’expériences. Il y poursuit ses études sur la fermentation pendant trois ans et écrit un opuscule sur les causes de la fermentation butyrique. Mais depuis 1858, Pasteur est en bute aux partisans de la génération spontanée et plus particulièrement à Félix Archimède Pouchet. Ce naturaliste rouennais communique une note à l’Académie des Sciences en décembre 1858 sur des proto-organismes nés spontanément dans l’air. Pasteur lui réplique aussitôt qu’il a tort. Pendant six ans les expériences dans les caves, sur les sommets des montagnes et les glaciers, les conférences et les articles se succèdent. Chaque partie refuse d’admettre les arguments de l’autre. Mais le 7 avril 1864, Pasteur donne une conférence à la Sorbonne. Ses expériences conquièrent le public, la commission d’experts et les médias. Pouchet est vaincu et avec lui la thèse de la génération spontanée.
Pourtant, si Pasteur remporte de franc succès sur le terrain scientifique, il n’en va pas de même dans ses fonctions à l’Ecole Normale. Taxé d’autoritarisme, il se heurte à de nombreuses contestations et son poste est finalement supprimé. Il peut alors s’investir entièrement dans ses recherches. A partir de juin 1865, Pasteur passe quatre ans à Alès pour y étudier la maladie qui décime les élevages de vers à soie. Ses observations lui permettront d’identifier les papillons malades et ainsi de détruire leurs œufs avant que tout l’élevage ne soit infesté.
Après l’abdication de Napoléon III et la guerre contre la Prusse, Pasteur, fervent napoléonien, ne reprend que lentement ses recherches. Il entame une série d’études sur la bière et ses problèmes de fermentation. En 1875, après cinq ans d’expériences, il publie les Etudes sur la bière et les conseils aux brasseurs. L’année suivante, Pasteur est candidat aux élections sénatoriales. Mais son programme, basé sur la défense de l’enseignement supérieur et de la recherche, ne satisfait pas les électeurs et il est battu. Ce revers n’entame pourtant pas son enthousiasme et les deux années suivantes se révèlent fastes. En Angleterre, un médecin voit apparaître des micro-organismes dans un flacon d’urine bouillie et protégée de l’atmosphère. Ces problèmes de contamination seront rapidement réglés par l’équipe de Pasteur qui met au point le filtre Chamberland (un filtre en porcelaine qui retient les germes de l’eau), l’autoclave et le flambage des vases. En Allemagne, Robert Koch prouve par ses expériences qu’un type donné de microbe provoque un certain type de maladie. La découverte du staphylocoque par Pasteur suivra. Pendant six ans, le Français et l’Allemand étudient les maladies et leurs microbes. Les techniques permettant la culture pure des micro-organismes se perfectionnent. Koch développe la culture sur des milieux artificiels, technique dont la maîtrise échappe encore à Pasteur. Ce dernier s’intéresse donc plus aux maladies qu’il peut cultiver sur des organes : charbon des moutons, choléra des poules, rage des chiens. En été 1879, Pasteur et ses collaborateurs, Roux et Duclaux, découvrent que les cultures vieillies du microbe du choléra injectées aux poules ne déclenchent pas la maladie. De plus, elles résistent à de nouvelles infections. Par ailleurs, Chamberland et Roux testent les effets de la chaleur sur la virulence des microbes du charbon et la durée de cet effet. Leurs résultats sont particulièrement probants et une démonstration est organisée. Le 5 mai 1881, un troupeau de moutons est vacciné. Le 2 juin, les résultats sont là : un véritable succès.
Pasteur a débuté ses recherches sur la rage en 1880, à la mort d’un enfant à l’hôpital Sainte-Eugénie. Mais alors que l’étude de la virulence de la maladie avance, l’agent pathogène lui échappe encore. Il semble pourtant que la moelle infectée et desséchée protège de la maladie. Le 6 juin 1885, Pasteur reçoit la visite de Marie-Angélique Meister dont le fils Joseph a été mordu par un chien soupçonné de porter la rage. Il commence les injections et trois mois plus tard, l’enfant sauvé, Pasteur présente ses travaux à l’Académie des Sciences qui lui offre un accueil enthousiaste. Le 1er mars 1886, sur 350 personnes vaccinées, une seule est décédée. L’Académie propose alors de créer un établissement destiné à traiter la rage après morsure. L’Institut Pasteur naît en 1888. Outil de recherche, de formation et de soins, l’établissement s’exporte rapidement en Australie et au Viêt-nam. Pasteur restera à la tête de l’Institut jusqu’à sa mort, le 28 septembre 1895.
PATÉ (Henry), 1878-1942 : Journaliste et homme politique. Né à Paris le 24 décembre 1878, Henry Paté est un ancien officier et journaliste. Spécialiste des questions militaires à la Chambre, il est, du 11 janvier au 28 mars 1924, commissaire général à la Gurre, chargé de l’Education physique et de la Préparation militaire dans le second cabinet Poincaré. Il devient ensuite sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction publique et aux Beaux-Arts, chargé de l’Education physique, du 13 novembre 1928 au 20 février 1930 dans les ministères successifs de Poincaré, Briand et Tardieu. Il garde ce poste du 23 février au 1er mars 1930 dans le premier cabinet Chautemps. Il décèdera en 1942.
PATENÔTRE (Raymond), 1900-1951 : Administrateur et homme d’affaires et politique. Né à Atlantic City aux Etats-Unis le 31 juillet 1900, où son père est amabassadeur de France, Raymons Patenôtre fera une triple carrière d’homme d’affaires prospère, d’important patron de presse et d’homme politique. Tenté par l’action publique, il est élu en 1925 conseiller général de Seine-et-Oise, puis député du même département de 1928 à 1936, il s’inscrit au groupe des indépendant de gauche puis, réélu en 1936, il s’inscrit à celui de l’union socialiste et républicaine. Son éloquence et ses compétences économiques le font remarquer et, Herriot le nomme sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et à l’Intérieur, chargé de l’Economie nationale dans son troisième cabinet à partir du 3 juin 1932. Poste qu’il conserve dans les ministères suivants de Paul-Boncour et Daladier jusqu’au 25 octobre 1933 puis du 26 novembre 1933 au 29 janvier 1934 dans le second gouvernement Chautemps. Paul-Boncour disait qu’ « il était devenu d’usage de le prendre dans les combinaisons ministérielles. On le prenait pour sa fortune et l’influence dont il disposait dans pas mal de journaux. » Il est ensuite nommé sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères, chargé de l’Economie nationale et du Tourisme du 30 janvier au 8 février 1934 dans le second cabinet Daladier.
Dans les années qui suivent, alors que sa carrière ministérielle connaît une éclipse, Patenôtre constitue un puissant empire de presse en faisant l’acquisition du Petit Journal et d’importants journaux de province comme Le Petit niçois, Le Petit Var, Lyon républicain. Tout en participant à la création de l’hebdomadaire Marianne. Il écrit une série d’ouvrages sur la crise économique qui témoignent d’une compétance rare au sein du monde politique français sur ce type de problèmes, et dans lesquels il préconise une dévaluation suffisante du franc et des accords internationaux pour combattre la crise.
Tenu à l’écart par un Front populaire beaucoup trop extrêmiste pour le modéré de centre-gauche qu’il est ministre de l’Economie du 10 avril 1938 au 15 septembre 1939 dans le troisième cabinet Daladier. Il décèdera à Paris le 19 juin 1951.
PATRONAT :
PAUL-BONCOUR (Augustin, Alfred, Joseph), 1873-1972 : Avocat et homme politique. Né le 4 août 1873 à Saint-Aignan (Loir-et-Cher), Joseph Paul-Boncour est le fils d’un médecin républicain et d’une mère catholique et monarchiste. Docteur en droit et avocat, il vient à se lancer dans la politique par ferveur républicaine et démocratique et par intérêts pour les problèmes sociaux. D’abord secrétaire particulier de président du Conseil Waldeck-Rousseau de 1899 à 1902 où il fonde le Conseil juridique de la Bourse du travail puis il devient en 1906, directeur de cabinet et directeur personnel de Viviani, ministre du Travail en 1906 dans le gouvernement Clemenceau. Elu au conseil municipal de Saint-Aignan en 1904, il devient député socialiste indépendant et conseiller général du Loir-et-Cher de 1909 à 1919. A la Chambre, il siège naturellement à la commission du Travail puis devient député du Tarn en 1924. Il sera réélu en 1928. Nommé à la tête du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale du 2 mars au 26 juin 1911 dans le bref cabinet Monis, il s’attache à assurer l’application de la loi sur les retraites ouvrières. Il est néanmoins battu aux élections générales de 1914 et il faut attendre vingt ans avant qu’il ne trouve un poste ministériel.
Pendant la Première Guerre mondiale, il est au front comme chef de bataillon et c’est dans ce contexte que son parcours s’infléchit. Il juge désormais prioritaires les problèmes de la paix. Convaincu qu’une organisation internationale devrait impérativement être mise en place pour garantir l’ordre mondial, il adhère à la SFIO de 1916 à 1931 dont les positions répondent à ses exigences. En 1919, après avoir plaidé comme avocat de la partie civile au procès de Raoul Villain, l’assassin de Jaurès, il revient à la Chambre comme député socialiste de la Seine, et choisit de siéger dans les commissions de l’Armée et des Affaires étrangères. Il y milite à la fois pour une meilleur organisation de la défense nationale et pour l’établissent d’une véritable sécurité collective dans le cadre de la Société des nations (SDN). Ses conceptions le conduisent à rejeter en bloc l’adhésion à la IIIe Internationale, en 1920, puis le situent à l’aile droite de la SFIO, parmi les partisans d’un cartel avec les radicaux. En 1924, il quitte la Fédération de la Seine, jugée trop extrémiste pour lui et devient député du Tarn. Après le succès des gauches, il devient membre de la délégation française à la SDN, mandat qu’il conserve jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, avec une interruption de 1928 à 1930, la SFIO, revenue à l’opposition, lui demande de se retirer. En 1927, il rapporte à la Chambre sur la loi relative à l’organisation générale de la nation en temps de guerre. Réélu en 1928, il devient président de la commission des Affaires étrangères. En 1931, soucieux de la dégradation du climat international et constatant l’impuissance progressive de l’organisme supranational dont il connaît tous les rouages, il quitte finalement la SFIO et la même année, il est élu sénateur du Loir-et-Cher.
Tous ces évènements contribuent à relancer sa carrière. Le 3 juin 1932, il entre comme ministre de la Guerre dans le troisième cabinet Herriot, poste qu’il occupe jusqu’au 17 décembre 1932. Après la chute de ce gouvernement, il est appelé à former son propre gouvernement le 18 décembre 1932. S’arrogeant alors le portefeuille des Affaires étrangères, il forge un ministère à dominante radicale. Son ministère chute quarante jours plus tard, son projet d’augmentation des impôts de 5% heurtant la SFIO qui lui retire son soutien. Ce pacifiste lucide – « je n’eus que le temps de tomber » écrit-il dans ses Souvenirs – quitte le sommet de l’Etat au moment où Hitler y parvient, le 30 janvier 1933. Les années qui suivent le voient accéder à plusieurs ministères. Il conserve le portefeuille des Affaires étrangères dans le premier ministère Daladier du 31 janvier 1933 au 29 janvier 1934, dans le premier ministère Sarraut du 26 octobre au 25 novembre 1933 et dans le second ministère Chautemps 26 novembre 1933 au 30 janvier 1934. Il s’emploie alors à réduire le contentieux avec l’Italie et tente de mettre en place le pacte à quatre des grandes puissances occidentales pour le maintien de la paix, mais qui laissait de côté les états de la « petite entente ». Pourtant, pour faire front à Hitler, il multiplie les tentatives de rapprochement avec les états d’Europe centrale, l’URSS et les Etats-Unis. Enfin, il souhaite l’établissement d’un statut international pour la Sarre qu’il considère comme un point de friction franco-allemand dangereux. Il devient ministre de la Defense nationale et de la Guerre dans le second cabinet Daladier du 4 au 9 février 1934 pour « défendre la République ».
En 1935, il est élu président du groupe parlementaire de l’Union socialiste et républicaine, qui se veut être l’axe d’une nouvelle union des gauches. Délégué permanent à la SDN, il prend place comme ministre d’Etat dans le cabinet Sarraut du 24 janvier au 4 juin 1936. Faute d’obtenir le Quai d’Orsay, il refuse de faire partie du gouvernement Blum formé en juin 1936. Il revient cependant une dernière fois aux Affaires étrangères du 13 mars au 9 avril 1938 dans le deuxième cabinet Blum. Hostile aux avancées d’Hitler, il s’efforce pendant les trois semaines d’existence du gouvernement, de consolider et d’élargir le réseau d’alliances de la France. La guerre venue, il obtient à Genève la condamnation de l’agression allemande envers la Pologne, puis de l’URSS contre la Finlande, et, à la commission des Affaires étrangères du Sénat, s’oppose plusieurs fois à Pierre Laval. Le 10 juillet 1940, il fait partie des quatre-vingts parlementaires qui refusent d'accorder au Maréchal Pétain les pleins pouvoirs constituants. Se retirant de la vie politique après la Libération, il meurt à Paris, le 28 mars 1972.
PAUL-BONCOUR (Joseph) : Entre-deux-guerres, 3 vol., Paris, Plon, 1945-1946.
PAUL-MOREL (Jean, Paul Morel, dit), 1869-1933 : Bâtonnier et homme politique. Né à Vesoul (Haute-Saône) le 20 septembre 1869, Paul-Morel est bâtonnier de Vesoul. Vice-président de la gauche radicale à la Chambre, il a en charge l’Intérieur, le Commerce, les Postes et Télégraphes, puis les questions financières. Parmi Les dossiers qu’il prend en charge, signalons : la limotation des débits de boisson, la protection de l’enfance, la surveillance des établissements de bienfaisance, les familles nombreuses, l’expropropriation, etc. Il décède à Lagny (Seine-et-Marne) le 23 décembre 1933.
PAZ (Madeleine), 1889-1973 : Journaliste. Madeleine Legendre est née le 6 juillet 1889 à Étampes (Seine-et-Oise). Elle épouse en premières noces Henri Marx, écrivain socialiste et pacifiste. Pacifiste elle-même, c’est en 1917 qu’elle participe à la Ghilde des Forgerons et y fait des conférences « aux femmes qui ne sont pas en guerre ». Elle écrit aussi dans la revue La Forge. En 1919, elle entre, avec Séverine, au comité directeur de la revue Clarté qu’elle a créée avec Henri Barbusse, la Ligue de solidarité intellectuelle pour le triomphe de la cause internationale, ouverte aux thèses féministes. Elle écrit dans l’hebdomadaire La Voix des femmes. Membre du PCF, elle rejoint aussi une obédience dissidente franc-maçonne : Le droit humain. En 1924, elle épouse Maurice Paz qui est avocat (notamment de Pierre Monatte) et lui-même, membre du parti communiste. En 1933, elle est sollicitée par Henri Barbusse pour adhérer à l’Association des écrivains et des artistes révolutionnaires. Elle refuse.
En 1936, elle est exclue avec son mari du parti communiste. Ce dernier devient l’avocat du gouvernement Blum en matière de presse écrite et d’agences de presse. Madeleine Paz se trouve alors sur tous les fronts culturels du Front populaire. Journaliste à Vendredi, avant-garde intellectuelle du Front populaire, elle occupe aussi la fonction stratégique de critique littéraire et artistique du Populaire.. Elle devient la cheville ouvrière de Mai 1936, mouvement populaire d’art et de culture où figurent un grand nombre de femmes dont Germaine Dulac. Cette même année, elle célèbre ces « temples du printemps » que sont les auberges de jeunesse. Elle aurait même tenter de constituer une Maison de la culture socialiste pour torpiller celle de la rue Navarin, tenue par les communistes. Dans Le Populaire, elle proclame « Le théâtre bourgeois est mort ». Sensible au combat de l’Union temporaire contre la prostitution réglementée, elle mènera une enquête à ce sujet en 1937. Un moment adhérente à la Ligue des femmes pour la paix et la liberté, elle la quitte à la veille de la Seconde Guerre mondiale pour créer une ligue composée uniquement de femmes : la Ligue des femmes pour la paix. La guerre déclarée, elle abandonne toute activité militante, écrit un livre sur George Sand et se consacre à la traduction d’auteurs américains. Elle décède à Paris le 12 septembre 1973.
MAITRON (J) : Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Paris, Editions Ouvrières, 1967.
ORY (Pascal) : La belle illusion, Paris, Plon, 1994.
PÉCAUT (Félix), 1828-1898 :
Né à Salies-de-Béarn (Pyrénées-Atlantique), le 3 juin 1828, Félix Pécaut est collaborateur attitré au Temps après la guerre de 1870 où il tente de dégager les conditions morales de l’avènement d’une véritable république. En 1880, à l’initiative de Ferdinand Buisson, il organise l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses chargée de former les professeurs des Ecoles normales supérieures de jeunes filles. Mission stratégique car « la femme » constitue un enjeu essentiel de la laïcité républicaine. Les « conférences du matin » à Fontenay sont restées célèbres : Pécaut s’y montre un grand « prédicateur moral ». Il cherche à promouvoir une spiritualité laïque, une éducation de la conscience », qui développe une haute conception de la vie et de l’univers. En 1898, il prend publiquement parti pour Dreyfus amenant, post mortem, Buisson à le rejoindre dans cet engagement. Il décède à Orthez (Pyrénées-Atlantique) le 31 juillet 1898.
COMPAYRÉ (G) : Félix Pécaut et l’éducation de la conscience, Paris, sd.
CAPÉRAN (L) : Histoire contemporaine de la laïcité française, Paris, NEL, volume 2, 1960.
PÉCHIN (Charles, Albert), 1871-1949 : Médecin et homme politique. Né à Dampierre-les-Bois (Doubs) le 21 juin 1871, ce protestant est docteur médecine. Elu député de la Seine de 1928 à 1936, inscrit à l’union républicaine démocratique puis au centre républicain, il est nommé, du 20 février au 2 juin 1932, sous-secrétaire d’Etat aux travaux publics et à la Marine marchande dans le troisième cabinet Tardieu. Il décède à Valentigney (Doubs) le 12 septembre 1949.
PÉGUY (Charles), 1873-1914 :
Charles Péguy, né le 7 janvier 1873 à Orléans est issue d’une famille de très humble origine. Spn père était ouvrier menuisier et sa mère rempailleuse de chaises. Charles Péguy n’a pas encore un an quand son père meurt. Tout petit, il est très intéressé par les études vénérant ses maîtres et suit son catéchisme avec application. Charles Péguy, appuyé par ses maîtres, entre au lycée d’Orléans. Toutefois, pendant son année de Philosophie, il abandonne la pratique religieuse prépare l’ENS où il est reçu en 1894. Charles Péguy et ses camarades ont alors pour professeur des maîtres à penser prestigieux comme le médiéviste Joseph Bédier ou l’écrivain Romain Rolland. Le philosophe Henri Bergson, auteur quelques années plus tard de L’Évolution créatrice, aura une grande influence sur la maturation intellectuelle du jeune homme. Rue d’Ulm, ses convictions socialistes s’affirment sous l’influence du bibliothécaire Lucien Herr. Il adhère alors au groupe socialiste et à partir de 1897, il collabore à la Revue socialiste puis participe à la fondation de la Librairie socialiste.
Licencié ès lettres, Charles Péguy démissionne de l’institution en 1897 après avoir échoué à l'agrégation de philosophie. En 1897, Péguy, qui s’essaie à la littérature, collabore à la Revue Blanche. Il abandonne alors toute pratique religieuse et s’engage avec conviction dans la cause dreyfusiste après avoir fait la connaissance de Bernard Lazare. Il s’engage passionnément avec son ami Daniel Halévy dans la campagne révisionniste aux côtés de Zola et de Jaurès. Il trouve dans cette affaire l’occasion d’exprimer son désir de justice et de vérité. C’est aussi à cette époque qu’il découvre sa vocation de poète. Sa rigueur, son refus de l’opportunisme vont faire de lui un indépendant. L’année suivante, Péguy se marie civilement avec Charlotte Baudouin, la sœur de son plus intime ami, récemment décédé. Le couple, qui demeure au 7, rue de l’Estrapade à Paris, aura quatre enfants : Marcel naît en 1898, Germaine en 1901, Pierre en 1903 et enfin Charles-Pierre en 1915.
Péguy ne peut-être séparé de Barrès, bien que les formes littéraires et le cheminement de la pensée soient chez eux différents. En revanche, comme Barrès, il découvre le sens de la patrie et l’exigence de la foi. Il consacre à Jeanne d’Arc, libératrice de la France et d’Orléans, sa ville natale, un drame ne trois actes et cette héroïne de la foi et de la patrie ne cesse de l’inspirer où il la chante en poète (1897). C’est là le point de départ de ses deux engagements futurs, l’engagement patriotique et l’engagement catholique. Pourtant la dédicace de Jeanne d’Arc place le poème au cœur de la mystique socialiste : « Á toutes celles et à tous ceux qui seront morts pour tâcher de porter remède au mal universel » et plus spécialement « pour l’établissement de la République socialiste universelle » puis brouillé avec ses amis socialistes, il fonde au mois de janvier 1900, les Cahiers de la Quinzaine, une maison d'édition indépendante qui publie chaque mois sa propre revue littéraire. Installée au 8 rue de la Sorbonne, l’écrivain en assume personnellement la direction. Celle-ci connaîtra 238 livraisons entre 1900 et 1914, qui lui permettent de publier ses œuvres, ainsi que celles de ses amis tels André Suarès, Anatole France, Georges Sorel ou Julien Benda. Péguy rédige également des textes formant dossier sur les aspects brûlants de l'actualité, comme la séparation de l'Église et de l'État, la défense des peuples luttant pour leur indépendance ou la crise de l'enseignement… Lui-même, journaliste et chroniqueur, dialogue avec ses abonnés pour dénoncer la démagogie ambiante et les totalitarismes à venir. De Jean Coste en 1902 s’attaque à Jaurès ; le Courrier de Russie ainsi que Les Suppliants parallèles manifestent son intérêt pour la lutte sociale et les événements de la Russie de Nicolas II... Péguy investit également dans une librairie, ouverte en compagnie de Georges Bellais ; le capital avait été mis à sa disposition par sa belle-famille. Installée rue de la Sorbonne, cette librairie devient rapidement un foyer de résistance au socialisme marxiste prônée par Jules Guesde ainsi qu’à l’influence de Jean Jaurès sur la vie de la gauche parlementaire. L’affaire périclite cependant à la suite de nombreuses difficultés financières. Avec la naissance du siècle, les convictions de Charles Péguy évoluent. S’il poursuit son combat pour les idées humanitaires, l'incident de Tanger en 1905 lui révèle la menace allemande et l'ampleur du "mal universel". Péguy s’élève alors contre le pacifisme et l'internationalisme de la gauche. Au mois d’octobre 1905, il publie Notre Patrie, un écrit polémiste et patriotique. Dans les années qui suivent, l’écrivain dénonce également le scientisme du "parti intellectuel", autrement dit ses anciens professeurs de l'enseignement supérieur. Situations notamment est publié à partir de 1907.
L’année suivante est marquée par son retour à la foi. Il en fait la confidence à son ami Joseph Lotte. De 1912 à 1914, Charles Péguy effectue plusieurs pèlerinages à Notre-Dame de Chartres. L’écrivain fustige à présent le socialisme officiel, auquel il reproche sa démagogie et son sectarisme anticlérical, après la séparation de l’Église et de l’État. L’écrivain se fait mystique dans des essais philosophiques comme Clio, Dialogue de l’Histoire et de l’Âme païenne, publié entre 1909 et 1912, ou Victor-Marie, comte Hugo, en 1910. Son style personnel et intemporel trouve à s’exprimer dans de vastes poèmes oratoires aux rythmes lancinants : Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc, en 1910 ; Le Porche du Mystère de la deuxième Vertu, l’année suivante ; Le Mystère des Saints Innocents et La Tapisserie de sainte Geneviève et de Jeanne d'Arc, en 1912 ; La Tapisserie de Notre-Dame, en 1913. Ces dernières œuvres sont dominés par le thème de la lutte en l'Homme de la grâce divine et des forces mortelles. Charles Péguy s’attache aussi à exprimer ce qui lie le spirituel au temporel. Enfin, avec Ève en 1913, un vaste poème symphonique de quelque 3.000 quatrains, l’écrivain patriotique célèbre de nouveau les morts "pour la terre charnelle", celle des ancêtres.
Le 2 août 1914, la mobilisation générale contraint celui qui appelle la naissance de la "génération de la revanche" d'interrompre sa Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne, un plaidoyer pour la défense de Bergson. Reparti sous les drapeaux à l’âge de 41 ans, l’officier de réserve Charles Péguy rejoint les rangs du 276e R.I. Il est tué, le 5 septembre 1914, lors des premiers combats de la bataille de la Marne. A Villeroy, à proximité de Neufmontiers-les-Meaux, il est à la tête de sa section d'infanterie lorsqu'une balle allemande l’atteint au front.
PEINE DE MORT :
PELLETAN (Charles, Camille), 1846-1915 : Journaliste et homme politique. Né à Paris le 23 juin 1846, Camille Pelletan est le fils d’Eugène Pelletan, membre du gouvernement de la Défense nationale. Ancien élève de l’Ecole des Chartes, il est le fondateur avec Clemenceau de la Justice. Député des Bouches-du-Rhône de 1881 à 1912, il devient ensuite sénateur de ce département jusqu’à sa mort. Excellent orateur et journaliste, il se signale par ses discours et ses articles contre le général Boulanger et contre l’Eglise. C’est à lui que revient l’honneur de rédiger la déclaration du parti radical socialiste lors de sa fondation en 1901. Adepte de la maçonnerie, il est, du 7 juin 1902 au 23 janvier 1905, nommé ministre de la Marine dans le cabinet Combes. Il joue alors un rôle important dans la rupture avec le Vatican et la séparation de l’Eglise et de l’Etat. A ce poste, il se fait beaucoup d’ennemis en s’opposant en permanence aux amiraux, qu’il refuse de recevoir et qu’il ne consulte jamais. Il suspend le programme d’équipement de son prédécesseur, soutient les ouvriers, les marins et les officiers mariniers contre les officiers de marine, affirme son opposition aux grosses unités de combat et entend briser les « féodalités militaires » en démocratisant la marine. Il lance cependant la construction de plusieurs torpilleurs et de quelques sous-marins, mais supprime le maigre du vendredi saint sur les navires, qu’il n’hésite pas à rebaptiser Ernest-Renan ou Démocratie. Son manque d’organisation et d’efficacité est mis en lumière par la première grêve des arsenaux déclenchée au lendemain même de l’octroi de la journée de huit heures. Ce régime désastreux ne sera pas rattrappé avant 1914. La flotte entrera en guerre avec un lourd retard. Symbole du radicalisme, il reste un conseiller écouté du président du Conseil. Il décèdera à Paris le 4 juin 1915.
BAQUIAST (Paul) : Une dynastie de la bourgeoisie républicaine : les Pelletan, Paris, L’Harmattan, 1996.
TOUROUDE (Georges) : Deux républicains de progrès : Eugène et Camille Pelletan, Paris, L’Harmattan, 1995.
PELLETAN (Pierre, Clément, Eugène), 1813-1884 : Écrivain, journaliste, homme politique. Né à Saint-Palais-sur-Mer (Charente-Inférieure) le 29octobre 1813, Eugène pelletan est, depuis 1864, député républicain de Paris au Corps législatif. En 1870, il est membre du gouvernement de la Défense nationale du 4 septembre 1870 au 17 février 1871. Il est chargé des ambulances et de la garde nationale durant le siège de Paris, chargé des ambulances et de la garde nationale durant le siège de Paris. Il s’occupe aussi de l’Instruction publique et des Cultes. En 1871, il est député des Bouches-du-Rhône à l’Assemblée nationale, siégeant au groupe de l’extrême-gauche avec Louis Blanc. En 1876, il est sénateur des Bouches-du-Rhône. En 1879, il fut nommé vice-président du Sénat. « Cœur généreux, esprit nébuleux » selon ses adversaires, il meurt à Paris le 13 décembre 1884.
BAQUIAST (Paul) : Une dynastie de la bourgeoisie républicaine : les Pelletan, Paris, L’Harmattan, 1996.
TOUROUDE (Georges) : Deux républicains de progrès : Eugène et Camille Pelletan, Paris, L’Harmattan, 1995.
PELLOUTIER (Fernand), 1867-1901 : Syndicaliste. Né à Paris le 1er octobre 1867 dans une famille de la bourgeoisie nantaise, Fernand Pelloutier, à l’âge de douze ans, suit son père fonctionnaire des postes nommé à Saint-Nazaire. Interne d'une pension religieuse, il tente deux fois de s'échapper. Il en est finalement chassé en 1882 pour avoir écrit un roman anticlérical. Il entre alors au collège de Saint-Nazaire où il se révéle un élève brillant, mais irrégulier et fantaisiste. En 1885, il échoue au baccalauréat. Il se consacre alors au journalisme, collabore avec Aristide Briand à la Démocratie de l'Ouest et à différents journaux, fonde des revues...
C'est au cours des années 1888-1889 que se manifeste, pour la première fois, ce lupus facial d'origine tuberculeuse qui devait finalement le terrasser une dizaine d'années plus tard. Un repos de quelques mois au bord de la mer semble lui rendre la santé. De retour à Saint-Nazaire à l'automne 1889, il se jette dans la bataille électorale et soutient Aristide Briand, candidat républicain radical aux élections législatives. Fernand Pelloutier, qui avait surestimé ses forces, voit son état s'aggraver. Il se résoud alors à l'inaction durant deux années.
Fernand Pelloutier est à la fois journaliste et militant du Parti ouvrier français de Jules Guesde. Il se sépare bientôt de ce dernier et du marxisme car il se proclame « l’ennemi irréconciliable de tout despotisme moral ou matériel, individuel ou collectif, c'est-à-dire des lois et des dictatures (y compris celle du prolétariat) » Il évolue donc vers l’anarchisme libertaire, préconisant comme moyen d’action le grêve générale. En juillet 1891, à peu près remis, il va passer quelques mois à la campagne et, en janvier 1892, revient à Saint-Nazaire où il accepte les fonctions qu'on lui offre de rédacteur en chef de la Démocratie de l'Ouest. Parallèlement, il est attiré par les questions économiques et contribue à la fondation de la Bourse du Travail de Saint-Nazaire. En 1892, il publie un mémoire intitulé De la révolution par la grêve générale.
Les 3, 4 et 5 septembre 1892, il participe à un congrès régional ouvrier (possibiliste) de l'Ouest. Il s'y était préparé avec soin et avait déposé une « proposition de grève universelle » grève qui, pacifiquement et légalement, « même limitée à une période relativement restreinte, conduirait infailliblement le Parti ouvrier au triomphe des revendications formulées dans son programme ».
Le congrès ayant pris en considération cette proposition, Fernand Pelloutier s'efforçe de convaincre Jules Guesde de la justesse de son point de vue. Il échoue et l'affrontement ultime se produit à Nantes en septembre 1894 au 6e congrès national des syndicats. Vaincus, les guesdistes se retirent, abandonnant la place aux adeptes de la grève générale.
Fernand Pelloutier qui, à la suite de sa polémique avec Guesde, avait démissionné du Parti ouvrier français, était venu s'installer avec sa famille à Paris fin 1892-début 1893, son père ayant obtenu son changement. Son évolution spirituelle avait fait de lui un anarchiste qui s'ignorait, encore qu'il se montrât alors hostile à des hommes comme Tortelier et Émile Pouget, de même qu'à la " secte ravacholienne " et condamnât le " verbiage révolutionnaire ", " la gesticulation irresponsable " et " la propagande par le fait " (La Démocratie de l'Ouest, 1892). À Paris, la fréquentation de quelques libertaires marquants lui révéla sa propre conception du monde qui était celle d'un certain anarchisme ou mieux du syndicalisme révolutionnaire, doctrine qui sera " codifiée " dix ans plus tard au congrès d'Amiens.
En 1895 qui le vit devenir secrétaire général de la Fédération nationale des Bourses du Travail, Fernand Pelloutier définit ainsi sa position dans un article " L'Anarchisme et les syndicats ouvriers " que publièrent les Temps Nouveaux le 20 octobre.
" Je sais -- écrit Pelloutier -- nombre d'anarchistes qui, par un préjugé jadis fondé d'ailleurs, se tiennent à l'écart des syndicats et, le cas échéant, les combattent, parce que pendant un temps cette institution a été le véritable terrain de culture des aspirants députés ". Mais, depuis deux ans, une évolution s'est produite et deux raisons ont motivé ce passage des syndiqués de la conception réformiste à la conception révolutionnaire. La première résulte de l'application, à partir de novembre 1892, des lois sociales promises depuis bien longtemps. Une loi qui se proposait pour but la protection de la femme et de l'enfant par la réduction du temps de travail eut pour conséquence la réduction des salaires dans certaines entreprises, le lock-out et l'extension du travail à domicile dans d'autres, bref se traduisit dans l'ensemble par une aggravation de l'exploitation. Les syndiqués pensèrent alors que la réduction de la durée du travail devait s'accompagner de la réglementation du prix du travail par de nouvelles lois. Mais ils constatèrent alors qu'une telle réglementation était immanquablement suivie d'une augmentation correspondante ou supérieure du coût de la vie. Dès lors, ils renoncèrent à faire appel à l'État et songèrent à faire leurs affaires eux-mêmes.
L'expérience leur apprit également qu'ils devaient être unis pour être victorieux mais " que leur propre division avait une cause plus élevée que la division des politiciens et que l'une et l'autre résultaient... de la politique ". Ils décidèrent alors " que dorénavant les agitations politiques leur resteraient étrangères, que toute discussion, autre qu'économique, serait impitoyablement proscrite de leur programme d'études et qu'ils se consacreraient tout entiers à la résistance contre le capital ".
Le terrain était prêt pour l'entrée des anarchistes dans les syndicats, et cette entrée eut un double résultat : " Elle apprit d'abord à la masse la signification réelle de l'anarchisme, doctrine qui, pour s'implanter, peut fort bien (...) se passer de la dynamite... individuelle : et, par un enchaînement naturel d'idées, elle révéla aux syndiqués ce qu'est et ce que peut devenir cette organisation corporative dont ils n'avaient eu jusqu'alors qu'une étroite conception ".
Pelloutier va développer ensuite une thèse qui montre que, pour lui du moins, le syndicalisme représente -- dès 1895 -- toute l'anarchie.
" Personne ne croit ou n'espère que la prochaine révolution, si formidable qu'elle doive être, réalise le communisme anarchique pur. Mais l'état transitoire à subir doit-il être nécessairement, fatalement, la geôle collectiviste ? Ne peut-il consister en une organisation libertaire limitée exclusivement aux besoins de la production et de la consommation, toutes institutions politiques ayant disparu ?...
" Or qu'est-ce qu'un syndicat ? Une association, d'accès ou d'abandon libre, sans président, ayant pour tous fonctionnaires un secrétaire et un trésorier révocables dans l'instant, d'hommes qui étudient et débattent des intérêts professionnels semblables. Que sont-ils, ces hommes ? Des producteurs, ceux-là mêmes qui créent toute la richesse publique. Attendent-ils pour se réunir, se concerter, agir, l'agrément des lois ? Non ; leur constitution légale n'est pour eux qu'un amusant moyen de faire de la propagande révolutionnaire avec la garantie du gouvernement, et d'ailleurs combien d'entre eux ne figurent pas et ne figureront jamais sur l'Annuaire officiel des syndicats ! Usent-ils du mécanisme parlementaire pour prendre leurs résolutions ? Pas davantage ; ils discutent et l'opinion la plus répandue fait loi, mais une loi sans sanction, exécutée précisément parce qu'elle est subordonnée à l'acceptation individuelle -- sauf le cas, bien entendu, où il s'agit de résister au patronat. Enfin, s'ils nomment à chaque séance un président, un délégué à l'ordre, ce n'est plus que par l'effet de l'habitude, car une fois nommé, ce président est parfaitement oublié et oublie fréquemment lui-même la fonction dont ses camarades l'ont investi. Laboratoire des luttes économiques, détaché des compétitions électorales, favorable à la grève générale avec toutes ses conséquences, s'administrant anarchiquement, le syndicat est donc bien l'organisation à la fois révolutionnaire et libertaire qui pourra seule contrebalancer et arriver à détruire la néfaste influence des politiciens collectivistes.
" Supposons maintenant que, le jour où éclatera la révolution, la presque totalité des producteurs soit groupée dans les syndicats ; n'y aurait-il pas là, prête à succéder à l'organisation actuelle, une organisation quasi libertaire, supprimant de fait tout pouvoir politique, et dont chaque partie, maîtresse des instruments de production, réglerait toutes ses affaires elle-même, souverainement et par le libre consentement de ses membres ? Et ne serait-ce pas l'association libre des producteurs libres ? "
De 1895 à sa mort en 1901, Fernand Pelloutier fut véritablement l'âme de la Fédération des Bourses et il est difficile de résumer son action. Le labeur écrasant qui fut le sien -- multiplication de tous les services des Bourses du Travail, et en particulier des services d'éducation, création d'une revue au titre si évocateur, L'ouvrier des deux Mondes, le 1er février 1897, qu'à partir de juin 1898, et durant treize mois, il confectionna intellectuellement et matériellement, collaboration à des journaux et revues... -- aggrava considérablement son état. En septembre 1898, il revint exténué du congrès de Rennes. En janvier 1899, il s'installa dans un petit pavillon aux Bruyères de Sèvres, mais, déjà, il était condamné. En juillet, ses jours étaient mis en danger par une hémoptysie qu'il finit cependant par surmonter. Il vivait dans une gêne extrême, et un ami, Georges Sorel, ira trouver Jaurès. Ce dernier sollicita A. Millerand, ministre du Commerce, et obtint pour Fernand Pelloutier un emploi d'enquêteur temporaire à l'Office du travail. L'année 1900 ne fut pour le malade qu'un douloureux calvaire. Il trouva cependant encore la force d'assister au 8e congrès de la Fédération des Bourses qui se tint à Paris en septembre. Il en profita, dans une réplique au délégué de Lyon, pour montrer que le poste qu'il avait accepté à l'Office du travail ne le liait en aucune façon au gouvernement, et qu'il avait conservé sa complète indépendance. Mais Fernand Pelloutier était physiquement à bout ; il s'alita et ne se releva plus. Les quelques mois qui lui restaient à vivre ne furent pour lui qu'une lente et dure agonie. Il mourut le 13 mars 1901.
Avant tout constructeur et éducateur dans l'esprit de ce que sera le syndicalisme révolutionnaire, Fernand Pelloutier fut plus qu'un libertaire en milieu ouvrier, en ce sens que, plongé dans un monde qui voyait s'affronter sous couvert de prises de position syndicales les conceptions étroites de sectes politiques, il fut l'homme hors parti susceptible de réaliser l'union ou, du moins, celui qui permit l'équilibre. " Placé en dehors de nos haines politiques, il est le plus apte à tenir la balance égale entre tous les délégués ", disait de lui, le 21 octobre 1897, un membre du comité fédéral qui n'était pas de ses amis " politiques " ; il fut approuvé à la quasi-unanimité. Fernand Pelloutier disparaissait à Sèvres (Seine-et-Oise) le 13 mars 1901
JULLIARD (Jacques) : Fernand Pelloutier et les origines du syndicalisme d'action directe, Paris, Le Seuil, 1971
MAITRON (J) : Le Mouvement anarchiste en France, Paris, F. Maspéro, 1975.
Deux ans plus tard, il devient secrétaire de la Fédération des Bourses du Travail et ses idées se propagent à travers les multiples syndicats locaux.
; secrétaire adjoint en 1894, secrétaire général en 1895 de la Fédération nationale des Bourses du Travail constituée à Saint-Étienne en février 1892 ; secrétaire général de la Chevalerie du Travail française, juin 1898-septembre 1899.
PENANCIER (Eugène) : 1873-1955 : Avocat et homme politique. Né à Bray-sur-Marne (Seine-et-Marne) le 4 février 1873, Eugène Penancier devient avocat puis magistrat et conseiller à la Cour des comptes. Président de la commission de législation à la Chambre, il est nommé, du 31 janvier au 25 octobre 1933 et du 30 janvier au 8 février 1934, vice-président du Conseil et ministre de la Justice dans les deux cabinets Daladier. Il s’occupe notamment de la réglementation des différents types de baux et des loyers. Très en retrait par rapport aus troubles du moment, il décide, avec le président du Conseil, des diverses sanctions judiciaires consécutives à l’affaire Stavisky. Il décèdera à ? le 4 juillet 1955.
PENANSTER (Charles, Marie, Pierre Huon de), 1832-1901 : Ecrivain et homme politique. Né à Lannion (Côtes-du-Nord) le 11 octobre 1832, Penanster est le représentant des Côtes-du-Nord à l’Assemblée nationale de 1871 à 1876 puis député de 1876 à 1881 sur les bancs de la droite. Sénateur de 1881 à sa mort, il demande, en 1889, la restitution au culte de l’Eglise Sainte-Geneviève – le Panthéon – et publie Une conspiration en l’an XI et en l’an XII. Il décède à Ploubezre (Côtes-du-Nord) le 31 mai 1901.
PERCIN (Alexandre), 1846-1928 : Général et homme politique. Originaire de Nancy ce polytechnicien fait une brillante carrière militaire dans l’artillerie. Le général André, connu dans le cadre de l’affaire des fiches, l’a pris comme chef de son cabinet lorsqu’il était ministre de la Guerre. Mis à la retraite d’office, ce farouche républicain fait cmpagne cntre la loi des trois ans. Candidat radical en 1914, il est rappelé en activité au début de la Première Guerre mndiale où il reçoit le cmmandement de la 1ère Région. Après la guerre, il participe à la campagne pacifiste.
PÉRET (Raoul), 1878-1942 : Avocat et homme politique. Né à chatellerault (Vienne) le 29 novembre 1878, ce fils de procureur général à la Cour d’Appel de Poitiers devient docteur en droit et avocat. Il est membre du cabinet du garde des Sceaux Guérin et de 1896 à 1902, il est substitut du Procureur de la République à Auxerre et se lance dans la politique. Il en franchit vite les échelons et, en 1902, il est élu député de la Vienne jusqu’en 1928 se consacrant aux questions juridiques.
Du 9 décembre 1913 au 17 mars 1914, il devient sous-secrétaire d’État à l’Intérieur dans le premier cabinet Doumergue, avant de devenir ministre du Commerce et de l’Industrie et des Postes et Télégraphes dans le même cabinet suite à l’affaire Caillaux. Il n’a le temps que de présenter et défendre son budget avant la chute du cabinet le 8 juin 1914. Après sa mobilisation, il est, du 12 septembre au 15 novembre 1917, ministre de la Justice dans le premier cabinet Painlevé Il doit alors faire face aux multiples polémiques sur l’affaire Vigo d’Almereyda, ce responsable de revue financée tour à tour par le précédent ministre de la Justice et par les Allemands Il fait traduire devant les tribunaux le présideny de la cour d’appel de Paris, lui-même très lié avec le directeur du Bonnet rouge. Par ailleurs, il ordonne la perquisition des locaux de l’Action française qui débouche sur un non-lieu. Pourtant, le ministre ne résiste pas aux accusations de manque de fermeté qui lui sont adressées.
Vice-président de la Chambre des députés, il en devient président en 1920, après l’élection de Deschanel à la présidence de la République et demeure à ce poste jusqu’à la fin de la législature en 1924. Le président de la République Millerand le charge en vain de former un nouveau ministère. Il est nommé mininistre des Finances dans le neuvième cabinet Briand du 9 mars au 22 juin 1926, dans une période particulièrement difficile, alors que le franc se déprécie, que la trésorerie de l’État est menacée par une crise de confiance et que la spéculation se déchaîne. Il réussit à faire adopter par le Parlement l’augmentation de la taxe sur le chiffre d’affaires et plusieurs impôts indirects, seul moyen de réduire le déficit budgétaire et donc de défendre le franc. Cependant, les mauvais résultats de la balance des paiements l’obligent à mettre sur le marché les réserves de dollars constituées par Poincaré. Il met sur pied un groupe d’experts charger de trouver des mesures à prendre pour juguler la crise (ces difficultés feront naître le calembour : « Raoul paierait si Raoul pouvait »). L’année suivante, Raoul Péret devient sénateur de la Vienne, siégeant alors sur les bancs de l’alliance démocratique et radicale.
Le 2 mars 1930, André Tardieu l’appelle dans son second gouvernement comme ministre de la Justice, mais les expériences gouvernementales ne lui réussissent décidément pas. C’est le moment où éclate l’affaire Oustric et le développement du scandale révèle qu’en 1926, Raoul Péret avait autorisé la cotation en bourse des actions de la Snia Viscosa, introduites par Oustric, puis était devenu, après son passage au ministère, conseiller juridique de la Banque. Attaqué par la gauche, Raoul Péret, bien que défendu par Tardieu, doit donner sa démission le 17 novembre 1930. Une commission d’enquête est nommée et le 24 juillet 1931, le Sénat, constitué en Haute Cour de Justice, l’acquitte. Mais Péret, découragé, n’agit plus guère. Au renouvellement triennal du Sénat de 1935, il est battu et se retire alors de la vie politique et décèdera à Saint-Mandé (Seine) le 22 juillet 1942.
PERET (Affaire Raoul) :
En 1926, Raoul Péret est ministre des finances dans le cabinet Briand. A la demande du banquier Albert Oustric, il autorise l'introduction à la Bourse de Paris de 500.000 actions d'une société italienne de textile artificiel. Mais ces titres s'effondrent, lésant les acquéreurs français.
Quelques années plus tard, en 1930, Raoul Péret exerce les fonctions de ministre de la justice, dans le gouvernement Tardieu. Informé qu'Albert Oustric est mis en cause dans une procédure judiciaire, il retarde l'inculpation du banquier dont les valeurs sont en train de s'effondrer. Deux semaines plus tard, Albert Oustric est en état de cessation de paiements, entraînant dans sa ruine de nombreux petits épargnants.
A la suite de ces évènements, la Chambre des députés décide, le 21 novembre 1930, la nomination d'une commission d'enquête chargée d'élucider « toute intervention abusive de la finance dans la politique et de la politique dans l'administration de la justice ». Le 25 mars 1931, la Chambre prononce la mise en accusation de Raoul Péret. Le Sénat, constitué en Haute Cour, est compétent pour juger cette affaire. La première audience est fixée au 19 mai. Il est ordonné un supplément d'information qui repousse au 20 juillet l'ouverture des débats au fond.
Le procès débute à cette date et occupe quatre audiences, à l'occasion desquelles Raoul Péret fait valoir, d'une part, que la société de textile dont il a autorisé l'introduction à la Bourse de Paris était, à l'époque, l'une des entreprises les plus florissantes d'Italie, cotée à Londres et à New York et, d'autre part, qu'il a retardé l'inculpation du banquier Oustric dans la seule intention de protéger les épargnants français en évitant d'aggraver, par la mise en œuvre d'une procédure judiciaire, la débâcle menaçant l'établissement financier de ce dernier.
Le 23 juillet 1931 en fin de matinée, après avoir entendu le procureur général, les témoins et les avocats de la défense, le président du Sénat déclare que les débats sont clos. La Haute Cour se réunit en chambre du conseil pour délibérer. A travers les portes, les journalistes perçoivent des éclats de voix et des coups de clochette tentant désespérément de ramener le calme. Ils en déduisent que les délibérations sont mouvementées.
En fin de journée, l'audience publique est reprise. Albert Lebrun, président du Sénat depuis le 11 juin, donne lecture de l'arrêt : la Haute Cour acquitte Raoul Péret, se contentant de condamner moralement les procédés qu'il a employés.
PERFETTI (Camille, Antoine), 1875-1956 : Homme politique. Né à Ciudad Bolivar (Venezuela) le 21 novembre 1875, Camille Perfetti est docteur en médecine, fervent laïc et républicain. Elu député radica socialiste, il se spécialise sur les questions de pensions à la Chambre. Perfetti est remarqué par Bouisson qui lui propose le poste de ministre des Pensions du 1er au 6 juin 1935 dans son unique cabinet. Il décèdera en 1956.
PERGAUD (Louis), 1882-1915 : Né à Belmont (Doubs), le 22 janvier 1882, il se destina à l’enseignement et fut nommé instituteur dans le Doubs. Son premier volume de vers, L’Aube, parut en 1904, et il publia L’Herbe d’avril en avril 1908. Il se révéla poète néo-symboliste et, dans un article signé Callet et paru dans la Revue d’Isis (1919), on lit cette phrase : "Ses poèmes, d’un style savant et travaillé riche d’accents nerveux, d’images neuves, de pensées et de sensations, parfois haletant d’âpres cris, captivent l’esprit et le coeur". L’Eveil du village parut ensuite.
En 1907, Pergaud se fixe à Paris où il est tour à tour employé à la compagnie des eaux, instituteur, et enfin expéditionnaire à la préfecture de la Seine. "En dehors de sa collaboration au Beffroi où furent publiées ses premières oeuvres poétiques, il donna des nouvelles et des poèmes à diverses revues, La Revue littéraire de Paris et de Champagne, La Rénovation Esthétique, l’Essor septentrional, la Revue d’Egypte et d’Orient, la Province, la Nouvelle d’Athènes, Hélios, la Phalange, le Feu et enfin le Mercure de France où parurent, avant d’être éditées à part, La guerre des boutons et les Histoires de bêtes. Il collabora à L’île sonnante "où, dans un article intitulé La Fontaine et la psychologie animale, sans d’ailleurs prétendre diminuer le génie du Bonhomme, il a tenté de détruire la légende d’un La Fontaine psychologue raffiné et scrupuleux observateur des bêtes". Pergaud a publié De Goupil à Margot, couronné par l’Académie Goncourt, La revanche du corbeau (1911), Le roman de Miraut, chien de chasse (1913), La guerre des boutons (1912). Dès ses débuts, sa maîtrise s’affirma ; il s’avéra auteur original, créateur d’un genre nouveau, observateur pénétrant, psychologue de tout premier ordre et écrivain remarquable. Malheureusement, la grande guerre de 1914 devait interrompre brutalement une carrière qui s’annonçait glorieuse. Parti simple soldat, il devint rapidement lieutenant puis, un soir à Marchéville (Meuse), après un rude combat, on ne le revit plus ; tombé dans la mêlée, il fut porté comme disparu le 8 avril 1915.
PÉRI (Gabriel), 1902-1941 :
Né le 9 février 1902 à Toulon (Var), fils du directeur des services techniques des docks de Marseille, Gabriel Péri s‘engage très tôt politiquement sous l’influence de la Grande guerre, de la Révolution russe et de personnalités comme Marcel Cachin ou Paul Vaillant-Couturier. Adhérent des Jeunesses socialistes avant le congrès de Tours, il est secrétaire national des Jeunesses communistes en 1922 et membre du Comité central du Parti communiste de 1924 à 1929, suppléant de 1932 à 1937 puis titulaire. Gabriel Péri devint, en novembre 1924, chef des services de politique étrangère de L’Humanité, fonction qu’il exerça jusqu’au 25 août 1939. Il fut également député de Seine-et-Oise de 1932 à 1940.
Gabriel Péri parvint à échapper aux arrestations de l’automne 1940 et fut condamné par contumace à cinq ans de prison en mars-avril 1940. Contraint de vivre clandestinement, il se consacra à une intense activité journalistique et travailla pour L’Humanité clandestine. Il fut arrêté le 18 mai 1941 et fusillé le 15 décembre suivant. En 1943, Aragon dédia à Gabriel Péri la "Ballade de celui qui chanta dans les supplices" : Et s’il était à refaire/ Je referais ce chemin/ Une voix monte des fers/ Et parle des lendemains.
PÉRICARD (Joseph, Jacques), 1876-1944 : Homme de lettres. Né à Saint-Florentin (Indre) le 10 octobre 1876, Péricard est un soldat héroïque au sortir de la Première Guerre mondiale. C’est a lui que l’on doit le fameux Debouts, les morts ! Il milite pendant l’entre-deux-guerres dans les mouvements d’anciens combattants et dans les milieux nationaux. Il collabore à la presse modérée (Intransigeant, Petite Gironde) ou de droite (Eclair de Nice, Bien Public, Salut Public), et est également le rédacteur en chef de l’Almanach du Combattant. Nommé vice-président de la Légion Française des Combattants, il reçoit la Francisque du Maréchal. Il est tué d’une balle allemande le 19 mars 1944, dans la voiture qui le ramenait au Mont-Dore.
PERNOT (Auguste, Alain, Georges), 1879-1952 : Avocat et homme politique. Né à Besançon (Doubs) le 6 novembre 1879, Georges Pernot, avocat catholique, se fait élire députe, et devient le spécialiste des questions familiales à la Chambre. Du 3 novembre 1939 au 20 février 1930, il est nommé par Tardieu ministre des Travaux publics dans son preier cabinet, poste qu’il conserve du 2 mars au 12 décembre 1930 dans le second cabinet Tardieu. Le président du Conseil lui échoit le fameux plan d’équipement de la nation. Pernot entreprend tout d’abord de doubler la patrimoine national de routes en classant dans la voirie de l’Etat 40.000 Km de voies à grand trafic. Homme de droite au-dessus de toute compromission et fidèle républicain, il se retrouve vice-président du Conseil et ministre de la Justice du 8 novembre 1934 au 6 juin 1935 dans les uniques cabinets Flandin et Bouisson. Nommé ministre du Blocus dans le troisième ministère Daladier, du 13 septembre 1939 au 20 mars 1940, il est considéré comme un temporisateur et est chargé de la Famille française – avec les attributions de l’ancien ministre de la Santé publique – du 5 au 16 juin 1940, lors du remaniement du gouvernement Reynaud. Il est le seul membre du gouvernement à rester indécis quant à l’idée d’armistice. Il décèdera à Besançon le 14 septembre 1962.
PERREAU-PRADIER (Alfred, Pierre, Joseph, Charles), 1885-1964 : Avocat et homme politique. Né à Auxerre (Yonne) le 5 juillet 1885, Pierre Perreau-Pradier, propriétaire viticole en Bourgogne, devient docteur en droit et avocat. Il commence sa carrière politique au cabinet de Paul Doumer à la présidence de la Chambre, puis à celui de Joseph Noulens au sous-secrétariat d’Etat à la Guerre. Devenu profet honoraire, il se fait élire député socialiste en remplacement de son père et s’intéresse de très près à la politique financière et à l’agriculture. Au moment de la crise des années 1930, il préconise le retour à l’équilibre budgétaire par la diminution des dépenses de l’Etat et la mise en place d’une politique de déflationRemarqué par Tardieu, Perreau-Pradier est nommé sous-secrétaire d’Etat aux Dinances du 20 février au 2 juin 1932 dans dans son troisième cabinet puis devient sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil du 8 novembre 1834 au 31 mai 1935 dans l’unique cabinet Flandin. Il décèdera à ? le 24 juillet 1964.
PERONNET (Charles), 1866-1953 : Avocat et homme politique. Attaché au cabinet de ministre en 1894, Charles Peronnet est candidat malheureux au conseil général de l’Allier en 1895 et 1907. Elu député radical-socialiste de ce département en 1906, il est battu en 1910 puis réélu en 1914 et en 1919. Battu en 1924 et 1928, il est entre-temps conseiller général de l’Allier (1919-1928).
PERRET (Auguste), 1874-1954 : Architecte. Né à Bruxelles (Belgique) le 12 février 1874, où son père avait trouvé refuge après avoir participé à la Commune de Paris, il s'initie aux procédés de construction au sein de l'entreprise familiale (son grand-père était maître carrier, son père était appareilleur, puis tailleur de pierre), avant de fonder sa propre entreprise dans laquelle il embauche Charles-Edouard Jeanneret dit Le Corbusier.
Auguste Perret fait ses études à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, où il reçoit l'enseignement de Julien Guadet, l'un des grands théoriciens de l'architecture de son époque. Il doit quitter les Beaux-Arts avant de pouvoir remporter le prix de Rome pour rejoindre l'entreprise familiale. Il y ouvrira plus tard son propre atelier et délivrera un enseignement quelque peu en rupture avec les autres « patrons » de l'École.
Associé à ses frères Gustave et Claude, qui avaient repris l'entreprise de maçonnerie fondée par leur père, il est l'un des premiers à employer le béton armé dans la construction.
Grâce à une réflexion sur les possibilités techniques et formelles de ce nouveau matériau, il arrive à l'idée d'une construction en deux entités fondamentales : la structure portante et les secteurs de remplissage. Il applique au béton des formes et des proportions empruntées à l'art grec et au classicisme français, ainsi que des textures et des surfaces très sophistiquées. Citon parmi ses œuvres : La Chapelle Sainte Thérèse de Montmagny ; immeuble au 25 bis, rue Franklin à Paris (1903), premier bâtiment à l'armature intégralement en béton armé, garage de la Société Ponthieu-Automobiles de Paris (1906) ; cathédrale d'Oran (1908) ; Théâtre des Champs-Élysées (1911-1913) ; église Notre-Dame du Raincy, au Raincy (1922-1923) ; tour d'orientation de Grenoble (1924-1925) ; chapelle Saint-Thérèse de Montmagny (1925) ; immeuble au 51-55 rue Raynouard à Paris (1928-1930) ;siège du service technique des constructions navales de la Marine nationale (1928-1931) ; chapelle de l'Immaculée-Conception à Arcueil (1930) ; immeuble rue Nungesser et Coli (1930) ; arsenal du port de Toulon (1932) ; le mobilier national, Paris (1936) ; le musée des travaux publics à Paris (1936-1938)… Il décèdera le 25 février 1954 à Paris.
ABRAM (Joseph) : Auguste Perret. Anthologie des écrits. Conférences et entretiens, Editions Le Moniteur, Paris, 2006.
ABRAM (Joseph) : Encyclopédie Perret, Monum. Editions du patrimoine et Editions Le Moniteur, Paris, 2002.
BRITTON (Karla) : Auguste Perret, Phaidon, 2001.
COLLINS (Peter) : La Splendeur du béton, Hazan, Paris, 1995
GARGIANI (Roberto): Auguste Perret, Gallimard / Electa, 1994.
LOUPIAC (Claude) : L'architecture moderne en France (Tome 1), Editions Picard, Paris, 1997.
PERRIER (Antoine), 1836-1914 : Avoué et homme politique. Né le 15 avril 1836 à la Rochette (Savoie), Antoine Perrier, maire de Chambéry (Savoie), est élu député de la Savoie de 1889 à 1900 et se spécialise dans les questions judiciaires à la Chambre. Nommé ministre de la Justice du 2 mars au 21 mai 1911 dans le cabinet Monis, il garde le même poste cumulé avec celui de vice-président du Conseil dans le même cabinet jusqu’au 26 juin 1911 après l’accident survenu à Monis sur l’aérodrome d’Issy-les-Moulineaux. Elu sénateur de la Savoie en 1900, réélu en 1919, il meurt en cours de mandat le 7 avril 1914 à Chambéry (Savoie).
PERRIER (Laurent, Léon, Francis), 1873-1948 : Biologiste et homme politique. Né le 1er février 1873 à Tournon (Ardèche), Léon Perrier est biologiste et professeur à l’université de Montpellier. Elu député puis sénateur radical-socialiste de l’Isère, il est remarque par Painlevé qui le nomme ministre des Colonies dans son cabinet du 29 octobre 1925 au 18 juillet 1926. Il garde le même portefeuille dans les trois cabinets Briand qui suivent et dans le quatrième ministère Poincaré. Subissant une campagne contre lui de la part de ses adversaires et démissionne le 6 novembre 1928. Il décèdera vingt ans plus tard à Avignon (Vaucluse) le 24 décembre 1948.
PERRIN (Jean), 1870-1942 : Scientifique et homme politique. Né le 30 septembre 1870 à Lille, Jean Perrin à travaillé sur les questions relatives aux rayons cathodiques et à la charge de l'électron. Il reçoit le prix Nobel de physique en 1926 pour ses travaux sur l'atome. Venu à la politique par le biais de l’affaire Dreyfus, il est un grand admirateur de Jaurès et soutient l’arrivée du Front populaire. Ami de Blum, ce dernier le nomme dans son premier cabinet sous-secrétaire d’Etat à l’Education nationale, chargé des Recherches scientifiques en remplacement de Marie Curie. Dans le second ministère Blum, du 13 mars au 9 avril 1938, il conserve le même poste. Le Palais de la Découverte est créé à son initiative (à l'occasion de l'Exposition Universelle). Il décide la fusion de la Caisse nationale de la recherche scientifique avec l'Office national des recherches scientifiques et des inventions, ce qui conduira à la fondation le 19 octobre 1939 du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Parmi ses nombreux ouvrages, citons : Traité de chimie physique. Les principes (1903), Les preuves de la réalité moléculaire (1911), Les atomes (1913, 1936), Matière et Lumière (1919), Les éléments de la physique (1929), L'orientation actuelle des sciences (1930), Les formes chimiques de transition (1931), La recherche scientifique (1933), Grains de matière et grains de lumière (1935), L'organisation de la recherche scientifique en France (1938). Nommé directeur de l'université française de New York en 1940 et quitte sa chaire de Paris. Il décèdera le 17 avril 1942 à New York.
PÉTAIN (Henri, Philippe, Bénoni, Omer), 1856-1951 : Maréchal et homme politique. Né le 24 avril 1856 à Cauchy-à-la-Tour (Pas-de-Calais), Philippe Pétain est issu d'une vieille famille d'agriculteurs. Il fait ses études dans des collèges jésuites et dominicains à Saint-Omer. Il choisit la carrière des armes et entre en 1876 à l'école militaire de Saint-Cyr. En 1878, il sort avec le grade de sous-lieutenant de chasseurs à pied. Sa carrière militaire est médiocre. Il ne participe à aucune expédition coloniale et exerce des commandements sans éclat dans des garnisons secondaires. Nommé lieutenant en 1883, il entre en 1888 à l'École supérieure de guerre, dont il sort breveté d'état-major en 1890. Il est nommé capitaine la même année.
Il entre en 1901 comme professeur à l'École de guerre. Jugé comme un esprit indépendant, son enseignement est alors opposé à la doctrine militaire de l'état-major général (contre l'offensive à outrance, il propose de privilégier une position défensive s'appuyant sur la puissance de feu). Il s’apprête en 1914, à 58 ans, à prendre sa retraire comme colonel. La Première Guerre mondiale va donner un éclat inattendu à une carrière jusquelà assez effacée.
Au début des hostilités, il se distingue à la tête d’une brigade d’infanterie en Belgique et à Guise, ce qui lui vaut une promotion rapide, puisqu’il est nommé en quelques semaines, général de brigade, de division puis de corps d’armée en 1915 et chef d'état major en 1917. Il combat sur la Marne, en Artois, en Champagne, se faisant remarquer par son souci de prudence et sa volonté de manager la vie des hommes. En février 1916, il est chargé de défendre Verdun contre les assauts allemands et réussit à in culquer à ses troupes la volonté de résister, en dépit des conditions épouvantables de la bataille. En mai 1916, au moment où il est nommé commandant du groupe des armées du Centre, il a acquis dans l’opinion une immanse popularité, il est devenu le « vainqueur d Verdun » l’homme qui, par ses qualités d’organisateur, a brisé tous les assauts allemands en assurant le ravitaillement et l’arrivée des renforts dans le saillant par une judicieuse organisation des transports, et qui a su comprendre que l’artillerie jouerait le rôle décisif dans la bataille. En 1917, après la sanglante et vaine offensive Nivelle du Chemin des Dames, Pétain est nommé commandant en chef de l’armée française avec comme mission de faire face aux mutineries qui éclatent sur le front et de redresser le moral des troupes. Il y parvient, en réduisant au minimum des sanctions, en améliorant les conditions de vie du Soldat et en renonçant aux grandes offensives meurtrières en attendant l’arrivée des chars et des troupes américaines qui permettront à l’équilibre des forces de basculer en faveur des alliés. Prudence décevante pour le gouvernement, le monde politique et l’opinion qui attendent des résultats spectaculaires. C’est Foch et non Pétain qui est nommé en mars 1918, généralissime des armées alliées, Pétain demeurant commandant en chef des armées. Entre les deux généraux, de tempérament opposé, les tensions ne cessent guère, Foch accusant Pétain de pessimisme excessif et de circonspection. Après la victoire, la popularité de Pétain est cependant considérable. Nommé en novembre 1918 maréchal de France, il devient en 1920 vice-président du conseil supérieur de la Guerre, et en 1922 inspecteur général de l’armée. Á ce titre, il est le grand inspirateur de la politique militaire de la France après la guerre. Jugé comme un officier humain qui a su ménager le sang de ses hommes, Pétain gagne en outre la confiance du personnel politique qui le tient pour un républicain, à la diférrence de Foch ou de Lyautey, considérés comme des monarchistes de cœur. En 1925, le cartel des gauches l’envoie au Maroc pour venir à bout de la révolte nationaliste d'Abd-el-Krim, dans le Rif, ce qui cause la démission de Lyautey, résident général. En 1929, il est elu à l'Académie française au fauteuil du maréchal Foch.
En 1931, lorsqu’il abandonne la vice-présidence du Conseil supérieur de la Guerre, il est nommé Inspecteur de la défense aérienne du territoire. Sa popularité est d’autant plus grande à partir des années trente qu’il est bientôt le dernier grand chef survivant de la Première Guerre mondiale. Aussi tous ceux qui rêvent d’instaurer en France un pouvoir fort songent-ils que le Maréchal Pétain doit être ce « chef » dont ils estiment que la France a besoin. C’est ainsi que Gustave Hervé lance en 1935 une campagne sur le thème : « C’est Pétain u’il nous faut ». Mais il paraît acquis que le Maréchal n’encourage nullement ces campagnes. Appelé au gouvernement après les émeutes du 6 février 1934 par Gaston Doumergue, en qualité de ministre de la Guerre. C’est à ce titre qu’il cautionne, pour des raisons budgétaires, la réduction des crédits militaires et il entreprend la construction de la ligne Maginot, fleuron de la politique militaire défensive de la France. On retrouve Philippe Pétain ministre de la Guerre dans l’éphémère cabinet Bouisson en 1935, mais ce gouvernement mort-né n’aura aucune action. Il n’en reste pas moins que Pétain est devenu un symbole. Devant la montée des périls, il demeure le « vainqueur de Verdun », l’homme dont le prestige contraste avec le discrédit croissant du régime. C’est pourquoi en rétablissant les relations diplomatiques avec l’Espagne franquiste, le président du Conseil Édouard Daladier lui propose, en 1939, le poste d'ambassadeur en Espagne afin de négocier la neutralité du régime de Franco en cas de guerre, mission dont il s'acquitte avec succès. C’est de là qu’un télégramme de Paul Reynaud le rappelle le 17 mai 1940, alors que la défaite française est pratiquement consommée, pour occuper la fonction de vice-président du Conseil auprès de Paul Reynaud. Désormais Pétain se sent l’homme indispensable et il s’est donné comme un mentor politique en la personne du juriste maurassien Raphaël Alibert. Face à des hommes politique qu’il méprise, il se pose en expert militaire, bien que la défaite de la France soit largement celle des conseptions qu’il a fait prévaloir comme principal inspirateur de la politique militire française, qu’il s’agisse de la défensive, du rôle d’appoint dévolu à l’arme blindée ou du fait que la ligne Maginot s’arrête à la forêt des Ardennes qu’il déclarait infranchissable. Aux chars et par où les blindés de Gudérian devaient affectuer leur percée le 13 mai 1940. La défaite assurée en métropole, il est le chef de file des ministres qui appuient le général Weygand pour refuser une capitulation qui permettrait au gouvernement de poursuivre le combat en Afrique du Nord, mais qui aurait l’inconvénient à ses yeux de faire reconnaître par les militaires une défaite qu’il entend imputer aux hommes politiques et spécialement à la gauche du Front populaire. Aussi sa solution est-elle celle de l’armistice. Paul Reynaud, opposé à l'armistice, démissionne et Lebrun demande à Pétain, le 16 juin, de constituer un nouveau gouvernement. Le soir même, il s’adresse à l’ennenmi pour demander les conditions d’armistices, non sans révenir les fRançais par un message dans lequel il fait retomber la responsabilité de la défaîte sur « l’esprit de jouissance », « les revendications », et les insuffisances de la natalité, de l’armement, des alliés, ne soufflant mot d’une infériorité stratégique dont l’État-major et son inspirateur pourraient être à quelque degré responsables. Pendant que pétain se laisse imposer sans discussion un armistice draconien le 25 juin 1940, deux de ses ministres, Pierre Laval et Raphaël Alibert, préparenet le renversement du régime. La mise à mort de celui-ci, le 10 juillet 1940, est obtenu de l’Assemblée nationale qui, par 569 voix contre 80 et 17 abstentions, met fin à l’existence de la IIIème république par le vote du texte qui donne tous pouvoirs au Maréchal Pétain à l’effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l’État français. Le « maréchal républicain » vient d’étrangler « la gueuse », provoquant ainsi la « divine surprise » de Maurras. Le marécha Pétain a alors 84 ans. Continuant sa carrière pendant l’Occupation, il est jugé en juillet 1945 et condamné à la peine capitale. Grâcié par le général de Gaulle, il est enfermé d’abord au fort du Pourtalet, puis à l’île d’Yeu où il meurt en juillet 1951.
FERRO (M) : Pétain, Paris, Fayard, 1987.
PLUMYÈNE (J) : Pétain, Paris, Éditions du Seuil, 1964.
PETIT (Édouard), 1858-1917 :
Né à Marseille (Bouches-du-Rhône) le 17 mars 1858, Édouard Petit est issu d’un milieu de petite ou moyenne bourgeoisie. Il fait ses études au lycée de Marseille puis à la faculté de lettre d’Aix-en-Provence. Licencié ès-lettres en 1881, admissible à l’École Normale supérieure en 1882, il devient agrégé de l’enseignement secondaire spécial en 1883, puis docteur ès-lettres en 1887 avec une thèse principale d’histoire consacrée à Andrea Doria, un amiral condottiere du XVIème siècle. D’abord maître auxiliaire pendant un an au collège Rollin, Édouard Petit est nommé après l’agrégation, professeur de l’enseignement spécial à Nimes. Á partir de 1886, il exerce à Paris au lycée Janson-de-Sailly, toujours dans l’enseignement spécial (devenu en 1891 enseignement moderne). C’est là qu’il se met déployer une grande activité au service de l’éducation populaire, écrivant ses premiers articles en faveur de l’enseignement secondaire (où il se place résolument du côté des « modernes »), du réveil des conférences populaires et des cours d’adultes, ou pour appeler de ses vœux la formation de mutualités et de patronages scolaires. Cette activité journalistique le fait rapidement connaître. Dès 1892, Jean Macé lui propose d’entrer en Conseil général de la Ligue de l’enseignement, ce qu’il accepte, inaugurant ainsi une étroite collaboration avec cette association dont il devait profondément influencer la réflexion et l’action.
En 1895, année de grande effervescence pour la Ligue, Édouard Petit – sur la probable recommandation de Ferdinand Buisson – est chargé le 9 mars par le ministre de l’Instruction publique, Raymond Poincaré, d’une mission officielle ayant pour objet l’organisation et la propagation des cours d’adultes et des conférences populaires. Le 31 août, au Havre, il est le rapporteur général du congrès des sociétés d’instruction populaires laïques, qui marque, avec les congrès de la Ligue à Nantes (août 1894) et à Bordeaux (septembre 1895), le coup d’envoi décisif du mouvement péri et poscolaire, grâce à l’action conjointe de l’initiative privée et des pouvoirs publics. La mission confiée à Édouard Petit est renouvelée par tous les successeurs de Poincaré. Comme cette lourde enquête annuelle perturbe le service d’enseignant de Petit à Janson-de-Sailly, son ami Léon Bourgeois, devenu ministre de l’Instruction publique, le nomme en août 1898 inspecteur général hors cadre pour l’enseignement primaire ; il est nommé inspecteur général en titre en avril 1900.
Dans cette fonction officielle, il se consacre entièrement à l’impulsion et au contrôle des œuvres postscolaires. Pendant 22 ans, Édouard Petit rédige chaque année un volumineux rapport à la suite de ses tournées d’inspection. Cette série, publiée au Journal officiel, est une mine d’informations pour les historiens. Il s’y y intéresse à la totalité des œuvres existantes et en publie les statistiques (cours d’adultes, conférences, patronages, sociétés d’anciens élèves, mutualités, universités populaires, société de gymnastique, etc.), prodigue des encouragements aux acteurs, pointe les insuffisances et suggère quantité d’améliorations de détails. Il n’a garde d’oublier les instituteurs dont il sait combien la collaboration est précieuse. Au fils des années, on le voit s’engager nettement en faveur de l’obligation de l’enseignement postcolaire pour les adolescents, sans cesser de préconiser l’engager volontaire dans les œuvres elles-mêmes.
Vice-président de la Ligue de 1899 à sa mort, Édouard Petit incarne un « solidarisme pratique » né dans le sillage de Léon Bourgeois et des théoriciens laïques de l’idée de solidarité, voyent dans l’essor de la vie associative le cadre même de « la jeune démocratie qui s’organise ». Conférencier distingué et toujours sur la brèche, il intervient dans de très nombreux congrès locaux, nationaus ou à l’étranger, produisant quantité de communications sur l’éducation populaire et la pédagogie. Il a d’importantes responsabilités dans le mouvement mutualiste, d’abord comme compagnon de Jean-Cyrille Cavé, l’inspecteur des mutualités scolaires publiques (fondée en 1906) ; il contribue à la fondation de la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) en 1902, dont il est nommé vice-président d’honneur. Il est aussi vice-président de la Société nationale des conférences populaires et patronne directement de nombreuses associations : Société des universités populaires, Mission laïque, Groupe français pour l’arbitrage entre les nations, Association d’études pour l’orientation professionnelle, etc. Il est également franc-maçon.
Son activité de plume au service de l’éducation populaire s’est poursuivie jusqu’au bout, surtout dans la presse pédagogique où il est notamment le collaborateur régulier du Journal des instituteurs, de la Revue pédagogique, et du mensuel destiné aux cours d’adultes, Après l’école. Il inspire en 1898 la création de l’Association des membres de la presse d’enseignement. Il donne également de nombreux articles surtout dans les journaux politiques de tendance radicale comme Le Mot d’Ordre, Le Radical, L’Événement, L’Action… et devient en 1900 le directeur littéraire de l’Écho de la semaine. Certaines de ses chroniques journalistiques (ainsi que des rapports de congrès) sont réunis dans les ouvrages qui jalonnent sa carrière : Alentour de l’École (1890), L’École moderne (1892), De l’École au régiment (1894), Chez les étudiants populaires (1898), L’École de demain (1902), La Vie scolaire (1907), Autour de l’éducation populaire (1908), La Mutialité scoalier et la Commune (1909), De l’École à la guerre (1916). Cet homme débordant d’énergie trouve encore le moyen d’écrire des manuels scolaires, plusieurs biographies historiques (Étienne Marcel, Eugène Pelletan, Dupleix, Garnier, Mignet) et de fonder L’Histoire universelle des pays et des peuples, dont il veut faire peuvre de vulgarisation. Il est également l’auteur d’une biographie de Jean Macé publiée après sa mort.
Édouard Petit est décédé à Perpignan (Pyrénées Orientales) le 19 février 1917 lors d’une tournée d’inspection des œuvres postscolaires. En 1910, il était devenu Officier de la légion d’Hinneur dans le cadre de la promotion du monument Jules Ferry.
BENNET (J) : Biographies de personnalités mutualistes XIXème-XXème siècles, Paris, Éd de la Mutualité francaise, 1987.
MARTIN (J-P) : La Ligue de l’enseignement et la République des origines à 1914, Thèse IEP, Paris, 1992.
PETIT MARSEILLAIS (Le) : Quotidien régional de nuance centriste paraissant à Marseille de 1868 à 1944. Son directeur dans l’entre deux guerres est G. Bourrageas. Léon Bancal, ancien président du Cercle Jacques Bainville de Marseille en est le rédacteur en chef. Répandu dans une vintaine de départements, ce journal a une influence considérable. Ayant continué à paraître pendant la guerre, il est taxé de pétinismeet interdit à la Libération.
PETIT PATRIOTE (Le) : Journal catholique et royaliste fondé en 1904 par Octave Cambon, qui le cède 25 ans plus tard à J.-Robert Lefèvre, un de ses confrères de l’Association de la presse monarchique et catholique et départements. Cet hebdomadaire est, audébut, surtout au cours des années qui précèdent la Première Guerre mondiale, l’organe de propagande populaire le plus répandu des feuilles de cette tendance : il donne alors, chaque semaine, un tract-affiche que nmbre de ses lecteurs placardent sur les murs de leur localité. Le Petit Patriote disparaît en 1929.
PETIT PROVENÇAL (Le) : Quotidien régional d’union des gauches paraissant à Marseille. Fondé en 1876, il succède en quelque sorte à La Jeune République et est, pendant près de trois-quarts de siècle, le journal de gauche et de la maçonnerie dans le Midi de la France. Son directeur, le sénateur Vincent Delpuech, administre en même temps Le Radical . A la Libération, son imprimerie est occupée par les FFI et, à sa place, paraît Le Provençal.
PETSCHE (Maurice, Eugène, Jean), 1895-1951 : Juriste et homme politique. Né à Paris le 1er décembre 1895, Maurice Petsche, après des études de sciences économiques et financières, devient docteur en droit et entre à la Cour des comptes comme auditeur en 1920. Attaché au cabinet de Louis Loucheur en 1921, ministre des régions libérées, il participe à la conférence de Londres sur les réparations et négocie les accords de Wiesbaden avec le ministre allemand de la reconstruction (1921). En 1925, il est élu député des Hautes-Alpes (gauche démocratique et radicale indépendante), mandat qu’il conserve jusqu’à la Guerre, il devient en même temps conseiller général du canton de Guillestre (Hautes-Alpes), à partir de 1928. Sous-secrétaire d’État à la Guerre dans le premier gouvernement Tardieu du 3 novembre 1929 au 20 février 1930, il devient ensuite sous-secrétaire d'Etat aux Finances dans le second gouvernement Tardieu du 2 mars au 13 décembre 1930.
Sous-secrétaire d'Etat à l’Instruction publique et aux Beaux-Arts dans les trois gouvernements successifs Laval du 27 janvier au 19 février 1932, il devient sous-secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil dans le gouvernement André Tardieu du 20 février au 3 juin 1932 puis est nommé ensuite sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères du 20 février au 2 juin 1932 dans le troisième ministère Tardieu. Continuant sa carrière politique après la Libération, il décèdera à Paris le 16 septembre 1951.
PEUGEOT (Jules-André), 1893-1914 :
Jules-André Peugeot est né à Étupes, dans le Doubs, le 11 juin 1893. Issu d'un milieu modeste, il se destinait à la carrière d'instituteur, lorsqu'il partit faire son service militaire, au 44e R.I. de Lons-le-Saunier. A l'été 1914, il est caporal (depuis le mois d'avril) et prépare le concours des officiers de réserve. Son régiment faisant partie des troupes de couverture, il a pour mission de surveiller la frontière franco-allemande, en cas de tension entre les deux pays. Fin juillet, à la suite d'une rapide escalade enclenchée à la suite de l'assassinat de l'archiduc d'Autriche François-Ferdinand le 28 juin précédent, celle-ci est à son comble. Le 30 juillet, pour tenter d'apaiser le gouvernement allemand, la France décide de reculer d'une dizaine de kilomètres ses troupes placées sur la frontière. C'est ainsi que les postes du 44e R.I. installés en avant de Delle, aux confins de la Suisse, du Reich allemand et de la France, doivent se replier sur Delle et Grandvillars.
Jules-André Peugeot, qui commande une escouade de la 6e compagnie du 2e bataillon, suit le mouvement général avec ses hommes, pour venir prendre position dans le village de Joncherey (au sud-est du Territoire de Belfort, 3 kilomètres au nord de Delle). A la sortie sud-est du bourg, il a pour mission de surveiller la route de Faverois. Son poste est installé près de la ferme de la famille Docourt, à 500 mètres du bourg dans lequel stationne un escadron du 11e Dragons. Il est couvert par une sentinelle postée 40 mètres plus loin.
Le dimanche 2 août, premier jour de la mobilisation générale, prévue pour midi, la guerre n'est pas encore déclarée mais chacun reste sur ses gardes. Peu avant 10 heures ce matin-là, la fille des Docourt, âgée de 9 ans, vient signaler au caporal Peugeot, qui est en train de se laver les mains avant de se mettre à table (on vient juste d'apporter la soupe pour son escouade), qu'elle vient d'apercevoir des cavaliers "prussiens" en allant chercher de l'eau à la source voisine. De toute évidence, ce détachement de huit hommes du 5e Chasseurs à Cheval de Mulhouse, qui progresse vers Jocherey en venant de Faverois a violé la frontière française et, profitant de la zone récemment laissée libre de troupes, il poursuit une mission d'exploration en profondeur. C'est le sous-lieutenant (leutnant) Camille Mayer qui le commande. Ce jeune officier (il a tout juste vingt ans) est originaire d'Illfurth, au sud de Mulhouse, à une trentaine de kilomètres de là. Il connaît bien la région.
Peugeot se porte au devant des cavaliers allemands qui viennent de bousculer la sentinelle (un coup de sabre entaille sa capote et entame son ceinturon). Il prononce les sommations d'usage. En guise de réponse, Mayer sort son revolver et tire trois fois dans sa direction. La deuxième balle blesse grièvement le caporal, atteint à l'épaule droite (le projectile ressort par la gauche). Les deux autres se perdent. Avant de s'effondrer, le Français a le temps d'épauler son fusil et de faire feu sur Mayer. L'officier est mortellement blessé d'une balle au ventre. Une autre balle, tirée par l'un des hommes de Peugeot, l'atteint à la tête et l'achève.
Retournant sur ses pas, Peugeot s'affaisse devant la maison des Docourt, où il rend l'âme dans l'instant. Il est 10 heures 07. Des dragons, alertés par les détonations, arrivent sur place. Trop tard. Le drame est consommé. Privés de chef, les chasseurs à cheval tournent bride et abandonnent le terrain. Trois chevaux sont blessés et leurs cavaliers désarçonnés. Deux d'entre eux sont capturés dans l'après-midi : l'un par un habitant de Joncherey et l'autre par des dragons. Le troisième le sera deux jours plus tard. Le reste de la patrouille est pris en chasse par un peloton du 11e Dragons, mais il parvient à rentrer sans encombre en territoire allemand.
Le corps du caporal est ramassé par ses quatre hommes, qui le ramènent en arrière et l'allongent sur la paille d'un hangar, à côté du cadavre de Mayer. Il est rendu à sa famille le 3 août, puis inhumé à Étupes (à une quinzaine de kilomètres de Joncherey seulement) le mardi 4, avec les honneurs militaires et en présence d'une foule considérable et émue. C'est qu'en plus de l'enfant du pays, elle pleure le premier mort militaire français de ce qui allait devenir la Grande Guerre. L'officier allemand est enterré le 3 août, aux frais des officiers du 44e R.I., qui tiennent par ce geste à rendre hommage à leur ennemi. Le lendemain, l'Allemagne notifie à la France sa déclaration de guerre...
Le 3 décembre 1915 (!), le caporal Peugeot est cité à l'ordre du régiment, avec la citation suivante : "Peugeot, Jules-André, caporal à la 6e compagnie. Le 2 août 1914, son escouade de garde à l'issue du village de Joncherey, a arrêté et dispersé la première patrouille qui violait le territoire français. A été tué par le lieutenant commandant cette patrouille au moment où il mettait en joue lui-même cet officier et le blessait mortellement".
Que reste-t-il de cet accrochage meurtrier, préliminaire à la grande tuerie ? Quelques reliques tout d'abord, comme le casque du lieutenant Mayer, trophée ramassé par les hommes du caporal Peugeot et aujourd'hui conservé au Musée de l'Armée à Paris. Un monument ensuite, inauguré par le président Poincaré à Joncherey en 1922, puis détruit en juillet 1940 par Allemands.
PEYRON (Alexandre, Louis, François), 1823-1892 : Vice-amiral et homme politique. Né à Marines () le 21 juin 1823, ancien élève de l’Ecole navale et chef d’état major de l’amiral Jauréguibberry, le vice-amiral Alexandre Peyron devient major de la flotte à Toulon. Remarqué par Jules Ferry, celui-ci le nomme ministre de la Marine et des Colonies dans son deuxième ministère du 9 août 1883 au 5 avril 1885. Elu sénateur inamovible en 1881, il décède à Paris le 9 janvier 1892.
PEYRONNET (Albert, Pierre, Camille), 1862-1958 : Avocat et homme politique. Né à Brest (Finistère) le 5 janvier 1862, Albert Peyronnet, fils d’un proviseur de lycée, devient avocat à Montluçon puis avoué à Cosne et enfin juge suppléant et juge d’instruction. Directeur de cabinet de Viviani puis chef de cabinet de Monis, il est élu sénateur de l’Allier en 1912, siègeant à la gauche démocratique jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Rapporteur du budget du Travail pendant cinq ans, il est nommé, du15 janvier 1922 au 28 mars 1924, ministre du Travail dans le second cabinet Poincaré. Il défend avec vigueur la loi sur la journée de huit heures et tente, en revanche, de résister aux pressions du Bureau international du travail qui souhaite voir appliquer cette loi au secteur agricole. Le différent est alors porté devant la Cour internationale de La Haye qui donne tort au ministre. Il décèdera à ? le 18 décembre 1958.
PEYTRAL (Paul, Louis), 1842-1919 : Pharmacien et homme politique. Né le 20 janvier 1842 à Marseille, ce pharmacien est élu député radical des Bouches-du-Rhône de 1881 à 1894, se spcialisant dans les quetsions économiques et financières à la Chambre. Sous-secrétaire d'Etat aux Finances du 15 janvier au 11 décembre 1886 dans le troisième cabinet Freycinet, il obtient alors l’augmentation des retraites des agents des douanes. Il retrouve son banc de député et devient vice-président de la Chambre. Ministre des Finances du 3 avril 1888 au 21 février 1889 dans le gouvernement Floquet, il garde le même poste dans les premier (du 4 avril au 2 décembre 1893), quatrième et cinquième ministères Dupuy et le cabinet Brisson (28 juin 1898 au 21 juin 1899). Il tente alors de faire débuter l’année financière au 1er juillet et d’imposer un impôt sur le revenu. Sénateur des Bouches-du-Rhône de 1894 à 1919, père de Victor Peytral, Paul Peytral décède le 30 novembre 1919 à Marseille.
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PICARD (Émile), 1856-1941 : Mathématicien. Emile Picard est né le 24 juillet 1856 à Paris. Son père est directeur d'une fabrique de soie, mais il décède lors du siège de Paris en 1870. Grâce à l'abnégation de sa mère, Picard peut néanmoins étudier au lycée Napoléon où il se révèle excellent élève, mais bizarrement est peu attiré par les mathématiques.
Ses intérêts changent cependant, et il est reçu second à l'Ecole Polytechnique, et premier à l'Ecole Normale Supérieure. Finalement passionné par les sciences, il opte pour cette dernière, où il prépare l'Agrégation qu'il réussit en 1877. Après divers postes d'assistant à Paris et Toulouse, il devient en 1881 Maître de Conférences à l'Ecole Normale Supérieure. Son nom est déjà célèbre dans le cercle des mathématiciens, car il vient de démontrer un théorème très important et très difficile : toute fonction entière non constante prend chaque valeur une infinité de fois, avec au plus une exception. Ce travail sur les singularités des fonctions holomorphes, complété plus tard par Julia, lui vaut une première nomination pour devenir membre de l'Académie des Sciences. Il est cependant trop jeune, et son élection est reportée en 1889 (il devient en outre Secrétaire perpétuel de cette institution en 1917). En cette année 1881 décidément très riche, il épouse Marie Hermite, la fille de Charles Hermite. Leurs 3 enfants décèderont pendant la Première Guerre Mondiale.
En 1885, Picard devient professeur à la Sorbonne, où il occupe la chaire de calcul différentiel. Là encore, son jeune âge est un gêne (il faut avoir au minimum 30 ans pour occuper un tel poste) et il faut utiliser une procédure astucieuse pour contourner la législation. Plus tard, Picard occupera la chaire d'analyse et d'algèbre, et il exercera aussi à l'Ecole Centrale des Arts et Manufacture (1894-1937) : il y forme à la mécanique plus de 10000 ingénieurs, et est, selon Hadamard, un excellent professeur.
Auteur de nombreux ouvrages théoriques, Émile Picard se passionna également pour la philosophie des sciences et publia plusieurs monographies scientifiques comme L’œuvre de Henri Poincaré (1913), Pascal mathématicien (1924).
Les travaux de Picard sont ardus, et ouvrent la voie à de nouvelles recherches. Il est le premier à utiliser le théorème du point fixe dans une méthode d'approximations successives qui permet de résoudre équations différentielles ou équations aux dérivées partielles. On lui doit également des travaux en géométrie algébrique, comme des recherches plus appliquées sur l'élasticité ou la chaleur. Il est aussi l'un des premiers défenseurs des théories d'Einstein. Son Traité d'Analyse constitua longtemps une référence, et Picard fut aussi philosophe et historien des sciences.
Sa renommée, dépassant largement les frontières, lui vaut d’être membre de nombreuses sociétés scientifiques étrangères et docteur honoris causa de cinq universités. Élu à l’Académie des Sciences en 1889, il en devient le secrétaire perpétuel en 1917. Parmi les distinctions que Picard a reçu, citons qu'il présida le congrès International des mathématiciens, qu'il fut élu membre de l'Académie Française en 1924, et qu'il reçut la médaille d'or Mittag-Leffler en 1937. Il décède à Paris le 11 décembre 1941.
PICARD (Alfred, Maurice), 1844-1913 : Ingénieur et homme politique. Né à Strasbourg (Bas-Rhin) le 21 décembre 1844, Alfred Picard entre à l'Ecole Polytechnique, en 1862, puis à l'École des Ponts et Chaussées. La guerre de 1870 le trouve ingénieur du canal des houillères de la Sarre et du canal des salines de Dieuze. Il est d'abord attaché aux travaux de défense de Metz, puis il prend du service dans l'armée de la Loire. En 1872, il est appelé aux fonctions du contrôle de l'exploitation des Chemins de fer de l'Est et du canal de la Marne au Rhin, qu'il exerce jusqu'en 1879, et au cours desquelles il dirige d'importants travaux.
En 1880, il est nommé directeur du cabinet et du personnel du ministère des Travaux publics, puis président de section au conseil d'État en 1886. Il est rapporteur général de l'Exposition universelle de 1889 et publie à cette occasion un rapport, véritable monument scientifique, qui le désigne pour la direction de l'Exposition de 1900, dont il est le commissaire général. Après la clôture de cette dernière, dont, le succès, quoique contesté, fut cependant très réel, Alfred Picard entreprit la rédaction d'un rapport extrêmement important formant six énormes volumes et intitulé Le bilan d'un siècle, qui est le résultat d'un travail surhumain, attestant une connaissance approfondie de toutes les parties de la science.
Alfred Picard préside la Commission chargée d'étudier les questions d'organisation du réseau de l'Etat, après le rachat de l'Ouest. Quoiqu'il n'a jamais fait de politique et n’est devenu ni député, ni sénateur, sa réputation d'administrateur incomparable le fait appeler au ministère de la Marine, par Clemenceau, du 22 octobre 1908 au 23 juillet 1909 dans son premier cabinet mais il n'y resta pas assez longtemps pour instituer les réformes que l'on attend de lui. La grande question est alors de savoir si la flotte serait capable de remplir son rôle en cas de conflit. Face à l’opposition de certains parlementaires et de plusieurs officiers, il répond par l’affirmative avec conviction. Il relève d’ailleurs de ses fonctions le vice-amiral Germinet qui lui a fait publiquement part de son insuiétude. Son premier souci est d’évaluer le montant du crédit spécial nécessaire à une utilisation optimale de la flotte, mais le chiffre avancé rencontre l’hostilité du ministre des Finanaces et des parlementaires qui décident la constitution d’une commission d’enquête. Celle-ci est lui est fatale et fait chuter en même temps tout le cabinet.
Le 27 février 1912, il était appelé à la vice-présidence du conseil d'État, et c'est dans ces fonctions que la mort le surprend, le 8 mars 1913 à Paris.
PICARD (Louis, Joseph, Ernest), 1821-1877 : Avocat et homme politique. Né à Paris le 24 décembre 1821, Ernest Picard, docteur en droit et avocat au barreau de Paris (1846), est élu député de la Seine de 1858 à 1869, de l'Hérault de 1869 à 1871 et de la Meuse de 1871 à 1875. Membre du gouvernement de la Défense nationale du 4 septembre 1870 au 17 février 1871, il est le premier titulaire du portefeuille des Finances jusqu’au 19 février 1871. Il participe alors aux négociations avec les Allemands avec Favre et s'emploie à financer le paiement de la contribution de guerre. Il supprime le paiement des droits de timbre sur la presse (décret du 5 septembre 1870) et, lorsque le 31 octobre 1871, les membres du gouvernement restent prisonniers à l’Hôtel de Ville par les forces insurrectionnelles, Ernest Picard est le premier à s’échapper pour organiser la libération de ses collègues. De plus, il fait passer sous le contrôle du département le domaine de la Couronne (décret du 10 novembre 1870). Ministre de l’Intérieur du 19 février au 5 juin 1871 dans le premier cabinet Dufaure, il mène une lutte active contre la Commune, introduit des espions et des policiers dans la capitale et en profite pour changer bon nombre de préfets.
Député de la Meuse de 1871 à 1876, conseiller général du Canton de Montiers-sur-Saulx (Meuse, 1873-1877), sénateur inamovibl de 1875 à sa mort, Ernest Picard a été entre temps ambassadeur de France en Belgique (1871-1873), il décède à Paris le 13 mai 1877.
PICARDIE (La) : Journal de droite paraissant à Amiens et fondé en 1911. Maurice Dupont devient son principal rédacteur et, en 1913, son directeur. Journaliste monarchiste militant, Maurice Dupont avait collaboré succéssivement au Mémorial d’Amiens et au Nouvelliste d’Amiens. A la disparition de celui-ci, il entre à La Picardie. Fait prisonnier au début de la Première Guerre mondiale, il subit pendant quarante-neuf mois, une pénible captivité. En février 1919, l’Action française lui confie la direction de la 1ère zone – région du Nord – qu’il réorganise en s’appuyant sur le groupe picard d’Action française. Qu’il a lui même fondé en 1909. La Picardie disparaît pendant la Première Guerre mondiale.
PICHON (Stéphen, Jean, Marie), 1857-1933 : Publiciste et homme politique. Né à Arnay-le-Duc (Côte d’Or) le 10 août 1857, Stephen Pichon, radical, est l’ami et le collaborateur de Clemenceau à La Justice. Élu député de la Seine en 1885, il se fait remarquer à la Chambre par son anticléricalisme et ses opinions d’extrème gauche. Rapporteur du budget des Affaires étrangères dès 1889, il est battu aux élections législatives de 1893 et entre alors dans la diplomatie. Il est successivement ministre plénipotentiaire à Port-au-Prince en 1894, à Rio de Janeiro en 1896, à Pékin en 1897 où il est assiègé par les Boxers. Délivré par les troupes alliées, il prend part aux négociations collectives des puissances avec la Chine en 1900-1901, signe le traité de délimitation de la Guyane française et rétablit les relations diplomatiques avec la République dominicaine. Á cette dernière date, il est nommé résident général à Tunis où il reste cinq ans. Élu sénateur du Jura en 1906, ce franc-maçon commence sa carrière ministérielle quelques mois plus tard lorsque Clemenceau l’appelle aux Affaires étrangères le 25 octobre 1906 et il conserve ce portefeuille sous les gouvernements qui se succèdent jusqu’au 1er mars 1911. Au début de sa carrière ministérielle, il défend la politique coloniale de la France, notamment au Maroc. Il fait occuper Casablanca en novembre 1907 et négocie avec l’Allemagne l’accord sur le Maroc (1909). Il soutient devant le Parlement le fameux emprunt russe de 300.000 francs qui est « conforme aux intérêts nationaux des deux pays ».
Écarté de direction de la diplomatie sous les gouvernements Monis et Caillaux, Pichon retrouve son banc de sénateur et devient rapporteur du budget des Affaires étrangères. Il reviens à son portefeuille de prédilection dans le gouvernement Barthou du 22 mars au 8 décembre 1913. Sa principale activité diplomatique restant la négociation du partage des territoires turcs en Europe.
Après une interruption de quatre ans, il est de nouveau appelé aux Affaires étrangères par Clemenceau dans son second cabinet, du 16 novembre 1917 au 19 janvier 1920. Dans les dernières années difficiles de la Grande Guerre, il doit faire face à la défection de la Russie. Il contribue alors à l’élaboration de l’armistice et du traité de Versailles. Il reste sénateur jusqu’en 1924 et, à cette date, abandonne la vie politique. Il décède à Vers-en-Montagne (Jura) le 8 septembre 1933.
PICOT (Yves, Emile), 1862-1938 : Né à Brest (Finistère) le 17 mars 1862, ce colonel d’infanterie est élu député de la Gironde en 1919. Président du groupe des députés mutilés, Yves picot fonde en 1921 les Gueules cassées. Membre des commissions de l’Armée et des Pensions, il est remarqué par Briand qui le nomme dans son dixième cabinet sous-secrétaire d’Etat à la Guerre, poste qu’il occupe du 23 juin au 18 juillet 1926. Retrouvant son banc de député jusqu’en 1932, il décède à Valette-du-Var (Var) le 19 avril 1938.
PICQUART (Marie, Georges), 1854-1914 : Général et homme politique. Né à Strasbourg le 6 septembre 1854, Georges Picquart est issu d'une vieille famille lorraine composée de magistrats et de militaires. Admis à Saint-Cyr en 1872, il entre, en 1874, à l'École d'État-Major, d'où il sort second. Il fait ses premières armes en Afrique, en 1878, au cours de la campagne de l'Aurès. De 1885 à 1888, il participe à la guerre du Tonkin et obtient, à son retour en France, le grade de commandant. Nommé en 1890 à l'École supérieure de guerre, il y enseigne la topographie jusqu'en 1893 (il a Alfred Dreyfus parmi ses élèves). Il est à cette époque attaché à l'Etat-Major du général de Galliffet, qui lui conserve toujours une grande estime. Doué de capacités intellectuelles considérables (il parle couramment l'allemand, l'anglais, l'espagnol et l'italien, et s'est mis à apprendre le russe), bénéficiant de la confiance de ses chefs, il est alors considéré comme l'un des espoirs de l'armée française.
En octobre-novembre 1894, il participe à l'enquête conduite au sein de l'État-Major, mais sans jouer un rôle de premier plan et assiste ensuite au procès et à la dégradation d'Alfred Dreyfus. Le 1er juillet 1895, il succéde au colonel Sandherr, à la tête du Service des renseignements, et est nommé lieutenant-colonel, le 6 avril 1896. En reprenant l'enquête de son prédécesseur, il acquiert la conviction de la culpabilité d'Esterhazy, mais se heurte à l'hostilité de ses supérieurs, qui l'écartent de son poste à partir d'octobre 1896, en lui confiant une mission d'inspection d'une durée indéterminée en France puis en Tunisie. Son engagement progressif dans la bataille de l'affaire Dreyfus, à partir de l'automne 1897, lui vaut une première arrestation le 13 janvier 1898, puis, après sa mise en réforme (décidée par le conseil d'enquête militaire le 1er février 1898, et promulguée le 26 février), un long emprisonnement de onze mois, du 13 juillet 1898 au 9 juin 1899. Réintégré dans l'armée avec le grade de géneral de brigade le 13 juillet 1906, promu général de division le 28 septembre, il devient peu après ministre de la Guerre dans le premier cabinet Clemenceau (25 octobre 1906-20 juillet 1909). Mis en disponibilité après la chute du cabinet Clemenceau il est nommé le 22 février 1910 à la tête du deuxième corps d'armée, basé à Amiens. C'est dans cette ville qu'il meurt, le 19 janvier 1914, des suites d'une chute de cheval.
PIERRE-ROBERT (Claude-Pierre-Robert, dit), 1875-1957 : Avocat, publiciste et homme politique. Né à Montbrison (Loire) le 17 mai 1875, Pierre-Robert se lance dans la politique en 1910 en devenant attaché du sous-secrétariat d’Etat aux Postes et Télégraphes. Elu en 1914 député de la Loire, il se spécialise dans les questions des Postes, Télégraphes et Téléphones. Réélu député en 1919 et 1924, il s’inscrit au parti radical et radical socialiste. Remarqué par Herriot, celui-ci le nomme sous secrétaire d’Etat au Commerce et à l’Industrie, chargé des Postes, Télégraphes et Téléphones du 14 juin 1924 au 16 avril 1925. Retrouvant son banc de député jusqu’en 1928, il est élu en 1927 sénateur de la Loire jusqu’à la Guerre. Continuant à s’intéresser à la communication, il décèdera à Paris le 29 octobre 1957.
PIERRES DE BERNIS (Henry, François, Jules de), 1842-1902 : Officier et homme politique. Né à Nimes (Gard) le 8 janvier 1842, de Bernis est issu d’une famille de Vivarais. Après ses études au collède de l’Assomption à Nîmes où il a pour professeur Emile Combes, le futur président du Conseil, il choisit la carrière des armes. Le Second Empire disparu, il s’intéresse à la politique et est élu conseiller mnicipal de Nîmes en 1871 et conseiller général du Gard en 1880. Monarchiste et catholique, il prend part aux manifestations organisées contre l’expulsion des Pères Récollets et est traduit devant le tribunal correctionnel qui l’acquitte.
Battu aux élections générales de 1885, il est élu député du Gard en 1889 et siège à l’extrême droite de la Chambre. Ses interventions au Palais-Bourbon mécontente si vivement le ministre de l’Intérieur Constans que celui-ci croit le déconsidérer en produisant une lettre du boulangiste Numa Gilly faisant état de l’alliance de l’aristocratie avec les socialistes révisionnistes nîmois. Cela ne l’empêche pas d’être réélu en 1893 et de poursuivre, à la Chambre, ses attaques contre les politiciens et contre le régime notamment lors de la discussion des fonds secrets en 1894 et de la nomination des parlementaires au Conseil d’administration des chemins de fer de l’Etat. Son altercation avec Jean Jaurès, qu’il traite « d’avocat du syndicat » lors d’une interpellation sur l’affaire Dreyfus en date du 22 janvier 1898, fait grand bruit. Il en vient d’ailleurs aux mains avec le socialiste Gérault-Richard, et le président doit lever la séance pour éviter une bousculade générale. Battu aux élections de mai 1898 et se retire de la vie publique. Il meurt au château de la Marine, près de Nîmes le 16 juillet 1902.
PIÉTRI (François, Sampiero, Sébastien, Marie, Jourdan), 1882-1966 : Homme politique. Né à Bastia (Corse) le 8 août 1882, François Piétri passe son enfance en Égypte où son père exerce les fonctions de conseiller du gouvernement égyptien. Après des études de lettres et de droit, il est reçu en 1906 au concours de l’Inspection des Finances. En 1911, il devient chef de cabinet su président du Conseil Caillaux. Mobilisé en 1914, il est blessé à Verdun en 1916 et devient l’année suivante Directeur des finances du Maroc où il reste jusqu’en 1924. Á cette date, il se fait élire député de la Corse sur une liste de droiteet s’intéresse aux problèmes financiers, à la question des pensions et à celle du Maroc. Devenu ministre des Finances du dixième cabinet Briand en juin 1926, Caillaux appelle François Piétri auprès de lui comme sous-secrétaire d’État, mais le gouvernement tombe en juillet 1926. Réélu en 1928, Piétri commence alors une importante carrière ministérielle dans les gouvernements de centre-droit de la législature 1928-1932. Il est succe-sivement ministre des Colonies des gouvernements Tardieu de novemebre 1929 à décembre 1930, ministre du Budget des cabinets Laval de janvier 1931 à février 1932, ministre de la Défense nationale du troisième ministère Tardieu de février à juin1932. L’arrivée au pouvoir de la majorité de gauche en juin 1932 lui barre un moment la route du ministère, mais dès octobre 1933, cet homme du centre retrouve les postes gouvernementaux dans les équipes qui cherchent à se rééquilibrer vers ce secteur de l’opinion. En octobre 1933, il redevient ministre des Colonies du gouvernement Albert Sarraut. Nommé ministre des Finances du gouvernement Daladier le 30 janvier 1934, il démis-sionne quatre jours plus tard en raison de la révocation du préfet Chiappe par le président du Conseil. Démission qui lui vaut d’entrer le 9 février dans le gouvernement de trêve formé par Gaston Doumergue, cette fois comme ministre de la Marine. Il conserve ce portefeuille dans tous les gouvernements qui se succèdent ensuite jusqu’à la victoire électorale du Front populaire et à la formation du gouvernement Blum en juin 1936. Dans ces fonctions, il accomplit une œuvre considérable de développement de la marine militaire, renouvelant l’escadre des cuirassés français. Réélu en 1936, il est écarté du gouvernement par son opposition au Front populaire. Le 10 juillet 1940, il vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. François Piétri sera nommé par le gouvernement de Vichy ministre des Communications, puis ambassadeur en Espagne. Condamné après la guerre à 5 ans d’indignité nationale, il ne regagne qa France que dans les années 1950, se tenant à l’écart de la vie poltique nationale et décèdera à Ajaccio (Corse) le 17 août 1966.
PILLET (Antoine) : 1857-1926 :
PILLOT (Armand), 1892- : Homme politique. Né à Nantes (Loire-Inférieure) le 20 décembre 1892, Armand Pillot est militant communiste. Élu député de la Seine en 1936, il rompt avec le Parti communiste après la signature du pacte germano-soviétique. Il fait partie de l’Union populaire française, groupe parlementaire des ex-députés communistes. Après son vote favorable à la délégation des pleins pouvoirs au maréchal Pétain, il se retire de la vie politique.
PINELLI (Jean-Noël-François), 1881-1970 : Avocat et homme politique. Né à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) le 31 mai 1881, Noël Pinelli est d’abord avocat puis commissaire en chef de la marine. Conseiller municipal de Paris, il est élu député de la Seine en 1936, inscrit au groupe des indépendants républicains. Remarqué par Paul Reynaud, Pinelli devient sous-secrétaire d’Etat à la Marine marchande dans son unique cabinet du 21 mars au 10 mai 1940. A la chute du cabinet, il retrouve son banc de député jusqu’à la Guerre et décèdera à Paris le 6 février 1970.
PIOCH (Georges), 1873-1952 : Journaliste. Militant socialiste et membre de la SFIO depuis 1915, Georges Pioch est serétaire de la fédération de la Seine du parti en 1920 et rallie le communisme au congrès de Tours. Mais il quitte le parti communiste après le congrès de Marseille en 1922 lorsque sont acceptées les fameuses 21 conditions de Moscou. Il participe alors à la fondation de l’Union socialiste-communiste en avril 1923 qui se propose de refaire l’unité politique de la classe ouvrière, brisée à Tours en 1920. Il en est l’un des dirigeants. Il appartient, par la suite, à la Ligue pour la défense des Libertés publiques, au Comité de Vigilence des intellectuels antifascistes sans cesser d’être foncièrement pacifiste et de dénoncer les boutefeus de 1938-1939. Il collabore dans l’entre-deux-guerres à divers journaux comme L’Humanité communiste ou La Flèche frontiste.
PIPE-EN-BOIS (Georges Cavalier, dit), 1841-1878 : Journaliste. Né à Tours en 1841, élève de l’Ecole polytechnique, puis de l’Ecole des Ponts et chaussées, habitué des brasseries du Quartier latin, il ne tarde pas à acquérir une certaine célébrité. La bizarre conformation de sa figure lui vaut le surnom de Pipe-en-Bois. Après le 4 septembre, il suit Gambetta en province comme secrétaire de la délégation. En mars 1871, il se rallie à la Commune, ui le nomme ingénieur en chef des voies et promenades publiques. Condamnée au banissement, il se réfugie en Belgique. Il décède à Paris en 1878,
PIVERT (Marceau), 1895-1858 : Enseignant et homme politque. Né à Montmachoux (Seine-et-Marne), le 2 octobre 1895 dans une famille de petits paysans républicains, Marceau Pivert est un jeune enseignant, sorti patriote de l'École Normale de Saint-Cloud. Fantassin en 1915, il subit le choc de la guerre, gazé et mutulé à 50%, il est réformé en 1917. Marqué par l'horreur du conflit, il devient progressivement un ardent pacifiste. Après la guerre Marceau Pivert reprend sa fonction d’instituteur puis de professeur de sciences physiques où il s’engage d’abord dans le combat syndical et laïque. Fondateur d’une association de défense des instituteurs anciens combattants (A.G.I.F.A.C.), il appartient au bureau national du Syndicat national des instituteurs de 1931 à 1933 et au comité central de la Ligue de l’enseignement, et adhère à la Ligue des droits de l’homme et à la franc-maçonnerie en 1919. Il s’engage au Parti socialiste français, scission du Parti socialiste-Section française de l’Internationale ouvrière (PS-SFIO) dans l’Yonne, en 1922 puis en 1924, il s’inscrit à la SFIO. Après son bref passage dans la fédération de l’Yonne, il arrive à Paris où il milite dans la fédération de la Seine comme secrétaire de la XVème section, il est membre de la commission exécutive à partir de 1927, secrétaire administratif en 1929-1930, puis membre du bureau fédéral. Au plan national, il prend en 1929, la vice-présidence des Étudiants socialistes, et entre en 1933 à la CAP du parti, où il reste jusqu’en 1937. Marceau Pivert passe pour le lieutenant de Jean Zyromski et devient rapidement avec ce dernier l’un des principaux animateurs de la tendance de gauche, la « Bataille socialiste », (courant marxiste dans la tradition de Jules Guesde), qui refuse toute participation socialiste à des gouvernements conduits par des radicaux.
La crise de février 1934 le propulse sur le devant de la scène. Il est, par ses initiatives et sa combativité, l’un des principaux artisans de la mobilisation antifasciste à l’intérieur de la SFIO, Après la bataille socialiste, il joue un rôle décisif dans l’établissement des contacts qui débouchent sur la signature, le 27 juillet 1934, du Pacte d’unité d’action SFIO-PC. Il pousse les militants à utiliser les moyens modernes de propagande, et crée pour leur usage un service cinématographique. Il constitue le groupement d’autodéfense de la Fédération de la Seine, les TTPS (Toujours prêts pour servir). En septembre 1935, il se sépare de Zyromski, et fonde sa propre tendance, la Gauche révolutionnaire regroupant les militants les plus à gauche de la SFIO. Il refuse d’admettre en effet que la lutte contre le « fascisme international » peut impliquer l’acceptation de l’idée de guerre. En outre, il veut forcer les directions des partis ouvriers à faire œuvre révolutionnaire, par l’appel aux masses et l’action directe. En 1936, il exige la formation d’un « front populaire de combat » déterminé à transformer les structures mêmes du régime. Suite à la victoire du Front Populaire et aux grèves spontanées qui en découle, il exhorte Léon Blum à rompre avec le capitalisme. Mais Blum, méfiant face à cette puissante grève générale, refuse. il écrit dans cet esprit un article resté célèbre sous le titre : « Touts est possible ! » - y compris une « révolution sociale » (mais Pivert ne parle pas de révolution socialiste). L'article, publié dans Le Populaire le 27 mai, a un grand retentissement. Animateur de “ l’équipe ” de cinéma socialiste avec Germaine Dulac et Robert Talpain, Marceau Pivert supervise la production de plusieurs films militants. Quoique chargé de mission à la présidence du Conseil, responsable de l’information par la presse, la radio et le cinéma, il n’accepte ni le légalisme et la timidité du gouvernement Blum, ni le réarmement ni la non-intervention en Espagne. En février 1937, après l’annonce de la « pause » par Blum, Pivert rompt avec lui en mars, par une lettre où il lui dit « Je n'accepte pas de capituler devant le capitalisme et les banques » et critique publiquement l’action des ministres socialistes. Blâmé par la SFIO en avril, elle prononce la dissolution de la Gauche révolutionnaire. Il n’en réussit pas moins à rassembler sur ses thèses 16, 5 % des mandats au Congrès national de Marseille, en juillet 1937, puis à se faire élire secrétaire général de la Fédération de Seine en janvier 1938. En mars et en avril 1938, indigné par les projets de Blum concernant une union nationale, puis par l’attitude du Sénat au second cabinet Blum, il commet d’autres actes d’indiscipline. Frappé de trois ans de suspension de délégation, tandis que sa fédération était dissoute, il est mis en minorité par le Congrès de Royan, en juin 1938. Il quitte alors la SFIO et crée le parti socialiste ouvrier et paysan (PSOP), un parti qui se veut révolutionnaire mais le qui a du mal à trouver sa place entre la SFIO réformiste et le PCF stalinien. De fait, la ligne du parti est assez floue : entre marxisme anti-autoritaire et réformisme radical, il n’a que peu d’adhérents en dehors de Paris, et est accaparé par la question de la guerre. Il approuve les accords de Munich et prêche la « révolution plutôt que la guerre ». Surpris par le conflit au cours d’une tournée aux Etats-Unis, poursuivi en France pour propagande pacifiste, en 1940, le parti est dissout par le gouvernement de Pétain. Il s’exile alors au Mexique, d’où il appelle à une lutte antifasciste sans compromis avec la nationalisme. Retournant en France après la guerre, il continue sa carrière au sein de la SFIO. Il meurt à Paris le 3 juin 1958.
KERGOAT (Jacques) : Marceau Pivert « socialiste de gauche », Paris, Editions de l’Atelier/ Éditions ouvrières, 1994.
JOUBERT (Jean-Paul) : Marceau Pivert et le pivertisme. Révolutionnaires de la SFIO, Paris, Presses de la FNSP, 1977.
GUERIN (Daniel) : Front populaire, révolution manquée, Paris, Julliard, 1963.
PLAN XVII DE LA FRANCE :
La plus grande humiliation qu'eut à subir la France après sa défaite contre Allemagne lors de la guerre franco-prussienne(1870-1871) fut de perdre l'Alsace et la Lorraine, dans l'est du pays. La France s'attendait à entrer une nouvelle fois en guerre avec l'Allemagne, et ses dirigeants militaires élaborèrent une stratégie de guerre destinée à récupérer les provinces perdues. Entre 1911 et 1914, le général Joseph Joffre, chef d'état-major général français, mit au point le plan XVII. Les diverses armées françaises se déploieraient le long de la frontière nord depuis la Suisse jusqu'à la Belgique, et lanceraient une attaque rapide et dévastatrice en Alsace et en Lorraine. Joffre pensait que les Allemands pourraient violer la neutralité de la Belgique dans le but d'attaquer la France, mais il estimait qu'ils ne pourraient pas avancer le long de la Meuse, dans le nord de la France, sans se déployer dangereusement. Les Français avaient également conclu un accord tacite avec les Britanniques, par lequel ces derniers s'engageaient à combler l'absence de troupes françaises le long de la frontière franco-belge. Le plan XVII présentait deux faiblesses majeures. Tout d'abord, Joffre sous-estimaint la puissance de l'armée allemande et la vitesse avec laquelle elle pouvait être mobilisée et se déplacer. Dans l'éventualité d'une guerre, cela donnerait aux Allemands l'avantage d'avoir une ligne de front plus grande et leur permettrait de traverser la Belgique sans devoir trop se déployer. La deuxième faiblesse de la stratégie de Joffre était que les Français adhéraient à la doctrine de l'attaque constante. Ils pensaient qu'une attaque déterminée pouvait vaincre n'importe quelle défense. Il ne suffisait que la volonté du soldat ordinaire pour appliquer "l'offense jusqu'à l'outrance". Par conséquent, l'entraînement militaire se cancentrait sur l'attaque et négligeait la défense. De leur ôté, les Allemands s'entraînaient à l'attaque comme à la défense - et leurs unités d'infanterie étaient équipées de davantage de mitrailleuses. Comme les Français le découvrirent en 1914, les attaques résolues face à des mitrailleuses pouvaient causer de lourdes pertes.
PLANCHE (Camille), 1892-1961 : Avocat et homme politique. Né à Bost (Allier), le 5 mai 1892, Camille Planche est d’abord conseiller municipal de Moulons, adjoint au maire en 1925 et se fait élire député républicain socialiste de l’Allier à partir de 1928. Il adhère à la SFIO en 1931 et se présente avec l’investiture de ce parti en 1932 : il est réélu. C’est sous l’égide du Front populaire qu’il triomphe aux élections de législatives de 1936. Candidat aux élections sénatoriales de 1938, sans succès. Président fondateur de la Ligue des anciens combattants pacifistes et membre du comité central de la Ligue des droits de l’Homme, en même temps que président à la fraction de gauche hostile à la guerre. Aussi est-il du nombre des socialistes qui votent pour le maréchal Pétain le 10 juillet 1940. Inéligible après la Libération, il se retire définitivement de la vie politique et décède à Paris le 2 mai 1961.
PLANISME :
Le déclenchement de la crise économique économique de 1929, joint à la mise en œuvre du plan quinquennal en Union soviétique, va conduire en Europe occidentale à l’idée de la nécessité de ne pas abandonner l’économie à la seule loi du marché afin d’éviter que ne se produisent de graves dépressions entraînant la misère de la population et des risques de dictature comme celles qui affectent l’Allemagne ou l’Italie. Sans doute n’est nullement question d’une direction de l’économie analogue à celle mise en place en URSS, mais plutôt d’un développement concerté, scientifiquement organisé et permettant l’intervention de l’État afin de corriger les déficiences éventuelles de la conjoncture. L’exemple en est donné par le sociologue belge Henri de Man, par ailleurs partisan d’une révision marxiste du marxisme, qui fait adopter par son parti en 1933 un « Plan de travail » prévoyant la division de l’économie en trois secteurs : un seteur public nationalisé comprenant les entreprises cartellisées, un secteur libre concernant les petites entreprises. Ce sont les principales qui dominent le « planisme », considéré en France en 1933-1934 comme une des solutions possibles à la crise économique. Il est adopté par les néo-socialistes inspirés par de Man et qui en font un des thèmes de leurs propositions. A l’intérieur même du parti socialiste SFIO, il est défendu par le groupe Révolution constructive proche des milieux syndicaux. Après le 6 février 1934, le syndicalisme adopte à son tour l’idée de planet, successivement, le CGT et la CFTC publient chacune leur projet planiste. Cette idée est également défendue par la revue Plans, fondée par Philippe Lamour et dans laquelle écrivenet des hauts fonctionnaires, des techniciens, des artistes (Picart-Le-doux), des architectes (Le Corbusier), des musiciens (Honegger). Autour de Jules Romains, un groupe comprenant des intellectuels de diverses obédiences politiques, parmi lesquels des néo-socialistes et des membres des Jeunesses patriotes se rassemblent pour lancer le Plan du 9 juillet 1934. Dissident du parti radical et fondateur du parti frontiste, Gaston Bergery cède à l’air du temps en publiant à son tour le plan frontiste. En fait, si le « planisme » triomphant des années trente est si largement répandu, c’est que l’idée prévaut qu’il n’est pas possible de rester inerte face au développement de la crise. Les solutions proposées, dans le droit fil des idées de Henri de Man, témoignent de l’aspiration à une forme d’économie dirigée, également éloignée des modèles de planification autoritaire soviétique et de contrôle de l’économie par l’État dans les pays fascistes. En fait ce que souhaitent les tenants du planisme, c’est une forme d’économie mixte que l’évolution des esprits et les problèmes nés de la guerre imposeront dans la France d’après 1945.
BERNSTEIN (Serge) : La France des années trente, Paris, A. Colin, 1987.
PLÉBISCITE :
POILU RÉPUBLICAIN (LE) : Organe officiel de la Fédération Nationale des Combattants Républicains, groupement des anciens combattants de gauche. Fondé en 1923, il paraît jusqu’à la Seconde Guerre mondiale sous la direction de J. Fontenoy.
POINCARÉ (Henri), 1854-1912 : Mathématicien et physicien. Né à Nancy en 1854 dans le milieu de la bourgeoisie lorraine, Henri Poincaré est considéré comme l'un des derniers mathématiciens universels capables de maîtriser la totalité de leur science. Il n'est pas le seul grand homme de sa famille puisque son cousin n'est autre que Raymond Poincaré, président de la République française de 1913 à 1920 et plusieurs fois président du Conseil et ministre.
Etudiant brillant, Henri Poincaré est admis major de la promotion 1873 à l'École polytechnique. Deux ans plus tard, il entre à l'École des mines et poursuit en parallèle un cursus universitaire. Licencié en 1876, il obtient en 1879 un doctorat en mathématiques qui lui permet d'embrasser une carrière d'enseignant. A l'université de Caen tout d'abord, puis à la Sorbonne, à Paris, où il occupe successivement les chaires de physique mathématique (1886) et de mécanique céleste (1896).
S'appuyant sur près de cinq cents publications, l'œuvre de Poincaré couvre tous les aspects des mathématiques, y compris ses applications en astronomie et physique. Ses premiers travaux portent sur les fonctions fuchsiennes, (fonctions invariantes par certaines transformations portant sur la variable), la théorie qualitative des équations différentielles et la théorie des fonctions. Le savant français est en outre le créateur de la topologie algébrique. Dans le domaine de la mécanique céleste, qui occupe le seul traité qu'il a écrit (Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste), Poincaré s'intéresse au difficile problème des trois corps. En physique mathématique, il établit les propriétés du groupe de Poincaré-Lorentz, groupe d'invariance des équations de l'électrodynamique, un peu plus tard utilisées par Einstein pour fonder la théorie de la relativité. Enfin, les nombreux textes rédigés par Poincaré en philosophie des sciences, dont La science et l'hypothèse (1902) ou Science et méthode (1908), témoignent de la volonté de leur auteur de participer au développement des idées au XXe siècle.
Membre de l'Académie des sciences, élu à l'Académie française en 1908, docteur honoris causa de huit universités et membre étranger de nombreuses académies et sociétés scientifiques dans le monde, Henri Poincaré meurt prématurément en 1912, des suites d'une opération de la prostate.
POINCARÉ (Raymond), 1860-1934 : Avocat et homme politique. Né à Bar-le-Duc (Meuse), le 20 août 1860, Raymond Poincaré est marqué dans son enfance par l'occupation par les troupes prussiennes de sa ville natale, souvenir qui l'obsèdera toute sa vie. Le traumatisme des évènements de 1870 est une des données constitutives de la culture politique d'un homme venu d'une famille de la bourgeoisie provinciale cultivée où l'on s'intéressait aux lettres et aux affaires publiques, où l'on avait le sens et la fierté de son rang social, où l'on était convaincu de la nécessité du travail et de l'instruction.
Après avoir achevé ses études secondaires au Lycée Louis-le-Grand à Paris, Poincaré renonce à l'Ecole polytechnique pour des études de droit. Il devient avocat au barreau de Paris en 1880 et obtient le titre de docteur en droit en 1883. Parallèlement, il collabore à divers journaux, notamment au Voltaire, quotidien gambettiste, où il apprend à connaître le milieu de la presse. Pendant ces années de formation, sous l'influence de son cousin germain Henri Poincaré, il se détache des croyances religieuses et devient laïc et rationaliste. Il est alors un républicain libéral et patriote, dont les modèles sont Léon Gambetta et Jules Ferry.
Raymond Poincaré entre en politique grâce à un passage par un cabinet ministériel, puisqu'il est le chef de son compatriote lorrain Jules Develle, nommé ministre de l'Agriculture dans le cabinet Freycinet en janvier 1886. Develle le pousse à se présenter aux élections cantonales de juillet 1886 à Pierrefitte-sur-Aire. A vingt-cinq ans, Poincaré obtient ainsi son premier mandat électoral et l'année suivante, le 31 juillet 1887, à l'occasion d'une élection partielle, il est élu député républicain modéré de la Meuse. Lors des élections générales de 1889, Poincaré est élu député de Commercy, un arrondissement rural de la Meuse. A près de trente ans, il dispose d'un fief électoral sûr, d'un réseau de notables à son service en Lorraine et d'un groupes d'amis dans l'appareil d'Etat. Il fait alors figure d'étoile montante de la République nouvelle.
Pour se faire connaître au parlement, Raymond Poincaré choisit le domaine aride de la politique financière, ce qui lui vaut d'être élu rapporteur général du budget en 1890. Cette fonction lui permet de quitter rapidement l'anonymat parlementaire, et d'entrer en contact avec les ministres et les hauts fonctionnaires. Pendant les dix-huit mois où il l'exerce, il, exprime déjà son opposition au projet radical d'impôt sur le revenu, qui sera récurrente.
Au début des années 1890, le scandale de Panama discrédite une partie du personnel politique républicain et permet à jeunes élus d'accéder rapidement à des postes de responsabilité. C'est le cas de Raymond Poincaré qui, de 1893 à 1895, va être en charge de plusieurs portefeuilles ministériels. La jeune génération des républicains modérés, "progressistes", semble avoir trouvé en lui son chef de file. Il s'est ménagé des amitié, des appuis, des réseaux dans la haute fonction publique, dans le monde de la presse, de l'Université et de la culture; dans sa circonscription, où il est réélu sans concurrent en 1898, celui qui est alors un homme de gauche n'a comme adversaire résolu que le clergé qui lui reproche sa laïcité militante dont témoigne par exemple le soutien qu'il apporte à la Ligue de l'enseignement.
En dépit des espoirs mis en lui, Poincaré, à la fin du XIXème siècle, pratique une sorte des grèves des ministères, refusant toute participation gouvernementale, comme pour se placer en réserve de la République, mais aussi pour se préserver du monde parlementaire qu'il critique et exercer librement son métier d'avocat. Ainsi, il décline l'offre de ses amis qui le souhaitent, en 1898, comme successeur de jules Méline. En juin 1899, quand le président de la République Emile Loubet lui propose de former un gouvernement, il oriente ses consultations pour former un cabinet de gauche décidé à faire cesser l'agitation nationaliste dans les rues de Paris. Mais l'exclusive des radicaux contre Louis Barthou, dont Poincaré souhaite la nomination comme ministre, et la volonté des socialistes d'imposer la présence de René Viviani dans le cabinet le font renoncer. Il refuse ensuite d'appartenir au cabinet Waldeck-Rousseau en raison de la présence du socialiste Alexandre Millerand. Un discours prononcé à Nancy le 12 mai 1901 montre alors ce qu'est son idéal gouvernemental: un gouvernement du centre, sans les collectivistes, une concentration républicaine qui exclut "la réaction" et "la révolution".
Elu sénateur de la Meuse en 1903, à quarante-deux ans, âge précoce pour rentrer à la Chambre haute, Raymond Poincaré rejoint l'Alliance républicaine démocratique dont il devient l'un des nombreux vice-présidents, sans en avoir été l'un des membres fondateurs, avant d'entrer au gouvernement comme ministre des Finances du 14 mars au 24 octobre 1906 dans le cabinet Sarrien. Mais il refuse d'appartenir au long ministère formé par Clemenceau après les élections de 1906, première marque de l'antagonisme entre les deux hommes.
Ayant acquis l'image d'un homme qui joint à la sagesse l'autorité et la compétence, il est appelé par le président de la République Armand Fallières pour diriger le gouvernement en janvier 1912, quand Joseph Caillaux perd le pouvoir à la suite du règlement de la crise d'Agadir. Il forme un ministère composé de douze ministres et de quatre sous-secrétaires d'Etat au sein duquel il choisit le ministère des Affaires étrangères, manifestant ainsi sa volonté d’accorder la priorité aux questions de politiques extérieure. Par égard pour la Chambre des députés, à laquelle il n’appartient plus, il confie à Aristide Briand, par ailleurs ministre de la Justice, la vice-présidence du Conseil. Cinq radicaux-socialistes appartiennent au gouvernement, dont Théodore Steeg à l’Intérieur, Léon Bourgeois au Travail, et louis Klotz aux Finances, mais ils ne constituent plus l’axe du ministère. Alexandre Millerand est ministère de la Guerre, Théophile Delcassé reste au gouvernement comme ministre de la Marine. Le nouveau gouvernement rejette les deux extrêmes et réalise une concentration qui regroupe toutes les fractions du parti républicain. Les socialistes sont la seule opposition déclarée et l’accueil qu’ils font au nouveau gouvernement a été moins négatif qu’on aurait pu le penser au regard des polémiques et des dénonciations de l’après-guerre.
A cette époque, Poincaré, qui avait été dreyfusard, peut-être considéré comme un homme de gauche modéré, défendant les conquêtes laïques mais attaché à la propriété privée et très réservé sur les interventions de l’Etat dans la vie politique. Connu des Français, il est soutenu par la grande presse qui répand l’idée qu’il est l’homme d’Etat dont la France et la République ont alors besoin. Poincaré était populaire dans la France bourgeoise et paysanne des villes moyennes et petites et des campagnes ; il était accepté par les élites, auxquelles il appartenait ; il était toléré par les catholiques, qui le préféraient aux politiciens radicaux ; par sa personnalité, Poincaré rassurait contre le danger collectiviste et révolutionnaire et représentait les aspirations en lui.
En politique extérieure, le chef du gouvernement s’efforce de resserrer les liens diplomatiques avec l’Angleterre et la Russie, renforçant l’Entente cordiale et se rendant à Saint-Pétersbourg en 1912. En politique intérieure, il fait voter par la Chambre des députés, malgré l’hostilité des radicaux, une loi électorale comportant le scrutin de liste avec représentation proportionnelle, que le Sénat rejette.
Si le bilan de son ministère est assez mince, la manière dont Poincaré gouverne est bien perçue. Sa réputation de travailleur de force et son sens de l’organisation plaident également en sa faveur. Il peut ainsi poser avec des chance sde succès sa candidature à la présidence de la République, annonce le 26 décembre 1912.
A Versailles, le 17 janvier 1913, Raymond Poincaré réunit sur son nom à la fois une majorité républicaine et les voix de toute la droite. Il est, depuis Casimir-Perier, le premier président du Conseil à accéder directement à la magistrature suprême. Entre l’élection et la prise de fonctions, près d’un mois s’écoule, mais il abandonne aussitôt la présidence du Conseil, qui revient à Aristide Briand. Le nouveau président de la République, s’il respecte la «constitution Grévy » accordant la réalité du pouvoir au président du Conseil, aspire cependant à relever la fonction pour devenir un acteur à part entière de la vie politique. Il apparaît ainsi comme l’inspirateur de la politique militaire et étrangère, soutenant l’allongement de la durée du service militaire à trois ans, et, dans les jours critiques de juillet et d’août 1914, c’est lui et non Viviani qui est « au cœur du processus de décision ».
Le 4 aout 1914, dans son message aux Chambres, il appelle à « l’Union sacrée » du peuple français, et devient le symbole et le ciment de ce rassemblement. Mais son rôle d’animateur de la défense nationale est de courte durée et la perspective de renforcement de la fonction présidentielle à travers l’Union sacrée se révèle rapidement illusoire. Le poids politique de Poincaré s’amenuise pendant les années de guerre : il est marginalisé par le pouvoir militaire, puis par le pouvoir ministériel. S’il tente de sortir de son de son rôle constitutionnel au début de 1917, il y renonce après l’offensive Nivelle qu’il a soutenue. Le 15 novembre 1917, après la chute du gouvernement Painlevé, Raymond Poincaré est contarint d’appeler à la tête du gouvernement son vieil ennemi Georges Clemenceau. L’opposition vive entre les deux hommes tourne bientôt à l’avantage du président du Conseil, qui réduit le président de la République à sa fonction de représentation. Lors des négociations des paix, Poincaré, partisan comme Foch d’une politique de fermeté à l’égard de l’Allemagne, demeure tenu à l’écart, mais il se venge en multipliant les critiques acerbes contre les traités de paix, jugeant excessives les concessions faites par Clemenceau sur la Rhénanie. Il estime indispensable à la sécurité de la France que la ligne du Rhin devienne la frontière militaire définitive entre la France et l’Allemagne et pense que la garantie anglo-saxonne est illusoire. Poincaré, constatant, comme il l’a écrit dans Le Temps en septembre 1920, que « la Constitution ne laisse au président que l’autorité morale que peuvent lui avoir donnée son expérience, sa connaissance des hommes, ses services » et soucieux de retrouver un rôle politique plus actif, ne se représente pas aux élections présidentielles de 1920. L’impuissance dans laquelle il s’est morfondu à l’Elysée a aiguisé son désir de pouvoir . Il se fait réélire sénateur de la Meuse le 11 janvier 1920, avant même d’avoir quitté l’Elysée, puis quelques semaines plus trad, retrouve son mandat de conseiller général et de président du conseil général de la Meuse. Pendant dix ans, son aura politique demeure considérable. Aux yeux des Français, il incarne l’homme d’Etat patriote, adversaire de la paix clemenciste et intransigeant sur les droits de la France.
Redevenu sénateur, il consacre aux affaires internationales l’essentiel de son attention. Il martèle que l’Allemagne n’a pas changé et reste un danger pour la patrie. En février 1921, il est élu président de la commission des affaires extérieures du sénat, poste stratégisque qui lui procure toute l’information nécessaire et d’où il peut critiquer la politique de Briand, qui, redevenu président du Conseil, s’engage dans une politique plus souple à l’égard de l’ennemi vaincu.
Ce dernier ayant démissionné après la conférence de Cannes, Alexandre Millerand, qui a succédé à Paul Deschanel à la présidence de la République, fait appel à celui dont la fermeté à l’encontre de l’Allemagne est en phase avec l’opinion de la majorité de la Chambre. Le 15 janvier 1922, Poincaré retrouve la présidence du Conseil et le ministre des Affaires étrangères. La composition du cabinet traduit sa volonté de ne pas se couper de la famlle radicale. L’axe de son ministère est formé par des homme de l’Alliance démocratique, amis de Poincaré, comme Louis Barthou à la Justivce, Henri Chéron à l’Agriculture, André Maginot à la Guerre et aux Pensions, et par d’anciens collaborateurs au Palais de Justice qui ont sa confiance, comme Léon Bérard, ministre de l’Instruction publique, Charles Reibel, ministre des Régions libérées ou Maurice Colrat, sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil dont la nomination marque le souci de mieux coordonner l’action gouvernementale. Douze ministres de Briand reste avec Poincaré : ce sont ceux qui ont désapprouvé les ouvertures conciliatrices de Cannes. Il obtient une large confiance de la Chambre et son retour aux affaires est très positivement accueilli par l’opinion et la presse. Pendant toute la durée de son ministère, il se révèle un fin manœuvrier parlementaire, usant de la question de confiance et de l’appel à l’opinion publique pour dominer une majorité qui le supporte plus qu’elle ne l’approuve. Les questions de politique étrangère occupent largement ce long passage au pouvoir, qui dure plus de deux ans.
Poincaré entend dégager rapidement la diplomatie française de la tutelle britannique, mais, en ce qui concerne la politique allemande, le nouveau gouvernement se place plutôt, jusqu’en juin 1922, dans la lignée briandiste. Au cours de l’année 1922, la situation change : le traité germano-russe signé à Rapallo le 24 juin 1922, est ressenti comme un signe de la montée du nationalisme allemand et laisse augurer l’abandon de la politique d’exécution du traité. Enfin, la poursuite de la dépréciation rapide du mark est interprétée comme un moyen utilisé volontairement par l’Allemagne pour échapper à ses obligations. Dans les milieux parlementaires, parmi les officiers de l’armée et dans l’entourage du président du Conseil, l’idée d’occuper la Rurh fait son chemin, surtout après l’échec de la conférence de Londres (7-14 aout). Aux objectifs économiques s’ajoutent à l’automne des objectifs politiques et sratégiques : profiter de l’occupation de la Rurh pour créer sur l’ensemble des territoires occupés (Rurh et Rhénanie) une entité politique autonome, en fair un protectorat, qui assurerait définitivement, au-delà de l’évacuation des troupes prévues pour 1935, la sécurité de la France. Ces idées sont défendues par deux hommes qui ont l’entière confiance de Poincaré, Paul Tirard, président de la Haute-Commission interalliée des territoires rhénans, et le général Degoutte, commanant en chef de l’armée du Rhin et des troupe interalliées. Le ralliement du président du Conseil, longtemps réticent, va à l’encontre de l’image de l’image trop souvent répandue d’un Poincaré respectueux de la lettre du traité de Versailles.
Quand est formé en Allemagne, à la in de l’année 1922, le cabinet Cuno, le plus à droite depuis novembre 1918, et que la commission des réparations constate de nouveaux manquements aux obligations de livraison, Poincaré, malgré ses hésitations à se lancer dans une opération qui nuirait aux bonne srelations avec la Grande-Bretagne, décide l’occupation intégrale de la Ruhr comme « gage productif ». L’ordre d’intervetion est donné aux troupes française le 11 janvier 1923. Le président di Cunseil réunit chaque jour au Quai d’Orsay un conseil de guerre et obtient un soutient massif des députés. Une vague d’indignation secoue l’Allemagne et la Rhénanie occupée, le gouvernement Cuno décrète la résistance passive, provoquant en Allemagne une inflation qui débouche sur l’effondrement du mark. Dans l’attente de la défaite allemande, Poincaré prend le risque de l’isolement diplomatique : en août 1923, il refuse de dialoguer avec l’Angleterre, puis de répondre aux appels du nouveau chancelier Stresemann qui a remplacé Cuno. Toutefois, le 23 octobre 1923, il accepte la proposition anglo-américaine de soumettre à un comté d’experts la capacité de paiement de l’Allemagne en matière de réparations. En avril 1924, Poincaré accepte le plan Dawes, ce qui lui permet de sortir d’un isolement diplomatique relatif.
Au début 1924, le difficultés financières se sont ajoutée aux problèmes extérieurs. Le gouvernement réussit à sauver la monnaie, grâce notamment à un prêt de la banque Morgan et à une augmentation des impôts de 20% (ce que l’on appelle le double décime). Poincaré conjure la tempête monétaire avec un tel brio apparent que l’on salue le redressement spectaculaire du franc comme une réussite personnelle, un « Verdun financier », mais ses décisions ne sont pas sans conséquences politiques. Le 26 mars, alors que le ministre des Finances Charles de Lasteyrie a posé la question de confiance, le gouvernement est mis en minorité lors de la discussion de la loi sur le pensions. Poincaré remet alors sa démission au président de la République qui le charge de constituer un nouveau gouvernement. Ce nouveau gouvernement gouvernement Poincaré comporte treize ministère, et, dans un souci d’économie, aucun sous-secrétaire d’Etat. N’y figurent que deux ministres sortant : André Maginot à la Guerre et Yves le Trocquer aux Travaux publics, poste qu’il occupe depûis 1920. Les ministres radicaux, qui avaient refusé d’obéir à l’injonction de leur parti de démissionner en juin 1923, partent cette fois, mais le gouvernement s’ouvre au centre gauche avec les nominations de Henri de Jouvenel à l’Instruction publique et Louis Loucheur au Commerce. Pour ne pas trop irriter sa majorité, Poincaré fait entrer deux parlementaires de droite, Fradéric François-Marsal aux Finances et Louis Marin aux Régions libérées. La presse critique la formation du nouveau ministère, mais la confiance est votée par 383 voix contre 131 et 42 abstentions, les radicaux-socialistes étant passés à l’opposition. Ce cabinet n’est qu’un cabinet de transition, à quelques semaines des élections legislatives.
Au lendemain de la victoire du Cartel des gauches, le 11 mai, Raymond Poincaré, surpris par l’ampleur de la nouvelle majorité parlementaire, donne sa dmission, qui est effective le 1er juin. Pendant deux ans, il reste en réserve de la République, attentif et vigilant, intervenant dans le débat politique, entretenant ses relations avec la presse écrite, notamment avec L’Illustration.
Dans la nuit du 21 au 22 juillet 1926, après l’échec économique du Cartel, le président de la République, Gaston Doumergue, fait à nouveau appel à lui. Pour sauver le franc, Poincaré constitue un gouvernement d’Union nationale, marquant une trêve temporaire entre la gauche et la droite. Ce nouveau mnistère restraint (treize membres seulement) ne marque pas tant une rupture qu’une volonté d’associer le centre droit aux affaires. Outre Poincaré, ministre des Finances, cinq anciens présidents du Conseil en sont membres (Aristide Briand, Louis Barthou, Georges Leygues, Edouard Herriot et Paul Painlevé). Poincaré obtient de la Chambre une impressionnante majorité, les groupe de la droite et du centre votant favorablement, satisafaits d’être débarrassés de la « tyrannie du Cartel » ; de même, le Sénat est massivement acquis au ministère.
Grâce à cette majorité, à l’appui de l’opinion publique et au soutien des milieux d’affaires qui cessent de spéculer, le gouvernement parvient à prendre des mesures qui mettent fin à la crise monétaire : une révision constitutionnelle permet la création d’une caisse d’amortissement de la dette publique. Des sous-préfectures, des recettes des finances et des tribunaux de première instance sont supprimés afin de réduire les dépenses de l’Etat., les impôts indirects sont augmentés. Poincaré, pleinement occupé par la politique financière, laisse à Aristide Briand la conduite de la politique étrangère et admet donc le rapprochement avec l’Allemagne. Le gouvernement d’Union nationale engage également la lutte contre « les ennemis de la nation », notamment les communistes et les automistes alsaciens. . Il tente de combler le ratard français en matière d’assurance par le vote, juste avnat la cloture de la treizième législature, d’une loi prévoyant la couverture des risques de maladie, maternité, invalidité, invalidité et vieillesse pour l’ensemble des salariés français dont le salaire n’excède pas un certain seuil, le système étant financé par les cotisations patronales et ouvrières payées par les employeurs et gérées par des caisses privées.
Les élections d’avril 1928, pour lesquelles a été rétabli le scrutin uninominal majoritaire à deux toirs, sont un elarge victoire pour le président du Conseil qui conserve ses fonctions et, à la grande déception des modérés, n’apporte que peu de modifications à son ministère : Armand Fallières battu aux élections législatives, est remplacé par Louis Loucheur, qui lance un programme de construction d’HBM ; un député alsacien Albert Oberkirch, est nommé sous’secrétaire d’Etat à l’Hygiène. Au Travail et à la Prévoyance sociale. Poincaré décide alors la stabilité du franc, en dépit de la réticence de certains de ses ministres. La dévaluation du 25 juin 1928 fixe celui-ci au cinquième de sa valeur de 1914.
Le 6 novembre 1928, le congrès du parti radical-socialiste réuni à Angers et manœuvré par Joseph Caillaux, demande aux ministres radicaux de se retirer du gouvernement afin de rendre à nouveau possible une politique d’union des gauches – les députés radicaux, pour les deux tiers, ayant été élus avec des voix socialistes,voire communistes. Surpris, les ministres radicaux obtempèrent et Poincaré apporte au président de la République la démission de son gouvernement. Poincaré forme alors son cinquième ministère, remplaçant les radicaux par les républicains socialistes et évinçant Louis Marin pour équilibrer le départ des ministres radicaux. Fatigué, il abandonne le portefeuille des Finances et se contente de garder la seule présidence du Conseil. La nomination d’André Tardieu au minist-re de l’Intérieur et le retour d’André Maginot comme ministre de la Colonies montrent bien une certaine inflexion vers la droite, mais ce dernier mi nistère illustre bien l’idéal gouvernemental de Poincaré : « la conjonction des centres ». La nouveauté réside dans la nomination de plusieurs secrétaires d’Etat, notamment André François-Poncet à l’Enseignement technique et aux Beaux-Arts. Si ce cinquième ministère Poincaré obtient la confiance, une véritable guérilla est déclenchée à la Chambre dès le début de l’année 1929 par de jeunes députés radicaux qui attaquent le gouvernement sur la politique sociale, la laïcité et la réforme judiciaire notamment. Comme en 1923-1924, le gouvernement Poincaré, le ministère d’abord de large union nationale, se mue, sous l’effet du retrait radical, en un gouvernement appuyé sur une majorité clairement orientée à droite.
Après la signature, le 31 mai, du plan Young qui réduit les annuités des réparations, et la difficile ratification parlementaire des accords de 1926 sur les dette interalliées, Poincaré décide, en juillet 1929, de quitter le pouvoir en raison de son état de santé, laissant à Aristide Briand la direction du ministère. Il s’est alors résigné à l’évacuation anticipée de la Rhénanie et les relations franco-allemandes rentrent dans une phase d‘apaisement. Déclenant la proposition que lui fait Gaton Doumergue en 1930 de former un nouveau gouvernement, il consacre ses dernières années à rédiger ses mémoires, Au service de la France, long plaidoyer de son action. Il décède à Paris le 15 octobre 1934.
La carrière politiquede Poincaré confirme la prééminence, sous la IIIème République, du président du Conseil sur le président de la République. Ses deux derniers passages à la présidence du Conseil sont marqués par des décisions essentielles, en politique extérieure (l’occupation de la Ruhr) et en politique financière (le « franc Poincaré »).
Raymond Poincaré est élu à l’Académie française le 18 mars 1909. Son élection succéde à celle de son cousin germain, le mathématicien Henri Poincaré. La droite de l’Académie, hostile à Raymond Poincaré, avait fait élire le scientifique, pensant à tort que deux membres de la même famille ne pouvaient être élus coup sur coup.
JEANNESSON (S.) : Poincaré, la France et la Ruhr (1922-1924, histoire d’une occupation, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 1998.
MARCUS (P.) : Raymond Poincaré, l’architecte d’une carrière d’Etat, Paris, Séguier, 2006.
MIQUEL (P.) : Poincaré, Paris, Fayard, 1981.
POINCARE (R.) : Au service de la France. Neuf années de souvenirs, 10 volumes, Paris, Plon, 1926-1934.
ROTH (F.) : Raymond Poincaré, Paris, Fayard, 2000.
POIRIER (Léon), 1884-1968 :
Né en 1884 dans une famille de vieille souche française où les arts furent toujours en honneur et qu’illustre sa tante, la peintre impressionniste Berthe Morisot, Léon Poirier est d'abord un homme de théâtre, avant de devenir réalisateur chez Gaumont où il succède à Louis Feuillade au poste de directeur artistique. Dans le courant des années 1920, il s'émancipe de la tutelle de Léon Gaumont pour devenir un cinéaste-ethnologue emprunt d'un mysticisme opposant les notions de civilisation et de spiritualité.
En 1906, alors qu'il est le tout jeune secrétaire général du Gymnase, il se fait remarquer en supprimant la morte saison des scènes parisiennes. Il instaure la saison d'été qui lui offre fortune et gloire dès 1910, où il présente « Le Mariage de Mlle Beulmans ». Le succès est tel qu'il fait jouer la pièce dans trois autres théâtres de Paris (la Renaissance, le Théâtre Réjane, Les Bouffes Parisiens). L'année suivante, il organise au Vaudeville une saison d'opérette qui connaît un triomphe.
Sur cette lancée, il décide de créer son propre théâtre. Avec Gabriel Astruc et les frères Perret, il s'attelle à la construction du bâtiment qui abritera la grande salle du « Théâtre des Champs Élysées » et la petite de la « Comédie des Champs Elysées » baptisée lors de l'inauguration en 1913 « Théâtre Léon Poirier ». La faillite de la salle principale (malgré les Ballets Russes), une série d'insuccès et un grave accident précipitèrent sa ruine. Léon Gaumont qu'il connait pour lui avoir loué le Gymnase pour les représentations de son chronophone lui fait une offre: cinquante francs par semaine pour écrire le scénario et mettre en scène un film de cinq cents mètres qui devait être tourné dans le même laps de temps pour un budget total de 2500 francs. Ce sera « l'Amour passe », puis « Le Jugement des Pierres », « Ces demoiselles Perrotin », « Monsieur Charlemagne » et « le Trèfle d'argent », interrompu par la guerre dans laquelle il s'engage comme artilleur.
En 1919, il revient à la vie civile avec pour intention de se tourner complètement vers le cinéma. Il se remet à l'œuvre aux studios Gaumont où il tourne « Ames d'Orient ». En 1920, il réalise, d'après une idée d'Edmond Fleg « Le Penseur ». Puis « Le Coffret de Jade », anecdote humoristique et philosophique. « Narayana », rêverie fantastique, vient l'année suivante. En 1922, « L'Ombre déchirée », vient compléter la galerie de visions fantastiques auxquelles semble se complaire le réalisateur. La même année, c'est le « Jocelyn » de Lamartine que la maison Gaumont, désireuse de filmer presque exclusivement des adaptations littéraires ou théâtrales, demande à Léon Poirier de réaliser. Puis viennent « L'Affaire du Courrier de Lyon », « Geneviève » et « La Brière ». Avec « La Croisière Noire », s'amorce la seconde carrière cinématographique de Poirier : l'ethnologue fasciné par les cultures primitives.
Il enchaîne avec « Amours exotiques », avant de revenir en France pour préparer le tournage de « Verdun, Visions d'Histoire », fresque historique consacrée à la grande bataille. Le ton est pacifiste, la logique du film conduit à la fraternisation. Nous sommes en 1927, l'époque est à la réconciliation franco-allemande. Le film terminé, il se dirige vers Madagascar pour réaliser « Caïn, Aventures des mers exotiques ».
De retour à Paris pour mettre au point la version sonorisée de « Verdun Souvenirs d'Histoire », Léon Poirier est, comme beaucoup de réalisateurs au temps du muet, dérouté par l'arrivée du parlant qui met un terme à une certaine forme de symbolisme qui lui semble être l'essence même de l'art cinématographique. Il repart en Afrique ensuite pour réaliser un film d'aventures se déroulant pendant la Première Guerre mondiale, « La Voie Sans Disque ». Á son retour, il se plonge dans la biographie de Charles de Foucaud écrite par René Bazin et entreprend la préparation d'un film consacré à la vie de Charles de Foucaud: « L'Appel du Silence ». Il imagine un financement original : par souscription nationale. Il obtient le parrainage du général de Castelnau, « le capucin botté » comme l'appelait Clemenceau et par celui-ci de la puissante Fédération Nationale Catholique. Pendant seize mois, il parcourt la France et la Belgique avec une conférence sur Charles de Foucaud, accompagnée de projections fixes. A l'issue, il récolte les souscriptions. Elles suffiront pour atteindre la somme qui permettra ensuite aux banquiers d'avancer sans risque le complément du budget. Citroën met gracieusement le matériel automobile à la disposition du réalisateur. Poirier subit pendant le tournage de « La Croisière Noire » l'envoûtement du désert et il veut le traduire en images mieux qu'il n'a pu le faire la première fois, où son travail était soumis aux exigences d'une expédition publicitaire. Car le sujet touche à son drame personnel. C'est au Sahara qu'il a retrouvé la paix intérieure après une grave crise morale. Il enchaîne ensuite avec « Sœurs d'Armes », l'histoire de Louise de Bettignies, chef d'un réseau de résistance dans le nord de la France pendant la Première Guerre mondiale. Il représente les soldats allemands non plus dans le personnage traditionnel du Prussien (« La Grande Illusion » est tournée la même année), mais déjà sous des traits et avec des comportements qui introduisent aux déviances du nazisme. Après la fin du film, il repart pour l'Afrique et plus exactement dans la forêt équatoriale du Congo et du Gabon pour réaliser « Brazza ou l'épopée du Congo », l'histoire de la bataille que se livrèrent Savorgan de Brazza et Stanley dans la conquête de l'Afrique, la premier adoptant une attitude résolument pacifiste pendant que le second n'hésitait pas à recourir à la violence de manière quasi systématique. Plus généralement, il oppose la colonisation française à la colonisation britannique. Lorsque le film fut terminé, la France était en guerre.
Continuant sa carrière pendant et après la Seconde Guerre mondiale, il se retire ensuite dans la petite commune d'Urval-le-Buisson en Dordogne, dont il devient maire. Il publie ses mémoires en 1953, « 24 images à la seconde » où le cinéma s'efface largement derrière une forme littéraire de réflexion humaniste. Il meurt en 1968.
POLDES (Léopold Seszler, dit Léo), -1970 :
Léo Poldes milite vers 1908 aux Jeunesses socialistes et, ensuite, appartient au parti socialiste jusqu’au Congrès de Tours en 1920. Il suit alors la majorité et rejoint la IIIème Internationale. A partir de 1922, il se consacre uniquement au Club du Faubourg qu’il a fondé. Ajoutons, qu’au lendemain de la Première Guerre mondiale il est candidat contre Louis Barthou dans les Basses-Pyrénées. Il est l’auteur de quelques pièces de théâtre comme Forum, Le Réveil et L’Éternel ghetto qui sont des œuvres politiques. Il décède à Paris le 18 décembre 1970.
POLICE :
POLIN (Pierre-Paul Marsalés, dit), 1863-1927 : Chanteur. Le 13 août 1863 naît à Paris Pierre Paul Marsalès, le futur Polin. Il est le fils unique d'un employé de bureau à la Direction Générale de l'Enregistrement, du Domaine et du Timbre. Rien dans le milieu familial ne le prédestinait à aborder une carrière artistique.
1872 : sa mère meurt alors qu'il n'a que neuf ans. Son père le met en pension.
1877 : son père le fait admettre à la Manufacture des Gobelins, d'abord à l'École de Dessin, puis à l'École de Tapisserie.
1880 : son père décède. Peu après, il démissionne des Gobelins.
Pris en charge par sa famille qui cherche à lui trouver une situation, il entre chez un cousin bijoutier comme apprenti sertisseur. Mais il abandonne pour enfin se consacrer à sa passion: la chanson. Il aurait même, dit-on, fait un bref passage au Conservatoire (cependant nous n'avons pu en retrouver aucune trace).
1886 marque son entrée dans le monde du café-concert. Le 4 septembre, il débute au Concert de la Pépinière, où il chante un mois, puis passe quelques temps au Concert Parisien.
1887 : il passe les trois mois d'été au Concert des Bateaux-Omnibus. En septembre, il entre à l’ Éden-Concert, où il restera cinq ans. Que ce soit pour ses chansons ou pour ses rôles dans de courtes pièces, il se fait très tôt apprécier comme un comique remarquablement doué. C'est là qu'il trouve sa voie, celle du pioupiou tendre et naïf.
1891 : Francisque Sarcey signale à l'attention de ses lecteurs «un certain Polin, qui dit d’une voix très nette et qui a beaucoup de naïveté et de verve.»
- PREMIERS SUCCÈS -
1892 est une année importante dans la carrière de Polin. Tout d'abord, en mai, il quitte l’ Éden-Concert pour entrer à l'Alcazar d'Été, puis aux Ambassadeurs, deux cafés-concerts réputés. Ensuite, il fait ses premiers pas au théâtre, avec un rôle dans une pièce de Feydeau qui connaît un énorme succès: Champignol malgré lui.
1893 : Il rompt son contrat avec le théâtre pour revenir au café-concert. Il devient alors le grand favori du moment. En septembre, il débute à la Scala, dont il restera pensionnaire pendant vingt ans.
Dans les années qui suivent, on le voit passer d'une salle à l'autre au fil des engagements, et des saisons, variables selon les salles.
1894 : Voici un bel exemple de ce que peut être l'emploi du temps d'un chanteur tel que Polin. Il est à la Scala jusqu'à fin janvier. En mars-avril, il chante à l'Eldorado. En mai, il passe à l'Alcazar d'Eté. En septembre, il rentre aux Ambassadeurs alors qu'il n'a pas encore quitté l'Alcazar d'Eté («voilà un artiste qui ne se ménage pas! Sept chansons aux Ambassadeurs, histoire de se mettre en voix, puis sept autres pour le moins dans les Véli-vélo de l'année, l'amusante revue de l'Alcazar. Avouez qu'il faut avoir des poumons… et, l'amour du métier» lit-on dans Gil-Blas). Puis il quitte l'Alcazar d'Eté pour passer à la Scala, mais chante encore aux Ambassadeurs! Et en novembre, il revient à l'Eldorado.
Les années suivantes se ressemblent. En mai, il rentre à l'Alcazar d'Été ou aux Ambassadeurs, et en septembre à la Scala. En hiver, on le voit régulièrement en province. C'est ainsi que lors d'une de ses tournées à Toulon, un certain Jules Muraire, un adolescent qui voulait suivre la carrière de son compatriote Mayol, décide de commencer sa carrière en adoptant le «genre Polin». Il choisira plus tard le pseudonyme de Raimu.
1898 : Sur la recommandation de Jules Claretie, administrateur de la Comédie-Française, Polin reçoit les palmes académiques. Il motivera cette nomination en particulier par le fait qu'il a «cherché, sous la forme légère de [ses] chansons, à rendre de plus en plus sympathique et populaire notre armée nationale»!
Pour la deuxième fois, on le voit au théâtre, au Palais-Royal cette fois. Il joue dans Chéri!, un vaudeville.
1903 : Il fonde Paris qui Chante, une revue hebdomadaire consacrée au café-concert dont il restera quelques temps rédacteur en chef.
1906 : Il participe à la fondation de l'APGA, une société d'enregistrement qui permet aux artistes de percevoir une partie des bénéfices sur la vente des chansons.
En septembre, il se marie. Si discrètement que, malgré sa célébrité, la presse n'en fera aucun écho. Et part aussitôt pour une longue tournée en province.
C'est aussi l'année de la création de la Petite Tonkinoise.
- LE THÉÂTRE -
1907 marque un tournant, puisque, sans abandonner le café-concert, Polin va maintenant se consacrer régulièrement à l'opérette et au théâtre. Il commence sa nouvelle carrière par une opérette, Son Petit Frère, bientôt suivie d'un vaudeville, Panachot gendarme.
Il emménage dans la maison qu'il a fait construire à La Frette sur Seine, tout en conservant un logement à Paris.
1908 : Nouvelle opérette, Cinq minutes d'amour.
Le 4 avril, pour un soir, Polin est à la Comédie Française. Il joue dans Ma Générale, créée à l'occasion de la représentation de retraite d'un sociétaire. On peut se demander ce qui lui vaut cet honneur, car on l'avait jusqu'à présent très peu vu au théâtre. Quoi qu'il en soit, la critique est unanime pour louer ses qualités d'acteur.
On peut toujours l'applaudir à la Scala ou à l'Alcazar d'Été.
1909 : Il joue la comédie au théâtre Michel, dans Les Deux Visages, puis part en province où a lieu la création d'une opérette, le Lieutenant Cupidon.
1910 : Lors d'une tournée de Polin dans le sud de la France, le jeune Fernand Contandin, âgé de 7 ans, a le coup de foudre qui décidera de sa vocation. Il débutera lui aussi avec des chansons de Polin. Il choisira plus tard le pseudonyme de Fernandel.
1911 : On le voit dans ses tours de chant à la Scala, à l'Alcazar d'Été et aux Ambassadeurs, et dans deux opérettes, Pâris ou le bon juge et L'Amour libre. En fin d'année, il est à la Comédie Royale avec un rôle dans Le Pavillon. Et, ce qui est nouveau, on le voit au cinéma.
1912 : Il est à nouveau au théâtre Michel, pour La Bonne Maison. Puis il passe à l'opérette dans une reprise du Petit Duc.
1913 : A nouveau une opérette, La reine s'amuse. En fin d'année il a un rôle de curé dans une comédie, Un jeune homme qui se tue.
1914-1918 : Polin n'est pas mobilisable. Pendant ces quatre années de guerre, il continue donc à monter sur la scène des cafés-concerts, dans des revues ou des opérettes. En 1916, il tourne plusieurs films, mais sa carrière cinématographique s'arrête dès l'année suivante.
Il figure aussi au programme de nombreux galas au profit des soldats ou des victimes de la guerre. Cela lui donne l'occasion de remonter sur la scène de la Comédie Française, dans une comédie de Lavedan.
- LES DERNIÈRES ANNÉES -
Après la guerre, le caf' conc' n'est plus autant en vogue et Polin se consacre surtout au théâtre et à l'opérette. Malgré tout, il reparaît de temps en temps au music-hall où il obtient toujours un vif succès.
1919-1920 : Il joue dans trois opérettes, La folle escapade, La Belle du Far-West et Titin.
1921 : Il est aux côtés de Sacha Guitry dans Le Grand-Duc, au théâtre Edouard-VII.
1922 : Quelques brèves apparitions au théâtre.
En décembre, on le voit dans Ton Bec, une revue du Perchoir. La fin du premier acte est un hommage au Polin d'autrefois: il y apparaît entouré des héroïnes de ses chansons, comme Mlle Rose, la grosse Julie, la Tonkinoise ou la Boiteuse.
1923 : Après plusieurs reprises de La folle escapade, on le remarque surtout dans une pièce de Sacha Guitry, Le lion et la poule.
1924 : Polin est promu «maréchal des armées de la République de Montmartre» lors d'une fête organisée en son honneur au Moulin de la Galette. Il a un rôle dans une pièce de Tristan Bernard, Le danseur inconnu.
1925 : Polin a déjà soixante ans, on ne le voit plus guère sur scène. Il se limite à quelques apparitions d'une ou deux semaines au music-hall, notamment à l'Empire. Il joue aussi la comédie, dans Une femme: ce sera sa dernière apparition au théâtre.
1926 : En fin d'année, plus de quarante ans après ses débuts, Polin monte une dernière fois sur scène. Il apparaît dans A vol d'oiseau, une revue de Sacha Guitry au théâtre Edouard-VII.
Le 3 juin 1927, malade du cœur depuis quelques années déjà, il meurt dans sa propriété de La Frette sur Seine.
POMARET (Charles), 1897-1984 : Homme politique. Né à Montpellier (Hérault) le 16 août 1897, Charles Pomaret est docteur en droit puis devient auditeur au Conseil d’Etat. Elu député de la Lozère en 1928, il entre dans la parti républicain socialiste. Remarqué par Laval, ce dernier le nomme sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction publique et aux Beaux-Arts, chargé de l’enseignement technique dans ses trois cabinets successifs du 27 janvier 1931 au 19 février 1932. Réélu député en 1932 puis en 1936, il se spécialise dans les textes sociaux. Nommé ministre du Travail du 23 août 1938 au 16 juin 1940 dans le troisième cabinet Daladier, en remplacement de Ramadier, puis dans l’unique cabinet Reynaud, il est confronté aux grèves qui durent depuis un mois et demi et décide d’employer l’armée pour y remédier. Il met alors sur pied les allocations de solidarité, la retraite, l’amnistie des grévistes et les contrats collectifs de travail. Favorable à l’armistice, il est nommé ministre de l’Intérieur dans le cabinet Pétain du 16 au 26 juin 1940 et autorise le départ de certains parlementaires sur le bateau Massilia. Il fait aussi arrêter Mandel le lendemain, qu’il accuse d’avoir fourni des armes pour une action contre le gouvernement. Du 27 juin au 12 juillet 1940, il est nommé ministre du Travail dans le même cabinet. Il décède à Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes) le 11 septembre 1984.
PONTBRIAND (Fernand, Marie, René, du Breil, comte de), 1848-1915 : Agriculteur et homme politique. Député de droite de Loire Inférieure, de 1889 à 1901, puis sénateur du même département de 1901 à sa mort, Fernand de Pontbriand appartient au roupe agricole et au groupe de la Défense nationale de la Chambre. Lorsque Drumont est député d’Alger et président du Groupe parlementaire antisémite, le comte de Pontbriand faisait partie de ses adhérents.
POPULAIRE (Le) : Le Populaire,fondé en mai 1916 par Jean Longuet, fils du communard Charles Longuet et de Jenny Marx, la fille aînée de Karl Marx, sera en mars 1921 l’organe officiel de la SFIO, les communistes majoritaires au congrès de Tours gardant le contrôle de L’Humanité. Bimensuel en 1924, relancé comme quotidien en 1927, Le Populaire paraît régulièrement jusqu’en 1940. C’est dans ce journal que s’exprime Léon Blum, son directeur. Un supplément mensuel, La Vie du Parti, publie les textes principaux et les motions de congrès.
POPULATION :
POSITIVISME :
Le positivisme est fondamentalement une philosophie développée par Auguste Comte (1798-1857), qui tire son importance du fait qu’elle imprègne profondément la pensée des fondateurs de la IIIème République et qu’elle est le principal constituant de la culture politique dominante jusqu’à la fin des années 1880. Sans doute faudra-t-il se garder de croire que le régime se modèle étroitement sur la pensée d’Augustre Comte et que les dirigeants participent aux controverses qui, après la mort du philosophe, opposent ses disciples « orthodoxes », fervents de la « religion de l’humanité » qu’il défendait à la fin de sa vie, à ceux qui, comme Littré, ne voient dans le positivisme qu’une méthode, encore que certains comme Jules Ferry aient suivi de près ces débats. Mais de manière générale, ils adhèrent à la plupart des propositions initiales du positivisme et en tirent surtout des conséquences pratiques sur le plan politique.Les Républicains sont profondément convaincus de l’homogénéité des sciences et attachés à l’idée selon laquelle seule l’inégalité du savoir de certaines branches interdit à l’homme d’avoir une visionscientifique globale de l’humanité et de son avenir. Pour eux, si l’homme possède une connaissance valable des sciences exactes une connaissance plus imparafaite des sciences naturelles, il est encore dans l’ignorance envers la plus complexe de toutes les sciences, celle qui concerne l’organisation de la société que Comte appelle la « physique sociale » (avant qu’on lui donne le nom de sociologie). Mais ils estiment que le moment est venu où il pourra aborder cette connaissance puisque l’humanité, après avoir connu le stade théologique où l’explication des phénomènes est cherchée dans des forces supérieures douées d’une existance indépendante et personnelle (génies, dieux, esprits), puis le stade métaphysique où des identités abstraties sont considérées comme les causes des phénomènes (Dieu, l’Être, l’Absolu), est enfin parvenue au stad positif, où, se détournant de la recherche des causes premières ou des causes finales, elle applique l’esprit scientifique à la connaissance, c'est-à-dire se contente de chercher les relations et les lois relatives qui régissent ces phénomènes. Le positivisme est donc la philosophie qui exprime la profonde croyance des rationalistes qui ont fondé la IIIème République dans la primauté de la science. Quelles conséquences pratiques en tirent-ils au niveau politique ? En premier lieu, le primat absolu de l’éducation, considéré comme la clé de voute du progrès de l’humanité, et qu’il importe d’ôter à l’Église, force du passé, tenante de l’explication métaphysique, pour la confier à ceux qui prépareront des esprits scientifiques, artisans du progrès humain, et c’est là une des significations de leur combat laïque et de leur intérêt pour l’enseignement. Ensuite, la recherche, dans l’ordre de la « physique sociale », d’une organisation politique et sociale capable de concilier l’ordre des choses (que l’esprit scientifique permettra de découvrir) avec le progrès qui est, depuis les origines, la loi même de l’humanité. De cette volonté de concilier ordre et progrès résulte une démarche synthétique qui caractérisera les hommes de la IIIème République, étudiant de près les structures réelles de la société pour imaginer les moyens de la faire progresser sans bouleversements. C’est cette méthode qui conduira les fondateurs de la IIIème République à imaginer la forme originale de régime politique que constitue la démocratie libérale ; c’est elle encore qui inspirera le réformisme social dont se réclame le régime. Si entre opportunistes et radicaux, des divergences se font parfois fait jour sur la méthode à employer, l’accird sur les fins comme sur les principes est très profond et il conduira les radicaux au pouvoir à partir de 1902 à reprendre à leur compte l’essentiel de la politique des modérés en ce qui concerne, non le détail des mesures politiques, mais l’esprit qui les inspire et les frésultats qu’on en escompte. Contesté par la réaction anti-rationaliste qui se manifeste à la fin des années 1880, le poids du positivisme ne cesse de décliner à partir de cette date et s’amenuise singulièrement après la Première Guerre mondiale.
POSTES ET TÉLÉGRAPHE :
Listes des ministres des Postes, Télégraphes et Communications :
-5 février 1879 - 6 avril 1885 : Adolphe Cochery
-6 avril 1885 - 7 janvier 1886 : Ferdinand Sarrien
-7 janvier 1886 - 30 mai 1887 : Félix Granet
-20 mars 1894 - 30 mai 1894 : Jean Marty
-30 mai 1894 - 26 janvier 1895 : Victor Lourties
-26 janvier 1895 - 1 novembre 1895 : André Lebon
-1 novembre 1895 - 29 avril 1896 : Gustave Mesureur
-29 avril 1896 - 28 juin 1898 : Henry Boucher
-28 juin 1898 - 1 novembre 1898 : Émile Maruéjouls
-1 novembre 1898 - 22 juin 1899 : Paul Delombre
-22 juin 1899 - 7 juin 1902 : Alexandre Millerand
-7 juin 1902 - 24 janvier 1905 : Georges Trouillot
-24 janvier 1905 - 12 novembre 1905 : Fernand Dubief
-12 novembre 1905 - 14 mars 1906 : Georges Trouillot
-14 mars 1906 - 24 juillet 1909 : Louis Barthou
-24 juillet 1909 - 3 novembre 1910 : Alexandre Millerand
-3 novembre 1910 - 2 mars 1911 : Louis Puech
-2 mars 1911 - 27 juin 1911 : Charles Dumont
-27 juin 1911 - 14 janvier 1912 : Victor Augagneur
-14 janvier 1912 - 22 mars 1913 : Jean Dupuy
-22 mars 1913 - 9 décembre 1913 : Alfred Massé
-9 décembre 1913 - 17 mars 1914 : Louis Malvy
-17 mars 1914 - 9 juin 1914 : Raoul Péret
-9 juin 1914 - 13 juin 1914 : Marc Réville
-13 juin 1914 - 29 octobre 1915 : Gaston Thomson
-29 octobre 1915 - 27 novembre 1919 : Étienne Clémentel
-27 novembre 1919 - 20 janvier 1920 : Louis Dubois
-29 mars 1924 - 9 juin 1924 : Louis Loucheur
-9 juin 1924 - 14 juin 1924 : Pierre Étienne Flandin
-14 septembre 1928 - 11 novembre 1928 : Henry Chéron
-3 novembre 1929 - 21 février 1930 : Louis Germain-Martin
-21 février 1930 - 2 mars 1930 : Julien Durand
-2 mars 1930 - 13 décembre 1930 : André Mallarmé
-13 décembre 1930 - 27 janvier 1931 : Georges Bonnet
-27 janvier 1931 - 20 février 1932 : Charles Guernier
-20 février 1932 - 3 juin 1932 : Louis Rollin
-3 juin 1932 - 18 décembre 1932 : Henri Queuille
-18 décembre 1932 - 26 octobre 1933 : Laurent Eynac
-26 octobre 1933 - 30 janvier 1934 : Jean Mistler
-30 janvier 1934 - 9 février 1934 : Paul Bernier
-9 février 1934 - 8 novembre 1934 : André Mallarmé
-8 novembre 1934 - 4 juin 1936 : Georges Mandel
-4 juin 1936 - 22 juin 1937 : Robert Jardillier
-22 juin 1937 - 18 janvier 1938 : Jean-Baptiste Lebas
-18 janvier 1938 - 13 mars 1938 : Fernand Gentin
-13 mars 1938 - 10 avril 1938 : Jean-Baptiste Lebas
-10 avril 1938 - 21 mars 1940 : Alfred Jules-Julien
-21 mars 1940 - 16 juin 1940 : Alfred Jules-Julien
-27 juin 1940 - 12 juillet 1940 : André Février
POTHUAU (Louis, Marie, Alexis), 1815-1882 : Vice-amiral et homme politique. Né à Paris le 28 octobre 1815, Louis Pothuau est un ancien élève de l’Ecole navale. En 1870, durant le siège de Paris, il est détaché aux marins débarqués qui participent au siège de Paris, comme commandant les forts d'Ivry, de Bicêtre et de Montrouge. Officier républicain, député de la Seine de 1871 à 1875, il est nommé a deux reprises ministre de la Marine et des Colonies : du 19 février 1871 au 24 mai 1873 dans les premier et second cabinets Dufaure puis du 13 décembre 1877 au 3 février 1879 dans le cinquième cabinet Dufaure. Il lance plusieurs programmes navals et la construction de canons d’acier. Il décide de limiter également le nombre de cadres et de faire des économies d’équipement. Il s’occupe de la déportation des communards en Nouvelle-Calédonie. Sénateur de 1875 à sa mort, il est nommé ambassadeur à Londres de 1879 à 1880 et décède à Paris le 7 octobre 1882.
POTTECHER (Maurice), 1867-1960 :
Né à Bussang (Vosges), le 19 octobre 1867, Maurice Bussang montre très tôt des dispositions pour l’art et la littérature. Il fait des études brillantes au collège d’Epinal dont il sort bachelier à 16 ans pour faire une année de rhétorique supérieure au collège Louis-le-Grand, puis obtient une licence en droit. Il fait alors la connaissance de M. Suarès, son condisciple, de Romain Rolland, et de Paul Claudel. Il rencontre Alphonse et Léon Daudet et devient un habitué de la rie de Bellechasse où se croisent Pierre Loti, Maurice Barrès, Edmond de Goncourt, Marcel Schwob. Avec ce dernier, il cherche à monter une pièce de Shakespeare au théâtre de l’œuvre, dont l’interprète Camille de Saint-Maurice, dite Georgette Camée, est sa compagne depuis 1890. Quand ils se marient en 1894, elle abandonne sa carrière et se consacre à l’œuvre de son mari. Grâce à Marcel Schwob encore, il devient l’ami de Jules Renard.
Depuis son arrivée à Paris, Maurice Pottecher publie articles, contes, nouvelles et poèmes : son talent est reconnu mais il ne s’habitue pas aux mœurs littéraires et théâtrales de la capitale. Aussi pour le centenaire de la République en 1889, monte-t-il le Médecin malgré lui dans son village natal à Bussang. C’est le début d’une grande aventure : « Le désir me vient, écrit Maurice Pottecher de créer un théâtre qui fut accessible à tous, au peuple entier sans exclusion de caste ni fortune, et qui pût intéresser toux ceux d’esprits même très divers, qu’il réunirait sur ses gradins… ». En 1895, il crée avec succès Le diable marchand de goutte. Les acteurs sont des amis, des membres de la famille, des voisins, les figurants viennent du village, les décors et les équipements sont manipulés par les ouvriers locaux. Ainsi naît le Théâtre du peuple qui provoque un vif engouement et trouve un écho en France comme en Europe. D’abord jouées en plain air, les pièces sont bientôt données sous une vaste charpente de pins ; de grandes portes roulantes permettent de fermer et d’ouvrir le fond de la scène sur le décor naturel. Le Théâtre du peuple est voué à " l’éducation et au divertissement des populations des hautes vallées vosgiennes ". Il affiche sa devise au-dessus de la scène : « Par l’art. Pour l’humanité ». La famille, de tradition radicale socialiste, est mécène du projet. Si le théâtre du Peuple veut favoriser une communion dans la simplicité populaire, les dérives paternalistes du « padre », comme se fait appeler Maurice Pottecher, peuvent aussi provoquer des conflits. Confinés à des petits rôles de figuration réducteurs et caricaturaux, les ouvriers ne voyaient pas toujours d’un bon oeil les ambitions de leur employeur.
Maurice Pottecher partage dès lors son temps entre ses étés de création théâtrale et la vie littéraire parisienne : il écrit pour son théâtre une pièce tous les ans. Il monte en 1897 Le Sotré de Noël avec son ami R. Auvray. Ce dernier, qui a trouvé le nom de Théâtre du peuple, l’incite à s’engager et en particulier à se soucier de l’éducation populaire alors qu’apparaît la première loi sur le repos hebdomadaire en 1907. L’œuvre théâtrale de Maurice Pottecher devient éducative et renoue avec le grand rêve de Michelet. Il multiplie les conférences et les articles pour expliquer sa démarche et faire des émules. Selon lui, le spectacle doit être simple, émouvant, accessible à tous, propre à éveiller les consciences et à réunir fraternellement ceux que leur classe sociale séparent ordinairement. Pour Maurice Pottecher, l’intérêt d’un théâtre populaire provincial, est également « de refléter le génie particulier au sol » : l’encrage régional est essentiel.
Maurice Pottecher participe aux côtés d’amis plus révoltés (Octave Mirbeau, Maurice Bouchor, Louis Lumet) au Comité du théâtre populaire en 1899. Mais, humaniste est spiritualiste de tempérament, c’est surtout avec Romain Rolland (qui publie en 1900 un ouvrage sur le théâtre populaire) qu’il se sent en affinité, partageant le même enthousiasme démocratique, le même idéalisme. « Le Peuple fournit à l’Art une foi » écrit Maurice Pottecher.
En 1904, sa pièce Liberté, créée à Bussang en 1898, est représentée à Paris au Congrès des Universités populaires. Le théâtre de Bussang endommagé après le Première Guerre mondiale, reprend ses activités estivales en 1921. Le lieu de spectacle s’aggrandit : 1200 places dans une salle désormais fermée hormis le fond mobile. On y donne L’Anneau de Sakountala, le Château de Hans, monté par Pierre Richard-Willm, le jeune premier du cinéma de l’entre-deux-guerres, un fidèle de Bussang.
Maurice Pottecher participe au Congrès international du théâtre des années trente que préside son ami Firmin Gémier qui suit de très près l’aventure de Bussang. Après la guerre, le théâtre continue d’être approvisionnée en pièces nouvelles par Maurice Pottecher. Il décède à Paris le 16 avril 1960.
POTTECHER (Frédéric) : Histoire du théâtre du peuple de Bussang, Bussang Vosges, 1981.
POTTECHER (Frédéric), DECOMBIS (V) : Un siècle de passion au théâtre du peuple de Bussang, Paris, Gérard Louis Éditeur, 1995.
POUBELLE (Eugène, René), 1831-
POUGET (Émile), 1860-1931 : Révolutionnaire et syndicaliste. Émile Pouget est né le 12 octobre 1860 à Pont-de-Salars dans le département de l'Aveyron. Son père, qui était notaire, mourut de bonne heure. Sa mère se remariera et, de ce fait, sa vie fut en quelque sorte désaxée. Néanmoins, son beau-père, bon républicain de l'époque, batailleur comme son beau-fils, perdit vite sa place de petit fonctionnaire pour avoir écrit dans une petite feuille de combat qu'il avait du reste fondée.
C'est au lycée de Rodez où il commença ses études que naquit sa passion pour le journalisme. Il fonda à quinze ans son premier journal, le Lycéen républicain. Je n'ai pas besoin de dire comment ses maîtres accueillirent la petite feuille. En 1875, son beau-père mourut. Il lui fallut quitter le lycée pour gagner sa vie. Paris l'attira. […] Employé dans un magasin de nouveautés, il se mit, la tâche terminée, à courir les réunions publiques, les groupes avancés et rapidement se donna tout entier à la propagande révolutionnaire. Mais, déjà, l'anarchisme purement spéculatif et idéaliste ne pouvait satisfaire un sens social prononcé et, dès 1879, il prit part à la fondation, à Paris, du premier syndicat d'employés. Il y a une telle unité de vie militante chez Pouget qu'il sut bientôt décider son syndicat à publier la première en date des brochures antimilitaristes. Inutile de dire que ce fut notre syndicaliste qui la rédigea; et j'ajoute qu'elle serait aujourd'hui impubliable aussi bien par la véhémence de son texte que par les conseils dont elle était largement émaillée.
Vers les années 1882-1883, le chômage sévissait à Paris avec une certaine intensité, si bien que le 8 mars 1883 la chambre syndicale des Menuisiers convoquait les sans-travail à un meeting en plein air qui devait se tenir sur l'esplanade des Invalides.
Bien entendu, le meeting fut rapidement dissous par la police, mais deux groupes importants de manifestants se formèrent: l'un prit le chemin de l'Élysée et fut rapidement dispersé, l'autre, avec Louise Michel et Pouget, dévala le boulevard Saint-Germain. Rue du Four une boulangerie fut plus ou moins dévalisée.
Néanmoins, la manifestation continua et ce ne fut qu'arrivée place Maubert qu'elle se trouva en présence d'une force de police importante. Les agents s'étant précipités pour arrêter Louise Michel, Pouget s'efforça de la délivrer; il fut à son tour arrêté et conduit au poste. Quelques jours après, sous l'inculpation, inexacte, de pillage à main armée, il passait en cour d'assises. Louise était condamnée à douze ans de réclusion, Pouget à huit ans, peine qu'il dut purger à la prison de droit commun de Melun. Il y restera trois années pleines, et une amnistie intervenue à la suite d'une action de Rochefort l'en tira au bout de ce temps. La prison, au contraire, n'avait pas assagi le militant.
C'est le 24 février 1889 que parut le premier numéro du Père Peinard en petite brochure, rappelant la Lanterne de Rochefort 2, écrit à la façon imagée du Père Duchêne d'Hébert, mais d'un style plus prolétarien.
[…] Les petits pamphlets de Pouget eurent un succès dont on se rend difficilement compte aujourd'hui. Tant que dura le Père Peinard -puis la Sociale-, il y eut dans certains centres ouvriers une réelle agitation prolétarienne, et je pourrais citer dix, vingt localités ouvrières, telles Trélazé, Fourchambault où tout mouvement est tombé à rien après la disparition de ses pamphlets.À Paris, notamment, parmi les ébénistes du faubourg Saint-Antoine, le mouvement revendicatif dura tant que vécut le Père Peinard.
Un petit brûlot, le Pot-à-Colle, écrit dans le même style, y parut même vers les années 1891-1893.
L'anarchisme de Pouget est avant tout et surtout prolétarien. Dès les premiers numéros du Père Peinard, il exalte les mouvements de grève, les numéros du 1er mai sont uniquement consacrés à encourager "les copains" à y prendre part : Le 1er mai est une occasion qui peut tourner bien. Il suffirait pour cela que nos frangins, les troubades, lèvent la crosse en l'air comme en février 1848, comme au 18 mars 1871, et ça ne serait pas long du coup.
L'un des premiers, il sent tout ce que l'on peut tirer de l'idée de grève générale et, dès 1889, il écrit :
Oui, nom de Dieu, y a plus que ça aujourd'hui: la grève générale ! Voyez-vous ce qui arriverait si dans quinze jours il n'y avait plus de charbon. Les usines s'arrêteraient, les grandes villes n'auraient plus de gaz, les chemins de fer roupilleraient.
Du coup, le populo presque tout entier se reposerait. Ça lui donnerait le temps de réfléchir; il comprendrait qu'il est salement volé par les patrons et, dame, il se pourrait bien qu'il leur secoue les puces dare-dare !
Et plus loin: Donc, une fois que les mineurs seraient tous en l'air, que la grève serait quasi générale, faudrait, nom de Dieu, qu'ils se foutent à turbiner pour leur propre compte; la mine est à eux, elle leur a été volée par les richards; qu'ils reprennent leur bien, mille bombes. Et, le jour où, assez marioles, y aura une tripotée de bons bougres qui commenceront le chabanais dans ce sens, eh bien! foi de Père Peinard, le commencement de la fin sera arrivé !
Mais une telle propagande, menée avec tant de vigueur, n'était certes pas sans inconvénients. Les poursuites pleuvaient dru et, si ses gérants écopaient, Pouget, lui aussi, allait faire de temps à autre des séjours à Sainte-Pélagie, la prison politique de l'époque, ce qui n'empêchait pas le Père Peinard de paraître, des copains allant à tour de rôle chercher la copie à la prison même.
Une période d'agitation aussi intense, et il faut bien le dire elle n'était pas seule, avait exaspéré certaines individualités; une série d'attentats s'ensuivit avec, comme couronnement, l'assassinat à Lyon du président Sadi Carnot.(3)
La bourgeoisie, excitée par la presse à son service, fut prise d'une frousse telle qu'elle ne crut trouver son salut que dans le vote par les parlements d'une série de lois de répression qualifiées justement, la peur passée, de lois scélérates.(4)
Les arrestations succédèrent aux perquisitions qui eurent lieu par centaines à travers le pays, et un grand procès, dit Procès des Trente", fut engagé.
Pouget et pas mal d'autres camarades mirent la frontière entre eux et leurs prétendus juges. L'exil commençait pour lui et, le 21 février 1894, le 253e et dernier numéro de la première série du Père Peinard paraissait.
Réfugié à Londres où il retrouva Louise Michel, ce serait mal connaître notre camarade que de croire qu'il allait s'arrêter et, en septembre de la même année, le premier numéro de la série londonienne du Père Peinard paraissait. Huit numéros parurent jusqu'en janvier 1895. Mais un exil n'est pas une solution, la bourgeoisie se sentait un peu rassurée, Pouget revint en France pour purger sa contumace et fut acquitté comme l'avaient du reste été tous ses coaccusés du "Procès des Trente".
Toutes ces péripéties n'avaient en rien altéré l'ardeur du militant, cela ne traîna pas, le 11 mai de la même année paraissait la Sociale qui succédait au Père Peinard, dont son fondateur, pour de multiples raisons, n'avait pu reprendre momentanément le titre (qui ne fut repris qu'en octobre 1896).
De ces deux nouveau-nés de Pouget, que dire sinon qu'ils furent égaux, par l'intensité de la propagande, à leur aîné ? Même courage, plus de courage même, car les "lois scélérates" aggravaient les difficultés, et même vaillance. C'est de cette époque que datent les fameux Almanach du Père Peinard, de nombreuses brochures de propagande dont l'une, entre autres, signée Pouget, les Variations guesdistes fit quelque bruit dans le landerneau du socialisme politicien.
Vint l'affaire Dreyfus Pouget, là encore, ne pouvait pas rester indifférent. Il se jeta dans la bataille, mais ce fut pour réclamer la justice aussi pour les anarchistes envoyés au bagne et qui se mouraient aux Îles du Salut, qui leur étaient à cette époque spécialement affectées.
Par de multiples articles, par sa brochure, les Lois scélérates, écrite en collaboration avec Francis de Pressencé, il réussit à attirer l'attention des masses, et des gouvernants de l'époque durent mettre en liberté quelques-uns de ceux qui restaient d'une prétendue révolte habilement machinée antérieurement par l'administration pénitentiaire.
Nous sommes arrivés à l'année 1898. La Confédération Générale du Travail (CGT) prend un développement de plus en plus grand, une importance sociale toujours plus forte.
Le Congrès de Toulouse (1897), sous l'impulsion de Pouget, avait adopté un important rapport sur le boycottage et le sabotage, qui apportait à la classe ouvrière une nouvelle forme de lutte.
Enfin, et c'était là son idée la plus chère, il avait envisagé de doter la classe ouvrière d'un organe de combat exclusivement rédigé par les intéressés. Déjà un premier vœu dans ce sens avait été adopté au Congrès de Toulouse, puis repris au Congrès de Rennes. Il s'agissait alors dans l'esprit des camarades d'un journal quotidien, projet auquel l'on dut renoncer par la suite, en présence de difficultés financières de tout ordre. N'importe, l'idée était lancée, et il est bon de le rappeler ici, c'est aussi grâce à la ténacité de Pouget que le premier numéro de la Voix du peuple paraissait le 1er décembre 1900.
Pouget, nommé secrétaire adjoint de la CGT, section des fédérations, était chargé d'assurer la parution hebdomadaire du journal. Grâce à son effort persévérant et aidé par Fernand Pelloutier, la classe ouvrière pour la première fois était dotée d'un organe bien à elle.
Il me serait facile, la collection de la Voix du peuple aidant, de reprendre une à une les campagnes de tous ordres, luttes contre les bureaux de placement, repos hebdomadaire, journée de huit heures, luttes contre les iniquités les plus diverses auxquelles le nom d'Émile Pouget est constamment mêlé et toujours au premier plan de la bataille.
C'est toute la classe ouvrière qui luttait par sa plume.
Il me faut cependant rappeler ces beaux et inoubliables numéros spéciaux sur Le tirage au sort, sur le 1er mai, conçus et mis en valeur d'une telle façon qu'il n'est pas exagéré de dire que jamais une telle intensité de propagande n'a été dépassée.
Rappellerai-je aussi la campagne pour la journée de huit heures, ayant son aboutissement au 1er mai 1906 ?
Il faut avoir vécu cette époque aux côtés de Pouget pour savoir quelle science - le mot ne me paraît pas trop fort - de la propagande il déploya alors. Secondé par son alter ego Victor Griffuelhes (9), pendant près de deux années, ils surent trouver chaque fois du nouveau pour tenir en haleine la masse des travailleurs qui parfois a trop tendance à douter d'elle-même.
Il n'est donc pas exagéré de dire que si, là où elle sut l'imposer intégralement, la classe ouvrière jouit de la journée de huit heures, elle le doit pour une part assez appréciable à Émile Pouget. Il suffit de reprendre la collection des congrès de la CGT entre 1896 et 1907 pour bien juger de l'influence profonde qu'il exerça sur ces assises du travail. Ses rapports, ses interventions au sein des commissions sont encore les plus sûr garants de ce que lui doit le syndicalisme. Rappellerai-je qu'à Amiens c'est lui qui tint la plume et que la motion, qui aujourd'hui encore reste la charte du véritable syndicalisme est en partie son oeuvre ? [6]
Il faut rappeler aussi, en dehors des nombreuses brochures qu'il signa, sa collaboration à nombre de petits journaux ouvriers et aussi ses grands articles parus dans Le Mouvement socialiste d'Hubert Lagardelle [7] , études si substantielles qu'il sera impossible de les ignorer lorsque l'on voudra à l'avenir étudier plus que superficiellement les origines et les méthodes du mouvement syndicaliste en France.
Pouget eut toute sa vie comme la hantise d'un journal quotidien, mais d'un journal prolétarien reflétant exclusivement les aspirations de la classe ouvrière. C'est alors ce qu'il tenta en fondant avec d'autres camarades La Révolution, Griffuelhes en était, Monatte [8] aussi.
Malheureusement, il faut beaucoup d'argent pour faire vivre un journal quotidien et l'aide escomptée n'étant pas venue, La Révolution dut, au bout de quelques mois, cesser de paraître. Ce fut bien là l'un des plus grands crève-coeur de sa vie de voir sombrer l'oeuvre qu'il avait si ardemment désirée.
Je pourrais presque m'arrêter ici mais il me faut rappeler l'affaire de Villeneuve-Saint-Georges. Il semble bien en effet, avec le recul des années, que cette misérable et triste journée ait été voulue par Clémenceau.
C'était du reste l'opinion de Griffuelhes autant que celle de Pouget. Des poursuites furent engagées contre un certain nombre de militants et naturellement Pouget était du nombre. Mais au bout de plus de deux mois passés à la prison de Corbeil, l'accusation dut être abandonnée et il n'est pas exagéré de dire que, si le procès était venu, le banc d'infamie n'aurait sans doute pas été celui des accusés. Mais déjà la santé de Pouget, qui était notre aîné d'une bonne dizaine d'années, commençait à laisser à désirer. À la longue, la lutte telle qu'il la comprenait usa quelque peu son homme. Le repos pour lui consista alors à se remettre au travail pour gagner sa vie et jusqu'au jour où la maladie le terrassa; il n'arrêta pas, bien qu'âgé de soixante et onze ans, de travailler. Il décèdé à Lozère (Seine-et-Oise), le 21 juillet 1931.
QUIBEN (X.-U.) : Émile Pouget, la plume rouge et noire du Père Peinard, Paris, Éditions libertaires, 2006.
POUYER-QUERTIER (Augustin, Thomas), 1820-1891 : Industriel et homme politique. Né à Etouteville-en-Caux (Seine-Inférieure), le 2 septembre 1820, industriel, Augustin Pouyer-Quertier fonde à Rouen une fabrique de cotonnades. Député de la Seine-Inférieure de 1871 à 1876, il est nommé ministre des Finances du 25 février 1871 au 23 avril 1872 dans le premier cabinet Dufaure. Après la conclusion du traité de Francfort, il fait voter un emprunt de 2,5 milliards de francs (loi du 20 mai 1871) qui, couvert deux fois, permet de libérer à la fin de 1871 neuf départements occupés. Les droits indirects sur le tabac, les allumettes, le sucre etc. sont relevés ainsi que les droits de douane à l'importation (lois des 23 août, 1er et 4 septembre 1871, loi du 28 février 1872). On lui doit enfin la loi du 21 juin 1871 qui fixe la composition de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Il décède à Rouen (Seine-Inférieure) le 2 avril 1891.
Politique économique : Questions financières, 1871-1872 (1872).
PRADON–VALLANCY (Hubert), 1891-1943 : Agriculteur et homme politique. Descendant d’un député des Etats généraux, Hubert Pradon-Vallancy est maire de Texat-Sénat et conseiller d’arrondissement. Elu député républicain socialiste de l’Allier en 1928, il devient conseiller général de ce département en 1932. Il préside le conseil d’administration du Progrès de l’Allier.
PREMIER MAI : Le premier rai de soleil du jour de mai naissant paraît sur les tombes silencieuses de Waldheim et découvre lentement le modeste monument des cinq anarchistes qui succombèrent en novembre 1887 entre les mains du bourreau. C'est de la tombe commune de ces cinq militants que surgit l'idée universelle du Premier Mai.
Le terrible assassinat de Chicago fut l'épilogue sinistre de ce grand mouvement qui se produisit le premier mai 1886 dans tous les centres industriels des Etats-Unis afin d'obtenir pour le prolétariat américain, avec l'arme de la grève générale, la journée de huit heures. Ces cinq anarchistes, dont les restes reposent sous la verte pelouse de Waldheim, furent les porte-voix les plus vaillants et les plus audacieux dans la grande lutte entre le capital et le travail et durent payer de leur vie leur fidélité à leurs frères de combat. inspiré de. l'esprit des cinq pendus, le Congrès international de Paris, en 1889, conçut la résolution de proclamer je premier mai jour férié du prolétariat universel et jamais une résolution n'a trouvé un écho aussi puissant et enthousiaste au sein du grand peuple des déshérités. On vit dans la réalisation pratique de cette résolution un symbole de l'émancipation prochaine.Ni la rage aveugle des exploiteurs, ni les misérables tentatives des politiciens socialistes ne furent capables de changer je sens profond de cette manifestation caractéristique ou de la faire dégénérer. Comme une lueur ardente, l'idée vécut dans je coeur immense du peuple travailleur de tous les pays et ne put en être extirpée, même durant les temps de dure réaction. Car c'était une idée surgie des profondeurs et qui devait maintenir solidement dans l'esprit des masses un espoir luttant pour une expression vivante et faisant appel à la vigoureuse conscience des opprimés comme une pensée nouvelle, l'idée resurgit du plus profond : ce n'est pas d'en-haut que fleurira notre salut, c'est d'en-bas que doit venir la force qui brisera nos chaînes et donnera des ailes à notre aspiration. Le premier Mai est pour nous un symbole, un symbole de la libération sociale par la voie de l'action directe qui trouve sa forme la plus achevée dans la grève générale. Tous ceux qui souffrent la servitude et que la préoccupation quotidienne de l'existence marque de son empreinte, l'énorme armée de tous ceux qui extirpent les trésors de la terre, travaillent sur les hauts-fourneaux ou dirigent la charrue par les champs, tous ces millions d'êtres qui doivent satisfaire le capital, dans d'innombrables usines et ateliers, par un tribut de sang, les travailleurs manuels et intellectuels de tous les continents, tous seront partie de cette immense et invincible association du sein de laquelle jaillira un futur nouveau dès que. la connaissance de sa désolante existence s'encrera fortement dans la conscience de chacun de ses membres.
Sur ses épaules, un monde entier repose, elle tient le destin de toute la société entre ses mains et sans sa force créatrice, toute vie humaine est condamnée à mort.
La vente de son travail et de son esprit est la cause occulte de sa servitude et de sa dépendance : le refus d'effectuer ce travail pour les monopolistes doit par conséquent se transformer en l'instrument de son émancipation. Le jour où cette évidence illuminera l'esprit des opprimés, ce jour sonnera le grand crépuscule des dieux de la société capitaliste. Le Premier Mai doit être pour nous un enseignement qui apporte à la conscience des travailleurs et des opprimés ténorme énergie qui est entre leur mains. Cette force prend racine dans l'économie, dans notre activité comme producteurs. La société naît chaque jour de cette force et reçoit à tout moment les possibilités de son existence même. En cela, le membre d'un parti ne compte pas, mais bien le mineur, le cheminot, le forgeron, le paysan l'homme qui produit les valeurs sociales et dont l'énergie créatrice maintient le monde sur ses rails. Le levier de notre force est là ; dans ce foyer doit être forgée l'arme qui blessera à. mort le veau d'or.
Nous ne parlons pas ici de la conquête du pouvoir, mais de la conquête de l'usine, du champ, de la mine. Car n'importe quel pouvoir politique n'a jamais été autre chose que la violence organisée qui impose aux grandes masses du peuple la dépendance économique envers des minorités privilégiées. L'oppression politique et l'exploitation économique vont de pair, elles se complètent et l'une ne peut exister sans l'appui de l'autre. Il est absurde de croire que de futures institutions gouvernementales constitueront un jour une exception.
L'important n'est pas l'étiquette extérieure, mais l'essence d'une institution ; et la pire forme des tyrannies fut toujours celle qui s'est exercée au nom du peuple ou d'une classe. Par conséquent, toute véritable lutte contre le monopole de la possession est en même temps une lutte contre le pouvoir qui le protège et de même que l'objectif du prolétariat militant sur le terrain économique est l'abolition et la suppression du monopole privé sous toutes ses formes, son objectif politique doit être aussi la suppression de toute institution du pouvoir. Celui qui utilise l'une de ces formes pour anéantir l'autre n'a pas compris la véritable signification du socialisme, et c'est toujours l'application du même principe d'autorité qui a été jusqu'ici la pierre angulaire de joutes les tyrannies. Le Premier Mai doit être un symbole de la solidarité internationale, d'une solidarité non limitée aux cadres de l'Etat national qui correspond toujours aux intérêts des minorités privilégiées du pays. Entre les millions de salariés qui supportent le joug de l'esclavage, il existe une unité d'intérêts, quelle que soit la langue qu'ils parlent et la bannière sous laquelle ils sont nés.
Mais entre les exploiteurs et les exploités d'un même pays, il existe une guerre ininterrompue qui ne peut être solutionnée par aucun principe d'autorité et qui prend ses racines dans les intérêts contradictoires des diverses classes.
Tout nationalisme est un déguisement idéologique des véritables faits : il peut dans un moment donné entraîner les grandes masses vers ses représentants menteurs, maïs il n'a jamais été capable d'abolir de ce monde la brutale réalité des choses.
Les mêmes classes qui, à l'époque de la Guerre mondiale, tentèrent d'élever le patriotisme du peuple jusqu'à l'exaltation, envoient aujourd'hui les produits du travail du prolétariat allemand à celui qui fut en d'autres temps "l'ennemi étranger", tandis que les grandes masses manquent du plus nécessaire dans leur propre pays. Les intérêts nationaux des classes dominantes sont mis en balance quand ils sont identiques aux intérêts de leur porte-monnaie et qu'ils produisent le pourcentage nécessaire.Si des millions de pauvres diables ont laissé leur vie ou leurs membres dans cette folie des grandes tueries des peuples, ce ne fut jamais parce qu'ils voulaient payer telle ou telle dette de l'honneur national, mais parce que leurs cerveaux ont été maintenus dans les ténèbres des préjugés artificiellement créés.
Cette sanglante tragédie se répétera, à moins que les ouvriers ne prennent conscience des véritables ressorts de la guerre et des pantalonnades nationalistes. La lutte infatigable contre le militarisme, non les vulgarités pacifistes, nous est donc nécessaire. Tant que les travailleurs seront disposés à produire les instruments de mort violente et du massacre des masses, la " soif de sang, " des peuples ne disparaîtra pas ; pour les esclaves qui forgent eux-mêmes leurs chaînes, la libération n'arrivera jamais. Ainsi le Premier Mai est pour nous une puissante manifestation contre tout militarisme et contre l'immense supercherie nationaliste derrière lesquels se cachent les intérêts brutaux des classes possédantes.Il faut créer un futur nouveau sur les bases du socialisme libertaire, sous le souffle ardent duquel les conceptions moribondes des temps passés et les institutions rongées du présent disparaîtront dans l'abîme de ce qui a été, pour ouvrir l'ère de la véritable liberté, de la véritable égalité et de l'amour humain.
Nous célébrons le Premier Mai dans ce sens, comme le symbole d'un avenir prochain qui germera au sein du peuple révolutionnaire pour racheter le monde de la malédiction des dominations de classes et de l'esclavage du salarié.
PRÉFETS :
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE :
Depuis 1848, l’Etat est personnifié et représenté par un magistrat unique, le président de la République, appelé aussi chef de l’Etat.
Sous ce rapport, il apparaît
-Adolphe Thiers (1797-1877) : 17 février 1871- 24 mai 1873 ;
-Patrice de Mac Mahon (1808-1893) : 24 mai 1873 - 30 janvierg1879 ;
-Jules Grévy (1807-1891) 30 janvier 1879 - 3 décembre 1887 ;
-Sadi Carnot (1837-1894) : 3 décembre 1887 - 24 juin 1894 ;
-Jean Casimir-Perier (1847-1907) 24 juin 1894 - 15 janvier 1895 ;
-Félix Faure (1841-1899) : 17 janvier 1895 - 16 février 1899 ;
-Emile Loubet (1838-1929) : 18 février 1899 - 18 février 1906 ;
-Armand Fallières (1841-1931) : 18 février 1906 - 18 février 1913 ;
-Raymond Poincaré (1860-1934) : 18 février 1913 - 17 févrierg1920 ;
-Paul Deschanel (1855-1922) : 17 février 1920 - 21 septembre1920 ;
-Alexandre Millerand (1859-1943) : 23 septembre 1920 - 11 juinn1924 ;
-Gaston Doumergue (1863-1937) : 13 juin 1924 - 13 juin 1931 ;
-Paul Doumer (1857-1932) : 13 juin 1931 - 6 mai 1932 ;
-Albert Lebrun (1871-1950) : 10 mai 1932 - 13 juillet 1940.
DANSETTE (A.) : Histoire des présidents de la République, de Louis-Napoléon Bonaparte à Vincent Auriol, Paris, Amiot-Dumont, 1953.
LESOURD (P.) : Les présidents de la République dans l’Histoire de France, Paris, Les Editions Inter-Nationales, 1960
Les présidents de la Troisième République
Adolphe Thiers 1871-1873
Patrice de Mac Mahon
Jules Grévy
Sadi-Carnot
Casimir Périer
Félix Faure
Emile Loubet
armand Fallières
Raymond Poincaré
Paul Dechanel
Alexandre Millerand
Gaston Doumergue
Paul Doumer
Albert Lebrun
Les présidents du Conseil
Jules DUFAURE
Albert DE BROGLIE
Général DE CISSEY
BUFFET
SIMON
ROCHEBOUET
WADDINGTON
Charles de Freycinet
Jules FERRY
Léon Gambetta
ARISTIDE BRIAND
ERNEST MONIS
JOSEPH CAILLAUX
LOUIS BARTHOU
RENE VIVIANI
PAUL PAINLEVE
FREDERIC FRANCOIS MARSAL
EDOUARD HERRIOT
ANDRE TARDIEU
CAMILLE CHAUTEMPS
THEODORE STEEG
PIERRE LAVAL
JOSEPH PAUL-BONCOUR
EDOAURD DALADIER
ALBERT SARRAUT
PIERRE-ETIENNE FLANDIN
LEON BLUM
PAUL REYNAUD
PHILIPPE PETAIN
PRÉSIDENT DU CONSEIL :
L’existence du président du Conseil n’est pas constitutionnellement reconnue mais le terme apparaît dans le décret du 9 mars 1876 nommant Dufaure à la tête du gouvernement.
Si désormais le président de la République n’est plus membre du cabinet, c’est lui qui en désigne le chef, et pour se faire, il dispose d’une relative liberté de choix puisque, aucun partie n’a la majorité ni de chef incontesté et il peut écarter de ce poste, au moins pour un certain temps, des hommes qu’il n’apprécie guère, ainsi Poincaré vis-à-vis de Clemenceau. Toutefois, il ne peut imposer ses candidats au Parlement, car c’est ce dernier qui confère le pouvoir au gouvernement avec la pratique de l’investiture, non prévue dans la Constitution mais rapidement entrée dans les usages politiques. Ainsi, le 8 juin 1924, la Chambre des députés refuse-t-elle d’entrer en relation avec François-Marsal, chef d’un gouvernement de minorité désigné par Millerand.
Pour obtenir la confiance des députés, le président du Conseil désigné est nécessairement conduit à négocier avec les partis et les parlementaires dont il doit être l’exécutant docile. Il n’a donc que peu de pouvoir. Perpétuel négociateur plus que véritable chef d’équipe, il tient d’abord son autorité du fait qu’il constitue lui-même son gouvernement (dont le président de la République entérine la composition et à propos de laquelle il n’a son mot à dire que pour les affaires étrangère), mais n’importe quel ministre, n’importe quand peut poser la question de confiance. Il est chargé, outre de la responsabilité d’un département ministériel, de la présidence du Conseil du cabinet qui prépare la réunion officielle du conseil des ministres et comme tel, il parle au nom du gouvernement, mais la présidence du Conseil n’est dotée ni de locaux ni d’administration propres. Les présidents du Conseil, fréquemment anciens présidents de la Chambre des députés (8 fois), sont d’abord des conciliateurs (Briand, Laval, Chautemps) et, entre 1900 et 1914, les grands leaders sont rares (Clemenceau) ou leur passage à la tête du ministère brefs (Caillaux, Poincaré).
Avec la Première Guerre mondiale, l’autorité du Président du Conseil tend à se renforcer. Le 3 août 1914, Viviani devient le premier chef du gouvernement sans portefeuille pour mieux en coordonner l’activité (expérience sans suite immédiate). La même préoccupation aboutit à la création de comités interministériels, à l’apparition d’un sous-secrétariat d’Etat à la présidence du Conseil (novembre 1917). En outre, les réunions plus fréquentes des conseils de cabinet par Clemenceau, qui entend tenir Poincaré, le président de la République, à l’écart, lui permettent de concentrer entre ses mains des pouvoirs considérables, tout en maintenant le contrôle parlementaire.
L’après-guerre correspond à un certain retour en arrière : ainsi, en octobre 1925, le Parti radical contraint Painlevé à la démission. En juillet 1929, Briand demande aux députés une trêve. Toutefois, la mutation apparue entre 1914 et 1918 se confirme avec l’appel à la tête du gouvernement d’un homme providentiel à l’instar de Clemenceau ; ainsi Poincaré en 1926, Doumergue en 1934, Pétain en 1940. L’accroissement des pouvoir du président du Conseil est encore attesté par la décision de plusieurs d’entre eux de l’être sans portefeuille (Poincaré en 1928-1929, Doumergue, Flandin, Blum) ; par l’organisation, à partir de 1935, des services de la présidence du Conseil qui s’installe à l’Hôtel Matignon ; par le recours grandissant aux décrets-lois sous les gouvernements Poincaré, Doumergue, Laval, Chautemps et Daladier (3).
Cette évolution aboutit à la « dictature de Daladier », mais celle-ci disparaît au cours de la drôle de guerre pendant laquelle le gouvernement est à nouveau victime des jeux politiciens : le 9 mai 1940, Paul Reynaud est démissionnaire. Le 16 juin, Pétain devient président du Conseil : il sera le dernier, car, loin de « sauver » la République, il établit très rapidement un nouveau régime.
Liste des gouvernements de la IIIe République :
-Gouvernement de Défense nationale, 4 septembre 1870 au 17 février 1871 :
•Ministère du 4 septembre 1870 au 19 février 1871.
-Présidence d’Adolphe THIERS, du 31 août 1871 au 24 mai 1873 :
•Armand DUFAURE (1) du 19 février 1871 au 18 mai 1873 ;
• Armand DUFAURE (2) du 18 mai 1873 au 24 mai 1873.
-Présidence du Maréchal de MAC-MAHON, du 24 mai 1873 au 30 janvier 1879 :
•Albert de BROGLIE (1) du 24 mai 1873 au 24 novembre 1873 ;
•Albert de BROGLIE (2) du 26 novembre 1873 au 18 mai 1874 ;
•Ernest COURTOT de CISSEY du 22 mai 1874 au 10 mars 1875 ;
•Louis Joseph BUFFET du 10 mars 1875 au 23 février 1876 ;
•Armand DUFAURE (3) du 23 février 1876 au 9 mars 1876 ;
•Armand DUFAURE (4) du 9 mars 1876 au 2 décembre 1876 ;
•Jules SIMON du 12 décembre 1876 au 16 mai 1877 ;
•Albert de BROGLIE (3) du 17 mai 1877 au 19 novembre 1877 ;
•Gaétan de ROCHEBOUËT du 23 novembre 1877 au 24 novembre 1877 ;
•Armand DUFAURE (4) du 13 décembre 1877 au 30 janvier 1879.
-Présidence de Jules GRÉVY, du 30 janvier 1879 au 2 décembre 1887 :
•William Henri WADDINGTON du 4 février 1879 au 21 décembre 1879 ;
•Charles de FREYCINET (1) du 28 décembre 1879 au 19 septembre 1880 ;
•Jules FERRY du 23 septembre 1880 au 10 novembre 1881 ;
•Léon GAMBETTA du 14 novembre 1881 au 26 janvier 1882 ;
•Charles de FREYCINET (2) du 30 janvier 1882 au 29 juillet 1882 ;
•Charles DUCLERC du 7 août 1882 au 28 janvier 1883 ;
•Armand FALLIERES du 29 janvier 1883 au 17 février 1883 ;
•Jules FERRY (2) du 21 février 1883 au 30 mars 1885 ;
•Henri BRISSON du 6 avril 1885 au 29 décembre 1885 ;
•Charles de FREYCINET (3) du 7 janvier 1886 au 3 décembre 1886 ;
•René GOBLET du 11 déc. 1886 au 17 mai 1887 ;
•Maurice ROUVIER (1) du 30 mai 1887 au 4 décembre 1887.
-Présidence Sadi CARNOT, du 3 décembre 1887 au 24 juin 1894 :
•Pierre TIRARD du 11 décembre 1887 au 30 mars 1888 ;
•Charles FLOQUET du 3 avril 1888 au 14 février 1889 ;
•Pierre TIRARD du 22 février 1889 au 13 mars 1890 ;
•Charles de FREYCINET (4) du 17 mars 1890 au 18 février 1892 ;
•Emile LOUBET du 27 février 1892 au 28 novembre 1892 ;
•Alexandre RIBOT (1) du 6 décembre 1892 au 10 janvier 1893 ;
•Alexandre RIBOT (2) du 11 janvier 1893 au 30 mars 1893 ;
•Charles DUPUY (1) du 4 avril 1893 au 23 novembre 1893 ;
•Jean Casimir PERIER du 3 décembre 1893 au 22 mai 1894 ;
•Charles DUPUY (2) du 30 mai 1894 au 25 juin 1894.
-Présidence de Jean Casimir PERIER, du 27 juin 1894 au 15 janvier : 1895 :
•Charles DUPUY (3) juillet 1894 au 15 janvier 1895.
-Présidence Félix FAURE, du 17 janvier 1895 au 16 février 1899 :
•Alexandre RIBOT (3) du 26 janvier 1895 au 28 octobre 1895 ;
•Léon BOURGEOIS du 1er novembre 1895 au 23 avril 1896 ;
•Jules MELINE du 28 avril 1896 au 15 juillet 1898 ;
•Henri BRISSON (4) du 28 juin 1898 au 26 octobre 1898 ;
•Charles DUPUY (4) du 1er novembre 1898 au 18 février 1899.
-Présidence Emile LOUBET, du 18 février 1899 au 18 février 1906 :
•Charles DUPUY (5) du 18 février 1899 au 12 juin 1899 ;
•Pierre WALDECK-ROUSSEAU du 22 juin 1899 au 3 juin 1902 ;
•Emile COMBES du 7 juin 1902 au 1er janvier 1905 ;
•Maurice ROUVIER (2) du 24 janvier 1905 au 18 février 1906 ;
-Présidence d’Armand FALLIERES, du 18 février 1906 au 18 février 1913 :
•Maurice ROUVIER (3) du 18 février 1906 au 7 mars 1906 ;
•Ferdinand SARRIEN du 14 mars 1906 au 20 octobre 1906 ;
•Georges CLEMENCEAU (1) du 25 octobre 1906 au 20 juillet 1909 ;
•Aristide BRIAND (1) du 24 juillet 1909 au 2 novembre 1910 ;
•Aristide BRIAND (2) du 4 novembre 1910 au 27 février 1911 ;
•Ernest MONIS du 2 mars 1911 au 23 juin 1911 ;
•Joseph CAILLAUX du 27 juin 1911 au 11 janvier 1912 ;
•Raymond POINCARÉ (1) du 14 janvier 1912 au 21 janvier 1913 ;
•Aristide BRIAND (3) du 21 janvier 1913 au 18 février 1913 ;
-Présidence Raymond POINCARÉ, du 18 février 1913 au 18 février 1920 :
•Aristide BRIAND (4) du 18 février 1913 au 18 mars 1913 ;
•Louis BARTHOU du 22 mars 1913 au 2 décembre 1913 ;
•Gaston DOUMERGUE (1) du 9 décembre 1913 au 2 juin 1914 ;
•Alexandre RIBOT (4) du 9 juin 1914 au 12 juin 1914 ;
•René VIVIANI (1) du 13 juin 1914 au 26 juillet 1914 ;
•René VIVIANI (2) du 26 juillet 1914 au 29 octobre 1915 ;
•Aristide BRIAND (5) du 29 octobre 1915 au 12 décembre 1916 ;
•Aristide BRIAND (6) du 12 décembre 1916 au 17 mars 1917 ;
•Alexandre RIBOT (5) du 20 mars 1917 au 7 septembre 1917 ;
•Paul PAINLEVÉ (1) du 12 septembre 1917 au 13 novembre 1917 ;
•Georges CLEMENCEAU (2) du 16 novembre 1917 au 18 janvier 1920 ;
•Alexandre MILLERAND (1) du 20 janvier 1920 au 18 février 1920.
-Présidence de Paul DESCHANEL, du 17 février 1920 au 21 septembre 1920 :
•Alexandre MILLERAND (2) du 18 février 1920 au 23 septembre 1920.
-Présidence d’Alexandre MILLERAND : président du 23 sept. 1920 au 11 juin 1924 :
•Georges LEYGUES du 24 septembre 1920 au 12 janvier 1921 ;
•Aristide BRIAND (7) du 16 janvier 1921 au 12 janvier 1922 ;
•Raymond POINCARÉ (2) du 15 janvier 1922 au 29 mars 1924 ;
•Raymond POINCARÉ (3) du 29 mars 1924 au 1er juin 1924 ;
•Frédéric FRANÇOIS-MARSAL du 8 juin 1924 au 10 juin 1924.
-Présidence de Gaston DOUMERGUE : président du 13 juin 1924 au 13 juin 1931 :
•Edouard HERRIOT (1) du 14 juin 1924 au 10 avril 1925 ;
•Paul PAINLEVÉ (2) du 17 avril 1925 au 27 octobre 1925 ;
•Paul PAINLEVÉ (3) du 29 octobre 1925 au 22 novembre 1925 ;
•Aristide BRIAND (8) du 28 novembre 1925 au 6 mars 1926 ;
•Aristide BRIAND (9) du 9 mars 1926 au 15 juin 1926 ;
•Aristide BRIAND (10) du 23 juin 1926 au 17 juillet 1926 ;
•Edouard HERRIOT (2) du 19 juillet 1926 au 21 juillet 1926 ;
•Raymond POINCARÉ (4) du 23 juillet 1926 au 6 novembre 1928 ;
•Raymond POINCARÉ (5) du 18 novembre 1928 au 26 juillet 1929 ;
•Aristide BRIAND (11) du 29 juillet 1929 au 22 octobre 1929 ;
•André TARDIEU (1) du 3 novembre 1929 au 17 février 1930 ;
•Camille CHAUTEMPS (1) du 21 février 1930 au 25 février 1930 ;
•André TARDIEU (2) du 2 mars 1930 au 4 décembre 1930 ;
•Théodore STEEG du 13 décembre 1930 au 22 janvier 1931 ;
•Pierre LAVAL (1) du 27 jan. 1931 au 13 juin 1931.
-Présidence de Paul DOUMER, du 13 mai 1931 au 6 mai 1932 :
•Pierre LAVAL (2) du 13 juin 1931 au 12 janvier 1932 ;
•Pierre LAVAL (3) du 14 jan. 1932 au 6 février 1932 ;
•André TARDIEU (3) du 20 février 1932 au 10 mai 1932.
-Présidence d’Albert LEBRUN, du 10 mai 1932 au 10 juillet 1940 :
•Edouard HERRIOT (3) du 3 juin 1932 au 14 décembre 1932 ;
•Joseph PAUL-BONCOUR du 18 décembre 1932 au 28 janvier 1933 ;
•Edouard DALADIER (1) du 31 janvier 1933 au 24 octobre 1933 ;
•Albert SARRAUT (1) du 26 octobre 1933 au 24 novembre 1933 ;
•Camille CHAUTEMPS (2) du 26 novembre 1933 au 27 janvier 1934 ;
•Edouard DALADIER (2) du 30 janvier 1934 au 7 février 1934 ;
•Gaston DOUMERGUE (2) du 9 février 1934 au 8 novembre 1934 ;
•Pierre-Étienne FLANDIN du 8 novembre 1934 au 31 mai 1935 ;
•Fernand BOUISSON du 1er juin 1935 au 4 juin 1935 ;
•Pierre LAVAL (4) du 7 juin 1935 au 22 janvier 1936 ;
•Albert SARRAUT (2) du 24 janvier 1936 au 4 juin 1936 ;
•Léon BLUM (1) du 4 juin 1936 au 21 juin 1937 ;
•Camille CHAUTEMPS (3) du 29 juin 1937 au 14 janvier 1938 ;
•Camille CHAUTEMPS (4) du 18 janvier 1938 au 10 mars 1938 ;
•Léon BLUM (2) du 13 mars 1938 au 8 avril 1938 ;
•Edouard DALADIER (3) du 12 avril 1938 au 11 mai 1939 ;
•Edouard DALADIER (4) du 11 mai 1939 au 14 septembre 1939 ;
•Edouard DALADIER (5) du 14 septembre 1939 au 20 mars 1940 ;
•Paul REYNAUD du 22 mars 1940 au 16 juin 1940 ;
•Philippe PÉTAIN du 16 juin 1940 au 11 juillet 1940.
MAYEUR (Jean-Marie) : La vie quotidienne sous la IIIe République, Paris, Le Seuil, 1984.
CHANTEBOUT (G.) : Droit constitutionnel et sciences politiques, 1978, 10e éd., Paris, A. Colin, 1991.
PRESSE ASSOCIÉE (LA) : Agence de presse fondée en 1900 et animée par son directeur Jean-Marie-Bernard Passerieu, dit Jean-Bernard. Avocat et journaliste, ce dernier fonde L’Idée française à l’étranger et il préside le Syndicat générale de la presse française dans l’entre-deux-guerres. Républicain très gauchissant à ses débuts, il est initié à la franc-maçonnerie. Mais il évolue progressivement par la suite, entretenant d’excellentes relations avec les modérés. La Presse associée était une sorte de coopérative de journalistes : elle fournissait aux quotidiens, hebdomadaires et périodiques abonnés, des informations, un bulletin politique et chroniques diverses en français, mais aussi en allemand pou les journaux d’Alsace et de Lorraine. Avant 1914, elle avait des éditions danoise, allemande, russe ou belge, et transmettait sur demande, des caricatures de célébrités sous forme de clichés en zinc. Au cours des années 1930, l’agence éditait aussi une feuille spéciale du Parti républicain radical-socialiste et une feuille spéciale de l’Alliance démocratique. Près de 500 journaux utilisaient alors les services de La Presse associée.
PRESSEMANE :
PRESSENSÉ (Edmond de), 1824-1991 : Pasteur et homme politique. Né à Paris le 7 janvier 1824, Edmond de Pressensé est issu d’une famille aisée, convertie au protestantisme du Réveil sous la Restauration. Il fait des études de théologie en Suisse romande et c’est à cet endroit qu’il rencontre sa femme, Elise du Plessis-Gouret. A partir de 1847, il est pasteur à Parsi à l’église indépendante, non concordataire, de la chapelle Taïtbout. Il est, à ce titre, une des personnalités protestantes les plus connues de son temps.
A partir de 1871 et au commencement de la IIIème République, il mène une en parallèle une carrière politique. Ami de Thiers, il est élu député centre-gauche en juillet 1871. Il sera élu sénateur inamovible en 1883. Participant en tant qu’homme politique à la discussion de plusieurs projets de loi, son action sociale directe est moins importante que celle de sa femme. Il professe également des idées politiques moins avancées qu’elle. Compréhensif vis-à-vis des idées de 1848, il sera nettement plus sévère à l’égard de la Commune. Son action culturelle le porte avant tout à défendre et à illustrer la foi chrétienne et sa conception du protestantisme, celle d’une orthodoxie ouverte. Il publie ainsi une réponse à la Vie de Jésus de Renan. Il dénonce aussi dans divers ouvrages et articles de la Revue chrétienne, le matérialisme, tant celui de la société bourgeoise que celui des théories révolutionnaires athées. Il décède à Paris le 8 avril 1891.
ENCREVE (A) : Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, tome 5, Paris, Edition Beauchesne, 1993.
CORDEY (H) : Edmond de Pressensé et son temps, Lausanne, 1916.
PRESSENSÉ (Elise), 1826-1901 :
Elise du Plessis-Gouret est née à Nyon (Suisse), le 22 décembre 1826. Issue de milieux fortunés, elle est surtout marquée par une stricte éducation protestante inspirée par le « Réveil ». Elle épouse le pasteur Edmond de Pressencé en 1847 et vit avec lui à Paris où il exerce son ministère. Vivant dans un milieu privilégie, Elise de Pressencé s’y singularise par ses idées avancées, tant sur le plan religieux que politique, qui l’amènent à fréquenter à la fin du Second Empire des militants socialistes. Elle est l’auteur de nombreux « romans éducatifs » qui obtiennent un vif succès au delà même des familles protestantes qui sont son premier public. Les ouvrages, surtout destinés aux enfants et aux adolescents, développent une conception de l’éducation fondée sur le naturel et le refus des préjugés, en même temps qu’ils sont inspirés par l’esprit évangélique.
Sur le plan de l’action sociale, Elise de Pressencé est la créatrice, au lendemain de la Commune, de l’œuvre de la Chaussée du Maine. Cette œuvre destinée aux femmes et aux enfants déshérités se veut inspirée par un esprit de solidarité plutôt que de charité. Elle associe aux secours matériels (ouvroir, foyer-asile) des entreprises éducatives (atelier-école, école enfantine et maternelle. Elise de Pressencé crée n particulier au début des années 1880 une colonie de la vacances de la Chaussée du Maine. Elle est ainsi, avec le pasteur Théodore Lorriaux, avec qui elle collabore, une des créatrices françaises des colonies de vacances. Elise de Pressencé apparaît comme un pionnier du christianisme social protestant, mais aussi de l’action sociale et de l’éducation populaire telles qu’elles se développeront au début du XXème siècle. Elle décède à Paris le 11 avril 1901.
FABRE (R) : Une grande dame du protestantisme, É. de Pressensé, Paris, bull. de la SHPF, janvier-mars 1986.
REY-HERME (P) : Les colonies de vacances en France, origines et premiers développements (1881-1906), Paris, P.A. Rey- Hermes, 1954.
PRESSENSÉ (Francois de), 1853-1914 : Journaliste et homme politique. Né à Paris, le 30 septembre 1853, Francois de Pressencé est issu de la grande bourgeoisie protestante, fils du pasteur Edmond de Pressencé et de Elise de Pressencé. Au cours de ses études, il est engagé volontaire en 1870. Licencié ès-lettres en 1872 et en droit en 1876, il commence sa carrière politique en 1878 par une année passée comme sous-chef au ministère de l’Instruction publique. En 1879, il est au ministère des Affaire étrangères comme secrétaire d’ambassade à Constantinople puis à Washington en 1880. En 1887, il change de voie pour devenir chef de cabinet du ministre de l’Instruction publique. Parallèlement, débute pour lui une carrière de journaliste dans divers journaux républicains dont le quotidien Le Temps où il tient pendant 19 ans la rubrique de politique étrangère. En 1889, il est membre de l’Association protestante pour l’étude pratique des questions sociales (APQS).
Francis de Pressensé est sur le point de se convertir au catholicisme quand éclate l'affaire Dreyfus. Dreyfusard de la première heure, il est très engagé dans la campagne de réhabilitation de ce dernier et en 1899, il renonce même à la Légion d’honneur lors de la radiation d’Emile Zola. Il rejoint dès sa fondation, en 1898, la Ligue des Droits de l’Homme dont il est élu président de 1903 jusqu’à sa mort. Sensibilisé aux thèses féministes par sa mère, il soutient la cause de l’émancipation des femmes. C’est au cours de sa présidence de la Ligue des Droits de l’Homme, que Maria Vérone fait adopter le principe de l’égalité des droits politiques des deux sexes.
Républicain progressivement passé au socialisme, ami et proche collaborateur de Jaurès, il est élu député du Rhône en 1902. Il est alors membre du groupe socialiste de la Chambre et appartient à la Commission d’assistance et de prévoyance sociale. Enfin, au sein du parti socialiste, il représente la tendance jauressienne et siège à ce titre dans la délégation des gauches qui tente d’organiser après 1902 la majorité du Bloc des gauches. Il joue un rôle important à la Chambre des députés comme orateurs au service des grandes causes humanitaires, plaidant par exemple la cause des Arméniens. Devenu violemment anticlérical, il élabore en 1903 un projet de loi visant à la séparation de l’Église et de l’État, projet que signent 56 députés, parmi lesquels Jaurès et Briand.
En même temps, de Pressensé poursuit son activité dans le journalisme, passant du Temps à l’Aurore où il se fait le spécialiste de la dénonciation du conservatisme des radicaux. En 1904, il finance personnellement le lancement du journal de Jaurès, L’Humanité, et y tient, en collaboration avec Lucien Herr, la rubrique de politique étrangère. La même année, il crée la revue La vie socialiste car il veut « réaliser l’unité des socialistes français ». La revue disparaît au bout d’un an. Réelu en 1906 Francis de Pressensé est battu aux élections de 1910. Il décède à Paris le 19 janvier 1914.
FABRE (Rémi) : Francis de Pressensé et la défense des Droits de l’homme, un intellectuel au combat, Paris, Coll. Histoire, 2004.
PROCES DES TRENTE : Le 6 août 1894, à Paris, devant la Cour d'Assises de la Seine, débute le Procès des Trente. Le pouvoir et la police désirant en finir avec "la propagande par le fait" et les agissements anarchistes ont, grâce au vote des "lois scélérates", intensifié la répression contre le mouvement anarchiste. S'ensuivirent de nombreuses arrestations dont celles de militants connus comme Paul Bernard, Charles Chatel, Sébastien Faure, Félix Fénéon, Jean Grave, Louis Matha, etc. Trente personnes sont déférées, mais seulement vingt-cinq comparaissent; Emile Pouget, Constant Martin, Louis Duprat, Alexander Cohen et Paul Reclus ayant pu prendre la fuite. A ces militants connus, une dizaine de détenus de droit commun ayant un lien indirect avec l'anarchisme sont adjoints.
Ils ont tous à répondre de l'accusation d'affiliation à une prétendue association de malfaiteurs. Dès l'ouverture, la cour décide qu'il sera interdit de reproduire les interrogatoires de Jean Grave et Sébastien Faure, attendu que cela pourrait être employé pour faire de la propagande anarchiste. Le 12 août 1894, à Paris, se clôt le "Procès des trente" qui s'était ouvert le 6 août. Destiné à justifier les mesures de répression contre les anarchistes (voir "lois scélérates") et à rassurer l'opinion publique après les récents attentats, le réquisitoire de l'avocat général Bulot s'emploiera sans succès à prouver une entente et une prétendue association de malfaiteurs entre les divers prévenus qu'ils soient théoriciens, militants, où simples voleurs. Prévenus qui (certains ne se connaissant même pas) n'eurent aucun mal à réfuter l'accusation. Cela n'empêcha pas l'avocat général de demander une peine sévère pour les théoriciens du mouvement comme Jean Grave, Sébastien Faure, Louis Matha, etc. La tentative de machination judiciaire n'échappa pas aux jurés qui prononcèrent un acquittement général sauf à l'encontre des trois prévenus coupables de vols qui écoperont de plusieurs années de bagne.
Les contumax: Paul Reclus, Alexandre Cohen, Constant Martin, Louis Duprat et Emile Pouget, quant à eux seront condamnés par défaut le 31 octobre, à 20 ans de travaux forcés. Lorsqu'ils rentreront en France après l'amnistie, ils seront (sauf Paul Reclus) tous acquittés.
PRODUCTION FRANÇAISE (LA) : Hebdomadaire royaliste fondé en 1925 pour répandre les idées sociales de l’Action française. Il est l’organe officiel de l’Union des Corporations françaises. Il publie autour de 1934, un supplément mensuel intitulé L’Ouvrier français remis gratuitrement aux abonnés et aux lecteurs au numéro.
PROGRESSISTES :
On donne le nom de Progressistes aux Républicains modérés qui gouvernement la France entre 1893 et 1898. Considérant qu’aucune menace sérieuse ne pèse plus sur le régime, ils souhaitent, avec Antoine Constans, « le repos, la tolérance, les réformes pratiques » afin de permettre à la France de poursuivre sa marche vers le progrès. Adversaires de tout bouleversement, ils entendent lutter contre l’anarchisme et le socialisme et sont disposés à s’entendre pour assurer l’ordre avec les catholiques ralliés, sans pour autant renoncer à la législation laïque établie par les opportunistes. Les progressistes tiennent à l’Élysée avec Jean Casimir-Périer, puis Félix Faure ; ils se succèdent à la présidence du Conseil avec Charles de Freycinet, Charles Dupuy, Jean Casimir-Périer, Alexandre Ribot et surtout Jules Méline, qui apparaît comme leur chef de file, cependant que se lèvenet dans leurs rangs, les étoiles montantes du parti républicain modéré, Raymond Poincaré et Louis Barthou. De 1893 à 1898, l’action des Progressistes sera marquée par une lutte très vive contre l’extrême-gauche illustrée par le vote et la mise en application des « lois scélérates » contre les anarchistes et les socialistes. Ils mettront un soin extrême à écarter du pouvoir les radicaux jugés trop complaisants envers l’extrême-gauche et leur action contribuera à faire tomber le ministère Bourgeois, coupable d’avoir voulu faire adopter l’impôt sur le revenu en 1896. En revanche, vis-à-vis des catholiques, ils prônent l’apaisement et souhaitent mettre fin à la politique anticléricale. Le ministre des Cultes, Eugène Spuller, ancien ami de Gambetta rejettetous les fanatismes et tous les sectarismes, et plaide pour un « esprit nouveau de tolérance ». Enfin, dans le domaine économique, les Progressistes se montrent soucieux de défendre les intérêts des milieux d’aaffaires et ils font triompher le protectionnisme avec Jules Méline. C’est l’affaire dReyffus qui va faire éclater le camp progressiste en deux camps. Alors que la majorité, avec Jules Méline, Charles Dupuy, le président Félix Faure, se range dans le camp anti-révisionniste, un groupe de modéré s’affirme partisan de la révision du procès, comme Ludovic Trarieux, fondateur de la Ligue des Droits de l’Homme. D’autres s’inquièteront de voir les hommes au pouvoir, en particulier Charles Dupuy, se montrer faibles, voire complaisants envers les menées antirépublicaines des nationalistes, en particulier de Paul Déroulède. Et c’est le progressiste René Waldeck-Rousseau qui, en 1899, prend la tête du gouvernement de Défense républicaine, appuyé sur la gauche et qui rejette la plus grande partie des Progressistes dans l’opposition. Á la veille des élections de 1902, les deux fractions désormais opposées du progressisme constituent l’une l’alliance républicaine démocratique autour de Waldeck-Rousseau, l’autre la Fédération républicaine qui rassemble des hommes comme Méline, Dupuy et Charles Benoist.
MAYEUR (Jean-Marie) : La vie politique sous le IIIème République, Paris, Éditions du Seuil, 1984.
MAYEUR (Jean-Marie) : Les débuts de la IIIème République, Paris, Éditions du Seuil, 1973.
REBÉRIOUX (M) : La République radicale ?, Paris, Éditions du Seuil, 1975.
PROPAGANDE POLITIQUE :
La loi du 29 juillet 1881, en fixant les cadres de la liberté de la presse et de l’affichage, avait aussi établi les conditions de la propagande politique en régime démocratique : liberté de colportage et de vente de journaux sur la voix publique ; autorisation de placarder les profession de foi, circulaires et affiches électorales sur les emplacements publics ; garde-fous aux excès (provocations aux crimes et délits, incitation de militaires à la désobéissance, diffamations, injures, offenses envers le président de la République ou les chefs d’État étrangers, etc.). Les grandes passions politiques et les luttes sociales de al fin du XIXème siècle élargissent la gamme des instruments d’une propagande moderne (affiches illustrées, tracts, papillons…) dominée par les partis, les syndicats et les groupes de pression, tandis que l’État demeure fidèles aux vieux modes d’expression. Ainsi, dénuées d’illustrations, les affiches gouvernementales s’en tenaient toujours, à la veille de la Première Guerre mondiale, aux traditionnels placards réglementaires.
La Grande Guerre, par sa nature exceptionnelle, éveille le monde à la propagande de masse : la France, au cœur de l’effroyable carnage, n’échappe pas à la règle. La débauche des textes et d’images visant à entretenir le moral des Français tout en diabolisant l’ennemi, masque pourtant le caractère peu novateur des structures d’émission. En effet, alors que l’adversaire s’efforçait de mettre en place toute une procédure et une organisation de propagande, le gouvernement français, en 1914, choisit de privilégier la politique de la censure. Le bureau de presse du ministère de la Guerre veillait, partout en France, par le truchement des préfet et des commandants de régions militaires, au strict respect des consignes imposées aux journaux. Privés d’information, les périodiques accordent une place plus accrue aux éditorialistes et chroniqueurs qui, à l’instar de Barrès dans L’Écho de Paris ou de Hervé dans la Victoire, se font les chantres zélés du patriotisme le plus cocardier. La pression de la censure et l’exaltation des journalistes contribuent à l’émergence d’une presse résolument optimiste (à de rares exceptions près : L’œuvre), diffusant sans sourciller les « bobards » les plus outranciers et les plus contradictoires. Dès 1915, ses excès entament sa crédibilité auprès des Français (plutôt réceptifs au début du conflit), provoquant même l’apparition de feuilles cherchant à faire obstacle au « bourrage de crâne » (Le Canard enchaîné). Le Quai d’Orsay conçoit néanmoins un embryon d’organisation de la propagande au début 1915. Mais il faut attendre janvier 1916 et la création de la Maison de la presse (confiée à P. Berthelot) pour voir se développer un programme cohérent à destination des pays neutres (diffusion de brochures, tournées de conférences, etc.). Une action subversive fut même menée en Allemagne à Partit du Danemark, de la Suisse et des Pays-Bas.
Avec la guerre, les images bénéficient d’une appréciable promotion : images mobiles (actualités mises en scène ou courts métrages, tantôt pathétiques, tantôt comiques), mais surtout images fixes. Pourtant, l’impulsion première ne vient pas de l’État qui, au début du conflit, juge aussi inutile qu’inconvenant le recours aux supports iconiques. En juillet 1915 encore, note L. Gervereau, le ministère des Finances désapprouve fermement l’initiative du préfet des Basses-Alpes proposant la publication d’une affiche illustrée. Ce sont donc les origines privées, laïques ou confessionnelles, qui, appliquant les recettes publicitaires classiques, lancent par voie d’affiches dessinées (contrôlées par la censure) les premières souscriptions (soutiens aux orphelins, assistance aux sinistrés, journée du « Poilu »). Enfin convaincu de l’utilité et de l’efficacité de l’image de propagande, le gouvernement prit en charge la diffusion d’affiches illustrées, d’abord pour le lancement d’emprunts (3 affiches sur ce thème en 1915 ; 40 en 1918), et aussi pour affermir le moral des Français. Leur tirage gagne toujours en ampleur. L’initiative d’impression, qui demeure largement privée pendant le conflit, bénéficie du concours des préfets et des comités départementaux de propagande qui en assurent la distribution dans chaque commune. De nombreux artistes, par conviction patriotique ou en mal de commande (Cappiello, Carlu), participent à l’effort national. Toutefois, ce sont les dessinateurs de presse qui, devenus coutumiers d’une propagande développant les thèmes les plus haineux (les atrocités allemandes), produisent le plus grand nombre d’affiches. Si certains, avant-guerre, ne cachaient pas leur nationalisme (Forain), la plupart d’entre eux sont restés jusque-là à l’écart des œuvres politiques (Poulbot, Faivre, Willette) ; d’autres collaborent même à la presse d’extrême-gauche (Hermann-Paul). Au cours de la guerre, tout devient support de propagande (cartes postales, gravures, bibelots, objets divers) et toutes les catégories de la population subissent l’œuvre de mobilisation. Les enfants, comme l’a montré S. Audouin-Roureau, ne sont pas épargnés : au sein ou en dehors de l’école (loisirs : jeux, livres illustrés, « bandes dessinées »)…). Les célébrités du théâtre ou du music-hall (Sarah Bernhardt, Maillol) sont sollicitées pour galvaniser les foules ou distraire les poilus.
Après la Première Guerre mondiale, les années qui suivent favorisent la consolidation d’outils de propagande devenus classiques, comme l’affiche, désormais diffusée sur tout le territoire national. Les élections restent le moment fort de la production. On se souvient de l’affiche de Barrère pour les législatives de 1919 : le bolchevik, le couteau entre les dents. Faisant écho à un placard allemand de Rudi Sald, elle est commandée par le patronat (Union des intérêts économiques). Tirant les leçons de l’échec aux législatives de 1924, la droite réagit vivement. Sa presse , jusque là souvent modérée, a massivement recours aux méthodes les plus virulentes et le plus schématiques pour combattre le Cartel (caricatures). Le directeur de l’Echo de Paris, Henri de Kerillis, crée la première structure permanente de propagande politique en 1927 : le Centre des républicains nationaux (financé par souscriptions). Ce dernier anime une école d’orateurs, intervient sur les ondes, et fourni surtout aux candidats de droite un précieux matériel électoral : tracts, films, affiches. Ces dernières , violentes ou ironiques, sont signées par les meilleurs dessinateurs de l’époque comme Sennep ou Galland. Le Centre poursuit son activité jusqu’en 1938. La gauche, communiste d’abord, innova également, et sait mobiliser les artistes (Office de propagande graphique fondé par Carlu). Sans négliger l’humour (Gassier, Dukercy), elle introduit dans l’affiche des procédés réalistes (modèle du jeune militant d’avant-garde) et, dans un souci d’efficacité, rationalise les symboles, s’inspirant en cela de l’iconographie politique soviétique. En revanche, l’extrême-droite resta hermétique aux influences de la propagande des dictatures.
Mais l’entre-deux-guerres marque aussi l’avènement de nouveaux instruments propres à peser sur l’esprit public. La TSF est vite l’objet de controverse. Monopole d’État à partir de 1926, elle est mise à contribution dès 1932 pour les élections (discours des candidats et chefs de parti). Le président du Conseil Tardieu, qui se manifeste entre les deux tours du scrutin, est accusé par la gauche de s’approprier les ondes et, dans la presse d’opposition » reçu, pour l’occasion, le surnom de « l’homme le micro entre les dents ». Les gouvernements surveillent de près le journal parlé (crée en 1924 : Frot, ministre de l’Intérieur, y installe même un censeur , en février 1934. Les allocutions radiodiffusées deviennent rapidement pratiques courante pour certains présidents du Conseil, à l’instar de Doumergue : l’opposition feint de voir dans ses interventions répétées la preuve d’une dérive dictatoriale. A l’époque du Front populaire, les violentes campagnes de presse d’extrême-droite fustigent la « TSF…IO ». Les responsables politiques comprennent également le profit qu’on pouvait tirer du film. Outils d’éducation de masses et instruments de persuasion, les images mobiles gagnent leur place., dès les années 1920, dans les grands rassemblements comme dans les réunions locales de la SFIO et du parti communiste (qui y consacrent un service spécial). Le cinéma militant prend un relief particulier au moment du Front populaire, notamment dans la mouvance communiste et autour de la maison de la culture. Ainsi, « Ciné-Liberté » conçoit, conjointement aux films d’action (La Marseillaise), de nombreux courts métrages (Grèves d’occupation 1936, 14 juillet 1789-1937, images sur la guerre d’Espagne).
L’État aussitôt la paix revenue, dissout les organismes qui ont animé la propagande. L’imminence de la guerre pousse finalement le cabinet Daladier à créer, par le décret du 29 juillet 1939, un commissariat général de l’Information chargé « d’organiser, animer et coordonner tous les services d’information et d’expansion française ». Il est confié à Jean Giraudoux. Mais la déclaration de guerre met automatiquement en vigueur la loi de 1938 : si bien que les Services généraux d’information (contrôlés par les militaires, composés d’un personnel recruté, avec des objectifs strictement définis) coiffent d’emblée l’organisme naissant qui se révèle peu efficace. Frossard, nommé ministre de l’Information, remplace Giraudoux en mars 1940. La censure, comme en 1914, prend le pas sur la propagande.
AMAURY (P) : De l’information et de la propagande d’Etat, 2 tomes, Paris, LGDJ, 1969
AUDOUIN-ROUZEAU (S) : La Guerre des enfants, 1914-1948, Paris, A. Colin, 1993.
BELLANGER (C) : Histoire générale de la presse française, tome 3, Paris, PUF, 1972-1976.
GERVEREAU (L) : Le Couteau entre les dents, Paris, Chêne, 1989.
DELPORTE © : Histoire du journalisme et des journalistes, Paris, PUF, 1995.
DOMENACH (J) : La Propagande politique, Paris, PUF, 1950.
PROTECTIONNISME :
La IIIème République a connu durant la quasi-totalité de son histoire un système protectionniste qui avait pour objet de protéger la production nationale grâce à des droits de douanes élrvés, des contingentements, des mesures d’encouragement aux exportations, etc. Cependant lorsque débute la IIIème République, elle hérite du régime impérial un système libre-échangiste institué par le traité de commerce du 23 janvier 1860 avec le Royaume-Uni et toute une suite de traités signés dans le même esprit avec diverses puissances européennes. Mais cette situation est mal supportée par les industriels, tenants de la tradition colbertiste qui suppose que l’État accorde sa protection à la production nationale, et par les agriculteurs qui subissent, dès 1875, la concurrence des produits agricoles bon marché des pays neufs. De très fortes pressions s’exercent sur le gouvernement, venant de ces milieux, mais c’est la Grande Dépression qui atteint la France vers 1881 qui relèvent légèrement les droits sur les produits finis. Entre 1882 et 1884, la France négocie le renouvellement des traités de commerce signés avec les pays européens, mais ce renouvellement aboutit à un système faiblement protectionniste puisque le taux moyen de prélèvement sur les importations passe de 6, 5% en 1880 à 7, 1% en 1884. Cependant, les pressions des agriculteurs et des in dustriels vont s’accroître durant la campagne électorale de 1889, au point que la question du tarif extérieur domine les élections.
Créateur de l’Association de l’industrie et de l’agriculture française, Jules Méline prend la tête de la coalition protectionniste. Après la victoire électorale de celle-ci, il obtient du Parlement, il obtient le vote de la loi de janvier 1892 qui autorise le gouvernement à dénoncer tous les traités de commerce en vigueur. Le tarif Méline, adopté en 1892, est avant tout un instrument de négociation puisqu’il prévoit un tarif général applicable à tous les pays avec lesquels il n’existe aucun accord et qui est relativement élevé et un tarif minimum susceptible d’être appliqué en échange de concessions identiques par les pays ayant signé des traités avec la France. Ce dernier tarif comporte des droits de 8% sur les produits industriels, de 5 à 20% sur les produits agricoles. Il témoigne d’un protectionnnisme modéré puisque les droits industriels sont augmentés d’un tiers et qu’il ne comporte aucune limitation quantitative, sauf pour le vin. En 1897, le tarif Méline est complété par la « loi du cadenas » qui autorise le gouvernement, en cas de surproduction à augmenter les droits sur les céréales et la viande. Enfin, en 1910, les tarifs reçoivent les barêmes les plus élevés.
Après un certain desserrement de la protection douanière durant les années 1920, l’entrée de laz France dans la crise économique à partir de l’automne 1931 conduit le gouvernement à adopter toute une série de mesures qui témoignent d’un protectionnisme renforcé et beaucoup plus redoutable que celui de l’époque de Méline. C’est en premier lieu, à partir de novembre 1931, l’institution d’une surtaxe de change de 15% à l’encontre des pays ayant dévalué leur monnaie. C’est d’autre part le système des contingentements qui, pour chaque produit, institue des quotas a priori qui limitent autoritairement les quantités importables. En 1936, 65% des importations des importations françaises se font selon le système des contingentements. Sans aller jusqu’à l’autarcie mise en place par les régimes fascistes, la France se replie alors sur elle-même comme elle ne l’a jamais fait de son histoire. Les effets des deux vagues de protectionnisme lors des deux graves crises économiques qui ont marqué l’histoire de la IIIème République s’expliquent de deux manières. Dans un premier temps, elles ont sans doute empêché la crise d’atteindre de façon plus brutale l’économie française, elles ont protégé le revenu des agriculteurs et des industriels et elles ont par conséquent évité les effets trop rigoureux des difficultés économiues sur la société. Enfin, elles ont habitué, à terme, les producteurs français à compter sur l’assistance de l’État en cas de de graves problèmes, elles les ont conduits à se contenter de pratiques routinières sur un marché protégé au lieu d’investir pour tenter de conquérir les marchés extérieurs et sont, de ce fait, responsables d’une certaine sclérose de l’économie française, touchant la grande majorité du tissus des entreprises nationales.
ASSELAIN (J-C) : Histoire économique de la France, du XVIIIème siècle à nos jours, 2 volumes, Paris, Éditions du Seuil, 1984.
PROUDHONISME :
On donne le nom de proudhonisme aux idées émises par Pierre-Joseph Proudhon, théoricien socialiste qui vécut de 1809 à 1865, mais dont les thèses imprègnent profondément le monde ouvrier français jusqu’à la fin du XIXème siècle. La principale préocuppation de Proudhon est de préserver la personne humaine des empiétements du pouvoir, quel qu’il soit. Aussi est-il hostile à l’État centralisé et bureaucratique qu’il rêve de supprimer pour le remplacer par une fédération de groupes naturels (familles, professions, communes, régions) librement associés : la gouvernement se dissoudrait ainsi dans une société économique. Par ces théories, Proudhon est ainsi le principal précurseur de l’anarchisme. Son idée d’un ordre naturel le conduit à proposer un « assainissement de la propriété » par la fondation d’une banque d’échange partiquant le crédit gratuit ; ainsi se trouvait éliminé l’intérêt du capital, la justice des échanges serait assurée, les travailleurs échangeant des produits au prix de revient. Si la pensée de Proudhon est souvent confuse et contradictoire, elle exerce un profond rayonnement sur le monde des artisans et des compagnons des petites entreprises françaises. Son influence est consédérable sur le monde ouvrier de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle. Il est a beaucoup d’égards l’inspirateur du syndicalisme révolutionnaire. Ce n’est véritablement qu’après la Première Guerre mondiale que linfluence marxiste éclipse celle de Proudhon en France. Encore le proudhonisme marque-t-il nombre de dirigeants du mouvement socialiste et syndicaliste jusqu’aux années 1930.
WILLIAM (C) : Socialisme et communisme français, Paris, Arrmand Colin, 1967.
PROUST (Antonin), 1832-1905 : Journaliste et homme politique. Né à Niort (Deux-Sèvres) le 5 mars 1832, Antonin Proust s'oriente à l'origine vers la peinture sous l'influence de son camarade d'enfance Édouard Manet, puis se tourne vers le journalisme et la politique. Le fondateur du journal La semaine universelle devient, en 1870, le secrétaire de Gambetta et, délégué du ministre de l’Intérieur à Paris en septembre de la même année, il est chargé des populations réfugiées dans la capitale.
Elu député de la gauche républicaine de 1876 à 1893, il devient ministre des Arts du 14 novembre 1881 au 29 janvier 1882 dans le « grand ministère » de Gambetta. Antonin Proust profite de cette occasion pour fonder l'école du Louvre. La fin de sa vie est essentiellement consacrée à rendre hommage à son ami Manet disparu : Antonin Proust organise dès 1884 une vaste exposition retraçant la carrière du peintre, puis publie un recueil de souvenirs portant notamment sur leurs années communes passées au collège Rollin. Atteint d'une maladie incurable, il se suicide à Paris le 23 mars 1905.
PROUST (Adrien), 1834-1903 :
PROUST (Marcel), 1871-1922 :
Marcel Proust naît le 10 juillet 1871 à Auteuil au sein d’une famille de la bourgeoisie parisienne. Son père, Adrien Proust, est agrégé de médecine et sa mère, Jeanne Weil, est la fille d’un riche agent de change de confession juive. L’enfant qui a, depuis le 24 mai 1873, un frère prénommé Robert, est de constitution chétive. Dès 1880, Marcel Proust est saisi de crises d’asthme, une maladie dont il souffrira sa vie durant. Il entre en 1882 au Lycée Condorcet, établissement qui l’accueille pendant l’ensemble de ses études secondaires. L’adolescent est attiré par la littérature et en particulier par le mouvement symboliste porté par les œuvres de Stéphane Mallarmé et de Paul Verlaine, alors en vogue. En 1888, avec quelques-uns de ses camarades de classe, il rédige ainsi la Revue Lilas. Ses talents littéraires sont déjà remarqués par ses professeurs, Maxime Gaucher notamment en classe de rhétorique.
Après son Baccalauréat obtenu en 1889, Proust effectue son service militaire en tant que volontaire devançant l’appel au 76e régiment d’infanterie, à Orléans. L’année suivante, il s’inscrit à la Faculté de Droit de Paris ainsi qu’à l’École des Sciences Politiques. Cependant c’est sans grande conviction que le jeune homme assiste aux cours. Il se concentre davantage sur les relations qu’il noue et qui lui permettent d’entrer dans le monde. En 1892, il effectue ses débuts littéraires en collaborant à la revue symboliste Le Banquet, puis l’année suivante à la Revue Blanche. L’étudiant obtient enfin sa licence ès lettres au mois d’août 1893.
Proust trouve alors à s’employer en tant qu’assistant, non-rémunéré, à la bibliothèque Mazarine. Détaché au ministère de l’Instruction Publique et multipliant les congés d’absence, il s’intéresse davantage à la vie des salons parisiens. A cette époque, il fait la rencontre du musicien Raynaldo Hahn, de Robert de Montesquiou et bientôt de Lucien Daudet, fils de l’écrivain. Une amitié passionnée lie les deux hommes. Proust doit d’ailleurs se battre en duel à la Tour de Villebon, le 6 juillet 1897, avec le journaliste Jean Lorrain qui avait supputé de leur homosexualité.
A cette époque, Marcel Proust travaille à l’écriture d’un roman autobiographique, Jean Santeuil, qui demeurera inachevé. En 1896 paraissent Les Plaisirs et les Jours chez Calmann-Lévy. L’ouvrage, préfacé par Anatole France (modèle du Bergotte de la Recherche du Temps perdu), est un recueil d’essais et d’articles de critique. Proust s’attache également à l’étude de l’esthète anglais John Ruskin. En 1900, au moment où celui-ci disparaît, il donne de nombreux articles en son honneur dans la presse parisienne. Quelques années plus tard, en 1904, paraît une traduction annotée de La Bible d’Amiens. Vient également celle de Sésame et les Lys deux années plus tard.
Tandis que son père décède le 26 novembre 1903, puis sa mère le 26 septembre 1905, Marcel Proust réfléchit à une œuvre romanesque dans laquelle il évoquerait une matinée en compagnie de celle-ci. L’ouvrage, où son auteur compte exposer ses sentiments artistiques prend de l’ampleur dans les années qui suivent. Proust voit en effet son état de santé se dégrader et sa vie mondaine s’alléger. Il se réfugie alors dans le travail d’écriture. A partir de 1909, il entre en discussion avec les éditeurs en vue de la publication de son roman Ceux-ci, le Mercure de France, Fasquelle et la N.R.F., sont cependant réticents. A la recherche du temps perdu se compose maintenant de deux volumes de 700 pages chacun. Des extraits paraissent néanmoins dans Le Figaro et au Gil Blas.
C’est alors que Marcel Proust trouve en Bernard Grasset un interlocuteur intéressé. Le 13 novembre 1913, paraît à compte d’auteur la première partie de l’ouvrage, Du coté de chez Swann, où le romancier révèle sa maîtrise de la phrase, mise au service de l’exposition des sentiments et des "intermittentes du cœur". L’année suivante décède son secrétaire et dactylographe, Alfred Agostinelli. L’écrivain prépare néanmoins l’édition du second volume. Le 1er août 1914 cependant, la guerre est déclarée et le projet d’édition arrêté.
Commence alors une période de silence pour Marcel Proust. Le romancier continue de séjourner sur la côte normande, à Cabourg notamment, haut lieu de la villégiature à la Belle Époque. Dégagé des obligations militaires en raison de son état de santé, il continue de travailler à son roman, qui se développe considérablement. Au mois de juin 1919 enfin, paraît A l’ombre des jeunes filles en fleur. Ce second volume, publié par la N.R.F., obtient le succès. La notoriété de son auteur dépasse désormais le cercle des initiés, d’autant plus qu’il se voit attribuer le prix Goncourt, le 10 novembre suivant, devançant dans l’esprit du jury Les Croix de bois de Roland Dorgelès.
Dans les années qui suivent paraissent les autres volumes de la Recherche : Le Coté de Guermantes à partir de 1921, puis Sodome et Gomorrhe l’année suivante. Cependant l’état de santé de Marcel Proust se dégrade. Au mois de mai 1921, il est pris d’un violent malaise en visitant au musée du Jeu de Paume une exposition sur les maîtres flamands. Délaissant maintenant la vie de société, le romancier quitte son appartement du n° 102 du boulevard Haussmann et s’installe au n° 44 de la rue Hamelin. Il travaille fiévreusement, pendant les courtes période de répit que lui laisse la maladie, afin d’achever son œuvre. Marcel Proust décède d’une pneumonie le 18 novembre 1922. Dans les années qui suivent s’étale la fin des publications de la Recherche : La Prisonnière au mois de novembre 1923, Albertine disparue ou la fugitive en 1925 et enfin Le Temps retrouvé, en 1927. Si le plan d’ensemble en est respecté, Proust ayant dés sa naissance fixé les traits de son projet et procédé par ajouts successifs, le romancier n’a cependant pas eu le temps de revoir la dactylographie de ces trois derniers romans.
PROUVÉ (Victor), 1858-1943 :
Peintre et artiste décorateur. Né à Nancy en 1858 dans un milieu de dessinateurs en broderie, Victor Prouvé entre à l'Ecole de dessin de Nancy, puis à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris dans l'atelier de Cabanel. Résidant à Paris jusqu'en 1902, mais sans cesser de participer à la vie artistique nancéienne, il devient le second président de l'Ecole de Nancy à la mort d'Emile Gallé en 1904.
D'abord peintre portraitiste et paysagiste, il est aussi sculpteur, graveur, travaille le cuir et le métal, donne des dessins de broderies et de bijoux, et collabore avec de nombreux artistes et industriels de l'Ecole de Nancy. Il dessine plusieurs décors de verreries et de meubles pour Emile Gallé, réalise des études en plâtre pour Eugène Vallin, crée des motifs de broderies pour Fernand Courteix et Albert Heymann, fait éditer ses statuettes par les frères Mougin, par Daum, par des bronziers parisiens, etc. Il réalise également de nombreux menus, programmes, vignettes, affiches et illustrations d'ouvrages. Ses envois aux Salons de Paris et de Nancy depuis 1882, lui valent une reconnaissance nationale et lui amènent de nombreuses commandes publiques et privées. Il décore de grands panneaux décoratifs à la salle des fêtes de la mairie du XIe arrondissement de Paris et l'escalier de la mairie d'Issy-les-Moulineaux. Avec Emile Friant, il reçoit la commande du plafond de la Préfecture de Meurthe-et-Moselle et réalise pour l'Hôtel de Ville de Nancy douze médaillons symbolisant les mois de l'année. Il peint le plafond de la Caisse d'Epargne de Commercy et une grande toile décorative pour la brasserie La Lorraine représentant plusieurs personnalités nancéiennes participant à une fête de Bacchus.
Il révolutionne l'art de la reliure avec Camille Martin et le relieur René Wiener à l'Exposition du Champ-de-Mars de Paris en 1893, ce qui vaut à l'Ecole de Nancy sa première reconnaissance nationale et internationale. De 1919 à 1940, Victor Prouvé est directeur de l'Ecole des Beaux-Arts de Nancy, sans abandonner une carrière personnelle féconde.
SALMON, MIDANT, WEISBERG. L'Ecole de Nancy. Peinture et Art nouveau. Cat. exposition musée des Beaux-Arts, 1999. Paris, RMN, 1999
CHARLE-ROUX, HECRE, PELTRE. Victor Prouvé, voyages en Tunisie. Cat exposition Doüera, Malzéville, 1999. Metz, serpenoise, 1999
PROUVE (Madeleine), Victor Prouvé. Nancy, Berger-Levrault, 1958.
PROVINCES DE FRANCE : Revue régionaliste de tendance moonarchiste animée par Guillain de Bénouville, paraissant en 1934-1935.
PROUVOST (Jean), 1885-1978 : Industriel et homme politique. Né à Roubaix (Nord) le 24 avril 1885, Jean Prouvost reste un des plus importants industriels du textile du nord de la France. Après la Première Guerre mondiale, il s’intéresse aux entreprises de presse. En 1924, il achète Paris-Midi et en 1930 il rachète Paris-Soir. Jean Prouvost constitue bientôt un véritable empire comprenant Marie-Claire, magazine féminin racheté en mars 1937, et Match, journal sportif, en 1938.
Nommé ministre de l’Information du 5 au 16 juin 1940 dans l’unique cabinet Reynaud, il est favorable à l’armistice et aux idées du maréchal Weygand, puis devient haut-commissaire à la propagande française du 19 juin au 12 juillet 1940 dans le cabinet Pétain. Il profite pour attaquer dans son journal Paris-Soir les parlementaires embarqués sur le Massilia. Se détachant de la politique pendant la guerre, il reprend la tête, après la libération du Figaro et de Paris-Match. Il décèdera à le 18 octobre 1978.
Barillon (Raymond), Le cas Paris-Soir, Paris, A. Colin, Col. Kiosque, 1959.
Boegner (Philippe), Oui Patron.
Hanoteau (Guillaume), La fabuleuse aventure de Paris-Match.
PUECH (Jean, Louis), 1852-1947 : Avocat et homme politique. Né à Bozouls (Aveyron) le 1er mai 1851, Louis Puech est le frêre de Denys Puech, sculpteur français connu pour avoir été Directeur de la Villa Médicis de 1921 à 1933. Devenu avocat de profession, il se fait remarquer en plaidant diverses affaires politiques, notamment celles des grévistes de Decazeville (appelée aussi affaire Watrin) et des anarchistes Monod et Lucas. Conseiller minicipal de Paris puis député de la Seine de 1989 à 1932, il devient ministre des Travaux publics et des Postes et Télégraphes du 3 novembre 1910 au 1er mars 1911 dans le scond cabinet Briand. Il décèdera à Bozouls le 15 juillet 1947.
PUECH (Denys), 1854-1942 : Sculpteur. Né à Bozouls (Aveyron) le 3 décembre 1854, Denys Puech, issu d'une famille d'agriculteurs est le frère du précédent. Il débute comme apprenti chez l’artisan marbrier François Mahoux à Rodez. En 1872, après deux ans de formation, il poursuit son apprentissage à Paris chez François Jouffroy puis chez Alexandre Falguière et Chapu, tout en suivant des cours du soir aux Beaux-Arts.
En 1881, il obtient son premier succès avec le 2e grand prix de Rome pour Tyrtée chantant les Messéniennes. En 1883, il enregistre un nouveau succès avec le 2e grand prix de Rome pour Diagoras mourant de joie en apprenant le triomphe de ses deux enfants vainqueurs aux Jeux Olympiques. En 1884, il est enfin lauréat du Grand Prix de Rome pour Mezence blessé. Dès lors, il réalise de nombreuses commandes officielles au long de la Troisième République. Il sculpte, entre autre, les bustes de Jules Ferry (1895), Sainte-Beuve (1898), Émile Loubet (1901) et Mussolini (1925). En tout, 573 œuvres sont recensées.
Elu membre de l'Académie des Beaux-Arts en 1905, il est nommé Chevalier de la Légion d'honneur le 17 janvier 1908. Il occupe le poste de Directeur de la Villa Médicis de 1921 à 1933.
Il épouse le 13 mai 1908 la princesse Anina Gagarine Stourdza (1865-1918), artiste-peintre. Il fonde à Rodez en 1903 un musée des Beaux-Arts. Le bâtiment, inauguré en 1910, est conçu en concertation avec l'architecte Boyer pour mettre en valeur ses sculptures. Il décède à Rodez (Aveyron) le décembre 1942.
PUECHMAILLE (Félix, Alexandre), 1874-1925 : Inspecteur et homme politique.Né à Golinhac (Aveyron) le 2 mai 1874, Puechmaille devient inspecteur primaire et président de la fédération de l’Allier de la Ligue des droits de l’Homme. Elu député socialiste indépendant en 1924 puis adhère à la SFIO en 1925. Elu conseiller général en 1925, il décède la même année à Moulins (Allier), le 18 octobre 1925.
PUIS (Auguste, Charles, Marie), 1873-1950 : Homme politique. Né à Paris le 5 avril 1873, Auguste puis, docteur en droit, est élu député radical socialiste du Tarn-et-Garonne de 1919 à 1927. Il se spécialise à la Chambre sur les questions agricoles et, remarqué par Briand, celui-ci le nomme sous-secrétaire d’Etat à l’Agriculture du 17 janvier 1921 au 14 janvier 1922 dans son septième cabinet. Son objectif reste de moderniser les exploitations agricoles et de moderniser le sort des agriculteurs. Face à l’hostilité des propriétaires au remembrement, il envoie des missions sur place expliquer la politique gouvernementale en la matière. Elu sénateur du Tarn-et-Garonne en 1927, il démissionnera de son mandat en 1934. Il décèdera le 14 novembre 1950.
PUJO (Bertrand, Bernard, Léon), 1878-1964 : Général et homme politique. Né à Orignac (Hautes-Pyrénées) le 21 août 1878, le général Pujo est un ancien officier de la Légion étrangère. Nommé chef d’état-major de l’armée de l’air pour l’année 1935, il devient administrateur puis président d’Air France au début de la déclaration de guerre. Envoyé par Paul Reynaud à Madrid afin d’aller chercher le maréchal Pétain, ce dernier le nomme alors ministre de l’Air du 16 juin au 12 juillet 1940 dans son unique cabinet Il procède alors à la démilitarisation des avions de combat français dont la quasi-totalité se trouve en Afrique du nord. Manquant de personnel compétent pour faire voler ces appareils, le général Pujo donne toutefois l’ordre de riposter à l’attaque britannique sur Mers el-Kébir. Les Français abattent deux appareils de la Royal Air Force et sauvent ainsi l’armée de l’air d’une démobilisation complète imposée par les Allemands et les Italiens. Il décèdera à Paris le 14 septembre 1964.
PUJO (Maurice), 1872-1955 : Journaliste et homme politique. Né le 26 janvier 1872 à Lorrez-le-Bocage (Seine-et-Marne), Maurice Pujo fut d'abord un philosophe républicain plutôt de gauche (salué dans un article par Jean Jaurès en 1894). Il appartient à une cercle d'intellectuels de gauche, l'"Union pour l'action morale", qui prend parti pour la défense du capitaine Dreyfus. À ce moment, par réaction nationaliste, Henri Vaugeois et Maurice Pujo quittent ce cercle pour fonder, le 8 avril 1898, le premier comité d'Action française qui deviendra en 1899 l'Action française (Revue d'Action française), mouvement politique nationaliste puis également monarchiste lorsque Charles Maurras convertit ses dirigeants (Pujo et Vaugeois) vers 1900.
Maurice Pujo codirige, entre 1908 et 1944, le quotidien homonyme L'Action française. Entre 1951 et 1955, il est directeur de l'hebdomadaire Aspects de la France (devenu entre-temps le bimensuel L'Action française 2000, dirigé par son fils Pierre Pujo). Le Règne de la grâce. I. Le règne de la grâce. II. Les étapes. III. Stéphane Mallarmé. IV. Maurice de Guérin. V. Frédéric Schlegel. VI. La philosophie de Novalis. VII. Avant les héros. VIII. La jeunesse libre. IX. La résurrection du Christ. X. L'Esthétique indépendante, Paris, F. Alcan, 1894.
Après l’Affaire, Paris, Bureaux de l’Action française, 1898.
Essais de critique générale de la crise générale, Paris, Perrin, 1898.
Contre la classe de philosophie de l'enseignement secondaire. Lettre ouverte à M. Jules Lemaître, Paris, Perrin & Cie, 1899.
Les Nuées. Comédie contemporaine en 3 actes et en prose , Paris, Nouvelle Librairie Nationale, 1908.
Les Cadres de la démocratie. Pourquoi l’on a étouffé l’affaire Valensi?, Paris, Nouvelle Librairie Nationale, 1912.
La Politique du Vatican. Charles Maurras et Maurice Pujo. L’affaire Demulier. Un factum de propagande allemande, encouragé par l’autorité ecclésiastique, Paris, Librairie d’Action française, 1928.
Comment Rome s’est trompée. L’agression contre l’esprit, Paris, Fayard, 1929.
La guerre et l’homme, Paris, Flammarion, 1932.
Les Camelots du Roi, Paris, Flammarion, 1933.
La veillée. Front de champagne 1915, Paris, Ducrot & Colas, 1934.
Le problème de l’union, Paris, Librairie d’Action française, 1937.
Comment La Rocque a trahi, Paris, Sorlot, 1938.
décédé le 6 septembre 1955 à Ferrières-en-Gâtinais (Loiret) |