Exposition universelle de 1889 : Construction de la Tour Eiffel  

 

1870-1940

 

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   HISTOIRE DE FRANCE
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70 ans d'histoire (1870-1940)

 

CABANES (Louis), 1867- : Peintre. Né à Toulouse (Haute-Garonne) en 1867, élève de J.-P. Laurens, Louis Cabanes s’est fait connaître comme peintre d’histoire avec une Jeanne d’Arc (1897) ; Rêve de gloire (1898) ; Le Repos de la caravane (1902) ; Le Ramadan (1903).

CABANÈS (Augustin), 1862-1928 : Médecin et historien. Né à Gourdon () en 1862, docteur en médecine, pharmacien, Augustin Cabanès s’est consacré à étudier les rapports de la médecine avec l’histoire et la littérature. En 1894, il fonde dans cet esprit la Chronique médicale, périodique bimensuel, et publie de nombreux ouvrages : Marat inconnu (1891) ; Balzac ignoré (1899) ; Les Curiosités de la Médecine (1900) ; Napoléon jugé par un Anglais (1901) ; Le cabinet secret de l’histoire (1895 et suivant, 6 séries) ; Les Morts mystérieuses de l’histoire (1901) ; Poisons et sortilèges, et La Névrose révolutionnaire (1905), ces deux derniers en collaboration avec le docteur Nass ; Comment se soignaient nos pères (1905-1913) ; Mœurs intimes du passé (1908 et suivant, 8 volumes) ; Fous couronnés (1914) ; Folie d’empereur : Guillaume II jugé par la science (1915) ; Chirurgiens et blessé à travers l’histoire (1918) ; L’Histoire éclairée par la clinique (1921) ; La Princesse de Lamballe intime (1923) ; Au chevet de l’Empereur (1924) ; Le Mal héréditaire dans l’histoire (1926) ; L’Enfer de l’histoire (1927). Il décède à Paris en 1928.

CABIÉ (Louis, Alexandre), 1857-1939 : Peintre. Né à Dol (Ille-et-Vilaine) en 1857, élève d’Harpignies, Louis Cabié à peint des paysages de dessin ferme et de coloris sobre. Citons : La Charente (1894) ; Le Soir (1899) ; Noirmoutier (1902).

CABINETS MINISTÉRIELS :

CABRIÈRES (Français, Marie, Anatole de Rovérié de), 1830-1922 : Prélat. Né à Beaucaire (Gard) en 1830, Cabrières devient d’abord professeur au grand séminaire de Nîmes, puis directeur du collège de l’Assomption, chanoine titulaire et vicaire général honoraire du diocèse, il est nommé évêque de Montpellier en 1873. Pie X l’élève au cardinalat. Il exerce une grande influence sur ses collègues de l’épiscopat, par son attitude indépendante. Il décède à Montpellier en 1922.

CABROL (Dom Fernand), 1856- : Bénédictin. Né à Marseille en 1856, Cabrol devient prieur de Saint-Pierre de Solesme, puis abbé de Farnborough (Angleterre). Il a écrit l’Histoire du cardinal Pitra (1893) ; Etude sur la « peregrinatio Silviae » (1895) ; le Livre de la prière antique (1900), un de ses ouvrages les plus répandus. Il a entrepris aussi un important Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie (1903 et années suivantes).

CACHIN (Marcel), 1869-1957 : Professeur et homme politique. Issu d’une famille modeste – son père était gendarme et mère fileuse de lin -, Marcel Cachin est né le 20 septembre 1869 à Paimpol (Côtes-d’Armor). Il obtient une bourse d’études qui lui permet de faire des études de philosophie, obtient sa licece et enseige à Bordeaux pendant quinze ans. Membre du Parti ouvrier français (POF) dès 1891, Marcel Cachin, disciple préféré de Guesde, a toujours été préocuppé par les questions sociales. Il fonde alors de nombreuses sections du POF dans l’arrondissement de Libourne et est élu Conseiller municipal de Bordeaux en 1900 puis adjoint au maire jusqu’en 1904. Cachin prend part aux congrès socialistes d’Amsterdam (1904) pour l’uniffication des partis socialistes, puis de Paris (1905) qui fonde la SFIO. Considéré comme un grand orateur, Cachin est nommé délégué de la propagande. Il parcourt la France pendant six ans et tient de nombreuses réunions. Elu conseiller municipal de Paris en 1912 et conseiller général de la Seine, il devient, en 1913, rédacteur à L’Humanité. Député de Paris sans interruption de 1914 à 1932, rallié à la politique d’union nationale après la mort de Jean Jaurès, il fait partie, pendant la Premuère Gerre mondiale, des « jusqu’auboutistes ». Nommé président du Comité patriotique du ravitaillement de Paris et chargé des missions délicates, il pernd contact en 1915 avec Mussolini qui vient de rompre avec le parti socialiste italien pour le persuader de déclancher une campagne en faveur de l’entrée en guerre de l’Italie contre les empires centraux. En 1917, il est envoyé en mission diplomatique en Russie pour convaincre Kernsky de continuer la guerre contre l’Allemagne. . Nommé directeur de L’Humanité en 1918, il gardera ce poste jusqu’à sa mort. En 1920, le congrès de Stasbourg le omme pour se rendre en Russie afin d’nevisager les moyens possibles de rétablir l’unité socialiste rompue par la création de la IIIe Internationale et de recueillir des informations sur la situation réelle de la Russie des Soviets. Cachin renconte Lénine qui critique vivement le positions de la SFIO, fait état des divergences profondent qui existent entre elle et les bolchevicks et fixe les « 21 conditions » d’adhésions des partis socialistes à la IIIe Internationale. Lors du congrès de Tours (1920), Marcel Cachin se range du côté de la fraction majoritaire (communiste) qui adhère à la IIIe Internationale. En 1923, il est membre du Comité central et du Bureau politique de la Section française de l’Internationale jusqu’à sa mort. La même année, il fait campagne contre l’occupation de la Ruhr, n’hésitant à aller en Allemagne affirmer la solidarité des travailleurs fraçais avec le peuple allemand contre l’action du gouvernement français. Poursuivie pour complot contre le sûreté de l’Etat, il bénéficie de la décision du Sénat constitué en Haute-Cour de Justice qui, en mai 1923, rejette ces poursuites. En 1924, il devient membre du Comité exécutif de l’Internationale communiste. Battu aux élections législatives de 1932, il est élu sénateur de la Seine en 1936 devenant ainsi le premier sénteur communiste. Après le pacte germano-soviétique qu’il refuse de désavouer, il est déchu de ses fonctions publiques en janvier 1940 et le Sénat prononce son exclusion. Au lendemain de la défaite de 1940, il suit la politique du parti communiste qui renvoie dos à dos l’Angleterre capitaliste et l’Allemagne nazie et s eprononce pour la nont-participation française à la guerre impérialiste. Pendant la Seconde Guerre mondiale Cachin et L’Humanité entrent dans la clandestinité reprenant ses activités publiques après la Libération. Il décèdera le 12 février 1958. CACHIN (M.) : Carnets, Paris, CNRS Editions, 2 vol. parus, 1993. HERTZOG-CACHIN (M.) : Regards sur le vie de Marcel Cachin, Paris, Eitions Sociales, collection Notre temps/Mémoires, 1980.

CADIOT (Pierre, Juste), 1858-1934 : Vétérinaire. Né le 13 juillet 1858 à Battigny (Meurthe-et-moselle), Cadiot est élève de l’Ecole vétérinaire d’Alfort et devient chef des travaux de chirurgie à cette école (1885). Professeur de clinique (1888), puis directeur (1920-1923), il est membre de l’Académie de médecine depuis 1905. Cadiot a publié sur l’art vétérinaire : De l’ovariotomie chez la jument et chez la vache (1893) ; Castration des chevaux (1895) ; Traité de thérapeutique chirurgicale des animaux domestiques (1895-1903) ; La Tuberculose du chien (1893) ; Les Tumeurs malignes des animaux (1894) ; Médecine canine (1901) ; etc. CADOL (Victor, Edouard), 1831-1898 : Auteur dramatique et littérateur. Né à Paris en 1831, On doit à Edouard Cadol : Paris pendant le siège (1871), et des romans : Madame Elise (1874) ; La Revanche d’une honnête femme (1882) ; Gilberte (1882) ; le Fils adoptif (1892) ; l’Archiduchesse (1896). Il décède à Asnières-sur-Seine en 1898.

CAGNAT (René, Louis, Victor), 1852-1937 : Professeur et philologue. Né à Paris le 10 octobre 1852, René Cagnat, est, à la mort de son père, pris en charge par Léon Renier, un ami de sa famille, qui s’occupe de son éducation. Elève à l’Ecole norrmale supérieure en 1873, agrégé de grammaire en 1876, il commence à s'intéresser à l'épigraphie. Il voyage en Afrique du Nord, et en 1883 devint professeur d'épigraphie. En 1887, il succède à Desjardins à la chaire d'Épigraphie et antiquités romaines du Collège de France, et en 1888, il fonde L'Année épigraphique. Il entre à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres en 1895, et en est le secrétaire perpétuel de 1916 à sa mort. Parmi ses travaux, citons : Etude historiue qur les impôts indirects chez les Romains (1882) ; Explorations épigraphiques et archéologiques en Tunisie (1883-1886) ; Cours élémentaire d’épigraphie (1886) ; les Fouilles de Timgad (1891) ; L'armée romaine d'Afrique et l'occupation militaire de l'Afrique sous les empereurs (1892) ; Voyage en Tunisie (1894) ; Lexique des antiquités romaines (1895) ; les Monuments historiques de la Tunisie (1898) ; Carthage, Timgad, Tebessa et les villes antiques de l'Afrique du Nord (1909) ; A travers le monde romain (1912) ; Manuel d'archéologie romaine (1916-1920) ; Inscriptions latines d'Afrique, Paris, 1923 ; etc. Il a fait paraître, en outre, depuis 1888, avec Bernier, l’Année épigraphique.

CAGOULE (Complot de la) : Le complot dit de la Cagoule a été l'expression, sous le Front populaire, de l'opposition au communisme et ses alliés de l'extrême droite activiste. Il y a eu, en fait, plusieurs complots de la Cagoule, cette dénomination ayant été forgée par la grande presse de l'époque, pour désigner les groupes clandestins crées après la dissolution des ligues et leurs menées factieuses contre le gouvernement afin de le renverser. La première société cagoularde fut l'Union des comités d'action défensive (U.C.A.D.), crée par le général Duseigneur, as de l'aviation en 1914-1918, et son ami, le duc Pozzo di Borgo. Prenant pour prétexte la défense des institutions républicaines, ils organisèrent des tournées en province, donnant comme consignes à leurs partisans inquiets du « danger marxiste » : « créez des comités de quartiers, stockez les armes » ; ils provoqueront ainsi l'intervention de la police. En relation étroite avec l'U.C.A.D., on trouve la plus sérieuse des organisations cagoulardes, le Comité secret d'action révolutionnaire (C.S.A.R.), dont le noyau dur était formé d'anciens Camelots du roi lassés par l'attentisme de Maurras. Trois personnalités y dominent : Jean Filliol, le docteur Martin, Eugène Deloncle, polytechnicien et ingénieur. Le but du C.S.A.R. : renverser la « Gueuse » par « l'action souterraine et une franc-maçonnerie retournée au bénéfice de la nation ». Le moyen : une nébuleuse de sociétés secrètes, séparées les unes des autres et s'ignorant mutuellement. La méthode de recrutement est le parrainage doublé d'un serment prononcé au cours d'un rite symbolique d'initiation. En échange de son dévouement et de sa discrétion, le militant reçoit une garantie de protection. Pour les traîtres, la seule sanction reste la mort. L’état-major de la Cagoule est organisé en « bureaux », sur le modèle militaire : le premier revient à Deloncle et à son homme de confiance, Jacques Corrèze. Le docteur Martin est responsable du deuxième, des renseignements et des « groupes Z ». Georges Cachier, administrateur de sociétés, et Jean Moreau de La Meuse sont respectivement à la tête des troisième et quatrième bureaux (opérations, recrutement et matériel). Leurs seconds les plus efficaces sont François Méténier, commis voyageur du complot, et Joseph Darnand. Deloncle a assimilé les techniques modernes du coup d'État et prépare l'insurrection avec minutie : groupes de combat clandestins équipés d'armes automatiques, conseils tactiques d'officiers sympathisants affiliés aux « réseaux Corvignolles » animés au sein de l'armée par le commandant Loustanau-Lacau. L'armée joue un rôle essentiel dans le plan d’action du CSAR, dont les groupes de combat disposent de stocks importants d'armes volées dans les magasins de l'armée, dans les usines, ou achetées à l'étranger. Deloncle mise sur une réaction communiste assez dure pour obliger l’armée à intervenir et à prendre le pouvoir avec les nationalistes. Pétain, pressenti, refusa catégoriquement son concours. En 1937, Franchet d'Esperey est choisi. Malgré les précautions prises et les exemples faits, la police pénétra les réseaux des cagoulards. Ses informateurs mis en place, elle attendit, en étoffant ses dossiers, le moment que le gouvernement jugerait favorable pour intervenir. Le 11 mars 1937, deux bombes détruisent l’immeuble du patronat français et celui de l'Union patronale interprofessionnelle à Paris. On soupçonne les anarchistes italiens émigrés, mais l'arrestation de trafiquants d'armes oriente l'enquête vers la Cagoule. Le 18 novembre, Marx Dormoy, ministre de l'Intérieur, dénonce le vaste complot contre la République. Une vague d'arrestations, opérées dans la France entière, permet d’écrouer cinquante-sept comploteurs et de mettre au jour les stocks d’armes. Filliol, Martin et Corrèze échappent à ce coup de filet. Des aveux précis établissent la responsabilité directe de la Cagoule dans les attentats de septembre et le meurtre des frères Rosselli en juin 1937. La guerre et l’occupation mirent fin aux enquêtes et aux poursuites judiciaires. Les cagoulards, très divisés, firent des choix souvent opposés : Deloncle, Corrèze et Schueller fondèrent un mouvement fasciste, le Mouvement social révolutionnaire (M.S.R.), qui devait fusionner avec le Rassemblement national populaire (R.N.P.) de Marcel Déat. Dewavrin (colonel Passy) et Corvisart rejoignirent de Gaulle à Londres ; Loustanau-Lacau, le docteur Martin, Pozzo di Borgo et Madeleine Fourcade participèrent activement à la résistance intérieure. Jeantet et Méténier servirent le régime de Vichy comme membres du cabinet du maréchal Pétain. BOURDEL (P.) : La cagoule: Histoire d'une société secrète du Front populaire à la cinquième république, Albin Michel, 1970. BOURDREL (P.) : La Cagoule - 30 ans de complots, Paris, Albin Michel, 1970. CAHEN (Coralie Lévy, épouse), 1832-1899 : Philanthrope. Née à Nancy en 1832, Coralie Cahen reste célèbre par ses œuvres de bienfaisance et de secours aux blessés militaires, qu’elle a l’occasion d’exercer lors de la guerre de 1870, d’abord à Metz, puis à Tours et à Vendôme. Elle se rend en Allemagne où, à la fin de 1872, où elle a visité soixante-six forteresses ; et il ne restait plus un prisonnier français. Depuis cette époque, Coralie Cahen consacre toute son activité à l’association des Dames françaises dont elle est vice-présidence. Elle décède à Parisen 1899. CAHEN (Albert), 1846-1903 : Compositeur. Né en 1846, on doit à Albert Cahen les ouvrages lyriques suivants : le Bois ; la Belle au bois dormant ; le Vénitien ; Fleurs des Neiges ; la Femme de Claude ; un poème biblique, Jean le Précurseur (1874), et un poème mythologique, Endymion (1883). Il décède à Cannes en 1903. CAHEN-SALVADOR (Georges), 1875-1963 : Conseiller d’Etat. Entré au Conseil d’Etat en 1899, Georges Cahen-Salvador gravit tous les échelons et en est le vice-président honoraire. Il occupe en outre des fonctions très importantes sous la IIIème République : directeur général du Sevice des priosonniers de guerre (1914-1919), directeur des Assurances sociales au ministère du Travail (1920-1923), secrétaire général du monistère de l’Intérieur (1934), puis du ministère du Travail (1939-1940), secrétaire général du Conseil national économique (1925-1940). Il est, en outre, délégué de la Frace à la SDN (1927-1934). Il a collaboré également à La Revue bleue, la Revue de Paris, à la Revue politique et parlementaire, à la Revue d’économie politique, etc. CAHIERS DE LA QUINZAINE (Les) : Publication dirigée par Charles Péguy de 1900 à 1914. Dès sa première année, elle publie une consultation internationale des socialistes sur l’affaire Dreyfus. Péguy, au cours de son évolution, y fait paraître toutes ses œuvres. Jean Jaurès y donne la série de ses Etudes socialistes, Anatole France ses discours, Romain Rolland son Jean Christophe ; les Tharaud y font leurs débuts. Une nouvelle série des Cahies de la Quinzaine a commencé à paraître en 1925. CAHUN (David, Léon), 1841-1900 : Ecrivain. Né à Haguenau (Bas-Rhin) en 1841, Léon Cahun fait plusieurs voyage en orient et devient conservateur adjoint à la bibliothèque Mazarine. Il a écrit pour la jeunesse des romans historiques pleins d’imagination et de savoir : Les Aventures du capitaine Magon (1875) ; La Bannière bleue (1876) ; Les Pilotes d’Ango (1878) ; Les Mercenaires (1881) ; Les Rois de mer (1887) ; Hassan la janissaire (1891) ; La Tueuse (1893) ; etc., et un ouvrage d’érudition : Introduction à l’histoire de l’Asie (1896). Il décède en 1900. CAILLARD (Henri), 1846-1917 : Vice-amiral. Né en 1846, Henri Caillard se distingue en 1870 comme lieutenant de vaisseau, puis en 1884 dans l’escadre de l’amiral Courbet dans les mers de Chine. Contre-amiral en 1898, il est appelé au poste de chef d’état-major général, conduit une démonstration navale devant Mytilène, et reçoit en 1902 la grade de vice-amiral. Il décède à Paris en 1917. CAILLAUX (Eugène, Alexandre), 1822-1896 : Ingénieur et homme politique. Né à Orléans (Loiret) le 10 septembre 1822, Eugène Caillaux, polytechnicien et ingénieur des Ponts est élu député conservateur de la Sarthe de 1871 à 1876. Elu sénateur de 1876 à 1882, Eugène Caillaux est d’abord fidèle à la politique de Thiers puis, se prononce contre lui le 24 mai 1873. Il est dès lors fidèle dfenseur de l’ »ordre moral ». Il remplace Larcy aux Travaux publics du 22 mai 1874 au 9 mars 1876 dans les ministères Cissey et Buffet et dans le troisième gouvernement Dufaure. Il impose alors le repos dominical et soutient les compagnies de chemins de fer. Il se préoccupe de de l’amélioration du bassin de la Loire et des ports de commerce, tout en étudiant un projet de tunnel sous la manche. Ministre des Finances dans le ministère de Broglie du 17 mai eu 22 novembre 1877, il acquiert une notoriété qui sera éclipsée par celle de son fils. Il décède à Paris le 8 août 1896. CAILLAUX (Joseph), 1863-1944 : Avocat et homme politique. Par le rôle qu'il a joué dans l'histoire de la IIIème République et spécialement durant sa présidence du Conseil, par la controverse qui a entouré son action et les scandales qui ont entaché sa vie, Joseph Caillaux occupe une place à part dont témoigne la plupart de ses contemporains. Fils du précédent, Joseph Caillaux est né au Mans (Sarthe) le 30 mars 1863. A l'issue d'études brillantes (droit et sciences politiques), Joseph est reçu à l'inspection des Finances en 1888. Pendant dix ans, il multiplie les tournées en province, acquérant une expérience et une compétence exceptionnelles. Très ambitieux, peu enclin à se satisfaire d'une carrière dans l'administration, il s'engage naturellement dans l'action politique. Son père, connu pour être roylaiste et catholique, Joseph opte, par réaction contre les idées reçues pour la République et le radicalisme. L'affaire Dreyfus, qui l'a scandalisé, compte beaucoup dans ce ralliement contraire à la tradition politique familiale. Peu de temps après la mort de son père, en 1896, il entame une carrière politique en 1898 où il arrache au candidat des droites, le duc de La Rochefoucauld-Doudeauville, le siège de député de la Sarthe qu’il détenait depuis vingt-sept ans (mandat qu'il conservera jusqu'en 1919). Le jeune parlementaire, travailleur inlassable, impose rapidement le respect à ses collègues par sa connaissance des questions économiques, en particulier budgétaire et fiscale. Déjà, il présente à la Commission de législation fiscale un exposé comparatif sur les divers systèmes d'impôts sur le revenu et se lie avec les gloires montantes du régime comme Poincaré, Delcassé, Deschanel et Barthou. Distingué par Waldeck-Rousseau qu'il appelle « son maître », Caillaux ne tarde pas à s'imposer comme un spécialiste des questions financières et est appelé au ministère des Finances par Pierre Waldeck-Rousseau en 1899, fonction qu'il occupe jusqu'en 1902. Pendant ces trois ans de pouvoir, il tâche de mettre en application ses idées en matière financière. Il pense déjà à l'instauration d'un impôt global et progressif sur le revenu, mais considère que le situation n'est pas mûre et que le Parlement fera barrage à un tel projet. Caillaux procède cependant à de nombreuses réformes. Il supprime les comptes extraordinaires, remanie les impôts sur les boissons et les droits de successions, refonde la taxation sur les sucres. Veillant à présenter des budgets excédentaires, il quitte le ministère avec Waldeck-Rousseau, son flair politique l'ayant dissuadé de poursuivre l'expérience avec Emile Combes dont il dénonce l'intolérance, contribuant à sa chute. Évoluant vers le centre gauche, il adhère au Parti radical et devient vice-président de la Chambre en 1906. Caillaux retrouve le portefeuille des Finances pendant les trois années du ministère Clemenceau (1906-1909). Durant cette période, il transforme les contributions directes, institue le cautionnement mutuel, règle le rachat des chemins de fer de l'Ouest. Il tente également de faire adopter son projet d'impôt progressif sur le revenu, consistant à remplacer les quatre impôts créés pendant la période révolutionnaire par un impôt unique, mais il se heurte à l'hostilité du Sénat, qui rejete son texte en 1907. Ses idées servent cependant de base à la réforme des contributions directes qui est réalisée entre 1914 et 1917. Après deux ans passé à la vice-présidence de la commission des Finances, il retrouve son portefeuille de prédilection dans le cabinet Monis en mars 1911. La mort accidentelle de Berteaux, en mai 1911, provoque l'effondrement du ministère et laisse Caillaux seul en lice pour hériter de la Présidence. Sans surprise, le président de la République Armand Fallières le désigne le 27 juin 1911. A quarante-huit ans seulement, Caillaux constitue un ministère resserré à forte ossature radicale puisque dix des douze ministres sont radicaux ou radicaux-socialistes. Il s'octroie l'Intérieur et les Cultes et s'entoure d'amis. Dans sa déclaration ministérielle du 30 juin, Caillaux se fixe comme objectifs l'amélioration de la loi sur les retraites ouvrières, la défense de l'école laïque et naturellement l'adoption de l'impôt sur le revenu. Il annonce également une réforme du fonctionnement des compagnies des chemins de fer. Conçu comme un ministère de réforme intérieure, le cabinet Caillaux va être, un mois après son avènement, absorbé par la seconde crise marocaine. Depuis 1905, le Maroc n'a cessé d'être une pierre d'achoppement dans les relations franco-allemandes. Caillaux négocie en direct et par le canal d'intermédiaires sûrs avec les autorités allemandes. Après d'innombrables péripéties et un marchandage effréné, un accord est finalement signé à Berlin le 4 novembre 1912. En contrepartie de son désengagement au Maroc, l'Allemagne recevoir une partie du Cameroun, soit 15.000 km² de Libreville à Ouesso et 250.000 km² au Moyen-Congo et en Oubangui. Cette négociation ne satisfait pas les nationalistes allemands et des tensions analogues ont lieu en France, où nombre de voix dénoncent une humiliante capitulation devant l'ennemi. Le 5 novembre, dans un discours qu'il prononce à Saint-Calais (Sarthe), le chef du gouvernement tente de justifier l'accord. Selon lui, la France ne pouvait accepter la présence d'aucune des grandes puissances européennes au Maroc. Voulant éviter la guerre, il a jugé indispensable de consentir des concessions en Afrique qui ne sont pas selon lui de nature à compromettre les intérêts supérieurs du pays. Caillaux ajoute que la répartition des territoires en Afrique centrale ne peut-être tenue pour définitive. La France, dans un esprit, sauve la paix et gagne le Maroc, moyennant des pertes mineures. Reste à en convaincre le pays et d'abord les parlementaires. En vertu de la constitution de 1875, le président du Conseil doit en effet faire approuver par le Parlement l'accord du 4 novembre. Le 14 décembre, le débat s'engage à la Chambre. La droite par la bouche d'Albert de Mun, fustige d'emblée la reculade de Caillaux et l'abandon du Congo. Le 20 décembre, le Chambre ratifie cependant le traité. Mais le Sénat promet d'être autrement plus difficile à convaincre. La Chambre haute veut en effet à travers Caillaux abattre l'impôt sur le revenu auquel elle n'a jamais cessé d'être hostile. Bourgeois est placé à la tête d'une commission chargée d'examiner le projet de loi dont Clemenceau est membre, Poincaré devenant rapporteur. Tous trois rendent publiques les tractations secrètes qui ont eu lieu entre Caillaux et le baron de Lancken, conseiller de l'ambassade d'Allemagne. Or, Caillaux, alors qu'on ne lui demande rien, estime nécessaire devant la commission de donner sa parole « qu'il n'y a jamais eu de tractation politique et financière d'aucune sorte, outre les négociations officielles ». Le mensonge permet au Tigre d'attaquer. Affirmant que le ministre des Affaires étrangère de Selves lui a dit le contraire, il interroge ce drenier qui refuse de répondre avant de donner sa démission. Caillaux a beau offrir, en vain le portefeuille à Delcassé puis à Poincaré, tout le monde comprend alors que le gouvernement est à l'agonie. Le 11 janvier, Caillaux démissionne après avoir fait signer à chacun de ses ministres la lettre suivante : « La politique extérieure pour laquelle vous nous avez demandé notre participation constante a rencontré dans chacune de nos réunions l'approbation sans réserve de tous les membres du gouvernement. Nous avons conscience d'avoir servi, avec la paix du monde, la dignité et la grandeur de la France. » Caillaux sort très affaibli de son échec. En raison de la conjoncture internationale et faute de temps, les réformes intérieures sont restées lettre morte. Sa personnalité déconcerte déjà nombre de ses contemporains. Une capacité hors du commun, un don d'orateur, une culture éblouissante sont en grande gâchés par l'orgueil démesuré de l'homme et de son caractère difficile : « Son humeur était terrible, précise Anatole de Monzie; il la connaissait, il s'en plaignait, il ne pouvait la vaincre; naturellement dur et brusque, il devient vite brutal, capable de toutes les insultes, et de tous les comportement inimaginables, changeant avec cela. » Autoritaire, riche et brillant, pacifiste dans une époque guerrière, tenant du gouvernement personnel et de la diplomatie occulte dans un siècle parlementaire, l'homme a tôt suscité une animosité extrême à son encontre qui a fait oublier sa fibre sociale et ses dons de visionnaires, notamment sur l'Europe dont il a été, avant Briand, un ardent promoteur. Tenu à distance des ministères par l’hostilité de Clemenceau, il se fait élire, au congrès de Pau de 1912, président du parti radical et retrouve le portefeuille des Finances dans le cabinet Doumergue en décembre 1913. L'homme et sa politique font l'objet d'une campagne de presse acharnée de la part du Figaro. Le journal publie au compte-goutte la correspondance privée de Joseph Caillaux à l'instigation de ses ennemis politiques et dans la volonté évidente de détruire sa carrière en raison notamment de son opposition à la guerre. Le 16 mars 1914, sa seconde épouse, Henriette Caillaux tue Gaston Calmette, le directeur du Figaro, excédée par la campagne qui vise son mari depuis plusieurs mois. L'affaire qui le conduit à démissionner, se solde par un acquittement spectaculaire qui intervient à l'orée de la Première Guerre mondiale. Réélu à la députation aux élections de 1914, Caillaux passe le début de la guerre en retrait de la scène politique, ne pouvant siéger au gouvernement avant la fin du procès. L'homme d'Agadir, connu pour son opposition au conflit, va être victime du retour au pouvoir de Clemenceau, devenu son implacable ennemi. Caillaux, rival et adversaire de Poincaré et de Clemenceau, entame alors une forme de traversée du désert. Partisan de longue date d’un rapprochement franco-allemand, Caillaux est soupçonné de trahison pour avoir noué des contacts dans divers pays afin de négocier une paix séparée avec l'Allemagne. Il est, à l'instigation de Clemenceau, ainsi accusé en 1917 et arrêté le 14 janvier 1918 pour « intelligence avec l’ennemi ». A partir d’octobre 1919, il est jugé deux fois devant le Sénat réuni en Haute Cour et condamné en février 1920 à trois ans de prison et à dix ans d'inéligibilité. Six ans après l'acquittement de sa femme, cette seconde affaire Caillaux aurait pu, comme le prévoyaient ses adversaires, mettre définitivement fin à sa carrière politique, mais l’outrance même de l’attaque suscite une réaction d’indignation qui lui profite. Après avoir été amnistié en 1925, il retrouve ses droits politiques et se présente au Sénat dans le département de la Sarthe. Elu en juillet 1925, il préside la prestigieuse commission des Finances et le banni fait figure, dans son camp, de martyr de la paix, tandis que les partisans de l'Action française fustigent « le traître », « l'homme le plus haï de France ». En même temps, il entame la lutte contre Edouard Herriot pour reconquérir la présidence du parti radical. Mais, là comme ailleurs, son heure est passée et les militants radicaux, réunis en congrès à Nice à l’automne 1925, plébiscitent Herriot, rejettant les idées de Caillaux qui fait désormais figure de conservateur. Il retrouve à trois brèves reprises le portefeuille des Finances : dans le cabinet Painlevé en 1925, le ministère Briand 1926 puis 1936. Partisan résolu de l'orthodoxie financière, il prend ses distances avec la gauche, s'oppose à la politique économique du Front populaire et joue un rôle déterminant dans la chute du premier cabinet Blum, en juin 1937. Entre temps, il est devenu président de la Commission des finances du Sénat. Son poids est si déterminant que les ministres des Finances successifs négocient avec lui avant de proposer au Parlement des mesures financières. En 1940, il vote les pleins pouvoirs à Philippe Pétain mais refusera toujours de s'associer, à quelque titre que se soit, à l'Etat français. Ses dernières années sont consacrées à la rédaction de ses Mémoires, témoignage de premier ordre pour justifier son action. Il décède à Mamers (Sarthe), le 21 novembre 1944. ALLAIN (J.-C.): Joseph Caillaux, 2 volumes, Paris, Imprimerie nationale, 1978-1981. BREDIN (J.-D.) : Joseph Caillaux, Paris, Hachette, 1980. HOUDYER (P.) : L’affaire Caillaux…ainsi finit la Belle Epoque, Les Sables d’Olonne, Editions Le Cercle d’Or, 1977. ROCHE (E.): Avec Joseph Caillaux : Mémoires, Souvenirs et documents, Paris, Publications de la Sorbonne, 1980. CAILLAVET (Gaston Arman de), 1870-1915 : Journaliste et auteur dramatique. Né à Paris le 15 mars 1870, Gaston Arman de Caillavet est le fils de Madame Arman de Caillavet, connue pour son salon littéraire et son amitié pour Anatole France. Il décute en 1891 au théâtre par de petites comédies, écrit plusieurs revues et forme en 1900 une brillante association avec Robert de Flers. Les deux auteurs ont donné des opéras bouffes : Les Travaux d’Hercule (1901) ; Le Sire de Vergy (1903) ; M. de La Palisse (1904) ; Pâris ou le bon juge (1906) ; des comédies : Les Sentiers de la vertu (1903) ; L’Ange du foyer (1905) ; Miquette et sa mère (1906) ; L’Eventail (1907) ; L’Amour veille (1907) ; Le Roi, avec E. Arène (1908) ; L’Ane de Buridan (1909) ; Le Bois sacré (1910) ; Papa (1911) ; Primerose (1911) ; L’Habit vert (1912) ; La Belle aventure, avec E. Rey (1913) ; Monsieur Brotonneau (1914) ; œuvres d’une fantaisie étourdissante et d’un esprit délicat, qui vont de la farce parodique ou satirique à la comédie aimable et sentimentale. On leur doit en outre une pièce historique, La Montansier (1905), et des livrets d’opérettes et des ballets. Bien qu’il soit difficile de déterminer l’apport personnel de chacun des collaborateurs, il semble cependant que Caillavet ait fourni cette verve pétillante et cocasse qui caractérise les premières œuvres des deux auteurs. Comme journaliste, Caillavet, collabore surtout au Figaro. il décède à Essendiéras (Dordogne) le 15 janvier 1915. BARILLET (P.) : Les Seigneurs du rire : Flers - Caillavet - Croisset, Paris, Arthème Fayard, 1999 CAILLÉ (Joseph, Michel), 1836-1881 : Statutaire. Né à Nantes en 1836, élève de Duret et Guillaume, Caillé expose pour la première fois au Salon en 1863, avec Aristée pleurant la mort de ses abeilles. On lui doit Caïn (1874) ; Elégie (1878) ; le modèle de la statue de Voltaire (1878). Il décède à Nantes en 1881. CAILLEBOTTE (Gustave), 1848-1894 : Peintre. Né en 1848 d'un père qui a su tirer profit des aménagements de Paris du Baron Haussmann, Gustave Caillebotte, après une licence de droit, se destine à la peinture et entre à l'Ecole des Beaux-arts en 1873.Héritier de la fortune de son père, et donc libéré de toute contingence matérielle, il devient le mécène de ses amis. En 1874, il aide à l'organisation de la première exposition impressionniste, mais ce n'est qu'en 1876 qu'il exposera avec eux, après que son tableau Les raboteurs de parquet ait été refusé au Salon Officiel l'année précédente. Dans cette œuvre, la manière de Caillebotte est déjà toute entière présente. Il s’attache toujours à rendre ces évènements quotidiens, en privilégiant un dessin clair, un cadrage efficace. Après 1882, son style évoluera dans une recherche plus proche de celle de l'impressionnisme avec un travail plus tourné vers les variations de lumière, notamment dans les paysages. Caillebotte meurt à Gennevilliers en 1894 en léguant à l'état une très importante collection des œuvres de ses amis. CAILLEMER (Exupère), 1837-1913 : Jurisconsulte. Né le 23 novembre 1837 à Saint Lo (Manche), Exupère Caillemer professe d’abord à Grenoble, puis, lors de la création de la faculté de Lyon en 1875, en est nommé doyen et sait l’élever rapidement au rang des premières de province. Parmi ses nombreux travaux, citons sa thèse sur Les Intérêts, ses Etudes sur les antiquités juridiques d’Athènes (1880). Il rédigea, dans le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines de Daremberg et Saglio la plupart des articles relatifs au droit public et privé de la Grèce. Il décède à Lyon en 1913. CAILLETET (Louis-Paul), 1832-1913. Physicien et industriel. Né le 21 septembre 1832 à Châtillon-sur-Seine (Côte-d'Or), Louis Cailletet suit les cours de l’Ecole des mines de Paris. Tout en poursuivant ses recherches, il travaille aux côtés de son père, maître de forges à Chênecières et à Villotte-sur-Ource. Il étudie un grand nombre de questions relatives aux propriétés physiques et chimiques du fer, à la dissociation des gaz, à la diffusion de l’hydrogène. En 1877, il réussit à liquéfier le dioxyde d'azote, par le froid intense résultant d'une décompression brusque du gaz fortement comprimé. La même année, il réussit le premier à liquéfier l’oxygène, l'hydrogène, l'air atmosphérique. L'air liquide était né. Il y parvint en 1877 quand il produit des gouttelettes d'oxygène liquide par une méthode différente de celle utilisée par Raoul Pictet, en utilisant l'effet Joule-Thomson. Dans sa technique, l'oxygène est refroidi et comprimé simultanément. Il subit ensuite une dilatation rapide, ce qui permet de le refroidir encore plus, aboutissant à la production de gouttelettes d'oxygène liquide. Ces travaux lui valurent la Médaille Davy en 1878. Membre de l'Académie des sciences en 1884, il décède à Paris le 5 janvier 1913. CAIN (Auguste), 1822-1894 : Sculpteur animalier. Né à Paris en 1822, Auguste Caïn, élève de Rude, s’adonne dès 1846 à la sculpture d’animaux. Ses œuvres sont fort nombreuses : Tigre étouffant un crocodile (1870) ; le Bœuf ; Combat de tigres (1878) ; Lion et lionne se disputant un sanglier (1882) ; deux groupes de Chiens de meute ; etc. Il décède à Paris en 1894. CAIN (Georges-Jules-Auguste), 1853-1919) : Peintre et littérateur. Né à Paris en 1853, puisera son inspiration dans l'histoire de Paris. Les sujets de ses tableaux sont pour la plupart empruntés de l’histoire anecdotique : Une barricade en 1830 (1889) ; Rixe au café de la Rotonde (1882) ; Mort des derniers Montagnards (1897) ; Une répétition de « Madame Sans-Gêne » (1899) ; etc. De l’écrivain, citon : Coins de Paris (1905) ; Promenades dans Paris (1906) ; Anciens théâtres de Paris (1906) ; A travers Paris (1909) ; Les Environs de Paris (1912-1913) ; etc. Il consacrera une partie de sa vie au musée Carnavalet dont il deviendra le conservateur de 1897 à 1914. Il décède en Paris en 1919. CAIN (Henri), 1859-1937 : Peintre et auteur dramatique. Frère du précédent, Henri Cain est né à Paris en 1859. Elève de J.-P. Laurens et Ed. Detaille, il a peint des scènes de genre et quelques portraits (le Duc d’Aumal, Léon Cavalho), Auguste Cain). Il est aussi un auteur dramatique et un librettiste habile. On lui doit nombre de livrets d’opéras-comiques : La Vivandière, musique de B. Godard (1895), La Navarraise, avec J. Claretie, musique de Massenet (1899) ; Le Juif polonais, avec Gheusi, musique d’Erlanger (1900) ; La Flamenca, avec Adenis, musique de Louis Lambert ; Chérubin, avec F. de Croisset, musique de Massenet ; La Cabrera, musique de G. Dupont (1905) ; Les Pêcheurs de Saint-Jean, musique de Widor (1906). Il a encore donné au théâtre : Jacques Callot, drame, avec Adenis (1896) ; Sapho (d’après Alphonse Daudet) avec Bernède (1897) ; Les Mirages, avec le même ; Une aventure de la Guimard, ballet-pantomime (1900) ; Cigale, ballet, musique de Massenet ; Quo vadis ? d’après le roman de Sienkiewicz, musique de Nouguès (1909) ; Don Quichotte (1910), et Roma (1912), musique de H. Février. Il a publié de nombreux romans et feuilletons. CALLIES (Alexis), 1870-1950 : Alexis Eugène Callies est né à Annecy le 26 mars 1870. Bien que fils de médecin, il néglige la carrière médicale pour celle des armes. Le 20 octobre 1891, il souscrit un engagement volontaire pour trois ans, au titre de l’École Polytechnique. Après y avoir obtenu son galon de sous-lieutenant, il complète sa formation à l’École d’Application de l’Artillerie et du Génie de Fontainebleau, d’octobre 1893 au 31 mars 1895, dans la spécialité "artillerie de marine" puis dans celle d’artillerie "de terre". Le 26 août suivant, il se marie avec Marie Louise Elisabeth Amiot, fille de l’ingénieur télégraphiste attaché à la personne de Napoléon III de 1859 à 1870. Le premier octobre, il rejoint comme lieutenant le 7e régiment d’artillerie (Rennes). Il part ensuite pour Toulon le 8 juillet 1904 et y intègre le 17e bataillon d’artillerie à pied. Le 23 mars 1907, il reçoit son galon de capitaine avec sa mutation pour le 19e d’Artillerie (Nîmes). Il y sert toujours à la déclaration de guerre. Entre 1914 et 1918, Alexis Callies occupe successivement les fonctions de capitaine commandant une batterie de canons de 75, d’officier adjoint au commandant d’une artillerie de corps d’armée, puis de chef d’escadron commandant un groupe d’artillerie de campagne. Ses carnets de guerre rendent compte de ces emplois et reflètent leur diversité. Et c’est précisément cette diversité des portraits brossés, des mentalités, des missions, des moyens, des préoccupations et des conditions de vie qui fait la richesse et l’originalité de son témoignage. Peu porté sur le travail scolaire, Alexis Callies est sorti dernier de sa promotion de l’École Polytechnique (ce qui explique son affectation dans l’artillerie de marine). Un an et demi plus tard, son appréciation de fin de stage à l’école d’application de Fontainebleau mentionne toutefois qu’il a " fait des progrès et en aurait fait davantage s’il avait montré plus d’assiduité au travail ". En outre, il y fait preuve de " bonnes aptitudes militaires ", d’intelligence et de certaines qualités d’orateur. Il en sort avec le 59e rang sur 85 élèves. C’est en corps de troupe qu’il se révèle être un excellent officier d’artillerie, comme en témoignent ses notations annuelles. A peine certains chefs de corps relèvent-ils chez lui une confiance en soi parfois excessive. Cavalier émérite, il suit les cours de l’école de Cavalerie de Saumur entre octobre 1897 et août 1898 et c’est tout naturellement qu’après un bref passage dans l’artillerie à pied il rejoint le 19e régiment d’artillerie à cheval. Ses qualités équestres lui furent salutaires à plusieurs occasions, pendant toute la guerre. Le 1er décembre 1919, il prend prématurément sa retraite comme chef d’escadron (il est placé en congé illimité en 1921) et, pour des raisons pécuniaires, se reconvertit dans l’industrie. Il dispose désormais du temps nécessaire à la mise au propre des notes qu’il avait rédigées sur son agenda personnel au jour le jour, pendant toute la campagne. Elles sont relues, vérifiées, parfois augmentées (mais en aucun cas réécrites), puis recopiées sur des cahiers d’écolier. A partir de 1925 et plus encore de 1928, date de son entrée en politique, Alexis Callies n’est plus en mesure de poursuivre son travail de mise à jour, faute de temps libre. Il l’interrompt donc pour ne le reprendre qu’en octobre 1935, sans changer de méthode. Il peut enfin achever son œuvre, laquelle occupe treize cahiers d’écolier, noircis d’une écriture serrée et parfois difficilement lisible. Si le commandant Callies décrit dans ses carnets ce que fut sa vie d’officier d’artillerie au front entre 1914 et 1918, il laisse également transparaître des soucis, des idéaux et des blessures propres à son époque et à son milieu. Quatre grands thèmes structurent son texte et sa réflexion : le poids du passé politique de l’armée, les considérations de pure tactique militaire, les rumeurs et la légende noire des troupes du Midi. Catholique pratiquant mais clérical modéré, rallié à la République mais non sans méfiance envers le régime, le commandant Callies appartient à la génération d’officiers la plus éprouvée par les scandales qui ébranlèrent l’armée Française entre 1890 et 1910. De l’affaire Dreyfus à la séparation de l’Église et de l’État, sans oublier le scandale des fiches du ministère du général André, chaque soubresaut a laissé de profondes cicatrices dans l’âme, les amitiés ou les relations de service de chacun. Il suffisait d’une prise de position un peu trop avérée en faveur d’un camp ou d’un autre pour que s’inventent des réputations ou se créent des inimitiés tenaces. Lorsque l’Allemagne déclare la guerre à la France, ces remous sont encore cruellement sensibles, en dépit d’une "Union Sacrée" d’apparence. Ils le restent durant toute la guerre. Alexis Callies s’en est fait le témoin et ses convictions religieuses en firent parfois une victime. S’il a toujours su faire passer ses idéaux après son métier d’officier, il n’en fut pas de même pour certains de ses chefs et subordonnés dont le sectarisme provoqua bien des blessures et des rivalités. L’anticléricalisme d’un général Jullian, ainsi que le républicanisme forcené et sectaire d’un général Sarrail ou d’un capitaine Pellegrin donnent autant d’occasions à Alexis Callies d’exprimer sa méfiance à l’égard des uns et son mépris pour les autres, tout en réaffirmant, lorsque l’occasion se présente, ses options religieuses et politiques. Dans le domaine strictement militaire, les carnets du commandant Callies fournissent d’utiles précisions sur les conditions de vie et de travail en campagne dans un petit état-major. Loin des tranchées d’un Barthas ou d’un Genevoix, ils décrivent un aspect un peu méconnu (et, il faut bien le dire, un peu méprisé) de la vie combattante. A l’échelon intermédiaire entre la troupe et les grands chefs, l’état-major de l’artillerie d’un corps d’armée (ainsi que tous les états-majors d’armes, d’une manière générale) peut sembler une "planque", vu des premières lignes. C’est une idée fausse, car on y meurt aussi. Au quotidien, le travail est harassant. Il afflue de toutes parts, en exigences péremptoires d’autant plus difficiles à respecter qu’elles ne tiennent souvent compte ni des délais ni des moyens nécessaires à leur satisfaction. Enfin, condition aggravante, la vie en petit état-major est généralement une vie en huis-clos, tout le monde partageant le même bureau, la même salle à manger, la même chambre... Les personnalités profondes s’y révèlent, les caractères s’y aigrissent et les rivalités de personnes ou d’opinions s’y font jour. Bien peu de carnets ou de mémoires jusqu’alors publiés rendent compte de ces réalités médianes entre le front et l’arrière. Après son retour en régiment, début 1916, Alexis Callies reprend le fil d’un récit plus classique. Le lecteur y retrouvera les évocations familières de la vie aux tranchées, des marmitages et des malheurs au quotidien des poilus. Il y sera également sensibilisé aux difficiles relations entre l’artillerie et l’infanterie. Relations tactiques, mais également relations humaines, tant les fantassins affectent d’ignorer et de mépriser les artilleurs, qui le leur rendent bien. Dans cet environnement délicat, le commandant Callies s’efforce constamment de rompre ce malentendu entre les deux armes. Pour ce faire, il doit lutter contre les idées préconçues des uns et les immobilismes des autres, sans parler des nombreuses méconnaissances mutuelles. Son action est à replacer dans le contexte plus global de la recherche (théorique mais aussi pratique) d’un combat commun harmonieux et efficace de l’artillerie et de l’infanterie, qui fut un incessant sujet de débat en France entre 1871 et 1945, avant que le principe d’un combat résolument interarmes (fondé tout d’abord sur l’exemple des "combat command" américains) ne s’impose durablement. En cherchant à renforcer les liens unissant fantassins et artilleurs, Alexis Callies fait profession de pragmatisme, mais surtout d’une indéniable modernité dans son approche des problèmes tactiques. Tous les combattants de la Grande Guerre, officiers ou soldats, s’efforcent de se tenir informés des opérations en cours. Attachés à leur secteur, lorsque ce n’est pas à leur portion de tranchée, vivant dans la terre, le regard au ras du sol, ils n’en cherchent pas moins à acquérir maladroitement une connaissance plus globale de la guerre. Cela les rassure et leur donne le sentiment d’être autre chose que des pions disséminés sur le front. Dans les petits états-majors, on partage ces préoccupations, tout en cherchant à faire montre de science stratégique ; on échafaude les alliances, élabore des plans de campagne et des offensives victorieuses... Ainsi, une foule d’informations circule quotidiennement dans les cantonnements, des premières lignes à l’arrière. On les appelle "bobards" ou "bouthéons" et personne ne cherche vraiment à en vérifier l’exactitude puisque, comme de bien entendu, on les tient toutes de source sûre. Quand sera-t-on relevé ? Dans quel secteur notre régiment (ou notre corps d’armée) va-t-il être engagé prochainement ? Qui va remplacer le général en chef ? Où doit se faire la prochaine offensive décisive ? Combien de temps la guerre durera-t-elle encore ?... Alexis Callies s’est fait le témoin et le chroniqueur de ces rumeurs. Son texte en fourmille. Il en rend souvent compte avec humour, mais également parfois avec une certaine candeur qui en dit long sur l’oreille complaisante que l’on prêtait alors aux bruits les plus divers. Il est enfin un autre leitmotiv qui ne prête pas à sourire. C’est toujours accompagné d’une profonde douleur et d’une indignation sincère qu’il revient dans les écrits du commandant Callies. Il s’agit de la mauvaise réputation qui est faite aux troupes du Midi en général et au 15e C.A. en particulier. Celle-ci se fait jour très tôt dans la guerre, dès les premiers revers d’août 1914. Elle est injuste et parfaitement infondée, mais comment n’aurait-elle pas connu de succès, puisque le général Joffre lui-même lui apporte son concours ? Le 21 août à 19 heures en effet, il déclare par téléphone au ministre de la Défense : " L’offensive en Lorraine a été superbement entamée. Elle a été enrayée brusquement par des défaillances individuelles ou collectives qui ont entraîné la retraite générale et nous ont occasionné de très grosses pertes. J’ai fait replier en arrière le 15e Corps qui n’a pas tenu sous le feu et qui a été cause de l’échec de notre offensive. J’y fais fonctionner fermes les conseils de guerre ". Rien n’est moins faux que ces prétendues défaillances du 15e Corps et Joffre allait s’en rendre compte bien vite. Il n’en reste pas moins que la légende était forgée et qu’elle bénéficiait de la bien maladroite caution de la plus haute autorité de l’armée française. Trois jours plus tard, l’affaire prend une toute autre dimension. De rumeur, elle devient diffamation, sous la plume du sénateur Gervais qui, le 24 août, publie sur la demande du ministre Messimy dans Le Matin un article accusateur, dont les échos devaient se faire entendre jusqu'à la fin du conflit. Les réactions ne se font pas attendre. Émanant des milieux politiques ou journalistiques, elles démontrent l’inanité d’une telle accusation contre les hommes d’une région de France. Après tout, les troupes (lorraines) du 20e C.A. n’ont pas connu plus de succès devant Morhange que celles du 15e C.A. autour de Dieuze. En outre, les causes de l'échec avancées par Gervais sont fausses car elles passent sous silence la réalité des combats, la puissance de feu de l’artillerie allemande, la qualité des organisations défensives de l’ennemi, les vices de la doctrine officielle de combat de l’armée française, etc.. Mais le mal est fait. La "légende noire" du 15e Corps est en marche, en dépit de toutes les tentatives et de toutes les bonnes volontés visant à la réfuter. L’affaire prend de telles proportions qu’elle menace de compromettre sérieusement le moral d’une partie de l’armée. Le ministre se voit contraint d’en appeler à la vigilance des généraux commandant les régions dites "sensibles" (7e, 14e, 15e, 16e, 17e et 18e régions militaires) et de leur demander d’étouffer toute tentative de la presse locale visant à raviver la polémique. La rumeur survit tout de même jusque après l’armistice, plus sournoise car moins officielle. Le chef d’escadron Callies en fut blessé, comme la plupart de ses confrères du 15e Corps. L’injustice et la médisance soulèvent chez lui une indignation certes pudique et généralement laconique, mais sincère et douloureuse, qui émaille l’ensemble de ses textes, au hasard de ses rencontres ou de ses lectures. Le 1er décembre 1919, Alexis Callies obtient sa mise à la retraite comme chef d’escadron et se retire à Levallois-Perret. Il commence alors une seconde carrière dans l’industrie et remplit un certain nombre de responsabilités, comme celle d’arbitre-expert près le tribunal de commerce de la Seine. Il n’abandonne toutefois pas l’armée, puisque versé dans la réserve puis la territoriale, il accomplit encore une douzaine d’années de service militaire, avant d’être rayé des cadres en 1933. Le 29 avril 1928, il est élu au second tour des élections générales et devient député d’Annecy. A l’Assemblée, il s’inscrit au groupe de l’Union Républicaine Démocratique et fait partie de plusieurs commissions, dont celles de l’armée, des mines et des programmes électoraux. Entre autres activités, il est l’auteur d’un projet de loi en faveur du vote familial (1930), interpelle le gouvernement au sujet des entreprises dissidentes au Maroc et dans le Sud-Oranais, participe à la discussion des budgets de la Guerre, de l’Instruction Publique et de la loi de finances (entre 1930 et 1932) et sert de rapporteur pour la proposition visant à rendre un hommage national au maréchal Joffre (en 1931). Il est battu par Henri Clerc aux élections des 1er et 8 mai 1932 et ne se représente pas en 1936, mettant ainsi un terme à sa carrière politique pour ne plus se consacrer qu’à son industrie. Il décède à Mars-sur-Allier, dans la Nièvre, le 23 juin 1950. CALMETTE (Albert-Léon-Charles), 1863-1933 : Bactériologiste. Né à Nice le 12 juillet 1863, Albert Calmette est d’abord médecin de la marine, et à ce titre effectue diverses croisières (Campagne de Chine) où il est fait des séjours aux colonies. Chargé de faire des recherches à l’Institur Pasteur, il est envoyé à Saïgon en 1890 pour fonder un institut analogue dont il deviendra le directeur de 1891 à 1893. Revenu en France, il fonde et dirige l’Instut Pasteur de Lille qu’il dirige pendant vingt-cinq ans, de 1896-1919). Puis, il organise le premier dispansaire antituberculeux, et installe un sénatarium. Professeur de bactériologie et d’hygiène à la faculté de cette ville, et sous-directeur de l’Institut Pasteur de Paris, il a écrit de nombreux mémoires sur la bactériologie, la chimie physiologique et l’hygiène. Les principaux portent sur le venin des serpents et la sérothérapie antivenimeuse, l’ankylostomiase, la vaccination jennérienne, la sérothérapie antipesteuse et la tuberculose. Citons : Recherches expérimentales sur la tuberculose effectuées à l’Institut Pasteur de Lille (1907), L’Infection bacillaire et la tuberculose chez l’homme et chez les animaux (1920), La Vaccination préventive contre la tuberculose par le BCG (1927). Albert Calmette fonde ensuite les Instituts Pasteurs d’Alger et d’Athènes, et est envoyé à Porto pour y combattre une maladie infectueuse. En 1917, il prend la place de Metchnikoff et commence ses recherches sur la vaccin antituberculeux (BCG). Les 23 et 24 octobre 1933, il veut encore partciper ai Congrès international d’hygiène qui se tient à Paris et meurt à Paris le 29 du même mois. CALMETTE (Gaston), 1858-1914 : Journaliste. Né à Montpellier en 1858, frère du précédent, Gaston Calmette est rédacteur au Figaro, puis secrétaire de la rédaction depuis 1894. il devient directeur-gérant de ce journal en 1903. Ayant commencé en janvier 1914 une campagne contre le ministre des Finances Joseph Caillaux, il est, le 16 mars, tué dans son bureau, d’un coup de revolver par l’épouse de ce dernier. CALMETTES (André), 1863-1942 : Acteur et réalisateur. Né à Paris le 18 avril 1861, André Calmettes débute en 1885 à l’Odéon dans Dom Juan, et demeure six ans à ce théâtre. Ayant suivi son directeur Porel au Grand-Théâtre, il s’y fait remarquer dans Sapho, Lysistrata, Pêcheur d’Islande, l’Arlésienne, etc. Il joue ensuite à l’Ambigu, au Gymnase, au Vaudeville, au Théâtre Sarah-Bernhardt où il fait, dans l’Aiglon, une belle création de Metterlinch, à la Porte-Saint-Martin, etc., règle la mise en scène de nombreuses pièces dans divers théâtres et devient, en 1926-1932, directeur du théâtre municipal de Strasbourg. En 1908 pour couvrir le bruit des spectateurs, André Calmettes a une idée géniale en demandant pour son prochain film une musique d'accompagnement. Un des premiers compositeurs à agencer une musique de film est Camille Saint-Saëns pour le film L'Assassinat du duc de Guise, le plus souvent jouée en « direct » dans la salle au cours de la projection par un pianiste. Le cinéma muet prendra à partir de cette époque une autre dimension car les films connaitront pendant les trente premières années, une musique d'accompagnement, un bonimenteur, ou même parfois des synchronisations avec des acteurs ou des chanteurs cachés derrière l'écran. Un duel sous Richelieu, L'Assassinat du duc de Guise, Britannicus, Oedipe roi (1908) ; Macbeth, L'Arrestation de la duchesse de Berry, Le Baiser de Judas (co-réalisateur), Les Enfants d'Édouard, Héliogabale, Le Légataire universel, La Légende de la Sainte-Chapelle, Louis XI, Le Retour d'Ulysse, Rigoletto, Rival de son père, Le Roi de Rome (1909) ; L'Aigle et l'aiglon, Au temps des premiers chrétiens, L'Avare, Don Carlos, L'Écharpe, Le Forgeron, L'Héritière, Le Lépreux de la cité d'Aoste, La Mésaventure du capitaine Clavaroche, Résurrection (co-directeur), Roi d'un jour, La Vengeance de Louis XIII (1910) ; Camille Desmoulins (co-réalisateur), Le Chevalier d'Essex, Décadence, La Fin d'un joueur, Jésus de Nazareth (co-réalisateur), Madame Sans-Gêne (co-réalisateur), Pour l'empereur, L'Usurpateur (1911) ; Richard III, La Dame aux camélias, Mignon, Les Trois mousquetaires (co-réalisateur) Acteur – filmographie : Le Forgeron, La Mésaventure du capitaine Clavaroche (1910) ; Pour l'empereur (1911) ; Le Petit Chose : Monsieur Viot (1923) ; La Closerie des Genets(1924). CALMETTES (Fernand), 1846-19 : Littérateur et peintre. Né à Paris en 1846, Fernand Calmettes suit d’abord les cours de l’Ecole des Chartes et de l’Ecole des hautes études puis, entraîné par son goût pour la peinture, il envoie au Salon des tableaux d’histoire, des portraits et des études de marins. La critique d’art le conduit à la littérature : ses romans Pauvre fille, Sœur aînée, Simplette, Melle Volonté, paraissent avec des illustrations du peintre de 1888 à 1891. Il publie encore le Vice (1896) ; Leconte de l’Isle et ses amis (1903) ; et il a réédité les Mémoires du baron Thiébault, d’une Inconnue, du duc de Choiseul. CALMON (Marc-Antoine), 1815-1890 : Homme politique. Né à Tamniès (Dordogne), le 3 mars 1815, Marc-Antoine Calmon est maître des requêtes au Conseil d’Etat. Député conservateur du Lot de 1846 à 1848, il est favorable aux Orléans et n’accepte d’entrer au gouvernement en 1871 que par amitié par Thiers. Il est ainsi sous-secrétaire d’Etat à l’intérieur du 23 février 1871 au 7 décembre 1872 dans le premier cabinet Dufaure. Il sert ainsi de caution aux monarchistes constitutionnels et signe l’expulsion du prince Jérôme-Napoléon. Rallié aux républicains conservateurs, il démissionne fin 1872 devant l’attitude de la droite. Elu à l’Académie des Sciences morales et politiques en 1872, il est préfet de la Seine jusqu’à la démission de Thiers. Député de Seine-et-Oise en 1873, il devient sénateur inamovible en 1875. Il meurt le 1890. Calmon avait publié notamment Histoire parlementaire des finances de la Restauration (1868-1970). CALVÉ (Rosa-Emma Calvet dite Emma) (1858-1942). Cantatrice. Née à Decazeville le 15 août 1858, elle débute au théâtre de la Monnaie de Bruxelles en 1882 dans Faust puis Hérodiade et Robert le Diable. Elle vient ensuite au Théâtre-Italien de Paris, pui à l’Opéra-Comique pour y créer Le Chevalier Jean, de Joncières, et y reprend Zampa, L’Eclair, Les Noces de Figaro, Lalla Roukh et La Flûte enchantée. À partir de 1892, cette soprano chante régulièrement au Royal Opera House de Londres et au Metropolitan Opera de New York. Elle crée le rôle de Suzel dans l'Ami Fritz de Mascagni à Rome, le 30 octobre 1891. Revenue à Paris, Massenet créa pour elle le rôle d'Anita dans la Navarraise et lui confie celui de Sapho dans l'opéra du même nom (1898). Cavaleria rusticana, Carmen, qu'elle chante plus de mille fois, aurait suffi à établir sa célébrité, notamment outre-Atlantique. Partout acclamée, Emma va chanter aux Indes, au Japon, en Australie, etc. C’est en 1904, à l’occasion de la millième de Carmen, le grand rôle de sa vie, qu’elle renonce à l’opéra, tout en continuant jusqu’en 1926 de donner des concerts dans le monde entier. Adulée des Américains, en 1916, elle avait entonné la Marseillaise à New-York, devant 30.000 personnes : le triomphe est mémorable. Elle meut dans le dénuement le 6 janvier 1942 à Millau, après avoir consacré à l’enseignement de son art les dernières saisons qu´elle passe à Cabrières (Aveyron). Elle a écrit son autobiographie sous le titre Sous tous les ciels j'ai chanté - Paris 1940. Jean Contrucci, Emma Calvé, la diva du siècle, Albin Michel, 1989. Georges Girard, Emma Calvé, la cantatrice sous tous les ciels, Éditions Grands Causses Georges Girard, Emma Calvé : étoile dans tous les cieux, cigale sous tous les ciels, Rodez : Cahiers rouergats, 1971; No de :"Les Cahiers rouergats", 1971, CAMBON (Pierre-Paul), 1843-1924 : Administrateur et diplomate. Né à Paris en 1834, chef du cabinet de Jules Ferry à la préfecture de la Seine en 1870, Paul Cambon devient secrétaire général des Alpes-Maritimes et des Bouches-du-Rhône (1871), et préfet de l’Aude (1872). Révoqué en 1873, il est nommé, en mars 1876 préfet du Doubs. Mis en disponibilité par le gouvernement du 16 Mai, il devient préfet du Nord (décembre 1877). En 1882, Paul Cambon quitte l’administration pour la diplomatie : il est envoyé comme résident de France à Tunis, où il élabore les bases du protectorat, puis comme ambassadeur à Madrid (1886), à Constantinople (1890) où on l’appèle « le grand ambassadeur », à Londres (1898) où il devait rester jusqu’en 1920. Au lendemain de Fachoda, il poursuit une politique de rapprochement avec l’Angleterre, qui aboutit à la craétion de l’Entente cordiale et à la collaboration anglo-russe. Une série de conventions entre la France, l’Angleterre, la Russie, le Japon et l’Espagne devait créer un équilibre de forces dont on peut apprécier l’importance en 1914 où Cambon, toujours présent à son poste à Londres, a une large part à l’entrée de la Grande-Bretagne dans la Première Guerre mondiale, à nos côtés. Membre de l’Académie des sciences morales et politiques depuis 1891, il décède à Paris en 1924. CAMBON (Jules-Martin), 1845-1935 : Avocat et ambassadeur. Né à Paris, le 5 avril 1845, Jules cambon est le frère cadet de l’ambassadeur Paul Cambon (1843-1924), et s’illustre également dans la diplomatie. Après des études de droit, il devient avocat en 1866. Lors de la guerre de 1870, il sert comme capitaine d’une compagnie de mobiles. Il entre ensuite dans l’administration et devient auditeur à la commission provisoire qui remplace le Conseil d’État. En 1874, il poursuit sa carrière en Algérie, d’abord à la Direction générale des Affaires civiles, puis comme préfet de Constantine (1878). Dans les années qui suivent, il occupe les fonctions de secrétaire général à la Préfecture de Police de Paris (1879), de préfet du Nord (1882), puis du Rhône (1887). Il retrouve l’Algérie en 1891, comme gouverneur général et, en 1897, il est nommé ambassadeur de France aux États-Unis. À ce poste, il négocie en 1897 la paix entre l’Espagne et les États-Unis. Ce grandgrand succès diplomatique le et au premier plan. De 1902 à 1907, il succède à son frère comme ambassadeur de France en Espagne. Nommé en 1907 à Berlin, il y œuvre de toutes ses forces pour la détente des relations franco-allemandes et pour la sauvegarde de la paix. Il parvint à éviter la guerre en 1911, au moment de la crise d’Agadir. Les rapports qu’il adresse à son gouvernement attestent sa clairvoyance et la sagesse de ses prévisions, car il est de ceux qui annoncent la guerre. Après la Première Guerre mondiale, il participe à l’élaboration du traité de paix, puis devient secrétaire général au ministère des Affaires étrangères, et enfin président de la Conférence des Ambassadeurs. Ce diplomate, qui avait rendu de très grands services et dont la parole faisait autorité dans les milieux gouvernementaux, est élu à l’Académie en 1918. Il est l’auteur d’un ouvrage intitulé Le Diplomate, nourri de son expérience et de ses souvenirs d’ambassadeur et de négociateur. Il meurt le 19 septembre 1935. CAMBON (Victor), 1852-1927 : Ingénieur et publiciste. Né à Lyon en 1852, Victor Cambon est élève de l’Ecole centrale. Après s’être occupé de questions agricoles, il entreprend à travers l’Europe des voyages d’études économiques à la suite desquels il publie des ouvrages de documentation qui établissent sa réputation. Son livre sur L’Allemagne au travail (1909), qui jette un jour nouveau sur la puissance industrielle de ce pays, est suivi des Derniers progrès de l’Allemagne (1916). Il consacre aussi plusieurs ouvrages à l’avenir économique de la France : Notre avenir (1918) ; Ou allons nous (1918). Il se montre l’apôtre du taylorisme, notamment dans L’Industrie organisées d’après les méthodes américaines (1920) Il a écrit un grand nombre d’articles de journaux et de revues sur les questions économiques et coloniales. il décède à Paris en 1927. CAMÉLINAT (Zéphirin-Rémy), 1840-1932 : Ouvrier et homme politique. Né en 1840 à Mailly-la-Ville (Yonne), fils d'un vigneron tailleur de pierres surnommé Camélinat le rouge,Zéphirin Camélinatl monte à Paris à l'âge de 17 ans et travaille chez un fabricant de tubes de cuivre, puis ouvrier bronzeur. Il devient l'un des principaux dirigeants syndicaux des ouvriers du bronze. Ami de Pierre-Joseph Proudhon, il est l'un des signataires du Manifeste des Soixante. Fondateur de l'AIT (Assemblée internationale des travailleurs), il participe activement à la Commune et doit s'exiler. Comdamné à la déportation, il est gracié en 1879. De retour en France, il rejoint l'alliance républicaine et socialiste de Charles Longuet, gendre de Karl Marx. Il contribue à la renaissance du socialisme et participe à la formation de la SFIO. Député de Paris (1885-1889), il participe, en 1892, au journal Le cri du peuple. Trésorier de la SFIO, il se rallie aux majoritaires communistes du Congrès de Tours en 1920, il favorise la naissance du communisme en France. En 1921, il transmet les actions du journal L'Humanité (fondé par Jean Jaurès) au parti communiste français et, en 1924, il est candidat à l'élection présidentielle et obtient 21 voix sur l'ensemble des députés et des sénateurs. Il meurt en 1932 à Paris. CAMESCASSE (Jean-Louis-Ernest), 1838-1897) : Avocat et homme politique. Né à Brest le 23 septembre 1838, Jean Camescasse devient avocat puis, il se joint, sous le second Empire, au groupe de l’opposition républicaine. Après la révolution du 4 septembre 1870, il occupe les préfectures du Loir-et-Cher, du Cher (1877), de la Haute-Savoie) (1876) et du Pas-de-Calais (1877). Préfet de police de 1881 à 1885, il est élu député du Finistère puis du Pas-de-Calais jusqu’en 1891. Elu sénateur de ce même département la même année, il décède en cours de mandat à Paris le 9 juin 1897. CAMOUFLAGE : C’est au cours de la Première Guerre mondiale que l’art du camouflage a pris naissance. Avant 1914, les belligérants ne cherchaient pas a dissimuler leurs travaux et organisations. Tout au plus préconisait-on timidement dans les réglements de manœuvres les marches de nuit pour dissimuler les mouvements de troupes. Dès le début de la campagne, on s’aperçoit de part et d’autre que l’observation aérienne et en particulier la photographie en avion décelaient la plupart des travaux, et qu’il était indispensable de les dissimuler aux onvestigations des aéronefs. En 1915, un service de camouflage est créé. Il comporte un organe central : section de camouflage et atelier central de camouflage auprès du général en chef, un atelier par armée et en chef d’équipe divisionnaire par division, aidé par des manœuvres pris parmi les troupes de la division. Le personnel technique était composé d’artiste (peintre, sculpeurs, etc.). Le camouflage comporte la dissimulation des organisations à l’aide de matériaux naturels ou artificiels (branchages, claies, toiles peintes, etc.), la construction de faux ouvrages (fausses batteries, etc.). Le camouflage maritime relèvait alors de la Défense contre aéronefs. Le camouflage maritime reposait sur des bases absolumment différentes du camouflage terrestre appliqué aux canons, chars d’assaut, camions, etc. Alors que ce dernier cherchait à rendre les objets difficilement visibles en les faisant se confondre avec la couleur générale du sol, le camou essayait de tromper le sous-marin sur la direction suivie par la bâtiment qu’il attaquait. Dans, ce but, on peignait sur la coque des traits fuyants déformant la perspecive. On allait jusqu’à changer la place des mâts, la pente des cheminées, etc. La direction suivie par le but est en effet un élément primordial à connaître pour le sous-marin, dont la manœuvre d’attaque consiste à aller se poster sur la route du bâtiment qu’il veut torpiller. CAMPAGNE (Daniel), 1851- : Sculpteur. Né à Gontaud (Lot-et-Garonne) en 1851, Daniel Campagne est l’élève de Falguière. Il expose en 1890 un monument, Autour du drapeau, érigé à Agen en 1891. Il a exécuté une statue équestre de Philis de La Tour du Pin érigée à Nyons en 1901, et le Tombeau du duc de Nemours au château de Dreux en 1902. CAMPARDON (Emile), 1837-1915 : Historien. Né à Paris en 1837, Emile Campardon sort de l’Ecole des chartes en 1857 et entre aux Archives nationales. Il y devient chef de la section judiciaire (1885-1908), et y puise tous les éléments de presque tous ses travaux sur le XVIIIème siècle : les Spectacles de la foire, de 1595 à 1791 (1877), les Comédiens du roi de la troupe française (1878), les Comédiens du roi de la troupe italienne (1880), l’Académie royale de musique au XVIIIème siècle (1884), etc. Il décède à Paris en 1915. CAMPENON (Jean-Baptiste-Marie-Edouard), 1819-1891 : Général et homme politique. Né à Tonnerre (Yonne), le 4 ma 1819, Jean-Baptiste Campenon, ancien élève de Saint-Cyr et diplômé d’état-major, refuse de préter serment au prince-président. Il se lie avec Gambetta lors de son commandement de la 5ème division d’infanterie à Paris. Celui-ci le nomme dans son cabinet ministre de la Guerre dans son « grand ministère du 14 novembre 1881 au 29 janvier 1882. Il fait alors l’objet de violentes attaques personnelles de la part de l’Intransigeant. Elu sénateur inamovible après la chute de Gambetta, il remplace le général Thibaudin au ministère de la Guerre du 9 octobre 1883 au 3 janvier 1885 dans le second ministère Ferry puis dans le premier ministère Brisson du 6 avril 1885 au 6 janvier 1886. Il organise alors l’envoi de renforts au Tonkin tout en ne cachant pas son hostlité à cette politique et se préoccupe de mantenir notre capacité de mobilisation. Il lutte en faveur de la loi de trois ans et n’admet qu’ à regret que des sursis soient accordés pour la poursuite des études. Enfin, il rend les militaires inéligibles au Sénat. Il meurt à Neuilly-sur-Seine ( ) le 6 mars 1891. CAMPINCHI (César), 1882-1941 : Avocat et homme politque. Né à Calcatoggo (Corse), le 4 mai 1882, César Campinchi, devenu maître du barreau, membre du conseil de l’ordre et gendre du ministre Landry est grièvement blessé pendant la Première Guerre mondiale où il servait comme combattant volontaire. Elu député en 1932, ses talents d’orateur lui valent la présidence du groupe radical socialiste en 1936 et le portefeuille de la Marine du 22 juin 1937 au 17 janvier 1938 dans le troisième cabinet Chautemps. L travaille alors à la modernisation et au déveleppement de la flotte de guerre. Du 18 janvier au 12 mars 1938, le président du Conseil Chautemps le place à la tête de la Justice dans son quatrème cabinet. Il se préoccupe à ce titre de la diffusion de la presse française à l’étranger et de la presse étrangère en France. Il retourne à la Marine du 13 mars 1938 au 16 juin 1940 dans le second cabinet Blum et dans le troisième ministère Daladier et, sentant le danger arriver, il s’efforce d’accélérer les programmes d’équipement. Il obtient la construction de 2 bâtiments de ligne, de 2 croiseurs, de 2 porte-avions, de 37 sous-marins et de 25 bâtiments légers. C’est lui qui lance à Brest, en janvier 1939, le premier cuirassé moderne, le Richelieu. Il fait aménager les bases de Mers el-Kébir et d’Aspreto. Enfin, il n’oublie pas l’aéronautique et améliore la protection antiaérienne de nos unités qu’il disperse sur toutes les mers du globe en prévision du conflit qui se prépare. Partisan de la poursuite de la guerre, il s’embarque sur le Massilia. Placée en résidence surveillée à Marseille, il y organise un réseau de résistance. Il décède à Marseille (Bouches-du-Rhône), le 22 février 1941. CAMUSET (Georges), 1840-1885 : Médecin et poète français. Né à Lons-le-Saunier en 1840, Georges Camuset a laissé un reueil de sonnets sous le titre : les Sonnets du docteur. Il décède à Paris en 1885. CANDACE (Gratien), 1873-1953 : Instituteur et homme politique. Né à Baillif (Guadeloupe) le 18 décembre 1873, Gratien Candace devient instituteur à dix-huit ans avant de venir en métropole pour poursuivre ses études. Docteur ès sciences, il entre en 1900 dans le cabinet de Viviani alors ministre du Travail. Député de son île natale en 1912, il suit de très près les questions coloniales et fonde en 1930 la re vue Colonies et marine. Nommé sous-secrétaire d’Etat aux Colonies du 3 juin 1932 au 30 janvier 1933 dans le troisième ministère Herriot et le cabinet Paul-Boncour, il cherche à aider l’agriculture des territoires d’outre-mer. Il développe ainsi une flotte bananière utile aux Antilles et à la côte africaine, et organise les coopératives fruitières. Il décèdera à Lormaye (Eure-et-Loire), le 11 avril 1953. CANET (Gustave), 1846-1908 : Ingénieur. Né à Belfort en 1848, Gustave Canet et élève à l’Ecole Centrale où il s’occupe d’abord des chemins de fer. Mais sa vocation l’entraîne vers la construction de matériel d’artillerie et, depuis 1881, il ne cesse de s’occuper de matériel de guerre. L’artillerie de terre et de mer lui est redevable de divers perfectionnements. Il meurt à Saint-Aubin-sur-Mer en 1908. CANET (Louis), 1883-1958 : Fonctionnaire et écrivain. Né à Rouen le 18 juillet 1883, Louis Canet étudie la médecine puis les lettres dont il est agrégé et suit les cours de l’Ecole pratique des Hautes études (sciences religieuses). Membre de l'École française de Rome (1912-1916), il est successivement attaché au Bureau de presse et de renseignements à l'ambassade de France à Rome, directeur adjoint des cultes à Strasbourg (1919) et conseiller du ministère des Affaires étrangères pour les affaires religieuses de 1920 à la guerre. Sous le pseudonyme de Nicolas Fontaine, Louis Canet publie un livre qui fait grand bruit en 1928 : Saint-Siège, Action française et catholiques intégraux. Il décèdera à Paris le 25 octobre 1958. CANNEVEL (Edouard), 1866-1920 : Ingénieur. Né à Saint-Nicolas-d’Aliermont (Seine-Inférieure) en 1866, Edoard Cannevel est l’inventeur des trames sur verre pour la similigravure. Il décède à Courbevoie en 1920. CANONGE (Joseph-Frédéric), 1837-1927 : Général et écrivain militaire. Né à Paris en 1837, Joseph-Frédéric Canonge sort de Saint-Cyr en 1857, et prend une part active aux batailles de Magneta et de Solférino., puis, comme capitaine, se fait recevoir docteur en médecine. En 1870, il était à Froeschwiller, puis à Sedan, d’où il s’échappe avec son bataillon et vient ensuite à l’armée de la Loire. Professeur en 1876 et 1877 du cours d’histoire militaire à l’Ecole supérieure de guerre, il est un rénovateur des études intellectuelles dans l’armée. Colonel en 1888, général de brigade en 1893, il est passé dans le cadre de réserve en 1899. Ses nombreuses publications historiques lui valent plusieurs récompenses décernées par l’Académie française. Il meurt à Paris en 1927. CANTELOUBE Surnommé " le barde d’Auvergne ", Canteloube, musicien régionaliste par excellence, puise son inspiration dans l’univers sonore de l’Auvergne auprès de ses amis les paysans : " les chants paysans s’élèvent bien souvent au niveau de l’art le plus pur, par le sentiment et l’expression, sinon par la forme ". C’est à Malaret, en Auvergne du Sud, que CANTELOUBE grandit au contact de la nature et des animaux ; une mini ménagerie qui interpelle déjà ses délicates oreilles de musicien : " J’ai le souvenir, à Malaret, de six ou sept chiens et d’autant de paons. La nuit, le moindre bruit déchaînait un vacarme peu ordinaire ". Certes, CANTELOUBE ne composa aucun Concerto pour chiens et paons, mais l’univers sonore de la campagne l’amena très tôt à la création musicale : " Je commençais à courir fermes et villages pour écouter les chansons des paysans, faisant chanter les vieux et les vieilles, les pâtres et les bergères aux pâturages, les laboureurs et les moissonneurs au travail ". Au début des années 1900, CANTELOUBE abandonne veaux, vaches, cochons et poulets pour étudier le piano, à Paris, avec Amélie DAETZER, élève de CHOPIN, ainsi que la composition avec Vincent d’INDY à la Schola Cantorum : " Quelle fière leçon donne l’art d’un Vincent D’INDY, à la fois pour le fond, c’est à dire la pensée, et pour la forme ! Cet art est si grand, si puissant et si vivant qu’aucun autre ne peut être aussi sain ni aussi salutaire ". Avec son maître D’INDY, CANTELOUBE s’attache à la tradition et à la mélodie La première composition de CANTELOUBE date de 1903 avec COLLOQUE SENTIMENTAL, pour chant et quatuor à cordes. Très vite, il devient un compositeur reconnu et ses œuvres sont exécutées aux fameux Concerts Colonne, Lamoureux, Pasdeloup ainsi qu’à la Société des Concerts du Conservatoire. Entre 1910 et 1913, il compose son célèbre opéra LE MAS, témoignage de son attachement au Massif Central. Parmi ses œuvres les plus réputées, viennent ensuite ses CHANTS D’AUVERGNE, composés entre 1923 et 1954. Ansi que son ANTHOLOGIE DES CHANTS POPULAIRES FRANÇAIS (1939 à 1944). L’Auvergne et ses auvergnats à Paris, c’est encore CANTELOUBE qui, en 1925, fonde LA BOURREE, une filiale de l’Auvergnat de Paris. Cet organisme réunit de jeunes auvergnats, désireux de faire connaître le folklore et la beauté de leur région. En 1941, notre " barde " innocent rejoint le gouvernement de PETAIN à Vichy. Il écrit dans le journal nationaliste l’Action Françaisge : " Il faut aux chants de la terre leur décor, leur cadre, leur accompagnement de nature, de plein air… ". Lors de son séjour champêtre à Vichy, CANTELOUBE participe à de nombreuses émissions radiophoniques sur le folklore français. La radio lui semble être le cheval de bataille idéal pour la diffusion de la musique populaire : " son action intellectuelle est indéniable…Mais pour qu’elle puisse remplir toute sa mission, la radio devrait être purgée de la basse musique… Le public n’en serait pas privé ; son goût se forme et s’élève vite ". Parallèlement à sa carrière de compositeur, il recueille, harmonise et publie bon nombre de chants traditionnels français. Musicologue averti, il publie en 1949 une biographie de Vincent d’INDY ; et en 1950, une biographie de son ami Déodat de SEVERAC. " Je n’ai jamais cherché à faire de la musicologie à bon compte, mais simplement œuvre de cœur, œuvre de musicien désirant exalter et faire connaître ce qu’il aime ". Passionné peut-être parfois à l’excès, il n’en reste pas moins que CANTELOUBE reste avant tout un musicien profond, vrai et sincère, à l’image de cette Auvergne qu’il aimait tant… CANTONNIER (Médaille des) : Créée en 1897, pour le cantonniers des routes nationales, la médaille est en argent, suspendue par un ruban formé de deux bandes tricolores verticales, avec une bande blanche au centre. Le ministre des Travaux publics la décerneaprès trente ans de service aux cantonniers, maîtres de porcs, gardiens de phares et éclusiers. Depuis 1898, une médaille est conférée par le ministre de l’Intérieur aux cantonniers de la voierie départementale et communale. CAPELARRO (Charles-Romain), 1826-1899 : Sculpteur. Né à Paris en 1826, Charles-Romain Capellaro est l’élève de David d’Angers, de Duret et de Rude. Après avoir pris une part active à la défense de Paris en 1871, il est mêlé aux troubles de la Commune où il est arrêté en mai 1871 et condamné à la déportation. A sa libération, il est nommé professeur de dessin à l’école normale d’instituteurs de Saint-Cloud. Parmi ses principales œuvres, on peut citer : Génie funèbre ; Minerve protégeant l’Etude, fronton ; l’Ange Gabriel, pour l’église Saint-Eustache. Il meurt à Paris en 1899. CAPELARRO (Paul-Gabriel), 1862 : Sculpteur. Né à paris en 1862, Paul-Gabriel Capellarro est l’élève de Dumont, de Thomas et de Bonassieux. Il obtient le prix de Rome en 1886. Il ets l’auteur d’un groupe de marbre, le Déluge. CAPET (Lucien), 1873-1928 : Violoncelliste. Né à Paris en 1873, Lucien Capet s’est signalé, tant comme soliste qu’en quator, parmi les plus grands interprètes de l’œuvre de Beethoven. Il est l’auteur d’une Technique supérieure de l’archet. Il meurt à Paris en 1928. CAPITAN (Joseph-Louis), 1854-1929 : Médecin et archéologue. Né à Paris en 1854, Joseph-Louis Capitan est surtout connu pour ses travaux préhistoriques, qui l’ont amené à l’étude des antiquités américaines et lui ont valu la chaire d’antiquités américaines au Collège de France en 1907. Auparavant déjà, il était professeur à l’Ecole d’anthropologie. Capitan, membre de l’Académie de médecine et qui est le premier secrétaire général de la Société des Américanistes de Paris a publié, outre de nombre mémoires : les Maladies infectueuses en 1895, la Caverne du Font-de-Gaume aux Eyzies, Dordogne en 1901, le Travail en Amérique avant et après colomb en 1914 et Psychologie des Allemands actuels en 1915. Il meurt à Paris en 1929. CAPLET (André), 1879-1925 : Compositeur et chef d’orchestre. Né au Havre (Seine-Inférieure) le 27 novembre 1879, André Caplet est inscrit dès l’enfance à l’Ecole de Musique de sa ville natale. Il y apprend l’harmonie et le contrepoint, et reçoit à neuf ans un premier prix de piano. Il arrive à Paris en 1896, entre au Conservatoire, connaît des années d’études matériellement difficiles, mais obtient le Prix de Rome en 1901. Son indépendance de caractère le pousse à abréger son séjour à la villa Médicis, et il regagne Paris où vont s’affirmer d’abord ses dons de chef d’orchestre, particulièrement dans l’exécution du Martyre de Saint Sébastien de Debussy. C’est sous l’influence de celui-ci, dont il était le familier, que Caplet commence à composer , mais son profond sentiment chrétien, avivé par les années de guerre, le conduit bientôt vers une musique originale, complètement dégagée de Debussy et du flou impressionniste , au dessin net et même un peu rude, à la fois très moderne d’inspiration et retrouvant l’inspiration joyeuse, exultante, du catholicisme grégorien, soit dans les Prières sur des textes français, soit dans la Messe à trois voix (1919) et surtout dans Le Miroir de Jésus, inspiré par une œuvre d’Henri Ghéon, où Caplet exprime sa prédilection pour les œuvres vocales. Ce véritable maître, indépendant des courants et des modes de la musique contemporaine, est mort trop tôt des suite de la Première Guerre mondiale qu’il a faite avec bravoure, et au cours de laquelle il a été gazé. Il décède à Paris le 24 avril 1925. DUMESNIL (R.) : Portraits de musiciens français, 1938. CAPOUL (Joseph-Amédée-Victor), 1839-1924 : Chanteur. Né à Toulouse en 1839, Victor Capoul est élève au Conservatoire de Paris. Il débute à l’Opéra comique en 1861, dans le Chalet. Sa jolie voix quoique parfois un peu faible, son chant expressif bien qu’un peu maniéré, son élégance naturelle en font bientôt le favori du public. Puis deux créations importantes, dans Vert-Vert et le Premier Jour du bonheur, le placent en complète évidence. Capoul s’adonne au chant italien, et se rend à New-York, où il joue, avec Melle Nilsson, Faust, Martha, Mignon, etc., puis à Londres. Il revient à Paris pour créer, au théâtre lyrique de la Gaîté en 1876, Paul et Virginie, et à la salle Ventadour le rôle de Roméo dans les Amants de Vérone. Capoul écrit avec Armand Silvestre le livret d’un opéra, Jocelyn, d’après le poème de Lamartine. Mais ce n’est pas lui qui tient le rôle lorsque l’ouvrage est représenté à Bruxelles : il le joue seulement à Paris l’année suivante, quand Joseclyn paraît au théâtre du Château d’Eau. Capoul repart pour l’Amérique où il est nommé directeur du Conservatoire de New-York, et revient à Paris comme directeur de la scène de l’Opéra. Il meurt à Pujaudran (Gers) en 1924. CAPUS (Alfred), 1858-1922 : Publisciste, romancier et auteur dramatique. Né à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) le 25 novembre 1858, Alfred Capus commence par faire des études d’ingénieur mais délaisse rapidement les sciences pour le journalisme et commance la collaboration à divers journaux et pér iodique : Le Gaulois, L’Echo de Paris, L’Illustration et La Revue bleue, où ses chroniques plaisent par le cîté brillant et volontiers caustiques de leur esprit. En 1894, Alfred Capus entre au Figaro qu’il ne quittera plus jusqu’à sa mort. L’année 1890 voit la plubication de son premier roman Qui perd Gagne - dans lequel on trouve, déjà immuable, la conception philosophique facile qu’il possédait de la vie – sorte de parodie de la doctrine d’Ibsen, ou plutôt comme elle a été plaisamment définie, « un ibsenisme mis à la portée des midinettes, des cocttes et des banquiers ». Capus écrit ensuite quelques essais comme Faux départ en 1891, Années d’aventure en 1895, etc., qui ne sont pas plus heureux. L’écrivain se lance alors dans le théâtre, en 1894, avec Brignol et sa fille, mais la pièce passe presque inaperçue. Enfin, après des alternatives d’insuccès et de succès médiocres (Rosine en 1897, Mariages bourgeois en 1898, les Maris de Léontine en 1900), il connaît le triomphe en 1901 avec La Veine. Dès lors, le public qui avait été charmé, au lendemain de l’affaire Dreyfus, par sa philosophie du « ça s’arrange » ne l’abandonne plus. Si, en effet, Capus ne lui offre pas de véritables personnages, il lui en offre du moins l’amusante caricature, et s’il ne possède pas l’art du dialogue, il sait toutefois y suppléer par de spirituels échanges de propos. Ses principales pièces sont : la Petite fonctionnaire (1901), Les Deux Ecoles (1902), la Châtelaine (1902), L’Adversaire (1903), Notre Jeunesse (1904), Monsieur Piégeois (1905), Les Passagères et L’Attentat en 1906, Les Deux Hommes et L’Oiseau blessé en 1908, Hélène Ardouin en 1913, La Traversée en 1920, etc. Alfred Capus est reçu à l’Académie française le 28 juin 1917. Il consacre ses dernières années à ses fonctions de journaliste et décède à Neuilly-sur-Seine (Seine) le 1er novembre 1922. CAPUS (Guillaume), 1857- : Voyageur et savant. Né à Essche-sur-Alzette (Luxembourg) en 1857, il accompagne Bonvalot dans ses premiers voyages en Asie centre en 1882 et en 1885, il recueille des observations scientifiques qui ont été publiées par la suite. Il étudie ensuite les pays d’Europe sud-orientale et part en Indochine, en 1897, pour y diriger le service de l’agriculture. De retour en France, il dirige alors les collections scientifiques de l’Indochine conservées au Palais-Royal. Capus a publié l’Oeuf chez les plantes et les animaux en 1885, le Toit du Monde en 1889, A travers le royaume de Tamerlan en 1892, A travers la Bosnie et l’Herzégovine en 1896, etc. CAPUS (Joseph-Marie), 1867-1947 : Professeur et homme politique. Né à Marseille (Bouches-du-Rhône), le 18 août 1867, Joseph est le frère de l’Académicien Alfred Capus et le fils d’un avocat marseillais. Diplômé de l’Ecole nationale d’agriculture de Grignon, il devient rapidement un spécialiste des qestions vinicoles. Député d’action républicaine et sociale, il est très présent à la tribune et entre dans le troisième gouvernement gouvernement comme ministre de l’Agriculture du 29 mars au 13 juin 1924. Il se préocuppe alors de modifier le régme fiscal du petit commerce et la police de chasse. Il meurt à Paris le 1er mai 1947. Il était l’un des fondateur de la Gironde (1930-1940). CAPY (Eugénie-MarieMarcelle Marques, dite), 1891-1962 : Femme de lettres. Née à Cherbourg (Manche), le 16 mars 1891, fille d’un garde d’artillerie de marine, Capy fait ses études à Cahors, puis à Toulouse où elle se passionne pour le mouvement des poètes languedociens. Jean Jaurès et Marc Sangnier qu’elle entend à Toulouse, lui font découvrir la question sociale. Elle se jette à cœur perdu dans le syndicalisme et vient à Paris en 1913 où elle collabore à La Bataille syndicaliste. Pour mieux décrire la vie des travailleurs, elle se fait embaucher dans les usines et vit la vie des ouvrières. Ses reportages lui valent l’amitié de Séverine, qui la considère bientôt comme sa fille spirituelle. Pendant la Première Guerre mondiale, admiratrice de Romain Rolland, elle publie son premier livre Une voix de femme dans la mêlée. Elle collabore à la revue Les Hommes du Jour, est secrétaire de rédaction du Journal du Peuple, puis fonde en 1918 avec son futur mari Pierre Brizon, La Vague qui a un succès retentissant dans les milieux de gauche. Après la guerre, elle poursuit son action pacifiste, en France comme à l’étranger. Elle collabore en même temps à L’œuvre, au Quotidien, à La Rumeur, à La République, au Journal, à La Femme de France, à La Patrie humaine et préside, quelque temps, la Ligue internationale des combattants de la paix. Lorsque la guerre intervient, elle se retire à la campagne puis après la Libération continue sa carrière et décèdera à Pradines (Lot) le 6 janvier 1962. CARABIN (François-Rupert), 1862-1932 : Scultpteur et ornemaniste. Né à Saverne (Alsace) en 1862, Rupert Carabin est l’élève de Perrin. Il est en 1884, un des fondateurs de la Société des artistes indépendants. Là, et, dès 1891, dans les Salons officiels, il a surtout exposer des meubles sculptés, ornés de figures ou de compositions assorties à la fonction du meuble : bibliothèques de bois et de fer forgé, tables, coffrets, fontaines, etc. Mais, c’est aussi des statuettes, des médailles, des bijoux. Directeur de l’Ecole des Arts décoratifs à Strasbourg en 1919, il meurt à Strasbourg en 1932. CARAN D’ARCHE (Emmanuel Poiré, dit), 1858-1909 : Dessinateur et humouriste. Né à Moscou en 1858, Caran d’Ache collabore à la Vie parisienne, au Chat noir, à la Caricature, et pubie divers recueils : les courses dans l’antiquité (1888), Nos soldats (1889), les Lundis de Cran d’Ache (1896), Pages d’histoire (1904). Il fait jouer au théâtre du Chat-Noir une pièce d’ombres, l’Epopée, qui a pour sujet les victoires du premier Empire ; Les figures de Caran d’Ache sont des silhouettes dessinées au trait d’une ligne continue, nette et pure : mais cette savnte simplicité suppose un long travail préparatoire et de nombreux croquis. Il est un des maîtres de l’illustration fantaisiste et de la caricature. Il meurt à Paris en 1909. CARETTE (née Bouvet, épouse), 1844- : Romancière. Née à Saint-Servan vers 1844, madame Carette est une ancienne lectrice et dame du palais de l’impératrice Eugénie. Elle a publié des Souvenirs intimes à la cour des Tuileries (1888-1891) ; des romans : Passion (1884), l’Outrage (1885) ; un choix de mémoires et écrits de femmes françaises des XVIIème, XVIIIème et XIXème siècles. CARICATURES : TILLIER (B.) : La républicature, la caricature politique en France, 1870-1914, Paris, CNRS Editions, 2002. CARISTIE-MARTEL (Léa), 1868- : Artiste et professeur. Née à Paris e 1868, Léa est la fille de Caristie-Martel de la Comédie-Française. Elle est engagée par Perrin, alors directeur de ce théâtre, dès l’âge de six ans, et y reste jusqu’à douze ans. Elle entre ensuite au Conservatoire où elle obtient le prix de tragédie. Elle débute alors à l’Odéon, se fait remarquer particulièrement dans : Marie Stuart, Andromaque, l’Assommoir et le Ventre de Paris. Elle disparaît de la scène au bout de trois ans pour se consacrer à l’enseignement. Elle a dirigé aussi les représentations du théâtre romain d’Orange. CARL-ROSA (Mario), 1855- : Paysagiste. Né à Loudun (Vienne) en 1855, Mario Carl-Rosa a successivement exposé la Meuse à Domrémy (1890), Argenton, En décembre (1895), Journée brumeuse sur les bords de la Seine (1900), Au pays franc-comtois (1905). CARLÈS (Jean-Antonin), 1851-1919 : Sculpteur. Né à Gimont (Gers), en 1851, Antonin Carlès est élève à l’Ecole des beaux-arts, de Jouffroy et Holle et débute au salon avec un buste la Cigale en 1878, suivis d’Abel mort en 1881, marbre, la Jeunesse en 1887, marbre (statue féminine debout) ; un Doge vénitien, buste marbre ; Retour de chasse, bronze (1888), Nymphe de l’Oise (1898), Junon et Au champ d’honneur ! (1900) ; le Monument à la mémoire du commandant Heriot, Retour de chasse (1900), qui lui valent la médaille d’honneur. Il décède à Paris en 1919. CARLUS (Jean), 1852 : Sculpteur. Né en 1852 à Lavaur (Tarn), Jean Carlus est élève à l’école des beaux-arts de Toulouse, puis de Falguière et de Mercié. On lui doit des statues et des figures décoratives comme le monument des Instituteurs de l’Aisne, à Laon, Buffon). CARNOT (Marie-François-Sadi), 1837-1894 : Ingénieur et homme politique. Né le 11 août 1837 à Limoges, Sadi Carnot est le fils de Lazare, Hippolyte Carnot, le petit-fils de Lazare Carnot (le Grand Carnot), neveu de l'autre Sadi Carnot. D’abord élève au lycée Condorcet puis à l'École polytechnique et enfin de l'École des Ponts et Chaussées dont il sort major en 1863, il devient ingénieur en chef à Annecy (Haute-Savoie) en 1864. Sadi Carnot se lance alors dans la politique et est élu député de la Côte-d'Or en 1871, et occupe des postes de haut fonctionnaire, notamment au Conseil supérieur des Ponts et Chaussées, puis il est nommé préfet de la Seine-Inférieure. Sous-secrétaire d'État aux Travaux publics puis ministre des Travaux Publics, il devient ministre des Finances en 1885. Suite à la démission de Jules Grévy, mis en cause dans l'affaire des décorations, Sadi Carnot est élu président de la République le 3 décembre 1887. Le début de son mandat est marqué par l'agitation boulangiste et le scandale de l'affaire de Panama (1892). Dans un contexte d'agitation syndicale et anarchiste (les lois relatives à la liberté individuelle et aux délits de presse visant à réprimer cette agitation, qualifiées de lois scélérates par l'opposition socialiste, venaient d'être votées), Sadi Carnot assure avec dignité la permanence de la République sans jouer un rôle politique de grande importance. Sadi Carnot, au milieu des fêtes de l’exposition de Lyon, est assassiné d'un coup de poignard par l'anarchiste italien Caserio le 24 juin 1894. Il meurt des suites de sa blessure le 25 juin 1894 peu après minuit. CARNOT (H.) : Sadi Carnot (biographie et manuscrit). Paris, Éditions Blanchard, 1953. DANSETTE (A.) : Histoire des Présidents de la République. Amiot Dumont. DREYFOUS (M.) : Les trois Carnot. Histoire de cent ans (1789-1889), Paris, 1988. FREMY (D.) : Quid des Présidents de la République. Paris. Robert Lafont, 1981. HARISMENDY (P.) : 1995. Sadi Carnot, Paris, 1995, Librairie Académique Perrin. SEMENTERY (M.) : Les Présidents de la Républiques et leurs familles, Paris, 1982, Christian. CARNOT (Marie-Adolphe), 1839-1920 : Inspecteur et directeur. Né et mort à Paris, Adolphe Carnot est le frère du précédent. Inspecteur général des mines, directeur de l’Ecole nationale des mines, et membre libre de l’Académie des sciences (1895), il est également connu pour ses travaux analytique. CARO (Elme-Marie), 1826-1887 : Philosophie, spiritualiste et moraliste. Né à Poitiers en 1826, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, puis membre de l’Académie française, Caro a été beaucoup plus un moraliste qu’un métaphysicien, un écrivain de grand talent qu’un penseur original. Sa philosophie est en somme celle de victor Cousin. Parmi ses nombreux écrits, citons notamment : le Matérialisme et la science (1878) ; le Pessimisme au XIXème siècle (1878) ; Littré et le positivisme (1880). C’est lui, dit-on, qui aurait fourni à Pailleron le type du philosophe mondain Bellac dans le Monde où l’on s’ennuie. Il décède à Paris en 1887 CARO (Pauline Cassin, épouse), 1835-1901 : Romancière. Née en 1835, épouse du précédent, Pauline Caro débute par une œuvre anomyme : le Péché de Madeleine (1865). Dès lors, elle a publié plusieurs romans remarquables par la grâce du style et la délicatesse des sentiments : les Nouvelles Amours de Hermann et Dorothée (1873) : Amour de jeune fille (1891) ; Fruits amers (1892) : l’Idole (1894) ; Idylle nuptiale (1896) ; Pas à pas (1898) ; etc. Elle décède à Paris en 1901. CARO-DELVAILLE (Henri) : 1876-1928 : Peintre. Né en 1876 à Bayonne, élève de Bonnat et de Maignan, Henri Caro-Devaille a surtout peint la femme moderne. Parmi ses principales œuvres, citons : La Manucure et le thé (1901) ; Femme aux estampes (1903) ; Ma femme et ses sœurs ; l’Eté (1904) ; Septembre (1905) ; etc., sans parler de nombreux portraits. Il décède à Paris en 1928. CAROLUS-DURAN (Charles Durand, dit), 1837-1917 : Peintre. Né à Lille en 1837, élève de Souchon dans sa ville natale, Carolus-Duran alla peindre en Italie un épisode dramatique de la Campagne romaine, l’Assassiné (1866). Mais, il se fait surtout connaître comme portraitiste. Entré à l’Académie des beaux-arts en 1904, il dirige pendant quelques années l’Académie de France à Rome, où il remplace Eugène Guillaume. Il décède à Paris en 1917. CARON (Rose-Lucile Meunier, épouse), 1857-1830 : Cantatrice. Née à Monnerville (Seine-et-Oise) en 1857, Rose Caron, sortie du Conservatoire, prend des leçons chez Marie Sasse et débute à Bruxelles au théâtre de la Monnaie, en 1882. Elle obtient un triomphe en créant le rôle de Brunehilde dans le Sigurd de Reyer, qui fait sa première apparition en Belgique où elle débute. Elle a chamté également les principaux rôles du répertoire, notamment dans Fidelio, Salammbô, Lohengrin, Tannhaüser. Elle a professé au Conservatoire de Paris et fait partie du conseil supérieur des études. Elle décède à Paris en 1930. CARPENTIER (Jules-Adrien-Marie-Louis), 1851-1921 : Ingénieur. Né à Paris en 1851, Jules Carpentier est élève de l’Ecole polytechnique. Il est attaché, en qualité d’ingénieur, à la compagnie du chemin de fer de Paris-Lyon-Méditerranée puis il acqiert la succession de Ruhmkorff et donne un développement remarquable à ses ateliers de construction. Il dote la science et l’industrie d’un grands nombres d’appareils de précision, en particulier d’appareils de mesure des grandeurs électrique, optique, photographique (focomètre, focograde). Il établit les premiers périscopes, construit les premiers appareils cinématographiques des frères Lumière. Membre du Bureau des longitudes, Carpentier est élu, en 1907, membre libre de l’Académie des sciences. Il décède à Paris en 1921. CARRAU (Victor-Marie-Joseph-Ludovic), 1842-1889 : Philosophe. Né à Paris en 1842, il professe à la faculté des lettres de Besançon, puis à la Sorbonne. Il défend avec finesse et élégance les idées spiritualistes dans une série d’études sur la théorie de l’évolution. Citons, parmi ses autres ouvrages : la Théorie des passions dans Descartes, Malebranche et Spinoza (1870), la Morale utilitaire (1875), la Conscience psychologique et morale (1888), la Philosophie religieuse en Angleterre (1888). Il décède à Paris en 1889. CARRA DE VAUX (baron Bernard), 1867-1952 : Orientaliste. Né le 3 février 1867 à Bar-sur-Aube (Aube), Bernard Carra de Vaux d’abord professeur à l’Institut catholique, fait paraître un Cours d’arabe (1892), une étude sur Le Mahométisme : le génie sémitique et le génie aryen dans l’histoire (1898), une autre sur Avicenne (1900). Son ouvrage sur La Doctrine de l’Islam a obtenu le prix Montyon. L’un des fondateurs de L’Orient chrétien, le baron de Carra de Vaux a également donné plusieurs traduction de l’arabe (L’Abrégé des Merveilles (1898). Il décèdera à Nice le 21 décembre 1952. CARRAUD (Gaston), 1864-1920 : Compositeur. Né le 20 juillet 1864 à Le-Méé-sur-Seine (Seine-et-Marne), Gaston Carraud a débuté ses études musicales à la célèbre Ecole Monge1 du boulevard Malesherbes. C'est sur les bancs de cette école qu'il connut Albéric Magnard et Charles Koechlin. Jacques Pillois, André Caplet et Gabriel Bender la fréquenteront à leur tour quelques années plus tard. Parmi les professeurs figurait, entre autres, le violoniste d’origine hongroise Dezso Lederer qui fut longtemps 1er violon chez Lamoureux. Il n’était pas rare dans cette école, où la méthode de notation par chiffres Galin-Paris-Chevé2 était enseignée, de voir se produire en concert des célébrités musicales de l’époque, tel Charles de Bériot vers 1880. Il alla ensuite se perfectionner auprès de Jules Massenet au Conservatoire national de musique de Paris et en 1890 reçut le Premier Grand Prix de Rome avec sa scène lyrique Cléopâtre, sur des paroles de Fernand Beisser. Lors de la 1ère audition de cette œuvre, dédiée par l’auteur " à mon maître J. Massenet ", les trois personnages furent interprétés par Mmes Baréty et Fiérens (Cléopatre), M. Cossira (Antoine) et le célèbre Taskin dans le rôle du Spectre de César. Après avoir donné notamment un poème symphonique intitulé La Chevauchée de la chimère, une autre pièce Les Nuits, sur des poèmes d’Alfred de Musset et l’ouverture Buona Pasqua qui fut bien accueillie par la presse, Gaston Carraud abandonna la composition pour se consacrer principalement à la critique musicale à partir de 1905. On lui doit également un excellent ouvrage : La vie, l’œuvre et la mort d’Albéric Magnard (Paris, 1912). Rattaché à aucune école, son indépendance dans ses écrits et son jugement sûr étaient très appréciés par ses confrères. Il décèdera le 15 juin 1920 à Paris. CARRÉ (Michel), 1865- : Auteur dramatique. Né à Paris en 1865, fils de l’auteur dramatique Michel Carré (1819-1872), Carré s’est fait connaître surtout par des vaudevilles, des pantonimes, des livrets d’opérettes et de ballets, notamment : Bouton d’or (1893) ; Muguette (1903) ; le Clos (1906) ; Afgar (1910) ; etc. Il a fait aussi éditer de nombreux films. CARRÉ (Ferdinand-Philippe-Edouard), 1824-1894) : Ingénieur. Né à Moislains (Somme) en 1824, Carré s’est fait connaître comme l’inventeur d’appareils réfrigérants destinés à produire de la glace, d’un régulateur de lumière électrique, etc. Il décède en 1894. CARRÉ (Albert), 1852- : Acteur et auteur dramatique. Né à Strasbourg en 1852, après avoir joué au Vaudeville, il dirige en 1884 le théâtre de Nancy. Revenu à Paris en 1885, il dirige, soit seul, soit avec Porel, le Vaudeville et le Gymnase, et succède en 1898 à Carvalho dans la direction de l’Opéra-Comique. Il s’y signale surtout par son goût et sa recherche de la mise en scène. En 1914, il est administrateur de la Comédie-Française, et revient en 1918, avec les frères Isola, à la direction de l’Opéra-Comique, qu’il garde jusqu’en 1925. Il a écrit le Docteur Jojo, comédie, et le livret de la Basoche. Marguerite Giraud (1880- ?), sa femme, née à Cabourg en 1880, débute à l’Opéra-Comique en en 1901 dans Mimi de la Vie de Bohème et a interprété ensuite les principaux rôles du répertoire avec succès. CARRÉ (Fabrice), 1855-1921 : Auteur dramatique. Né à Paris en 1855, petit-fils de l’auteur dramatique Labrousse, Fabrice Carré est d’abord avocat et journaliste. Il fait jouer, seul ou en collaboration, de nombreuses pièces : comédies, vaudevilles, opérettes, notamment : Joséphine vendue par ses sœurs (1886) ; Mon oncle Barbassou (1891) ; Mam’zelle Carabin (1893) ; l’Enlèvement de la Toledad (1894) ; Monsieur le directeur (1895) ; Ma Bru (1899) ; Une idée de mari (1901). Il décède en 1921. CARREL (Alexis), 1873-1944 : Physiologiste et chirurgien. Né à Sainte-Foy-lès-Lyon le 18 juin 1873, Alexis Carrel fait ses études à Lyon et obtient le diplôme de médecine en 1900. Pendant deux ans, c’est à dire jusqu’en 1902, il approfondit ses connaissances en anatomie et devient le protecteur de Testut, auteur du célèbre traité d’anatomie. En 1904, il s’embarque pour l’Amérique et travaille à l’Institut de physiologie de Chicago, sous la direction de Stewart. Ayant acquis des bases solides dans ces deux domaines qui doivent pour lui être essentiels, il est appelé par l’Institut Rockfeller de New York dont il fait bientôt partie, car son nom commence à être connu. La réputation qui s’attache à ses travaux, à ses recherches et à ses découvertes sont déjà telle qu’il obtient le prix Nobel en 1913 pour la physiologie et la chirurgie physiologique. Pendant la Première Guerre mondiale, il sert en France comme chirurgien d’ambulance et a apporté d’intéressantes innovations au traitement des blessures d’infectés. Il passe toute sa vie en Amérique et ce n’est qu’en 1940 qu’il revient en France. Ayant reçu un poste du gouvernement de Vichy, il est accusé de collaboration avec l’ennemi. Son nom est universellement lié aux travaux et aux expériences qu’il fait sur la culture des tissus, à une technique personnelle de la « structure à trois fils », à l’anastomose des vaisseaux et à celle des greffes organiques. Membre correspondant de l’Académie de médecine en 1927, il meurt à Paris le 5 novembre 1944. SOUPAULT (Robert) : Alexis Carelle, 1952. CARRÈRE (Jean), 1867-19 : Poète. Né à Agen en 1867, Jean Carrère se fait de bonne heure connaître coe poète avec l’Aube (1891) ; Ce qui renaît toujours (1891). En juillet 1893, les troubles du Quartier latin, survenus à la suite de l’étudiant Nuger, font de Jean Carrère un des chefs du mouvement des étudiants. Revenu à la littérature, il publie ses Premières poésies (1898). Correspondant de guerre au Transvaal, il en rapporte : la Guerre du Transvaal : 1° En pleine épopée (1901), et 2° le Pays de l’or rouge (1903). Par la suite, il a continué d’écrire des ouvrages d’une inspiration chaleureuse et d’un style coloré : la Terre tremblante : Calabre et Messine (1907-1909) ; l’Impérialisme britannique et le rapprochement franco-anglais (1917) ; les Buccins d’or, poésies (1918) ; les mauvais maîtres (1922) ; les Chants orphiques, poésies (1923) ; le Pape, Rome éternelle, etc. (1924). CARRIER-BELLEUSE (Louis-Robert), 1858-1913 : Peintre et sculpteur. Né à Paris en 1858, fils et élève du sculpteur Ernest, Albert Carrier de Belleuse, Louis Carrier de Belleuse devient peintre, sculpteur et auteur de scènes de genre : Equipe de bitumiers (1883) ; la Corvée, les Petits ramoneurs, etc., et de bustes d’une grande ressemblance. Il décède à Paris en 1913. CARRIER-BELLEUSE (Pierre), 1851-19 : Peintre et portraitiste. Né à Paris en 1851, frère du précédent, portraitiste et peintre de genre, Pierre Carrier-Belleuse a fait surtout apprécier son talent comme pastelliste dans ses études de danseuses. CARRIÈRE (Auguste), 1838-1902 : Orientaliste. Né à Saint-Pierre-le-Vieux (Seine-Inférieure) en 1838, professeur d’arménien à l’Ecole de langues orientales, il est nommé directeur pour l’enseignement des langues sémitiques à l’Ecole des hautes études. Il a publié : une traduction de la Grammaire arménienne, de Lauer (1883) ; un Ancien glossaire latin-arménien (1886) ; Moïse de Khoren et les Généalogies patriarcales (1891). Il décède à Paris en 1902. CARRIÈRE (Eugène), 1849-1906 : Peintre et lithographe. Né à Gournay (Seine-et-Oise) en 1849, Eugène Carrière passe par l’atelier de Cabanel, mais se dégage vite de l’influence académique pour se rapprocher de Vélasquez. Dès 1879, avec son tableau la Jeune mère, il montre sin goût pour les maternités et les scènes de la vie familiale. Il a surtout pein t les êtres qui l’entourent ; plus précocuppés des formes que des lignes, il a noyé celles-ci dans un clair-obscur de plus en plus brunâtre, d’où presque toute couleur disparaît progressivement. Signalons parmi ses œuvres : le Baiser, la Famille, Portrait de Verlaine, l’Enfant malade, le Christ en croix (1897), l’Enfant Sorbonne (1898), Carrière est en outre l’auteur de lithographies appréciées. Il décède à Paris en 1906 CARRIÈS (Jean-Joseph-Marie Cariès, dit), 1855-1894 : Sculpteur et céramiste. Né à Lyon en 1855, Carriès débute par la sculpture, exécute de nombreux bustes d’artistes, puis s’adonne à la céramique (notamment aux grés) et réalise des œuvres originales : des cheminées entières et jusqu’à une porte monumentale où il a déployé une imagination fantastique en employant à la décoration les animaux et tous les jeux de la physionomie humaine. Il décède à Paris en 1894. CARTAILHAC (Edouard-Philippe-Emile), 1845-1921 : Savant. Né à Marseille le 15 février 1845, assistant au Muséum d’histoire naturelle de Toulouse dont il deviendra conservateur-adjoint, Emile Cartailhac fonde en 1869 la revue Matériaux pour l’histoire naturelle et primitive de l’Homme et, après Boucher de Perthes, s’affirme comme un initiateur de la recherche préhistorique française dans les ouvrages tels que L’Age de pierre dans les souvenirs et superstitions populaires (1878) ; L’Age de pierre en Asie (1880) ; Œuvres inédites des artistes chasseurs de rennes (1885) ; Histoire de la science ; les premiers travaux sur les monuents mégalithiques (1886) ; Sépultures adventices et violations des ossuaires égalithiques (1886) ; Les Ages préhistoriques de l’Espagne et du Portugal (1889) et surtout La France préhistorique (1889), qu’on peut considérer comme un des évènements scientifiques du XIXe siècle. Dans La Caverne d’Altamara (en collaboration avec Henri Breuil) et Les Grottes de Grimaldi, Cartailhac a consigné ses découvertes importantes sur les peintures de l’âge des cavernes. Il avait été nommé en 1906 professeur d’anthropologie à la faculté des sciences de Toulouse, puis correspondant à l’Institut. Il décède à Genève (Suisse) le 25 novembre 1921. BEGOUEN (Comte) : Emile Cartailhac, 1922. CARTAN (Elie), 1869-1951 : Mathématicien et professeur. Considéré comme le l’un des lus grands mathématiciens de son époque, Elie Cartan possède une intuition géométrique remarquable, aidée ar une très grande aptitude à dominer les calculs les plus complexes. Son œuvre considérable présente une grande unité. Elle gravite principalement autour de la théorie des groupes de Lie, systèmes différentiels, « groupes infinis » et de leurs applications à la géométrie différentielle ainsi qu’à la mécanique. Né à Dolomieu (Isère) en 1869 Elie Cartan entre à l’Ecole normale supérieure, achève sa thèse en 1894, puis enseigne aux universités de Monptellier , Lyon, Nancy et Paris. Après sa retraite en 1940, il a encore une grande activité scientifique et continue à enseigner à l’Ecole normale supérieure de Sèvres. Les premiers travaux de Cartan, à la suite de ceux de Lie et de Killing, sont de nature purement algébrique. Cartan établit la classification des algèbres de Lie simples sur le cors des complexes (quatre classes plus plus cinq algèbres exceptionnelles). Il étudie les algèbres de Lie semi-simples et montrent qu’elles sont caractérisées par une forme quadratique non dégénérées. Ensuite, il détermine les représentations linéaires irréductibles des algèbres de Lie semi-simles, ce qui lui permet de découvrir notamment les représentations spinorielles des algèbres de Lie orthogonales (on connaot l’importance de ces théories en physique). En 1914, Cartan établit la classification des algèbres de Lie simles sur le corps des réels. Cartan applique la théorie des groupes de Lie à la géométrie différentielle. En 1910, il utilise les équations de structure de ces groupes pour établir une théorie du repère mobile qui étend les résultats de Frenet et Darboux à un espace homogène quelconque (c’est à dire un esace sur lequel opère transitivement un groupe de Lie G, ce qui est équivalent à E=G/H, H sous-groupe fermé de G) ; il étudie ainsi les invariants diffétrentiels et le problème de la déformation des sous-variétés de E. En 1922, Cartan (en relation avec la relativité), introduit la notion d’ « espace généralisé » ou « non holonome » (comprenant notamment les esaces homog-nes et riemanniens) : il « attache » à chaque point d’une variété différentielle un espace homogène d’un groue G et « raccorde » entre eux ces espaces : c’est la théorie des connexions (d’où la notion de courbure, torsion, groupe d’holomonie) ; en particulier la théorie des espaces à connexion euclidienne, affine, projective, conforme est développée. Depuis l’introduction des esaces fibrés qui a permis une formulation moderne de la notion de connexion (en particuliers des « connexions Cartan »). Parmi les travaux les plus importants en géométrie de Cartan, figurent les esaces symétriques (en particuliers les esaces riemanniens symétriques). Cartan a publié un livre et de nombreux mémoires sur la géométrie riemannienne. C’est à partir de ces travaux que Elie Cartan retourne à l’étude des groupes de Lie (cette fois au point de vue global) ; il déduit des propriétés topologiques globales des groupes simples, compacts ou non, à partir de celles des espaces symétriques. Il détermine notamment le nombres de Betti d’un espace symétrique à groupe d’automorphismes compact (il ramène ce problème à un problème algébrique). Ces derniers résultats utilisent la théorie des formes différentielles extérieures : cette théorie est au centre de l’œuvre de Cartan. Partant de l’algèbre extérieure de Grassmann et généralisant les formes de Pfaff, Cartan introduit vers 1900 les formes différentielles extérieures et et l’opérateur d de différenciation extérieure qu’il a utilisés pour établir les équations de structure des groupes de Lie, des « groupes infinis », pour formuler la théorie du repère mobile et des « espaces généralisés » (courbure, torsion d’une connexion). Les formes différentielles sont des éléments d’intégrales multiples et leur introduction a permis l’énoncé précis de la formule de Stokes. A partir de ces formes, Cartan a développé sa théorie des invariants intégraux (notamment dans son livre paru en 1922), généralisant les résultats de Poincaré et donnant ainsi à la mécanique analytique une impulsion nouvelle. En s’appuyant sur les théorèmes de de G. de Rham reliant l’homologie d’une variété à la cohomologie des formes différentielles (l’opérateur d vérifie d² = 0), Cartan utilise les formes différentielles invariantes sous l’action d’un groupe, pour étudier les ropriétés globales des esaces homogènes et groupes de Lie. Cartan a étudié les systèmes différentiels : d’abord les systèmes de Pfaff puis, à la suite des travaux de Kähler, les systèmes extérieurs de degrés quelconque. Il développe sa théorie de l’involution (un système Σ est involutif s’il existe une chaîne E С…C Eⁿ d’éléments de contact intégraux de Σ) ; our les systèmes analytiques, on a le théorème de d’existence de Cartan-Kähler, les systèmes extérieurs (de caractère local), associant à une chaîne d’éléments de contact intégraux une chaîne de variété intégrales. Cette théorie est liée également à la théorie du problème d’équivalence loc ale (c’est à dire de l’isomorphisme local de structures d’ « espaces généralisé »). De grans progrès ont été accomplis dans ces domaines (la théorie de l’involution, étudiée du point de vue algébrique, a été rattachée à des théories cohomoogiques). La thérorie de l’équivalence et de l’involutio ont leurs aplications dans la théorie des « groupes continus infinis » développée par Cartan de 1904 à 1909 (résumée dans les exosés du séminaire Julia en 1937), un « groupe infini continu» (dont la définition a été donnée par S. Lie) est un ensemble ςђ Il meurt à Paris en 1951 CARTAULT (Augustin), 1847-1922 : Professeur et érudit. Né à Paris en 1847, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, membre de l’Ecole française latine à la Sorbonne. Ses principaux ouvrages sont : La Trière athénienne, étude d’archéologie navale (1881) ; Sur l’authenticité des groupes en terre cuite d’Asie Mineure (1887) ; Etude sur les « Buccoliques » de Virgile (1897) ; De la flexion dans Lucrèce (1898) ; Etude sur les « Satires » d’Horace (1899) ; A propos du « Corpus Tibullianum » (1906) ; le Distique élégiaque (1911) ; les Sentiments généraux (1912) ; l’Intellectuel (1914). il décède à Paris en 1922. CARTEL : Le mot « cartel » , ressuscité en 1924 par le Cartel des gauches, ne s’utilaisait plus qu’en économie et en politique quand les quatre principaux animateurs de théâtre de Paris de cette époque, décident, le 6 juillet 1927, de fonder une association pour la défense de leurs intérêts professionnels, en particulier devant la critique. Ils l’appelèrent aux aussi le Cartel, sans se douter que ce nom deviendrait aux yeux du public le symbole d’une formule esthétique. A première vue, Dullin, Jouvet, Baty et Pitoëff éprouvent surtout, dans leut activité quotidienne, le sentiement de leurs divergences. Si Dullin et Jouvet avaient été, l’un et l’autre, disciples de Copeau, Dullin défendait un théâtre où le sens de l’action dramatique l’emportait sur le respect de la forme littéraire, alors que Jouvet _ subissait davantage le charme des idées et des mots. De son côté, Baty, lyonnais comme Dullin, mançait précisément ses anathèmes à « Sire le Mot » et s’efforçait surtout de récréer des atmosphères. Quant à Pitoëff, venu assez tard de Russie, via Genève, il s’était fait avant toutl’iitiateur de Paris au théâtre international. Cependant le public ne se trompait pas quand il groupait ces quatre hommes sous une même étiquette. Chacun d’eux représentait en effet, à sa façon mais avec fermeté, ce qu’on appelait alors le théâtre d’avant garde, c’est à dire un effort de recherche et de création libéré des préoccupations trop exclusivement commerciales de leurs confrères. Et, en dépit de leurs tempéraments différents, leurs convictions esthétiques profondes étaient les mêmes. Antoine avait été le précurseur, en ouvrant le théâtre aux grands thèmes de la pesée contemporaine, quels qu’ils fussent, pourvu qu’ils expriment les inquiétudes, les refus, les espoirs et les volontés de son époque. Copeau avait corrigé son excès de libéralisme en rappelant que le théâtre avait ses propres lois, qu’il était un art indépendant, avec ses moyens particuliers, que la forme y comptait autant que le fond et qu’il n’est point d’art sans que le wsouci du beau ne prime tous les autres, ou, du moins, ne leur prête sa dignité. Les quatre dirigeants du Cartel se trouvaient donc à pied d’œuvre, avec une doctrine équilibrée, où l’absolue liberté des thèmes des thèmes ne se concevait pas sans l’absolue discipline de la forme. Ils s’adressaient spontanément à l’élite, car personne ne s’était posé sérieusement le problème des droits du peuple au théâtre (les expériences de Gémier étaient colossales, généreuses et puériles). Ils cherchaient à atteindre la plus grade intensité d’expression avec le miimum de moyens. Ils croyaient à l’existence d’une sorte d’archétype du théâtre et chacun travaillait avec la conviction qu’il s’apporchait chaque jour de cette perfection. Ils concevaient l’art comme un absolu trouvant en soi sa justification. C’est Charles Dullin (1885-1949) qui se sépare le premier de Copeau, mais peut-être est-ce lui qui lui demure le plus fidèle. Ce paysan montagnard, à peu près autodidacte, dont, grâce à un oncle farfelu, les jeunes années ont connu une athmosphère de poésies et d’aventures imaginaires, et dont les ébuts s’étaient faits au hasard de ses besoins, dans les cabarets parisiens ou dans les théâtre du mélodrame, conserve toujours le souvenir ébloui de ses premières rencontres chez Copeau avec les grands textes littéraires. Deux mots expriment pour lui l’essence même du théâtscures chez qui les forces du bien et du mal se combattent cruellement re : transfiguration et mouvement. C’est pourquoi c’est sans doute avec les grands poèmes dramatiques de l’époque élisabethaine et du siècle d’or espagnol qu’il exprime le plus vigoureusement sa personnalité. Le visage ingrat mais animé par la passion du regard, la voix sourde mais dominée par une articulation parfaite, le geste lyrique mais toujours mesuré, il crée sur la scène un étonnant envoûtement où l’intelligence claire soutenait les élans de l’instinct. S’il aimait incarner des personnalités obscures, chez qui les forces du bien et du mal se combattent cruellement, il anime de sa foi bouleversante la naïveté radieuse du paysan Trygée dans La Paix d’Aristophane. De 1922 à 1939, le petit plateau de l’ancien théâtre Montmartre, baptisé par Dullin l’Atelier, est aussi le lieu de la formation de jeunes auteurs comme Achard, Salacrou, Zimmer, Passeur, Arnoux, de Richaud, Bréal. Louis Jouvet (1887-1951) affiche volontiers un certain cynisme intellectuel et mène sa carrière avec habileté. En fait, cet ancien élève de l’Ecole de pharmacie avait le culte du beau et manquait d’assurance en soi. Il alla du plus facile (presque le Boulevard) au plus difficile (les classiques) par un eprogression constante et opiniâtre, équilibrant ce qu’il pouvait y avoir de formel dans ses conceptions littéraires par une reconnaissance approfondie de totes les techniques de la scène, et, particulièrement, de la scène italienne ; il pensait que celle-ci offre, à qui sait l’utiliser, les possibilités les plus larges. D’esprit plus « moderne » que Dullin, pendant la plus grande partie de sa carrière il fait porter tous ses efforts (1924-1934 à la Comédie des champs Elysées, 1935-1940 à l’Athénée) à la recherche et à la formation d’auteurs contemporains dont le splus célèbres sont Jules Romain, Achard et surtout Jean Giroudoux. Il avait réunit une troupe brillante (Valentine Tessier, Renoir, Michel Simon, Madeleine Ozeray) à qui il impose un jeu sobre, rigoureux, où tout tend à éclairer et à mettre e valeur les idées et les mots. Un déécorateur de génie, Christian Bérard, unissait ses talents à ceux d’une équipe remarquable, galvanisée par les exigences et la ferveur du maître de jeu. Les représentations triomphales, en 1936, de L’Ecole des femmes de Molière, doivent être les premières d’une série classique (Les Fourberies de Scapin, Le Ttartuffe, Don Juan). Aux ailes de ce bastion d’équilibre et de vigueur que représentaient les deux disciples de Copeau, Pitoëff et Baty apportaient, l’u l’affranchissement de la pure poésie et l’autre celui du rêve. Quand Georges Pitoëff (1884-1939) débute à Paris e 1922, il a déjà une légende. Né à Tiffis, il apprend son métier d’acteur et de metteur en scène à Moscou, avant de s’installer à Genève, avec sa compatriote Ludmilla rencontrée à Paris. Leur couple est saisissant, lui, avec son visage d’apôtre obstiné, sa voix saccadée, sans souffle, elle, toute petite, avec des gestes de marionnette, un front large, lisse et blanc et des yeux noirs immanses. En scène, la foi les transfigure. Pendant trente ans, à Genève et à Paris, elle est la pureté rayonnante, la fragilité idomptable, et lui la générosité maladroite et bouleversante. La pauvreté est leur génie. Dans L’Echange de Claudel, on tend un mince ruban bleu à l’arrière-plan et c’est la mer. Quelques praticables gris sur lesquels jouent des projecteurs et ce sera tour à tour les créneaux du château d’Hamlet, le bûcher de Sainte Jeanne. Entourés d’une troupe souvent médiocre, mal payée et fidèle, ils transfigurent tout ce qu’ils touchent, et jusqu’à leur public. Ue sorte de pacte mystique unit la salle et la scène. La poésie des mots devient la poésie de l’âme. Shakespeare, Ibsen, Tchekhov, Shaw, Maeterlinck, Strindberg, Pirandello, tous les poètes du mystère, de l’angoisse, de la tendresse trouvent, sur les divers plateaux occupés par la troupe errante, leur lieu d’expression privilégié. Gaston Baty (1885-1952) aussi est poète, mais alors que les recherches de Pitoëff frôlent la métaphysique, celles du fondateur de la Baraque de la Chimère en 1922 tendent à favoriser l’évasion du public par la création d’atmosphères bien proches de celles du rêve. De milieu bourgeois, Gaston Baty, fait en Allemagne des études supérieures qui doivent orienter d’une manière décisive son activité artistique. Si sa sensibilité raffinée l’éloignait de tout engagement politique et social – et par là même l’amène à combattre les formules du théâtre d’après guerre – il a été en France le véritable précurseur des techniques de mise en scène de nos animateurs contemporains. Alors que Jouvet, Dullin et Pitoëff ont subi, directement ou par l’intermédiaire de Copeau, l’influence de Stanislavski, c’est Piscator et Reinherdt qui sont à l’origine de la maîtrise de Baty dans l’éclairage, le changement de décor et le maniement des foules, et ce n’est pas un hasard si c’est Baty qui, dès 1930, introduit Brecht en France (L’Opéra de quat’ sous). Très cultivé et amoureux des grands textes autant que ses compagnons du Cartel, il n’en prend pas moins position sinon contre le théâtre littéraire, du moins contre la primauté de l’auteur. Il se veut créateur autant que l’écrivain qu’il met en scène. Cette ambition l’amène à choisir des œuvres qui sont surtout des prétextes à la création d’atmosphères et l’un de ses auteurs préférés. Jean-Jacques Bernard invente pour lui « le théâtre du silence ». Baty est très conscient du caractère éphémère d’une œuvre dont le succès est lié exclusivement à la qualité de la mise en scène, et à la solidité d’une troupe de comédiens fidèles, en tête desquels birlle le talent troublant de Marguerite Jamois ; mais il voit dans cette précarité la noblesse même de l’art qu’il sert avec une délicatesse parfaite et un dévouement passionné, convaincu d’avoir suffisamment rempli sa mission à l’égard de son époque, en offrant à ses contemporains d’excquises « minutes d’évasion ». C’est ce respect de l’œuvre d’art en soi, sans autre souci que celui de sa perfection, qui le rattache le plus intimement à ses compagnons du Cartel. ARNAUD (L.) : Charles Dullin, Paris, 1952 BLANCHART (P.) : Gaston Baty, Paris, 1939 BRISSON (P.) : Le Théâtre des années folles, Genève, 1943. CEZAN (C.) : Louis Jouvet et le théâtre d’aujourd’hui, Paris, 1948. FRANK (A.) : Georges Pitoëff, Paris, 1958. GOUHIER (H.) : L’Essence du théâtre, Paris, 1943. HORT (J.) : Les Théâtres du Cartel, Genève, 1944. JOMARON (J.) : Georges Pitoëff, metteur en scène, Lausanne, 1979 KURTZ (M.) : Jacques Copeau, Paris, 1950. SIMON (A.) : Gaston Baty, théoricien du théâtre, Paris, 1972. CARTEL DES GAUCHES : Le « Cartel des gauches », victorieux en 1924 et en 1932, est la coalition des radicaux qui dominent alors la gauche (jusqu'en 1936) et des socialistes. Les premiers députés communistes qui sont élus en 1924 siègent dans l'opposition. Les socialistes ne participent pas au gouvernement et posent même en 1932 des conditions à leur participation qui sont rejetées par les radicaux (les "conditions Huygens") Le Cartel des gauches se constitue à la fin de l'année 1923 contre le Bloc National. Le Bloc national est un bloc anti-collectiviste, dirigé contre les socialistes, qui se constitue à l'instigation de l'Alliance Démocratique, pour les élections de 1919 et qui remporte la victoire (70% des sièges, la « Chambre bleue horizon »). Il comprenait la Fédération Républicaine, l'Action Libérale (descendance des « ralliés »), les nationalistes et une partie des radicaux. Le Cartel des gauches associe 4 groupes : -les radicaux indépendants (frange de droite des radicaux) ; -les radicaux-socialistes, unifiés désormais ; -les républicains socialistes, des socialistes indépendants (Paul Painlevé) ; -la SFIO. Le Cartel met en place un réseau de comités dans tout le pays, il lance un quotidien (« Le Quotidien ») et un hebdomadaire (« Le Progrès Civique »). Il se reconstituera en 1932 et gagnera à nouveau les élections. En 1924 le Cartel obtient la victoire en raison de la division de la droite. La gauche obtient 48,3% et la droite 51,7% mais le Cartel obtient une majorité de sièges : 327 contre 254 (la droite et les premiers députés communistes). La majorité est dirigée par Edouard Herriot. Elle éclate en 1926. Les socialistes passent dans l'opposition. Le gouvernement Poincaré bénéficie d'une forte majorité : droite et radicaux. La droite remporte les élections législatives de 1928 : il y a 329 députés de droite contre 285 pour la gauche. Comme à chaque élection les radicaux se présentent avec la gauche. En 1932, le second Cartel remporte les élections mais il n'y a pas de majorité de gauche associant radicaux et socialistes. Les socialistes posent leurs conditions à la participation (les "cahiers" ou les "conditions Huygens" du nom du gymnase dans lequel s'était tenu le congrès socialiste). Les gouvernements se succèdèrent, dirigés par des radicaux alliés aux "modérés". Cette majorité parlementaire, distincte de la majorité électorale, est fragile. Cette période de grande instabilité aboutit à la crise du 6 février 1934. CASADESUS (Francis-Louis), 1870-1954 : Compositeur. Né à Paris le 2 décembre 1870, Casadesus reste le représentant le plus prestigieux de cette grande famille de musiciens et d’acteurs. Elève d’Olivier Métra, de Lavignac et de César Franck, il est jusqu’à la Première Guerre mondiale, chef d’orchestre de différents théâtres lyriques de Paris et de Moscou. Il dirige la Société de concerts du Conservatoire. Après la guerre, il fonde le Conservatoire américain de Fontainebleau et développe son activité déjà ancienne en faveur des musiciens pauvres et du syndicalisme. A partir de 1928, il est président de la Société des auteurs et compositeurs de musique. Ses compositions, d’une solide facture s’inspirent souvent du folklore ouvrier parisien. Il s’appente, sans se confondre avec eux, à Gustave Charpentier et Alfred Bruneau. Il laisse des opéras : La Chanson de Paris (1924), Cachaprès (1924) ; des ballets comme Un Soir à Mabille, Esterelle (1900) ; des musiques de scène : Bertrand de Born (1925). Il meurt à Paris le 27 juin 1954. CASE (Jules-Richard), 1856- : Romancier et journaliste. Né à Sens (Yonne) en 1856, écrivain délicat, psychologue très fin, austère et mélancolique, Jules Case s’est fait connaître par de nombreux articles et par des romans : La Petite Zette (1884) ; Une bourgeoise (1885) ; La Fille de Blanchard (1886) ; Bonnet rouge (1887) ; Ame et peine (1888) ; Jeune Ménage (1890), réédité en 1897 sous le titre de la Vassale ; Promesses (1892), l’Etranger (1894) ; la Volonté du bonheur (1896). De son roman la Fille de Blanchard, il a tiré un drame qui a été joué à l’Odéon (1893) et sa comédie la Vassale est représentée à la Comédie-française en 1897. Citons encore Tablettes littéraires (1909) ; le Salon du quai Voltaire, roman (1914) et ses intéressants souvenirs littéraires. Il décède CASEVITZ (Thérèze, épouse Rouff), 1879- ? : Avocate et femme de lettres. Originaire de Genève, Thérèse Casevitz est issue d’une famille bourgeoise israélite pratiquante. Ardente féministe, maçonne, elle anime l’Union française pour le suffrage des femmes et le journal Distraire. Elle publie aussi des poèmes Les heures qui passent ; Les servitudes ; Le cœur en peine et des romans : Les voils noirs ; L’éternelle Genève et, en collaboration avec M. Rouff, Hortense Schneider. CASIMIR-PERIER (Auguste-Casimir-Victor-Laurent Perier, dit) : 1811-1876 : Diplomate et homme politique. Né à Paris le 20 août 1811, Casimi-Perier est le fils du ministre de 1830. Il débute dans la diplomatie avant d’être élu député de centre droit de Paris en 1846. Adversaire modéré du second Empire, il est nommé par Thiers ministre de l’Intérieur du 11 octobre 1871 au 6 février 1872 dans le premier cabinet Dufaure après la mort de Lambrecht. Il lutte alors contre la presse bonapartiste et réorganise son minstère en créant notamment la direction des affaires civiles de l’Algérie. La Chambre refusant de rentrer, selon sa volonté, de Versailles à Paris, il démissionne en février 1872. Soucieux de s’appuyer sur le centre gauche, Thiers fait de nouveau appel à lui pour le portefeuille de l’Intérieur du 18 au 24 mai 1873 dans le second cabinet Dufaure. Cependant, le tentative ne dure que six jours. Il s’oppose au duc de Broglie et refuse la présidence du Conseil que lui propose Mac-Mahon en 1875 et, en 1876, est élu sénateur inamovible. En 1873, il obtient d’ajouter le nom de Casimir à son nom patrnymique. Il meurt à Paris le 6 juin 1876. CASIMIR-PERIER (Jean), 1847-1907 : Homme politique. Né à Paris le 8 novembre 1847, Jean Casimir-Perier porte un nom qui incarne l’histoire du libéralisme politique dont sa famille a épousé l’évolution depuis la fin du XVIIIème siècle. Fils du précédent, petit-fils du président du Conseil de Louis-Philippe, Jean Casimir-Perier est orléaniste d’éducation, s’étant sincèrement rallié à la République, tout comme son père. auprès duquel il a commencé sa carrière politique comme chef de cabinet au ministre de l’Intérieur (octobre 1871-février 1872). Il épousera sa cousine, Hélène Périer-Vitet, le 17 avril 1873, deviendra conseiller général de Nogent-sur-Seine le 18 juillet 1873, puis député de centre gauche (Nogent-sur-Seine) le 20 février 1876. Il sera réélu sans interruption jusqu'en 1894. Il devient rapidement sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction dans le cabinet Dufaure puis sous secrétaire d’Etat à la Guerre, d’octobre 1883 à avril 1885, dans le dernier ministère Ferry. Capitaine de la 4ème compagnie au 1er bataillon des mobiles de l'Aube (équipé à ses frais) en 1870, il se distingue au combat, ce qui lui vaut de recevoir la Légion d’honneur. Son ralliement à la République est exempt de tout sectarisme et s’accomplit dans la fidélité à ses racines, comme le prouve son attitude devant l’exclusion annoncée en 1883 des anciennes familles régnantes, incluant les princes d’Orléans que sa famille a servis avec fidélité. Pour ne pas se déshonorer, il démissionne alors de son mandat parlementaire, attendant pour être élu que la loi ait été entérinée. Les années suivantes, il joue un rôle de premier plan à la Chambre, dirigeant notamment la commission du budget avant d’accéder à la présidence en janvier 1893. Quelques mois plus tard, la victoire des progressistes aux législatives et le renouvellement important de la classe politique après le scandale de Panama, lui ouvrent les portes du pouvoir. Elu président de la Chambre, il se fait longuement prier par le président de la République Carnot avant d’accepter de diriger le gouvernement. Alors âgé de quarante-six ans, cet homme neuf et autoritaire entend opérer une recomposition politique d’envergure. Désireux d’éviter le reours aux radicaux tout comme aux droites antirépublicaines, il veut en réalité, dans la lignée de Thiers, rassembler les modérés des deux bords dans un grand parti républicain de gouvernement, largement ouvert aux ralliés afin de lutter contre le socialisme montant. S’il s’agit en somme de de bâtir une droite républicaine, tâche qu’il juge possible maintenant que l’aventure boulangiste a frappé à mort les monarchistes conservateurs. Le cabinet, squ’il constitue le 3 décembre 1893, déçoit un peu. Le gouvernement étant constituer d’ancien gambettistes mûris dans le confort de l’ooportunisme à l’image de Spuller qui hérite de l’Instruction publique et des Cultes. Le grand notable, « symbole de la tradition larmoyante et hautaine du grand despotisme bourgeois », veut par là même afficher sa « républicanité », indispensable pour engager l’ouverture à droite qu’il appelle à ses vœux. La menace anarchiste, qui s etraduit par une vague d’attentats meurtriers, semble pouvoir favoriser le dessein du nouveau président du Conseil. Comme son grand-père, Casimir-Perier a pour tâche première et essentielle de rétablir l’ordre. Le 9 décembre 1893, Auguste Vaillant lance une bombe dans l’hémicycle du Palais-Bourbon, blessant plusieurs personnes. Le gouvernement fréagit aussitôt en déposant, quarante-huit heures plus tard, quatre projets de lois destinés à briser l’anarchisme. Associant répression et prévention, ces lois durcissent considérablement les dispositions existantes contre le délit d’association de malfaiteurs, interdisent la détention d’explosif, renforcent le budget de la police, autorisent la saisie préventive des journaux faisant l’apologie de la violances et des attentats et l’arrestation des provocaturs. L’arsenal constitué n’est pas sans rappeler les célèbres lois de septem re 1835, sucitant de virulentes protestations des socialistes qui fistigent les « lois scélérates ». Le 4 février 1894, Vaillant est exécuté, entraînant une nouvelle série d’attentats sanglants qui obligent Charles-Dupuy à durcir les lois existantes. C’est également durant son min istère, le 4 janvier 1894, que l’alliance franco-russe est finalisée par la ratification de la convention militaire d’août 1892. Même si elle est encore tenue secrète, la nouvelle transpire un peu partout, renforçant le gouvernement qui pense pouvoir orchestrer le rapprochement avec les ralliés. Pourtant l’opération demeure délicate, presuq eimpossible tant l’anticléricalisme reste le fer de lance du républicanisme, qoudant la plupart des opportunistes aux radicaux. Le 3 mars 1894, le ministre Spuller appelle dans un discours célèbre a faire prévaloir un « esprit de tolérance » dans les questions religieuses, « esprit nouveau » destinée, « dans une société aussi profondément troublée que celle-ci, à ramener tous les Français autour des idées de bon sens, de justice et de charité qui sont nécédssaires à toute société qui veut vivre ». En dépit d’un vote de confiance, les gauches accusent aussitôt le gouvernement de « pactiser avec l’ennemi » tandis que la plupart des conservateurs s’abstiennent ou votent contre, et que le sradicaux complotent afin d’obtenir la chute du cabinet. La majorité des centres est déjà bien affaiblie quand Jonnart, ministre des Travaux publics et autre partisan ardent du ralliement, est pris à partie pour son refus d’accorder la liberté de se syndiquer aux employés des chemins de fer de l’Etat. Le 23 mai, l’ordre du jour ministériel est repoussé. Le gouvernement n’aura existé qu’un semestre. Après avoir permutté avec Charles-Dupuy, qui retrouve la présidence du Conseil tandis qu’il retourne à celle de la Chhambre, Casimir-Perier est élu président de la République le 24 juin 1894 en remplament de Sadi-Cranot, assassiné à Lyon. Sa courte présidence, qui durera à peine plus longtemps que son ministère soit six mois, est pour lui un autre calvaire. Avide d’agir, il entend réhabiliter la fonction suprême qu’il juge trop affaiblie. Or, c’est exactement l’inverse qui se produit. Peu populaire, hypersensible, totalement marginalisé par Dupuy, incessamment attaqué par la presse de gauche sans pouvoir répondre, il étouffe dans sa fonction et prend prétexte du renforcement du cabinet Dupuy pour démissionner le 15 janvier 1895 : « Je ne résigne pas à comparer le poids des responsabilités morales qui pèsent sur moi et l’impuissance à laquelle je suis condamné », affirme-t-il dans son message au parlement pour justifier sa décision. Dégoûté de la politique, Casimir-Perier retourne aux affaires familiales, consistant essentiellement dans la gestion des mines d’Anzin, et à ses œuvres sociales. En 1899, Le président de la République Emile Loubet le sollicite en vain pour revenir au pouvoir. Il décède précocement à Paris le 11 mars 1907, laissant le souvenir d’un grand destin brisé. CASSAGNAC (Paul Granier de), 1843-1904 : Publiscite et homme politique. Né à Paris en 1843, Paul Granier de Cassagnac est le fils du publisciste et de l’homme politique Bernard, Adolphe Granier de Cassagnac (1808-1880). Dès 1862, il entre dans le journalisme. Après avoir été prisonnier en 1870, il devient directeur du Pays, où il fait une guerre acharnée à la République, comme porte-parole du parti impérialiste. En 1876, il est élu dans le Gers, membre de la Chambre des députés, échoue en 1893, est élu en 1898 et échoue encore en 1902. Après le 16 mai, il pousse le maréchal Mac-Mahon à faire un coup d’Etat. En 1886, il fonde un nouveau journal, l’Autorité. Pendant le mouvement boulangiste, il fait partie du Comité des six. Bien que catholique ardent, il se signale par ses attaques contre la politique du ralliement préconisé par Léon XIII. Il est un polémiste d’une extrême vigueur, et un orateur plein de fougue. Il décède à Saint-Viâtre (Loir-et-Cher) en 1904. CASSEZ (Emile), 1871-1948 : Homme politique. Né à Bournonville (Pas-de-Calais), le 23 juillet 1871, Emile Cassez est diplômé de l’Ecole nationale d’agriculture de Grignon et directeur adjoint au ministère de l’Agriculture de 1918 à 1924. Il entre à la Chambre comme député radical socialiste où il s’inscrit bien entendu à la commission de l’Agriculture. Flandin le nomme à ce portfeuille du 8 novembre 1934 au 31 mai 1935., où il doit affronter la cise agricole. Il meurt à Chaumont (Haute-Marne), le 14 septembre 1948. CASTANIER (Prosper), 1865-19 : Littérateur. Né à Saint-Ambroix (Gard) en 1865, Prosper Castanier entreprend une Histoire de la Provence dans l’antiquité (1893-1896) qui est demeurée inachevée et s’arrête au IVème avant Jésus-Christ. Il a aussi publié une série de romans historiques dans lequel le décor antique est souvent prétexte au libertinage : l’Orgie romaine (1897) ; la Fleur de Cythère, la Vierge de Babylone (1898) ; la Courtisane de Memphis (1900) ; la Fille de Crésus, et les Amants de Lesbos (1901). CASTELLANI (Charles), 1838-1913 : Peintre. Né à Bruxelles (Belgique) en 1838, Charles Castellani s’est distingué dans la peinture militaire avec les Marins au Bourget (1879) et surtout dans le panorama avec la Création avant le déluge. Il décède à Bois-le-Roi (Seine-et-Marne) en 1913. CASTELNAU (Noël-Marie-Joseph-Edouard de Curières de), 1851-1944 : Général et homme politique. Édouard de Castelnau est né à Saint-Affrique (Aveyron), le 24 décembre 1851 dans une famille de noblesse catholique. Il est, dans son enfance, qualifié des plus remuants, des plus actifs, des plus intelligents et des plus batailleurs. Il étudie neuf ans chez les Jésuites du collège Saint-Gabriel, puis au collège Sainte-Geneviève à Paris. Il intégre ensuite l’École spéciale militaire, Saint-Cyr, en 1869, alors qu'il n'avait pas encore 18 ans, et en sortit prématurément en août 1870, avec le grade de sous-lieutenant. Il est affecté au 31ème régiment d'infanterie, et, six semaines plus tard, le 27 octobre 1870, Édouard Castelnau est promu capitaine, à l'âge de dix-neuf ans. Il participe ensuite à la guerre de 1870-1871 et est nommé capitaine en 1876. Après avoir suivi les cours de l’Ecole supérieure de guerre, il est nommé chef de bataillon en 1889. Il entre en 1893 au Premier bureau de l’État-major général, et peut ainsi suivre l’affaire Dreyfus de très près, depuis son déclenchement en 1894. En effet, le capitaine Dreyfus avait effectué quelques mois plus tôt un stage, sous les ordres du général de Castelnau. Colonel en 1900, il se distingue alors dans le commandement du 37ème régiment d’infanterie à Nancy. Général de brigade en 1906, divisionnaire en 1909, il vient en 1911 à l’état-major de l’armée en qualité de 1er sous-chef d’état-major. En 1913, le général de Castelnau quittait l’état-major de l’armée pour prendre, au conseil supérieur de la guerre, la succession du général Paul, succession qui comportait le commandement éventuel de la IIème armée. La Première Guerre mondiale lui permit de prouver ses capacités tactiques sans jouer toutefois accéder aux premiers rôles. Il contribue à sauver Nancy et à triompher à la bataille de la Marne, mais ce n'est qu'en décembre 1915 que Joffre lui fait véritablement confiance, en le prenant pour adjoint. Il participe alors vaillamment à la bataille de Verdun, et un an plus tard, le 31 janvier 1917, envoyé en Russie, il rencontre le Tsar Nicolas II. Après l'armistice, il s'aventure dans la politique comme député de l'Aveyron, en 1919. Bien qu’il déploie une grande activité, en particulier comme président de la commission de l’armée à la Chambre, il connaît la marginalisation dont souffre l’extrême-droite et qui limite beaucoup sa marge d’initiative. A la mort de Barrès en 1923, il lui succède à la tête de la Ligue des Patriotes. Battu aux élections législatives de 1924, avec l’appui de la hiérarchie catholique, le général de Castelnau crée la Fédération nationale catholique, regroupant plus d'un million d'adhérents dont le but est de s’opposer, au besoin par la force, aux lois anticléricales prévues par le gouvernement. Parallèlement, le général de Castelnau dispose d’une tribune importante avec le journal L’Echo de Paris, dans lequel il écrit régulièrement et où il combat, outre les velléités anticléricales, la politique briandiste de réconciliation franco-allemande et l’esprit de Locarno. A partir de 1930, l’influence du général de Castelnau décroît rapidement. L’absence de retour à une politique anticléricale diminue l’intérêt de la Fédération nationale catholique qui tend à devenir moins militante, organisant des conférences ou s’efforçant d’arbitrer les élections en fonction des intérêts catholiques. Dépassé par les évènements, le militarisme et le traditionnalisme de Castelnau font de lui, l’homme d’une autre époque. Continuant à diriger la Fédération nationale catholique, il se retire dans sa propriété de l’Hérault. Il décède en Haute-Garonne, à Montastruc-la-Conseillère, le 19 mars 1944. CASTEX (Hubert), 1828-1912 : Général et écrivain. Né à Paris en 1828, entré à l’Ecole d’état-major, il fait les campagnes de Crimée et de l’armée du Rhin en 1870. Versé ensuite dans la cavalerie, il est mêlé à des incidents politiques et commande de 1885 à 1890 une brigade de cavalerie. Il a publié des souvenirs : Ce que j’ai vu (1900) ; Au bivouac et plus tard (1901), etc. Il meurt en 1912. CASTEX (André), 1851-19 : Chirurgien. Né à Bordeaux (Gironde) en 1851, ancien chef de clinique de la faculté de médecine de Paris, chirurgien de la clinique de l’Institution nationale des sourds-muets, André Castex s’est spécialisé dans le traitement des infections des oreilles, du nez et du larynx où il acquiert une compétence très étendue. Parmi ses ouvrages, citons : Traité des maladies du larynx, du nez et des oreilles (1901) ; les Maladies de la voix (1902) ; Causes de surdi-mutité (1903). Il a fondé, en 1898, le Bulletin de laryngologie, rhinologie et otologie. CATERS (Louis-Pierre-Ernest, baron de), 1856- : Littérateur. Né à Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise) en 1856, Caters a publié dans divers journaux ses romans : Passionnette (1895) ; Confessions d’une femme du monde (1894) ; Revanche d’amour (1893) ; De baisers en baisers (1895) ; l’Amour d’aimer (1897) ; Crimes d’orgueil (1891) ; le Lion de Camors (1894) ; les Pirates de Venise (1897). Il a signé du pseudonyme de Rapière des études sur la technique de l’escrime, et de celui de Saint-Georges des articles sur le cheval. CATHALA (Pierre), 1888-1947 : Avocat et homme politique. Pierre Cathala, né à Montfort-sur-Meu (Ille-et-Vilaine) le 22 septembre 1888, est un avocat radical élevé dans l’idée du service de l’Etat par un père sous-préfet. Il devient ansi l’adjoint de Laval au ministère du Travail et à la Prévoyance sociale du 2 mars au 12 décembre 1930 dans le deuxième cabinet Tardieu. Ancien condisciple de Laval en classe de philosophie, il appartiendra toujours à ses cabinets. Celui-ci le place auprès de lui dans ses deux premiers gouvernement avec la responsabilité de l’Intérieur. Dans le premier cabinet comme sous-secrétaire du 27 janvier 1931 au 13 janvier 1932 et dans le second comme ministre du 14 janvier au 19 février 1932. Il est nommé ensuite sous-secrétaire d’Etat à la Prédsidence du Conseil et aux Affaires étrangères du 20 février au 2 juin 1932 dans le troisième ministère Tardieu. Enfin, il est appelé par Bouisson dans son cabinet cimme sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et à l’Intérieur du 1er au 6 juin 1935. Président du parti radical indépendant en 1938, il est mobilisé dans la justce miltaire en 1939 puis fait partie de la mission militaire franco-polonaise. Continuant sa carrière politique pendant la guerre, il meurt à Paris le 27 juillet 1947. CATHOLICISME : Religion majoritaire en France, le catholicisme connaît dans l’histoire contemporaine du pays, un destin marqué tout à la fois par les débats politiques qui font de l’Eglise un des acteurs de la vie pulique, et par ses propres problèmes internes, qui tiennent à la manière dont elle envisage et remplit sa mission de diffusion du message dont elle est porteuse et l’encadrement des fidèles. Les déuts de la Troisième Répulique sont pour l’Eglise une période difficile. Face aux Républicains qui l’emportent en 1877-1879, l’Eglise catholique, liée à la contre-révolution et aux adversaires du nouveau régime, fait figure de force hostile. Contrairement à la période entre 1873 et 1877, ou elle a constitué le ciment de l’ordre moral par lequel les monarchistes entendaient préparer la restauration. Aussi, jusqu’en 1914, l’éEglise est-elle en butte à l’anticléricalisme des dirigeants du pays qui entendent briser son influence sur la société et la vie politique. Tel est le sens des lois scolaires de 1882 et de 1886, qui laïcisent l’enseignement primaire, des mesures prises à partir de 1880 contre les congrégations et qui conduisent à l’expulsion d’un grand nombre d’entre elles, à commencer par les Jésuites, de l’institution du divorce en 1884, des décisions qui aoutissent à la suppression des crucifix dans les écoles, à celle des aumôniers dans les lycées et hôpitaux, à l’interdiction faite aux troupes de paraître dans les cérémonies religieuses, à l’obligation du service militaire pour les séminaristes... Avec le vote de la loi de 1901 ur les associations qui débouche sur l’interdiction de la plupart des congrégations, de celle de 1904 interdisant mêmes autorisées, enfin avec l’instauration de la Séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’édifice anticlérical est achevé : les catholiques sont désormais en marge de la vie pulique qu’ils ont longtemps dominée. Il est vrai que, dans leur immense majoritée, ils constituent un bloc de résistance au nouveau régime et s erangent systématiquement dans le camp de ses adversaires. Les catholiques saint, sauf une étroite minorité, , de sentiments monarchistes et appellent de leurs vœux la Restauration. Après l’échec de celle-ci, ils figurent dans les rangs des troupes boulangistes. La tentative du pape Léon XIII, qui préconise le Ralliement des catholiques au régime par l’encyclique Au milieu des sollitudes (1892), fait sans doute naître, autour d’Albert de Mun et de Jacques Piou, un courant politique qui, à la fin du siècle, fera cause commune avec les Progressistes contre le socialisme naissant, mais ne parvient pas à convaincre le grand nombre des fidèles. On le voit ien au moment de l’affaire Dreyfus. La congrégation des Assomptionnistes et son journal La Croix sont le fer de lance de la croisade antidreyfusarde et antisémite qui agite la droite, cependant que la majorité des catholiques se range dans le camp antidreyfusard. Le catholicisme paiera de cette compromission avec la victoire des dreyfusards qui, de Waldeck-Rousseau à Combes, s’appliqueront à riser la force politique qu’ils représentent. Si le pape Léon XIII tente de réconcilier l’Eglise et la République, il comprend aussi la nécessité de consilier l’enseignement du dogme avec les méthodes scientifiques modernes. Aussi encourage-t-il les congrès scientifiques internationaux, favorise-t-il le renouveau de la pensée thomiste, admet-il l’approche par des méthodes neuves de l’étude des Ecritures et de l’Antiquité chrétienne. Cet effort d’intégration de l’Eglise au monde moderne sera sans lendemain. Pie X, qui succède à Léon XIII en 1903, retrouve la rigueur pratiquée par Pie IX au XIXème siècle. A la politique anticléricale de la République, il répond par un raidissement qui lui fait refuser tout accomodement avec le régime et précipiter la décision de séparation de l’Eglise et de l’Etat. Celle-ci votée, il la condamne formellement par l’encyclique Vehementer (février 1906), refusant d’autoriser les catholiques à constituer des associations culturelles (Encyclique Gravissimo d’août 1906). Ce raidissement concerne également le renouveau intellectuel : par l’encyclique Pascendi de 1907, Pie X condamne le courant « moderniste » animé par l’abbé Loisy et donne sa caution aux « intégristes » attachés au respect sourcilleux de la tradition. Enfin, il aboutit au rejet de la tentative de christianisme démocratique et socialisant organisée autour de Marc Sangnier et de sa revue Le Sillon dont le Saint-Siège condamne le principe en 1910. Mais en dépit de la politique d’isolement rigoureux poursuivie par Pie X qui paraît condamner les catholiques à une marginalisation complète vis-à-vis du régime, la séparation de l’Eglise et de l’Etat et l’essor intellectuel commencé sous le pontificat de Léon XIII aboutissent au début du XXème siècle à une véritale renaissance catholique qui pénètre les milieux intellectuels et la société. Favorisée par la crise qui frappe alors la pensée positiviste et le scientisme et restaure les valeurs intuitives, cette renaissance se marque par une floraison d’œuvres philosophiques (celle de Blondel, de Maritain, de Massis), par l’inspiration catholiques des œuvres littéraires de Péguy ou de Claudel par la volonté marquée de l’Eglise, désormais débarrassée de tout lien avec le pouvoir, d’insister sur son rôle pastoral et sur les données spirituelles du message évangélique. Au-delà de quelques conversions retentissantes, comme celle d’Ernest Psichari, c’est une véritale reconquête du monde intellectuel qui commence en ce début du XXème siècle pour les catholiques. Il reste que la rupture avec le pouvoir maintient les catholiques, anciens ou nouveaux, dans une opposition radicale au régime, marquée par la sympathie de nombre d’entre eux pour l’Action française, en dépit des réserves suscitées chez certains catholiques, voire à Rome même, par le positivisme maurassien. Celles-ci conduisent en 1914 à la Congrégation de l’Index à prohier les œuvres de Maurras et la revue L’Action française, mais le appe Pie X décide de ne pas rendre publique la condamnation. Au demeurant, la Première Guerre mondiale favorise la réintégration des catholiques française dans la cité. La Participation des catholiques à l’effort de guerre, les messes dites pour le salut de la patrie, l’accentuation, en raison de l’épreuve, du retour à al foi d’une partie de la société commencé après 1905, provoquent ce quon a appelé le « Second Ralliement » des catholiques à la République, mieux réussi que le premier dans la mesure où il concerne la masse des fidèles et non une mince élite engagée en politique. Signe des temps, les catholiques n’apparaissent n’apparaisent plus en marge du régime et l’un des plus représentatifs d’entre eux, Denys-Cochin, devient en octobre 1915 ministre d’Etat dans le gouvernement Briand. Au demeurant, l’Union sacrée favorise cette réintégration des catholiques français dans la vie publique et celle-ci est assez profonde pour qu’en 1917 la mjorité des catholiques, français, évêques compris, se montre solidaire du reste de l’opinion en opposant un refus poli, des dérobades ou des interprétations fort éloignées des intentions initiales, à la note du pape Benoît XV favorable à une paix de compromis. Cette réinsertion de catholiques dans la société politique est encore accentuée par la constitution en 1919 du Bloc national, tentative de poursuite de l’Union sacrée du temps de guerre en pleine période de paix. Les catholiques sont membres à part entière de ce rassemblement et ils constituent le ciment du groupe de l’Entente républicaine démocratique, noayu dur du Bloc national ; c’est dur que le catholicisme rallié au régime renforce de manière spectaculaire la droite républicaine. Les catholiques sont donc désormais dans la République, et ce par la volonté du suffrage universel et comme résultat de l’Union sacrée. Qu’il s’agisse là d’un fait de longue durée et non d’un accident conjoncturel, on en a la preuve lorsque, les élections de 1924 ayant porté au pouvoir le Cartel des gauches, le gouvernement Herriot semble vouloir en revenir à la politique anticléricale en annonçant son intention d’étendre les lois laïques aux département recouvrés d’Alsace et de Moselle, qui vivent toujours sous le Concordat et de l’école confessionnelle, et de faire appliquer dans tout le pays les lois sur l’expulsion des congrégations non autorisées tombées en désuétude depuis la guerre. Cette intention ne soulève nul enthousiasme dans l’opinion de gauche, mais provoque en revanche un tollé dans le monde catholique. Encadrées par la Fédération nationale catholique, créée pour l’occasion avec l’appui de la hiérarchie par le général de Castelnau, de grandes manifestations populaires de protestations se déroulent dans le pays qui obligent la nouvelle majorité anticléricale à reculer. Pour l’essentiel, on assiste là à la dernière grande tentative anticléricale de l’histoire de la Troisième République. Il reste que si le fait d’être catholique ne constitue plus désormais une preuve d’hostilité au régime, les catholiques ne jouent qu’un rôle mineur dans la vie politique. Dans un système au sein duquel la légitimité se situe à gauche, les catholiques penchent en effet majoritairement à droite. Nombre d’entre eux, à commencer par le clergé, se sentent proches de l’Action française, c’est à dire qu’ils n’acceptent la République qu’en attendant une restauration plus conforme à leur culture politique. La grande majorité se reconnaît dans la Fédération républicaine, la plus à droite des formations qui accepte le régime, dont les dirigeants sont normalement écartés du pouvoir, sauf en cas d’union nationale. Seule une étroite minorité milite dans les rangs démocrates-chrétiens et se retrouve en 1924 au Parti démocrate-populaire (PDP) qui se situe au centre-droit de l’échiquier politique. Plus minoritaires encore, sont ceux, qui derrière Marc Sangnier, optent pour un catholicisme démocrate et socialement réformiste en adhérant à la Jeune République. Cette connotation à droite et le souvenir des luttes passées, qui placent les catholiques à la marge de la Réépublique, expliquent que rares sont les ministres ouvertement catholiques. Lorsque certains d’entre eux accèdent au pouvoir, c’est généralement dans des postes secondaires comme le ministre des Pensions ou celui des Travaux pulics et seulses quelques rares personnalités comme Auguste Champetier de Ribes ou Georges Pernot, accèdent au conseil des ministres. Et cependant, les années après la Première Guerre mondiale, sont, pour le catholicisme, celle d’une mutation en profondeur. D’aord parce que la reconquête de la société, entamée au début du siècle, progresse par de nouveaux canaux. Le syndicalisme chrétien, marqué par la naissance de la CFTC en 1919, témoigne d’une tentative de pénétration des principes chrétiens dans le monde ouvrier, en même temps que la volonté de proposer une solution inspirée par les valeurs du catholicisme des problèmes sociaux. Du même souci révêle la création, dans les années de l’entre-deux-guerres et sous l’influence du pape Pie XI, de l’Action catholique spécialisée fondée sur le postulat que l’évangélisation doit être adaptée aux divers milieux sociaux. En 1926, naît la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), qui s’affilie à l’Association catholique de la jeunesse française (ACFJ). Sur ce modèle, on voit se créer successivement une Jeunesse agricole chrétienne (JAC) en 1929, une Jeunesse étudiante (JEC) la même année, une Jeunesse maritime (JMC) en 1932, une Jeunesse indépendante qui concerne les milieux bourgeois en 1936. A cette volonté de pénétration de la société s’ajoute l’exploration de voies politiques nouvelles. En 1926, le pape Pie XI décide de publier la condamnation de l’Action française et des thèses de Maurras décidée en 1914. Il en résulte une crise très profonde qui atteint le clergé, les intellectuels et une partie des fidèles. Mais en définitive, en dépit de quelques résistances et d’un certain nombre de sanctions qui frappent des clers ou des laïcs récalcitrants, la grande masse des catholiques s’incline. L’Action française perd ainsi une grand part de son influence et le catholicisme français, libéré de ses liens avec l’extrême-droite, peut se retourner vers l’exploration de voies politiques nouvelles. De la condamnation de ses adversaires, la démocratie-chrétienne sort confortée. Et surtout, on voit débuter une réflexion, que nourira par exemple un penseur comme Maritain, qur la place des chrétiens dans la cité qui aoutit, à l’initiative du philosophe, à poser en principe la validité du pluralisme politique : si en matière religieuse le croyant doit agir en tant que chrétien (c’est à dire en se déterminant en fonction de ses valeurs) dans les autres circonstances, en particulier dans le domaine politique. Ce sont ces voies nouvelles que s’efforcent par exemple d’explorer dans la revue Esprit, à partir de 1932, les intellectuels rassemblés par Emmanuel Mounier. Le résultat de cette évolution de l’entre-deux-guerres est un incontestable rapprochement entre l’Eglise catholique et la République autour des valeurs humanistes et dans une commune hostilité aux totalitarismes qui les menacent, qu’il s’agisse du fascisme ou du communisme. Il est marqué par les distinctions accordées par le pape Pie XI à quelques unes des personnalités radicales qui dirigent la Répulique à la fin des années 1930, par les hommages rendus au pontife défunt en 1939 par Herriot et Daladier, et par l’apaisement du conflit larvé entre l’Eglise et l’Etat laïque à la veille de la guerre. Pour autant, rappelons-le, les lois laïques votées au début du siècle demeurent en vigueur sauf en Alsace et en Moselle, même si celles qui concernet l’interdiction en France des congrégations non autorisées, ne sont plus guère appliquées. Ce rraprochement entre l’Eglise catholique et l’Etat va se trouver accentué par la Seconde Guerre mondiale. CHOLVY (G.) et HILAIRE (Y.M.) : Histoire religieuse de la France contemporaine, 3 volumes, Toulouse, Privat, 1985-1988. LATREILLE (A.) et RÉMOND (R.) : Histoire du catholicisme en France, Paris, Spes, 1962. PREVOTAT (J.) : Les catholiques et l’Action française, Paris, fayard, 2001. RÉMOND (R.) : Histoire de la France religieuse, tome IV, Paris, Seuil, 1993. CAUDRON (Gaston), 1882-1925 : Ingénieur et aviateur. Né en 1882 à Favières (Somme), Gaston Caudron construit, dès 1908, avec son frère René, un planeur qui réussit plusieurs envois, remorqué par un cheval, et sert de point de départ à une série d’avions connus pour leur souplesse et leur stabilité, utilisés avec succès pendant la Première Guerre mondiale. Gaston Caudron se tue à Lyon en 1925 en expérimentant le premier des appareils puissants de bombardements. CAUDRON (René), 1884- : Ingénieur et aviateur. Né à Favière (Somme) en 1884, frère du précédent, René Gaston a continué, après la mort de ce dernier, entre autres, la construction d’appareils puissants destinés à l’armée et aux compagnies de transports aériens. CAULLERY (Maurice), 1868-19 : Naturaliste. Né à Bergues (Nord) en 1868, docteur ès sciences naturelles en 1895, Maurice Caullery a succédé à Giard, dans la chaire d’évolution des êtres organisés à la faculté des sciences de Paris. (1909), après avoir professé à Lyon et à Marseille. Les nombreux travaux de ce savant portent sur des chapîtres divers de la zoologie mais principalement sur les invertébrés. On lui doit des recherches spéciales sur le parasitisme, la sexualisté, l’influence des milieux, etc. En 1928, il dvient membre de l’académie des sciences en remplacement de Henneguy. La station zoologique de Wimereux et le laboraroire d’évolution des êtres organisés de la Sorbonne lui sont redevables de perfectionnements et d’améliorations. CAUTRU (Camille), 1879-1969 : Avocat et homme politique. Né à Lassy (Calvados), le 4 février 1879, Camille Cautru est le fils d’un agriculteur. Il est avocat lorsqu’il est élu député républicain indépendant. Spécialiste des questions agricoles, il fait un court passage dans le gouvernement Steeg comme sous-secrétaire d’Etat à l’Agriculture du 13 au 23 décembre 1930. Il décède à Rocques (Calvados), le 14 octobre 1969. CAUWÈS (Paul), 1843-1917 : Jurisconsulte. Né à Paris en 1843, archiviste-paléographe et agrégé des facultés de droit, Paul Cauwès est, en 1873, appelé à suppléer Batbie dans son cours d’économie politique à la faculté de Paris ; puis, il professe l’histoire du droit, et remplit les fonctions de doyen (1910-1913). Son plus important ouvrage est Cours d’économie politique (1892-1893 ; 4 volumes). Eclairé par l’histoire sur l’évolution des institutions, il base l’étude des questions économiques sur l’observation des faits. Il est l’un des fondateurs de la Revue d’économie politique et contribue à la création de l’association française pour la protection légale des travailleurs, dont il est le premier président. Il décède à Verailles en 1917. CAVAIGNAC (Jacques-Marie-Eugène-Godefroy), 1853-1905 : Homme politique. Né à Paris le 21 mai 1853, Cavaignac est le fils du chef du pouvoir exécutif de 1848 et petits-fils du régicide Cavaignac de Lalande. Après avoir pris part à la guerre de 1870, ce polytechnicien, déjà célèbre pour avoir refusé de recevoir son prix du concours général des mains du fils de Napoléon III est ingénieur des Ponts et chaussées puis maître des requêtes au Conseil d’Etat en juillet 1881. Elu député de Saint-Calais en 1882, il est, depuis lors, constamment réélu, et ne cesse de voter avec les républicains progressistes. Ce nationaliste très lié avec l’Etat-major militaire entre au gouvernement comme sous-secrétaire d’Etat à la Guerre du 18 avril 1885 au 6 janvier 1886 dans le premier ministère Brisson. Redevenu député à la chute du cabinet, il suit avec attention les dossiers militaires et maritimes. Nommé ministre de la Marine du 27 février au 8 mars 1892 puis ministre de la Marine et des Colonies du 8 mars au 12 juillet 1892 par Emile Loubet, il se fait l’avocat des opérations en cours au Soudan et au Dahomey. Il démissionne à la suite du vote du Parlement mettant les forces navales sous l’autorité de l’armée de terre dans ce dernier territoire. Homme de caractère, il est ministre de la Guerre au moment de l’affaire Dreyfus : du 1er novembre 1895 au 28 avril 1896 dans le ministère Bourgeois et du 28 juin au 5 septembre 1898 dans le second cabinet Brisson. Il s’occupe alors de la révision du procès. Au cours d’une séance à la Chambre, il affirme être convaincu de la culpabilité du capitaine Dreyfus en donnant lecture d’un document qui est reconnu ensuite comme un faux fabriqué par le colonel Henry. Cavaignac donne sa démission, en déclarant toutefois qu’il demeure convaincu de la culpabilité de Dreyfus. En 1899 , il est un des premiers adhérents à la Ligue de la Patrie française, et préside, à la Chambre, le groupe nationaliste parlementaire. Il est l’auteur d’un ouvrage sur la Formation de la Prusse contemporaine (1891-1898). Il décède à Flée (Sarthe), le 24 septembre 1905. CAVAIGNAC (Eugène), 1876-19 : Historien et professeur. Fils du précédent, né au Havre en 1876, Eugène Cavaignac est membre de l’Ecole d’Athènes (1903-1905). Auteur d’une Histoire financière d’Athènes (1909, thèse) ; d’une Histoire de l’Antiquité (1912), il dirige depuis 1919, avec un groupe de collaborateurs, une Histoire du monde. CAVALIER (Auguste-Henri), 1871-1945 : Journaliste. Né à Vacquières (Hérault) le 1er septembre 1871, défensur ardent du trône te de l’autel, Cavalier appartient depuis le 6 juillet 1904 à l’Association professionnelle de la presse catholique et monarchique des départements. Il fonde et dirige, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, l’agence de presse L’Intérêt français, qui fournissait des articles à la presse de droite principalement aux nombreux hebdomadaires et périodiques monarchistes paraissant en province entre les deux guerres. Il dirigeait, en outre, Le Semeur de l’Ile-de-France et était le rédacteur en chef de l’Office Central de Presse. Plusieurs de ses livres ont été largement diffusés en particulier : Les Rouges chrétiens (1928), écrit en collaboration avec P. de d’Halterive. Il est également l’auteur de Réflexions sur la presse et Mon curé à sa place, parus àprès la Première Guerre mondiale. Il décède à Loges-en-Josas (Seine-et-Oise) le 4 juillet 1945. CAYEUX (Lucien), 1864-19 : Géologue. Né à Semousies (Nord) en 1864, ancien élève de la faculté des sciences de Lille, Lucien Cayeux est l’élève de J. Gosselet et de Ch. Barrois, dont il a été le préparateur de l’Ecole des mines de 1887 à 1891. Il deviensuite préparateur à l’Ecole des mines de Paris, puis chef des travaux (1902) et, après avoir supplée Marcel Bertrand, professeur titulaire (1907-1912). En 1912, il est nommé professeur au Collège de France, où il a succédé à Fouqué et Michel-Levy. Il est également depuis 1901 professeur de géologie appliquée à l’agriculture à l’Institut national agronomique. Les premiers travaux de Lucien Cayeux sont relatifs à l’Etude micrographique des terrains sédimentaires (1897 ; ils lui valent le prix Vaillant décerné par l’Académie des sciences. Dans ce mémoire quil présente comme sujet de thèse de doctorat à la faculté des sciences de Paris, le jeune géologue affirme déjà sa maîtrise d’observation et on peut dire que cette étude des roches sillicieuses et de la craie du Bassin de Paris contribue pour beaucoup à la création d’une pétrographie nouvelle, celle des roches sédimentaires. Depuis cette date, Lucien Cayeux a publié des travaux sur toutes les branches de la géologie théorique et appliquée. Il a contribué à la création des cartes géologiques, et on lui doit au 1/80.000 les feuilles de Cambrai., d’Amiens, de Lille, d’Alès, ainsi que la carte géologique de l’île de Crète au 1/150.000 et celle de l’île de Délos au 1/10.000 . En 1923, l’Académie des sciences lui décerna le grand prix des sciences physiques et, en janvier 1928, il est élu membre de l’Académie des sciences en remplacement de Haug, décédé. CAZALIS (Henry), 1840-1909 : Médecin et poète. Né à Cormeilles-en-Parisis en 1840, Henry Cazalis a publié sous le pseudonyme de Jean Caselli : le Livre du néant (1872) ; Henry Regnault, sa vie et son œuvre (1872) ; et, sous le pseudonyme de Jean Lahor, L’Illusion (1875-1893), le plus remarquable de ses recueils poétiques, inspiré du pessimisme de l’Inde, et d’une forme parnassienne ; le Cantique des cantiques (1885) ; les Quatrains d’Al-Gazali (1896). On lui doit encore une remarquable Histoire de la littérature hindoue. Médecin et philanthrope, il a donné Science et mariage ; l’Art par le peuple et pour le peuple, et diverses publications sur l’Art nouveau. Il décède à Genève en 1909. CAZE (), 1839-1907 : Avocat et homme politique. Né à Toulouse (Haute-Garonne), le 16 septembre 1839, cet avocat, docteur en droit et député d’union républicaine, est nommé au gouvernement par Gambetta comme sous-secrétaire d’Etat à l’Agriculture du 14 novembre 1881 au 29 janvier 1882. Il est ensuite président de la Société nationale d’encouragement à l’Agriculture. Il décède à Toutens (Haute-Garonne) le 10 septembre 1907. CAZELLES (Emile-Honoré), 1831-1908 : Philosophe et administrateur. Né à Nîmes en 1831, reçu docteur en médecine en 1860, il s’adonne à l’étude des sciences biologiques et philosophique, et il a puissamment contribué à répandre en France les idées des écoles associationniste et évolutionniste en traduisant les œuvres capitales de l’école anglaise : la circulation de la vie de Moleschott ; la Philosophie de Hamilton, l’Assujettissement des femmes, Essais sur la religion, Mes Mémoires ; de Stuart Mill, les Sens et l’intelligence d’Alexandre Bain (1873) ; la Religion naturelle, d’après Bentham, George Grote (1875) ; Les Premiers principes, Principes de biologie, de Spencer (1878) ; Principes de sociologie (de Spencer). Républicain sous l’Empire, il est préfet, directeur au ministère de l’Intérieur (1879), et conseiller d’Etat. Il décède à Saint-Gilles-du-Gard en 1908. CAZEMAJOU (Gabriel-Marius), 1864-1898 : Officier et voyageur. Né à Marseille en 1864, Cazemajou fait en 1893 un voyage dans le sud de la Tunisie jusqu’aux environs de Ghadamès, et dirige en 1896 une expédition qui, du Niger, devait gagner le Tchad, puis l’Oubanghi et donner la main à la mission Marchand mais il est tué par l’émir de Zinder (Soudan central) en 1898. CAZENOVE DE PRADINES (Pierre-Marie-Edouard de), 1838-1896 : Homme politique. Né à Marmande en 1838, Cazenove de Pradines est secrétaire du comte de Chambord et s’engage en 1870 dans le corps de Charrette. Député du Lot-et-Garonne à l’Assemblée nationale, il se signale par l’ardeur de ses convictions catholiques et monarchiues. Non réélu en 1876, il revient en 1884 à la Chambre comme député de la Loire-Inférieure. Il décède au Pouliguen en 1896 CAZENOVE DE PRADINES (Pierre-Fortaner-Paul de), 1894-19 : Agriculteur. Né à Nantes (Loire-Inférieure) le 14 avril 1894, Pierre Cazenove de Pradines appartient à une famille originaire de la Guyenne, restée fidèle à la monarchie. Son grand-père, délégué du comte de Chambord etait député de légistimiste du Lot-et-Garonne (1884-1885) puis de la Loire-Inférieure (1885-1896). Pierre de Cazenove de Pradines était l’un des fondateurs de l’association de presse monarchique et catholique. Licencié en droit et diplômé de l’Ecole des sciences politiques, il se prépare à l’inspection des finances quand la Première Guerre mondiale vient perturber ses projets. Il part dès le début des hostilités et sert dans les dragons, puis dans l’aviation. Il démissionne de l’armée en 1923, s’adonne à l’agriculture en Loire-Inférieure et s’occupe des syndicats agricoles et des caisses rurales de la région. Militant royaliste, ardent propagandiste des idées maurassiennes, il est nommé, en octobre 1930, président de la Fédération de Paris et de la banlieue de la Ligue d’action française en remplacement de François de La Motte. Il appartenait également au comité de l’Association Marius Plateau. CAZIN (Achille-Auguste), 1832-1877 : Profeseur et physicien : Né à Perpignan en 1832, Cazin se livre à d’importantes recherches sur l’électricité, le magnétisme, la thermodynamique, la propriété thermique des gaz et des vapeurs, etc. Outre des mémoires, on lui doit : L’Etincelle électrique (1877) ; La Spectroscopie (1878) ; Traité théorique et pratique des piles électriques (1881). Il décède à Paris en 1877. CAZIN (Jean-Charles), 1841-1901 : Peintre : Né à Samer (Pas-de-Calais), après avoir voyagé en Europe, Cazin s’essaie à restaurer la peinture à la cire. C’est par ce procédé qu’il exécute Le Chantier (1876) ; La Fuite en Egypte (1877) et Le Voyage de Tobie (1878). En 1880, Cazin expose Ismaël et Agar ; Le Départ de Tobie, et La Terre. La Ville de Paris achète Soir de fête. En 1883, une petite toile qui représente la Chambre mortuaire de Gambetta fait sensation. Il poursuit ses évocations tendres et douces dans des paysages ou panneaux décoratifs. A l’exposition universelle de 1900, il envoie Mesnival, La Route royale, Temps couvert, Les Voyageurs, Crépuscule, L’Orage, Septembre, etc. Il décède au Lavadou (Var) en 1901. Sa femme, née Guillet, née à Paimboeuf en 1845, se fait remarquer comme peintre et sculpteur. Elle a fait une statue de son mari. Leur fils et élève, J.-M. Cazin, né à Paris en 1869, décédé en 1917 était graveur, céramiste, médailleur. CAZOT (Théodore-Joseph-Jules), 1821-1907 : Avocat et homme politique. Né à Alès (Gard), le 11 février 1821, Jules Cazot est avocat républicain, milite dans sa jeunesse dans le mouvement démocratique du Gard et prend position contre le coup d’Etat de 1851. Interné sous le Second Empire, il est ensuite professeur libre de droit à Paris, puis est nommé secrétaire général du ministre de l’Intérieur après le 4 septembre 1870. Il suit Gambetta en province et est élu député en 1871, dans le Gard. Sénateur inamovible en 1876, il devient ministre de la Justice du 28 décembre 1879 au 22 septembre 1880 dans le premier cabinet Freycinet et garde le même portefeuille du 23 septembre 1880 au 29 janvier 1882 dans le premier cabinet Ferry et le ministère Gambetta. Il entame une réforme de la magistrature destinée à la « mettre en harmonie avec [les] institutions républicaines que le pays s’est données ». Ainsi, selon lui, l’inamovibilité ne doit redevenir la règle qu’une foi « l’épuration » effectuée. En mars 1880, Cazot signe les fameux décrets contre les jésuites, qui ne laissent que trois mois aux congrégations non autorisées pour se mettre en conformité avec la loi, et défend leur égalité devant le Parlement. Il réclame ensuite en vain le vote de plusieurs textes restreignant la liberté de la presse, et s’oppose au rétablissement du divorce. Il lutte enfin pour conserver au ministre de la Justice la présidence du tribunal des conflits. A son départ du gouvernement, il est nommé premier président de la Cour de cassation. Après la faillite d’une société dont il est administrateur, il donne sa démission spontanément et reprend son siège au Sénat. Il meurt à La-Jasse-de-Bernard (Gard), le 27 novembre 1912. CÉARD (Henri), 1849-1919 : Écrivain. Né à Paris le 18 novembre 1851, Henri Céard n’embrasse pas immédiatement la carrière des lettres et devient tout d’abord employé au ministère de la Guerre, puis attaché au cabinet du préfet de la Seine. Toutefois, quand il est nommé, en 1883, sous-directeur de la bibliothèque de la Ville de Paris (Hôtel Carnavalet), il avait déjà débuté dans la carrière des lettres avec une nouvelle intitulée La Saignée, parue dans le fameux recueil Les Soirées de Médan, et publie un roman Une belle journée (1881). Un autre de ses romans paraît en 1906 : Terrains à vendre au bord de la mer. Disciple convaincu du naturalisme, séduit par la perspective de rénover la littérature dramatique, comme beaucoup d’écrivains de la même école, il doit, presque inévitablement se tourner vers le Théâtre libre qu’André Antoine inaugure le 30 mai 1887. En effet, il y fait représenter en 1886, Renée Mauperin, tirée du roman des Frères Goncourt, et dès 1889, sa production théâtrale presque toute entière passe dans ce théâtre, où il a, ainsi que Georges Ancey, le plus grand succès. Citons parmi es œuvres : Les Résignés (1889), Tout pour l’honneur (1890) et La Pêche (1890). Il collabore en outre à de nombreux journaux comme critique littéraire et dramatique. En 1919, il est élu membre de l’Académie Goncourt en remplacement de Jules Gautier. Il meurt à Paris le 16 août 1924. CELS-COUYBES (Jules), 1865-1938 : Professeur et homme politique. Né à Figeac (Lot) le 18 novembre 1865, fils d’une journalière, Marie Cels, Jules Cels, normalien, n’adopte de nom de son père nourricier qu’à partir de sa trente-quatrième année. Agrégé de mathématiques et docteur ès sciences, il enseigne au lycée Condorcet puis au Lycée Louis-le-Grand, mais le jeune professeur, attiré par pa la politique, se présente à Agen aux élections législatives de 1902 puis en 1906, sans succès. Affilié au Grand Orient de France, membre du parti radical socialiste, il trouve dans ces milieux des appuis qui lui permettent de triompher aux élections suivantes. Le 8 mai 1910, il est élu député d’Agen, sur un programme bien fait pour plaire aux petits contribuables : diminution de l’indemnité parlementaire, lutte contre le gaspillage, impôt sur le revenu, retraites ouvrière et paysanne. Il siège à la Chambre de 1910 à 1924 et de 1928 à 1932. Lié à Georges Leygues, il est nommé sous-secrétaire d’Etat à la Marine, chargé de la Marine de guerre du 17 novembre 1917 au 19 novembre 1918 dans le second cabinet Clemenceau. Il conduit alors la guerre sous-marine de main de maître et s’attire les félicitations du président du Conseil à ce sujet. Après l’armistice, il est nommé sous-secrétaire d’Etat aux Travaux publics, aux Transports et à la Marine marchande auprès de Claveille. Il meurt à Paris le 24 octobre 1938. CÉLINE (Louis-Ferdinand Destouches, dit), 1894-1961 : Ecrivain. Ferdinand Destouches est né le 27 mai 1894 à Courbevoie (Seine). Son père, travaille au sein d'une compagnie d'Assurances et sa mère comme marchande de dentelles. Après avoir obtenu son certificat d'études primaires le 21 juin 1907, ses parents décident de l’envoyer en Allemagne et en Angleterre pour apprendre les langues étrangères avant de se destiner à une carrière commerciale. C'est aussi l'époque où son père, que sa condition professionnelle au sein de la compagnie d'assurances rend aigri, marque l'enfant par ses prises de position antisémites. Fin août 1907, Louis part en Allemagne, à la Mittelschule de Diepholz (Hanovre). L'enfant écrit de longues lettres à ses parents dans lesquelles son souci de l'argent transparaît. A partir de février 1909, il est inscrit à l'University School de Rochester et, un mois plus tard, change pour Pierremont Hall à Broadstairs. Après son retour en France, en novembre 1909, Louis Destouches entame sa période d'apprentissage pour apprendre le métier de bijoutier. Le 21 septembre 1912, Louis Destouches devance l'appel et s'engage pour trois ans. C'est à Rambouillet, au 12e régiment de cuirassiers, qu'il effectue ses classes. Nommé Brigadier le 5 août 1913 puis Maréchal des Logis le 5 mai suivant, il partira en mission de reconnaissance avec le 12e cuirassiers dès la guerre déclarée. D'abord à Audun-le-Roman, en août, puis dans la région d'Armentières, au mois d'octobre, dans les Flandres, Louis Destouches connaît son baptême du feu. Volontaire pour assurer une liaison risquée dans le secteur de Poelkapelle, entre le 66e et le 125e régiments d'infanterie, il est blessé par balle au bras droit. Louis Destouches restera, à cause des séquelles de cette blessure, invalide à 70 pour cent. En mai, il est affecté au consulat général de France à Londres, au service des passeports. Il est réformé le 2 février 1915. En mars 1916, Louis Destouches est engagé comme « surveillant de plantation » par la compagnie forestière Sangha-Oubangui et il part en Afrique. Au bout de huit mois, il rompt son contrat et, en février 1917, il regagne Douala pour y être hospitalisé à la suite de crises de dysenterie. Le 10 mars, il réintègre le domicile de ses parents. Cette période passée en Afrique a permis à Louis Destouches de faire ses premiers essais littéraires (la nouvelle intitulée Des Vagues). En septembre, il travaille avec Raoul Marquis, dit Henry de Graffigny (Courtial des Pereires dans Mort à crédit), directeur d'Euréka, une revue scientifique. Louis Destouches y signera la traduction d'un article de l'anglais en février 1918. En novembre Louis Destouches prépare le baccalauréat, dont il obtient les deux parties en avril et juillet 1919. Louis s'inscrit à l'école de médecine à partir de 1920. Poursuivant ses études dans la capitale, il soutient sa thèse le 1er mai 1924, travail consacré au hongrois Philippe Ignace Semmelweis, précurseur dans la lutte contre l'infection puerpérale. Dès le 27 juin, Louis Destouches entre à la Société des Nations. Il est nommé à Genève pour trois ans et accomplit des missions aux Etat-sUnis, à Cuba, au Canada et en Angleterre, en Afrique. Ces différents voyages l'obligent à délaisser sa vie de couple et divorce le 21 juin 1926. Louis Destouches commence la rédaction de L'Église. A Genève, il rencontre une danseuse américaine de 23 ans, Elisabeth Craig. Louis Destouches passe l'été 1927 à Paris et rédige Périclès, qui deviendra Progrès. Il ouvre un cabinet médical à Clichy. Le jeune médecin est alors nommé comme vacataire au dispensaire de Clichy. Parallèlement à son activité médicale, il se lance dans l’écriture et, au printemps 1931, sous le pseudonyme Céline, publie son premier roman Voyage au bout de la nuit qui obtient le prix Renaudot en 1932. Céline entame la rédaction de Mort à crédit. Mis en vente le 12 mai 1936, le roman devient l'objet d'un véritable scandale. La critique le blesse ou l'ignore et il en est très affecté. Fin juillet, Céline part en URSS jusqu'en septembre et publie Mea Culpa en décembre, violent pamphlet anticommuniste. Ses œuvres transposent les diverses phases de la vie de l’auteur et les expériences qu’il a vécues. Mais il les conçoit nullement comme des œuvres-témoignages, mais comm des récits destinés à transmettre des émotions qu’il a vécues, les sensations qu’il a éprouvées, les fantasmes qu’il a partagés. Son œuvre est dominée par l’obsession de la mort qui engendre chez lui un certain pessimisme, mais c’est par la dérision qu’il exprime son désespoir, le traduisant par un langage dégagé des normes classiques du style romanesque. Début 1937, Céline entame la rédaction de Casse-pipe, très vite abandonnée au profit de Bagatelles pour un massacre, pamphlet publié en décembre. Les polémiques sont instantanées, même si l'accueil reste plutôt tolérant. Céline démissionne du dispensaire de Clichy et, en 1938, compose un nouveau pamphlet pacifiste et antisémite, L'Ecole des cadavres. En mai 1939, le décret Marchandeau oblige Denoël à retirer de la vente ces deux pamphlets, dans lesquels Céline donne libre cours à un véritable délire dans sa dénonciation du « péril juif ». Céline est exclu de la vie littéraire. En septembre, il ouvre un cabinet à Saint-Germain en Laye. Après la défaite, Céline écrit Notre Dame de la débinette, publié en février 1941 sous le titre Les beaux draps. A partir de 1942, il cesse ses interventions publiques, écrit Scandale aux Abysses et l'essentiel de Guignol's Band. Le couple Destouches quitte Paris en juin 1944. Il gagne d’abord l’Allemagne puis le Danemark. Recherché, il est immédiatement écroué, et incarcéré. Le 25 avril 1951, le tribunal militaire de Paris ordonne l'amnisitie de Louis Destouches et rentre en France passant les dernières années de sa vie à Meudon. Il reprend son œuvre littéraire en évoquant son expérience de la Seconde Guerre mondiale dans la rédaction D'un château l'autre et Rigodon. Le 1er juillet, Louis-Ferdinand Céline meurt d'une rupture d'anévrisme. ALMERAS (P.) : Céline : entre haines et passion, Paris, Ed. Robert Laffont, 1993. GIBAULT (F.) : Céline, Paris, Ed. Mercure de France (3 tomes). MURAY (P.) : Céline, Seuil, Paris, 1981 (réédition chez Gallimard, 2001). VITROUX (F.) : Céline, Paris, Belfond, 1987. VITROUX (F.) : La Vie de Céline, Paris, Ed. Grasset, 1988. CENDRARS (Frédéric Sauser-Hall, dit Blaise), 1887-1961 : Ecrivain. Blaise Cendrars est né à la Chaux-de-Fonds (Suisse) le 1er septembre 1887 est l’écrivain victime de la légende qu’il a lui-même créée et que ses amis, ses crtiques ont enrichies : légende de l’homme d’action , de l’aventurier épris de la vie, et de la vie dangereuse, dédaigneux de l’art et des artistes, n’aimant rien que tant que bourlinguer et ne détestant rien qu’écrire Bourlinguer. Or cet homme qui refuse d’être homme de lettres a beaucoup écrit et continûment ; mais ses déclarations d’hostilité à la littérature et l’apparance autobiographique de son oeuv re ont pu faire que l’homme éclipse l’écrivain. Si Cendrars a Bourlingué, c’est bien plus dans les livres et les rêves que sur les mers du monde, et, solitaire touché par l’étoile de la Mélancolie, il a trouvé dans l’imaginaire son royaume. Cendrars entre en littérature avec Les Pacques à New-York en 1912, La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France en 1913, Le Panama, où les Aventures de mes sept oncles , achevé en 1914 et publié en 1918, qui font de lui, aux côtés d’Apollinaire, un grand poète de l’esprit nouveau. Il rejette le cadre étroit du poème court et sa structure statique pour dérouler un long courant de poésie ininterrompue, dynanmique, qui épouse un mouvement : marche du poète désespéré dans les rues de New-York, avancement monotone du train qui emporte le poète, « triste comme un efant » à travers les grandes plaines sibériennes, voyages aux quatre coins du monde du poète multiplié par ses oncles atteints comme lui du mal du pays. Déjà l’aventure est intérieure et plus douloureuse qu’exaltante La marche vaine du poète-Christ dans Les Pâcques est l’image même de sa Passion sans grand espoir de resurrection ; le voyage désenchanté - et imaginaire – du Transsibérien conduit allégoriquement le poète du « lieu de (sa) naissace » au « débarcadère » de la mort ; et si les lettres imaginaires de ses sept oncles lui ouvrent l’univers, c’est à la Mère, centre fixe vers lequel tout converge, que nous ramène constamment le refrain nostaligique : « la tistesse et le mal du pays ». En 1914, Cendrars est engagé volontaire étranger das l’armée française : en septembre 1915, un obus lui emporte le bras droit. Ce drame de la mutilation, longtemps l’œuvre le passe sous silenceen même temps qu’elle se dépersonnalise e se durcit. Cendrars découpe das l’œuvre d’un autre – Gustave Lerouge – ses Documentaires (1924). L’aveu lyrique cesse subitement. Le poète revient au poème court, volontairement apoétique, photographie verbale d’un fragment de réalité, où le « Je » n’est plus que spectateur distant et comme absent de lui-même (Le Formose, 1924). De 1915 à 1926, Cendrars se retire de son œuvre. Il se fait critique d’art et compilateur (Anthologie nègre, 1921) ; il s’évade dans la fable (La Fin du monde, 1919 ; L’Eubage, 1926). L’Or (1925), son premier roman, participe encore de cette volonté de neutralité ; pas d’intervention de l’auteur dans le récit, pas d’élément décoratif, une concision qui ne laisse subsister que le pur schém de l’action, dont l’emploi permanent du présent de l’indicatif impose la présence brute et immédiate, Moravagine (1926), grand roman surréaliste, où l’irrationnel s’exespère dans la violence sanglante, la révolution, la vie sauvage, la guerre, la folie, brise avec éclat l’impersonnalité des années précédentes. Le narrateur y parle à la première personne et un jeu complexe de miroirs multiplie les reflets de l’auteur : « On n’écrit que soi. » L’œuvre romanesque n’est qu ‘une autobiographie déguisée, mais où le fonctionnement d’un univers fictif intéresse autant Cendrars que la recherche et la révélation de soi sous le masque de la fiction : « Je suis l’Autre, l’homme qui écrit. » Il meurt à Paris le 20 janvier 1961 CENSURE : CENTRE (Le) : Quotidien de Montluçon fondé en 1872 par Alfred-Hippolyte Crépin-Leblond. D’abord bonapartiste et commandité ou subventionné par les industriels Duchet et Mony et par le financier Edouard Fould, il se fait républicain libéral avec après l’évolution de la bourgeoisie bourbonnaise. Le Centre sera suspendu et interdit le 21 août 1944. CENTRE, CENTRISME : CENTRE DE DIFFUSION FRANÇAISE : Organisme officieux crée en 1937 pour répandre les idées démocratiques françaises et contrecarrer à l’étranger les effets de la propagande hostile à la France. Raymond Offroy, ambassadeur de France, est chargé de la direction, secondé par Michel Gorlin. CENTRE DE LIAISON CONTRE LA GUERRE : Organisme pacifiste crée lors de la crise internationale de 1938. Il groupe : le Centre syndical d’action contre la guerre, le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, la Solidarité internationale antifasciste, le Parti socialiste ouvrier et Paysan (de Marceau Pivert), des mouvements trotskystes, etc. Il disparaît pendant la Seconde Guerre mondiale. CERCLE D’ÉTUDES POLITIQUES : Le Cercle d’études politiues a été crée au printemps 1927 par une équipe de jeunes gens réunis autour de Pierre Auscher – un ancien de la Jeune France républicaine -, Pierre Blanchet et Jean-Charles Legrand. L’objectif de ce petit groupe, proche de l’aile gauche de l’Alliance démocratique, est d’œuvrer à la constitution d’un « parti central », et de faciliter les échanges entre les jaunes modérés et la nébuleuse des « Jeunes équipes ». Le Cercle a bénéficié de l’appui d’un certain nombre de personnalités liées à l’Alliance démocratique comme l’ancien ministre Yves le Trocquer et dans un second temps, semble-t-il, l’ancien et futur ministre Pierre-Etienne Flandin. A partir du tournant des années vingt et des années trente, le Cercle d’études politiques est devenu l’un des principaux points d’appui du courant « flandiniste » à l’intérieur de l’Alliance. A ce titre, il a été l’un des viviers de la Jeunsesse républicaine française, organisation nationale des jeunes de l’Alliance démocratiques, née en 1934. CERCLE FUSTEL DE COULANGES : Groupement d’universitaires fondé en 1928 par le monarchiste Henri Boegner. Plusieurs centaines de professeurs ont adhéré au Cercle au cours des années 1928-1940 et beaucoup ont renouvelé leur adhésion après la Libération. CERCLE DU GRAND PAVOIS : Cercle politique autant que mondain fondé en 1937 par Bertrand de Jouvenel et Georges Suarez avec, comme animateur, Jean Lestandi. CERFBERR (Anatole), 1835-1896 : Littérateur. Né à Paris en 1835, Anatole Cerfberr a collaboré à un nombre considérable de journaux. Admirateur passionné de Balzac et de Victor Hugo, encyclopédie vivante en matière dramatique, il écrit d’un style bizarre. On lui doit un précieux Répertoire de la « Comédie humaine » de Henri de Balzac (1887), avec Christophe. Il décède à Neuilly en 1896. CERFBERR (Gaston), 1858-19 : Littérateur. Né à Paris en 1858, il publie plusieurs ouvrages techniques et documentaires, le Dictionnaire de la Boulangerie (1898) ; Jeux, Sports et Grands Matches (1904) ; L’Architecture en France, qu’il signe : Cerfberr de Medelsheim (1883) ; des Souvenirs de la Révolution française et de l’Empire (1897) ; des romans, des nouvelles, des livres à l’usage de la jeunesse, dont plusieurs ont été illustrés par lui. Il a composé aussi des comédies, des livres, etc. CERNY (Berthe de Choudun, dite), 1868-19 : Actrice. Née à Paris en 1868, Berthe de Choudun débute à l’Odéon en 1885, joue sur les principales scènes parisiennes, et entre en 1906 à la Comédie-Française, dont elle devient secrétaire en 1909. Comédienne au jeu très fin. CES-CAUPENNE (Alfred de), 1832-1892 : Né à Paris le 17 février 1832, après un long séjour en Algérie et en Afrique, Alfred de Ces-Caupenne publie plusieurs ouvrages sur le " Continent Noir " qui lui valent la Légion d’honneur. De retour dans les Landes, il est élu au conseil général en 1871 et y reste jusqu’à sa mort, en devenant vice-président en 1881 et président en 1889. En 1887, il est élu sénateur des Landes et réélu l’année suivante : il est le premier sénateur républicain des Landes, siégeant toujours à gauche. Il décède à Caupenne, 17 janvier 1892. CESBRON (Achille-Théodore), 1850-1913 : Peintre. Né à Oran en 1850, élève de Bonnat et de Cormon, Achille Cesbron s’est acquis par ses petites toiles représentant des fleurs et des natures mortes une réputation méritée. Il a surtout traité les fleurs avec une variété et une délicatesse de tons très remarquables. Citons : Fruits et Fleurs ; Légumes (1879) ; Les Roses (1881) ; Pivoines herbacées (1882) ; Les Puits aux roses (1885) ; etc. Il décède à Paris en 1913. CÉZANNE (Paul), 1839-1906 : Peintre. Né à Aix-en-Provence, le 19 janvier 1839, Cézanne est né dans une famille aisée (son père est banquier à Aix) et fréquente le Collège Bourbon (devenu Collège Mignet), où il se lie avec Émile Zola. Il entreprend sans enthousiasme des études de droit à l'Université d'Aix. Il suit des cours à l'École de Dessin et aménage un atelier au Jas de Bouffan, résidence que son père a achetée. Il part une première fois à Paris, poussé par son ami Zola, mais n'y reste que quelques mois et retourne dans le domaine familial. Dans la capitale, il rencontre Achille Emperaire, un autre Aixois, dont il fera plus tard le portrait, resté célèbre. En 1862, il abandonne la carrière juridique et repart à Paris. Il travaille à l'Académie Suisse et y rencontre Camille Pissarro, Pierre-Auguste Renoir, Claude Monet et Alfred Sisley. Il est refusé à l'École des Beaux-Arts en raison d'un tempérament jugé trop excessif. Durant l'année 1869, il rencontre Hortense Fiquet avec qui il aura un fils. Il cachera cette liaison à son père durant toute la vie de ce dernier. Il ne l'épousera d'ailleurs qu'en 1886, l'année de la mort de son père. Il s'installe à L'Estaque, petit village sur la côte, lorsqu'il n'est pas dans la capitale En 1872, il s'installe à Auvers-sur-Oise, où il peint avec Pissarro, et travaille dans la maison du docteur Gachet. En 1874, les impressionnistes organisent leur première exposition collective dans l'atelier du photographe Nadar et le public réserve un accueil peu encourageant, voire scandalisé, aux toiles de Cézanne qui en présente trois (Une moderne Olympia, La Maison du pendu et Étude, paysage d'Auvers). Il ne présente aucun tableau au cours de la seconde exposition impressionniste, mais montre 16 œuvres en 1877 à la troisième manifestation. Les critiques sont très mitigées et il se détache du groupe impressionniste et rejoint la Provence à partir de 1882, d'abord à L'Estaque, puis à Gardanne en 1885, petit village près d'Aix. Là, il commence son cycle de peintures sur la Montagne Sainte-Victoire, qu'il représente dans près de 80 œuvres (pour moitié à l'aquarelle). Sa situation financière reste précaire, d'autant que son père diminue son soutien. En 1886, il rompt avec Zola qui lui a envoyé son roman L'Œuvre, dont le peintre est l'inspirateur. La même année, son père meurt, lui laissant un héritage confortable le mettant à l'abri financièrement. Sa première exposition personnelle, organisée par le marchand de tableau Ambroise Vollard en 1895 en l'absence du peintre, se heurte encore à l'incompréhension du public, mais lui vaut l'estime des artistes. Sa renommée devient internationale et il remporte à Bruxelles un grand succès lors des expositions des Indépendants. Il se fait construire en 1901 un atelier dans la périphérie d'Aix : l'atelier des Lauves. Le 22 octobre 1906, une pneumonie l'emporte, dans sa maison de la rue Boulegon, à Aix-en-Provence. CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens) : La situation des travailleurs penadant les premières années de la Troisième République est assez catastrophique et il faut attendre 1884 pour que les syndicats soient enfin autorisés (Loi Waldeck-Rousseau). Le syndicalisme chrétien peut alors naître. Ce qu'il fait en 1887, à l'initiative d'employés parisiens, encadrés et groupés autour d'un frère des écoles chrétiennes, le Frère Hiéron. Face aux syndicats dominés par l'idéologie marxiste de la lutte des classes, les militants chrétiens cherchent à faire passer leurs idées en toute indépendance. Ils fondèrent le SECI, Syndicat des employés du commerce et interprofessionnels. Cette création, antérieure à la publication de la première lettre encyclique du pape Léon XIII Rerum Novarum sur la condition des ouvriers (1891), se situe dans la ligne de pensée et d'action des catholiques sociaux qui, tout au long du XIXème siècle ont dénoncé la misère ouvrière et le désordre de la société. En 1919, les deux principaux syndicats chrétiens, la Fédération des syndicats féminins et le syndicats des employés du commerce et de l’industrie sentirent la nécessité d'une coordination et décidèrent de créer la Confédération française des Travailleurs chrétiens (CFTC). Jules Zirnheld en est le premier président, poste qu'il occupera jusqu'en 1940, accompagné de Gaston Tessier, premier secrétaire. La CFTC regroupe, à l'origine, 321 syndicats soit environ 150.000 membres pour la plupart recrutés dans les catégories de salariés les plus proches des classes moyennes et trouvant l’essentiel de son audience dans les régions à forte tendance religieuse. Si elle se réfère à l'encyclique Rerum Novarum, elle retient cependant le principe de l'élargissement du recrutement à tous les travailleurs acceptant d'appliquer les idéaux de la morale sociale chrétienne. Elle rejette la lutte des classes et souhaite la collaboration du capital et du travail. La CFTC poursuit l'oeuvre des premiers syndicats, en développant les bureaux de placement, les services juridiques, les caisses d'entr'aide et les services sociaux. En 1920, elle adhère à la Confédération internationale des syndicats chrétiens. En France, elle fait reconnaître sa représentativité. Dans l'entre-deux-guerres, contrairement à ses idées, la CFTC mène des grèves et des luttes ouvrières assez rudes, essentiellement dans le Nord. En 1924, un patron catholique de la même région est obligé de déposer plainte contre la CFTC auprès du pape XI qui approuve, en général, l’action de la CFTC. Sous le Front populaire, le syndicalisme allait être tiraillé entre deux tendances principales : le syndicat instrument de la révolution politique ou bien le syndicat fer de lance pour transformer la société. La première tendance se définit parfois comme révolutionnaire, la seconde est réformiste. La première est celle de la CGT, la seconde, celle de la CFTC. Les deux confédérations s'opposeront violemment pendant les grèves de 1936 et la CFTC est exclue lors de la négociation des Accords Matignon sur ordre de la CGT qui n’approuve pas la doctrine réformiste de la CFTC. En effet, le « Plan CFTC » proposait ue intervention de l’Etat pour créer une législation sociale protectrice de la famille avec un salaire minimum, des allocations familiales, la réduction de la durée du travail, des logements sociaux, les conventions collectives, etc. Pour lutter contre la crise, elle préconise une gestion tripartite (Etat, employeurs, travailleurs, usagers) des services d’intérêts publics : crédits, assurances, forces motrices, transports, marine de commerce, hygiène et tourisme. Elle propose également une réforme de l’entreprise dans laquelle le travail serait associé, aux côtés du capital, à la gestion et aux profits. Mais pour l’essentiel, elle défend l'indépendance syndicale et la liberté du travail. Ces propositions ont peu de chance d’intéresser les monde politique et, à la veille de la guerre de 1939-1940, la CFTC rassemblait 2.300 syndicats soit 500.000 adhérents. Le 9 novembre 1940, un décret signé par le ministre de la Production industrielle et syndicaliste René Belin dissout les confédérations syndicales patronales et ouvrières dont la CFTC. LAUNAY (M.) : Le syndicalisme chrétien en France, de 1885 à nos jours, Paris, desclée, 1984. LEFRANC (G.) : Le syndicalise en France, Paris, PUF, 1964. LAUNAY (M.) : La CFTC, Origines et dveloppement, Paris, Publications de la Sorbonne, 1987. CGPF (Confédération générale de la Production française puis Confédération générale du Patronat français) : Créée en 1919, la Confédération générale de la production française (CGPF) est, en partie, la résultante d’une impulsion du gouvernement désireux de voir se créer une organisation représentative des employeurs. La guerre de 1914 entraîne indirectement le renforcement de ce mouvement de syndicalisation dans les milieux patronaux. Pour organiser la production plus efficacement en vue de l’effort de guerre, le gouvernement, plus précisément le ministre du Commerce et de l’Industrie Etienne Clémentel (octobre 1916 à janvier 1920) sollicite le concours des organisations professionnelles tant patronales qu’ouvrières et du coup leur confère un surcroît d’autorité, ou, comme on allait bientôt dire, de « représentativité ». Il reconnaît en elles des institutions naturelles et légitimes du corps social, des rouages indispensables de la grande machinerie économique et sociale. Toutefois, on ne discerne pas vraiment ni durant les années de guerre, ni au lendemain de l’armistice, dans les milieux patronaux, même dans le patronat déjà organisé, de tendances très nettes et très fortes en vue d’établir une coopération autre qu’épisodique et en cas de besoin entre les différents groupements professionnels, de les réunir tous, de les fédérer de façon organique et permanente. Clémentel obtient alors que les Chambres patronales existant sur le territoire national se réunissent par affinités professionnelles. Ainsi se constituèrent, entre février et avril 1919, vingt et un groupes professionnels, les réunions constitutives de ces groupes s’étant presque toutes tenues au ministère du Commerce, avec l’arbitrage du ministre. Reste à fédérer ces groupes. Une assemblée générale de leurs représentants, convoquée le 1er juillet, adopte les statuts d’une union générale qui prend le nom de Confédération générale de la Production française. L’objet de la Confédération est défini dans l’article 4 et reste ambigu : « La Confédération a pour objet essentiel d’étudier et de défendre les intérêts du travail national, de contribuer au développement de la puissance de production et d’exportation de la France, de coordonner les efforts des syndicats et associations professionnels. » D’une part, certains patrons y voient surtout un moyen d’éviter toute concurrence en favorisant les ententes entre producteurs ou de résister en commun aux revendications ouvrières, d’autre part, certains considérant au contraire qu’elle constitue un instrument de rationalisation et de modernisation de la production en évitant les crises. Dans ces deux cas, la CGPF n’intéresse que les grandes entreprises représentant les mines, la chimie ou les les industrie lourdes. Comme le donne à entendre le mot production inscrit dans le titre, la vocation de la Confédération est essentiellement économique. Sans doute se préoccupe-t-elle de la défense du “ travail national ”, mais l’expression n’avait pas alors le sens qu’elle prendra une douzaine d’années plus tard, quand on parlera de protéger “ le travail national ”, c’est-à-dire ici la main-d’œuvre française, contre la concurrence excessive, non de la main-d’œuvre étrangère proprement dite, mais de la main-d’œuvre immigrée. La CGPF est en gros fidèle à ce programme et elle intervint surtout dans les questions économiques, notamment en matière de fiscalité, de monnaie, de droits de douane, etc. Mais elle ne peut longtemps se retenir de faire connaître aussi son point de vue en matière sociale, d’abord parce qu’il n’est guère de questions économiques qui ne comportent pas d’implications sociales, ensuite parce que son délégué à la Conférence internationale du travail devait se prononcer au nom du patronat français sur différents sujets de législation sociale internationale, enfin parce que les institutions sociales qui se mettaient progressivement en place dans cette période, le Conseil national économique, le Conseil national de la main-d’œuvre, les assurances sociales et les allocations familiales appelaient le concours des organisations patronales. C’est ainsi que, pour “ rationaliser son action ”, la CGPF crée en son sein, outre une Commission économique et une autre dite de l’organisation scientifique du Travail, une Commission des questions sociales et qu’elle fonda, à côté de ces commissions, des organisations autonomes mais travaillant avec elle en contact intime » notamment un Comité central des Assurances sociales, un Comité central des Allocations familiales, une Association d’hygiène industrielle. Toutefois, sa vocation principale demeure économique et jusqu’en 1936, la CGPF reste le porte-parole des grands milieux d’affaires organisés, l’institution qui définit, face aux pouvoirs publics avec lesquels elle négocie, la politique du patronat français. Il faut attendre les événements de mai et juin 1936, pour qu’elle accordât désormais dans son action autant de place au « social » qu’à l’économique et aussi pour qu’elle attire sur elle l’attention de l’opinion qui jusqu’alors ne la distinguait guère des chambres de commerce. En effet, les grêves de 1936 et les Accords Matignon vont représenter pour la CGPF une très grâve crise. Son président, Duchemin, négocie avec la CGT, sous l’arbitrage du gouvernement, la fin des grèves moyennant des augmentations de salaires, la généralisation des conventions collectives et les droits syndicaux dans l’entreprise. Les conditions sont acceptées malgré tout par les grandes entreprises que gèrent la CGPF, mais intolérables aux yeux des petits patrons pour qui ses accords les mettent dans sune situation difficile. Les conséquences sont terribles puisque ces derniers accusent les grandes entreprises de les avoir sacrifiés et d’avoir trop facilement cédé à la pression syndicale. De crainte de voir se créer une organisation rivale, la CGPF se transforme en modifiant ses structures pour pour permettre aux petites entreprises d’âtres représentées dans ces instances dirigeantes. Le président de la CGPF Duchemin est obligé de démissionner et se voit remplacer par Claude-Joseph Gignoux. Sans changer le sigle, la CGPF prend désormais le nom de Confédération générale du Patronat français. Gravement touchée par les grèves de 1936, elle prend sa revanche dans l’échèc de la grève générale de 1938 soutant le gouvernement à la résistance. Le 9 novembre 1940, un décret signé par le ministre de la Production industrielle et syndicaliste René Belin dissout les confédérations syndicales patronales et ouvrières dont la CGPF. (René P. DUCHEMIN : Organisation syndicale patronale en France, Paris, 1940. EHRMANN (W.) : La politique du patronat français (1936-1955), Paris, A. Colin, 1959. CGT (Confédération générale du travail) : Face à la structuration du patronat, les premières organisations ouvrières se mettent en place. Les congrès qui se succèdent vont voir apparaître différents courants dans une période marquée par des grèves et la répression. La fondation de la Confédération générale du travail (CGT) au congrès de Limoges le 23 septembre 1895 repose à la fois sur un processus unitaire, les principaux piliers en sont la fédération du livre et celle des cheminots, mais de nombreux métiers restent hors de la CGT. En 1900, la CGT crée son propre journal la voix du peuple. Jusqu'en 1902, l'échelon confédéral reste mal organisé et ses secrétaires généraux pas à la hauteur. L'année marque l'ouverture d'une nouvelle période dans la vie de la CGT. Au congrès de Montpellier, elle parachève son unité. Cette unité réalisée constitue un pôle d'attraction pour beaucoup d'organisations restées jusque-là dans l'expectative. Le syndicat se structure avec l'action d'hommes, syndicalistes de formation anarchiste, disciples de Fernand Pelloutier, mort en 1901 comme Victor Griffuelhes et Émile Pouget. La CGT compte alors 100 000 adhérents. Se pose alors le principe d’une double organisation, professionnelle et géographique, la première étant représentée par les Fédérations nationales d’industries ou de métiers, la seconde par les Bourses du Travail, considérées comme unions régionales, départementales ou locales de la CGT. La Fédération des bourses s'efface en tant que centrale et ses organisations s'intègrent dans la CGT. La grève générale, l'autonomie syndicale et le syndicalisme de métier constituent les trois pans de la CGT. En 1906, la Charte d'Amiens, adoptée en congrès, donne au syndicalisme confédéral quelques uns de ses traits spécifiques : la lutte des classes, la lutte quotidienne pour des améliorations immédiates mais aussi la lutte pour la disparition du salariat et du patronat, ainsi que son indépendance vis-à-vis des organisations politiques. Lors du congrès, les guesdistes sont mis en minorité par les révolutionnaires et les réformistes. Le congrès rompt également avec la Fédération Syndicale Internationale. De 1901 à 1909, le secrétaire général de la CGT, Victor Griffuelhes, s’efforce de mettre en pratique les ides rvolutionnaires en pratiquant l’ « action directe », c’est à dire l’organisation de boycotts, des sabotages et surtout de grèves répétées, préparatoires à la gève génrale révolutionnaire annonçant le « grand soir » de la fin de l’Etat bourgeois. La première journée d'action pour la journée de 8 heures le 1er mai se prolonge par des grèves tout au long du mois; la revendication n'est pas satisfaisaite, mais cette première action concertée au niveau national à un grand écho. En 1907, la Fédération Nationale des Syndicats d'Instituteurs adhère à la CGT suivie en 1908 de la Fédération des Mineurs. En 1909, Victor Griffuelhes démissionne. Durant son court intérim, Louis Niel renoue les liens avec la Fédération Syndicale Internationale, mais il doit démissionner sous la pression des révolutionnaires. Cette orientation ne sera pas remise en cause par son successeur, Léon Jouhaux, proche des dits révolutionnaires, mais qui saura tracer progressivement sa propre voie. Le 5 octobre, paraît le premier numéro de la Vie ouvrière, qui se définit comme « syndicaliste Révolutionnaire, antiparlementaire ». La revue est dirigée par Pierre Monatte. C'est l'ancêtre de la Nouvelle Vie Ouvrière (NVO) qui est toujours la revue de la CGT. Bien que demandée au congrès de 1895, la CGT s'oppose à la loi sur les retraites ouvrières et paysannes à son congrès de 1910 par 1049 voix contre 251. Les révolutionnaires veulent abattre l'État, non qu'il soit social. L'âge de la retraite étant fixé à 65 ans quand l'espérance de vie est de 50 ans, la CGT parle de la « retraite des morts ». On critique également sa gestion par capitalisation. L’échec des grèves de 1906-1910 pousse Léon Jouhaux à abandonner la perspective révolutionnaire immédiate pour s’en tenir à des actions réformistes. En 1912, La CGT est la seule confédération syndicale existante et compte 700.000 adhérents sur un total de 7 millions de salariés. Le 24 novembre, elle tient un congrès extraordinaire sur le thème de l'action préventive contre la guerre. La CGT qui se veut antimilitariste, la guerre va constituer pour elle un profond traumatisme. Fin juillet 1914, après avoir organisé des manifestations syndicales contre la guerre, elle se rallie le 4 août, à l'Union sacrée. Jouhaux en tête, acceptant de collaborer avec le gouvernement apprès avoir lutté contre. Lors du congrès de la CGT, tenu du 26 novembre au 5 décembre 1914, seule une minorité se prononce contre la guerre et le secrétaire de la Fédération des métaux, Merrheim considère comme une trahison cette collaboration des classes et cette participation à l’Union sacrée. En 1915, viennent se rajouter la démission de Pierre Monatte, le 3 janvier et la protestation des syndicalistes disciples de Lénine qui entendent lier le syndicat au parti révolutionnaireen protestation contre le ralliement de la CGT à l'Union Sacrée. Ainsi, la guerre fait chuter les effectifs à 50.000 adhérents. De 1917 à 1919, les grèves se multiplient et les effectifes de la CGT passent de 300.000 à 1 million et demi d'adhérents. Après les grandes grèves de 1920, la grève des cheminots pour la nationalisation des chemins de fer sera un échec. Suite à ce mouvement, la 11e chambre du tribunal correctionnel ordonnera même le 13 janvier 1921 la dissolution de la CGT, sanction qui ne sera jamais appliquée. Contrecoup des échecs (et de certains acquis sociaux ?), les effectifs repassent à 700 000. En mai, la CGT reçoît l'adhésion de la Fédération des Employés de l'État. Après le Congrès de Tours de la SFIO (1920), et la création du parti communistre français, la forte minorité communiste de la CGT crée des Comités syndicalistes révolutionnaires (CSR) afin de noyauter les syndicats. Le congrès de Lille en juillet 1921 évite la scission dans le syndicat, où majoritaires et minoritaires sont au coude à coude, mais la division est consommée en décembre. Suite à l'exclusion de la fédération des cheminots, les révolutionnaires quittent la CGT, et créent la CGTU (Confédération Générale du Travail Unitaire), proche du PCF. Ainsi coupée de son aile révolutionnaire, la CGT se dirige dorénavant vers le réformisme en metant en avant l’idée nouvelle de nationalistaion et crée son journal Le Peuple. La CGT gagne des adhérants parmi les classes moyennes et revendique les congés payés et la semaine de 40 heures et l’éducation ouvrière. En 1925, elle obtient du Cartel des gauches la création d’un Conseil national économique où elle accepte d’envoyer ses délégués. De même, Léon Jouhaux siège-t-il au Bureau international du Travail à Genève, émanation de la SDN. La crise économique de 1930 aura sur la CGT deux conséquences. La prémière, elle reprend sa revendication de la semaine de 40 heures pour lutter contre le chômage et, en octobre 1935, adopte le planisme, théorisé en 1927 par le belge Henri de Man fondé sur la nationalisation des secteurs-clé de l’économie. La deuxième conséquence est la réunification de la CGT et de la CGTU lors du congrès de Toulouse (2-5 mars 1936); les confédérés dominent largement la nouvelle CGT. La réunifacation se faisant suivant ses consitions : elle conserve le nom de CGT, l’indépendance du syndicalisme vis-àvis des partis politiques est réafirmées, deux secrétaires « unitaires » seulement, Franchon et Racamond, entrent au bureux confédéral avec Jouhaux et de quatre secrétaires confédérés. Avec le succès du Front Populaire et les luttes, le patronat doit reconnaître la CGT et signer les accords de Matignon le 7 juin. En 1937, la CGT a quadruplé son audience et compte 4 millions d'adhérents. Le rapport de force interne s'est modifié en faveur des ex-unitaires. Mais, à l’occasion de ces nouvelles adhésions, les syndicalistes communistes parviennent à s’assurer le contrôle de nombre de Fédérations et d’Unions départementales. Pour lutter contre le noyautage communiste se constuture autour du secrétairé de la Cgt René Belin et du journal Syndicats qu’il fonde au même moment, une tendance nettement anti-communiste, Jouhaux assurant son maintien à la tête de la Confédération pour une position centriste ménageant les communistes. En 1938, la CGT est menacée par une nouvelle crise générée par les accords de Munich qui suscite la polémique entre les différentes tendances de la CGT. Ils sont défendus par la tendance Syndicats (20% de la CGT) dirigée par René Belin, quand les ex-unitaires les dénoncent. Le centre de Léon Jouhaux, Louis Saillant et Robert Bothereau s'allie avec les ex-unitaires (proches du PCF). L’échec de la grève contre les décrets-lois de Paul Reynaud du 12 novembre qui instaurent la semaine de six jours. Mal préparée après le congrès de Nantes, la grève de la fin du mois est un échec. 15 000 militants sont licenciés et la CGT perd un quart de ses effectifs, qui restent néanmoins élevés à 2 millions et demi d'adhérents. Le 23 août 1939, le pacte germano-soviétique sème la consternation dans la CGT et exacerbe les tensions contre les communistes. Le 18 septembre, le Bureau confédéral de la CGT vote une déclaration excluant les militants qui refusent de condamner le pacte germano-soviétique. Cette décision est approuvée par la Commission administrative de la CGT le 25 septembre, ce qui a pour effet d'exclure les communistes de la CGT. Plus de 600 syndicats sont dissous et de nombreux militants et dirigeants exclus sont arrêtés. Ceux qui ne sont pas arrêtés, ni mobilisés, entreront dans la clandestinité et en 1940, la CGT ne compte plus que 500 000 adhérents. Le 16 août, le gouvernement de Vichy de Pétain dissout les centrales syndicales ouvrières et patronales, dont la CGT; les fédérations peuvent cependant théoriquement continuer leur action. Le 9 novembre 1940, un décret signé par le ministre de la Production industrielle et syndicaliste René Belin dissout défintivement la CGT. DREYFUS (M.) : Histoire de la CGT, Bruxelles, Complexe, 2005. LEFRANC (G.) : Le syndicalisme en France, Paris, PUF, 1964. MOURIAUX (R.) : La CGT, Paris, Editions du Seuil, 1982. CGTU (Confédération générale du travail unifié) : La Confédération générale du Travail unitaire (CGTU) est née de la scission d'avec la CGT en décembre 1921, suite au Congrès de Tours de décembre 1920, où se crée le PCF. La caractéristique essentielle de la CGTU est d'avoir été le syndicat lié exclusivement au Parti communiste français (PCF), pendant les quinze premières années d'existence de celui-ci. La création de la CGTU répond à un grave désaccord sur la question des rapports entre syndicat et parti ouvrier : les fondateurs de la CGTU acceptent le principe léniniste de la soumission du syndicat au parti, contrairement à la CGT qui reste proche de la IIe Internationale et de la SFIO. Ainsi la CGTU, en dehors des syndicalistes liés au parti communiste comme Racamond, Monmousseau ou Frachon, comprend également des syndicalistes révolutionnaires tels que Pierre Monatte ou Pierre Besnard qui se réclament de l’opposition traditionelle à l’Etat bourgeois, au capitalisme et à la patrie, qu’ils accusent la CGT d’avoir abandonnée. La CGTU recrute ses adhérants essentiellement dans les miilieux ouvriers spécialisés ou des manœuvres, souvent d’origine rurale et dépourvus d’éducation syndicale et politique. Elle tient son premier congrès à Saint-Etienne en juin 1922 et Gaston Monmousseau y devient secrétaire général. Sous l’impulsion du Parti communiste, des commissions syndicales de contrôle sont mises en place, dirigées successivement par les hauts responsables de la SFIC (Section française de l’Internationale Communiste) comme Monmousseau, Racamond, Frachon ou Sémard. Le IIe congrès confédéral (Bourges, novembre 1923) vote une résolution reconnaissant le droit de s’organiser en fractions tandis que les militants d’origine anarchiste quittent la CGTU pour créer, autour de Besnard, une nouvelle centrale, la Confédération générale du Travail syndicaliste révolutionnaire ou, autour de Monatte, de retrouver les liens avec la CGT iù ils forment la tendance Révolution prolétarienne. A partir de 1924, la CGTU s’efforce de mettre en œuvre le « front unique à la base ». En 1925, un programme de revendications immédiates est établi (salaire minimum vital de base, échelle mobile des salaires), tandis qu’est définie une stratégie des grèves. L’année suivante, l’accent est mis sur l’opposition à la rationalisation. La Confédération persiste par ailleurs dans son opposition à toute loi sociale nouvelle, à l’heure du débat sur les Assurances sociale. La CGTU enregistre, à partir de 1926, une baisse continuelle des adhérents. Le problème est longuement débattu au IVe congrès confédéral (Bordeaux, septembre 1927), où est discuté pour la première fois en France la question du syndicalisme à bases multiples. Est alors décidée la création d’une Caisse nationale de solidarité ouvrière, destinée à gérer les futures Assurances sociales. Mais cette stratégie est abandonnée sous la pression de l’Internationale communiste qui, en 1928, adopte définitivement la ligne « classe contre classe ». Lors de son Ve congrès (Paris, septembre 1929), la CGTU reconnaît le rôle dirigeant du parti communiste en même temps qu’une indépendance syndicale qui restera toute formelle. La ligne « classe contre classe » signifie aussi la mobilisation ouvrière pour la défense de l’URSS. En 1933, Benoît Frachon succède à Gaston Monmousseau au secrétariat général de l’organisation. Les effectifs de la CGTU ne cesse de diminuer passant de 500.000 adhérants en 1922 à 200.000 en 1935. Mais c’est en 1934 que se déroulent les prémisses de la réunification avec la CGT : après le 6 février, la CGTU se rallie à la grève générale organisée par la CGT, et des discussions s’engagent entre les 2 centrales après le tournant unitaire du PC. En février 1935 est trouvée une solution au problème de l’indépendance syndicale. Une fois la CGTU résolue à condamner l’organisation des fractions politiques dans les syndicats, les discussions reprennent. Du 24 au 27 septembre 1935, CGT et CGTU tiennent simultanément leurs congrès nationaux : la perspective de la réunification est adoptée de part et d’autre par les congressistes. La fusion a lieu le 28 janvier 1936, avec la constitution d’un bureau provisoire de 8 membres dont 2 unitaires (Benoît Frachon et Julien Racamond). Le congrès d’unité se tiendra à Toulouse du 2 au 5 mars 1936. Toutefois, derrière cette aprance de fusion, les anciens unitaires conservent leurs liens, leur organisation, leur journal La Vie Ouvrière. La CGTU a publié les compte-rendus de chacun de ses congrès, en y ajoutant ceux des conférences nationales féminines (1923, 1925, 1927, 1931), des conférences d’unité (1925, 1933), des conférences nationales des jeunes syndiqués (1927) et des jeunes travailleurs (1931), de la conférence coloniale (1933). DREYFUS (M.) : Histoire de la CGT, Bruxelles, Complexe, 2005. LEFRANC (G.) : Le syndicalisme en France, Paris, PUF, 1964. MONATTE (P.) : Trois scissions syndicales, Paris, Les Editions ouvrières, 1958. MOURIAUX (R.) : La CGT, Paris, Editions du Seuil, 1982. CHABANEAU (Camille-Jean-Eugène), 1831-1906 : Philosophe. Né à Nontron (Dordogne) en 1831, d’abord employé dans l’administration des postes, Camille Chabaneau s’instruit seul et publie à la fin du Second Empire : Histoire et théorie de la conjugaison française. En 1878, il est chargé d’un cours de langue romane à la faculté des lettres de Montpellier, et, en 1886, il est nommé membre correspondant à l’Institut. Outre de nombreux articles dans la Revue des langues romanes, on lui doit : Grammaire limousine (1876) ; Biographie des troubadours en langue provençale (1885) ; La Langue et la littétaure du Limousin (1892) ; et de nombreuses éditions d’anciens textes provençaux. Il décède à Nontron en 1906. CHABAS (Maurice), 1862-19 : Peintre. Né à Nantes en 1862, élève de Bouguereau et Robert-Fleury, il a exposé des portraits, des paysages et des compositions symboliques ou philosophiques, parmi lesquelles on peut citer : Néméa et L’Exilée ; L’Idéal Pays ; Le Couronnement du poète ; L’Ange des grève et Les Arts ; Les Goémons sur la plage de Radenez et Les Rayons dorés à Port-Manech (1906). Il a orné des peintures murales la mairie du XIVème arrondissement de Paris, la mairie de Vincennes et la gare de Lyon-Perrache, où il représenté L’Art de la soie. CHABAS (Paul-Emile), 1869-19 : Peintre. Né à Nantes en 1869, frère du précédent, Paul Chabas est l’élève de Bouguereau et de T. Robert-Fleury. Parmi ses œuvres, on peut nommer : Chez Alphonse Lemerre (1895) ; La Marchande de rêves (1897) ; Joyeux ébats (1899) qui lui vaut un prix national. Portraitiste habile (Daniel Lesucur, Reine et princesses de Grèce), il a surtout traité d’agréables scènes de baigneuses, debout, dans une lumière perlée et comme transparente : Crépuscule, Nageuse (1909), Matinée de septembre, etc. Membre de l’Académie des beaux-arts en 1920, et président de la Société des Artistes français, il décède à le. CHABAT (Pierre), 1827-1892 : Architecte. Né à Paris en 1827, Pierre Chabat est l’auteur du Dictionnaire des termes employés dans la construction (1875-1882). CHABAUD-LATOUR (François-Henri-Ernest, baron de), 1804-1885 : Général et homme politique. Né à Nîmes (Gard), le 25 janvier 1804, major de Polytechnique, neuveu par alliance de Casimir-Perier, François de Chabaud-Latour est officier d’ordonnance du duc d’Orléans pendant onze ans. Député de 1837 à 1848, ce protestant soutient la politique conservatrice de Guizot. Il poursuit sa carrière sous la Seconde République et sous le second Empire. Commandant en chef du génie de l’armée durant le siège de Paris en 1870, il est élu le 8 février suivant député du Gard à l’Assemblée nationale siégeant à droite dans le groupe des orléanistes puis devient vice-président de l’Assemblée en 1874. Nommé ministre de l’Intérieur par le général de Cissey du 20 juillet 1874 au 9 mars 1875, il poursuit la politique « de combat » instaurée par les cabinets de Broglie et lutte ainsi contre la presse. « Grand, gros et fort [avec] la tenue d’un colonel de cuirassiers qui serait en même temps homme du monde », il présente plusieurs fois sa démission de ce poste qu’il a accepté avec regret et où il cherche à se faire le plus discret possible. Il est élu sénateur inamovible en 1876 en remplacement d’Ernest Picard. Il meurt à Paris le 10 juin 1885. CHABOCHE (Pierre), 1889-1953 : Industriel. Né à ? en 1889, Administrateur de sociétés, militant socialiste, Pierre Chaboche préside pendant de longues années, dans l’entre-deux-guerres, l’union des corporations françaises, organisation dépendant de l’action française et publiant La Production française, les Cahiers de la Corporation, Le Rail, Le Bâtiment français, Le Médecin et l’Ingénieur français. CHABOT (Jean-Baptiste), 1860-19 : Prêtre et orientaliste. Né à Vouvray (Indre-et-Loire) en 1860, docteur en théologie de l’université de Louvain, Chabot est chargé d’une mission archéologique en Syrie, en 1897. Auxiliaire de l’Académie des inscriptions pour le Corpus des inscriptions scientifiques, il devient, en 1917, membre de cette compagnie, en remplacement de Michel Bréal. Fort de l’appui pécuniaire des universités de Louvain et de Washington, il entreprend, sous le titre sous le titre Corpus scriptorum christianorum orientalium, une édition, avec traduction latine des textes originaux des écrivains chrétiens de l’Orient, qui, avec la Patrologia orientalis de Graffin et Nau, tend à compléter l’œuvre entreprise au siècle dernier par Migne. Il y a lui-même traduit quelques ouvrages. Il a, en outre, traduit l’importante Chronique de Michel le Syrien (1899-1910), un Recueil de synodes nestoriens (1902), une partie de la Chronique de Denys de Tell-Mahré (1895), l’Histoire de Mar Jabalaha III, patriarche nestorien (1895-1896), un Choix de monuments de Palmyre (1920). CHABRIER (Alexis-Emmanuel), 1841-1894 : Musicien. Né le 18 janvier 1841 à Ambert (Puy-de-Dôme), Emmanuel Chabrier est une des figures les plus originales de la musique française de la fin du XIXe siècle. Après avoir fait son droit, il entre, en 1861, au ministère de l’Intérieur. Mais sa vocation le pousse à se perfectionner toujours davantage dans l’art musical auquel il avait été initié dès l’enfance. Le musicien, devenu un des familiers de César Franck, entre, en 1874, à la Société nationale de musique, où il donne la mesure de sa virtuosité de pianiste et présente quelques-unes de ses compositions. En 1877, il aborde la scène avec L’Etoile, représentée aux Bouffes-Parisiens, suivie de cet autre opéra : Une Education manquée (1879). Chabrier, qui s’était démis de son emploi, fait, en mars 1880, un voyage à Munich au cours duquel l’audition de Tristan lui révèle le génie de Wagner. Devenu maître des chœurs aux concerts de Lamoureux (1882), il approfondit son étude de l’art wagnérien. Le voyage qu’il fait ensuite en Espagne est un bain de couleur qui inspire España, pièce qu’il fait exécuter en 1883, d’une très belle sonorité intrumentale. En 1886, il fait représenter à Bruxelles Gwendoline, opéra en trois actes et, en 1887, à l’Opéra-Comique, le Roi malgré lui. Parallèlement, il publie des recueils de pièces de piano, une scène dramatique pour mezzo-soprano et chœur de femmes, la Sulamite ; diverses compositions symphoniques : l’Ode à la musique pour voix de femmes. Enfin, il entreprend à la fois plusieurs ouvrages dramatiques : Briséis ou la Fiancée de Corinthe, Les Muscadins, Le Sabbat, etc., qui sont demeurés inachevés. Musiciens d’instinct plus que de métier, Chabrier, par la fantaisie de son imagination, sa verve, son invention pittoresque, son goût des recherches sonores, est une personnalité originale de la musique française de la fin du dernier siècle. Il meurt à Paris le 13 septembre 1894. CHABRON (Marie-Etienne-Emmanuel-Bertrand de), 1806-1889 : Général et homme politique. Né à Retournac (Haute-Loire) en 1806, colonel au retour de Crimée, de Chabron est fait général de brigade à Palestro en 1859. Rappelé à lactivité en 1870, il reçoit un commandement à l’armée de la Loire. Divisionnaire, il enlève le 28 janvier 1871, le faubourg de Blois à Orléans. Député de la Haute-Loire en 1871, il est ensuite élu sénateur inamovible par la Chambre des députés. Il décède à Paris en 1889. CHABRUN (César), 1880-1834 : Professeur et homme politique. Né à Mayenne (Mayenne), le 14 décembre 1880, César Chabrun, docteur en droit et professeur à la faculté de Paris, est membre du gouvernement pendant quelques jours seulement. Nommé par Chautemps dans son premier cabinet le 23 février 1930 comme sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction publique et aux Beaux-Arts, il est chargé de l’Enseignement technique. Il démissionne avec tout le cabinet le 25. Il retrouve sa place au sein de l’entente démocratique à la Chambre. Il meurt à Paris le 30 octobre 1934. CHABRY (Laurent), 1855-1893 : Biologiste. Nous devons à Chabry d’avoir réalisé l’expérience fondamentale qui contribua à la naissance de l’embryologiené en 1855 à Roanne et mort le 23 novembre 1894 à Riorges. Il obtient un doctorat de médecine en 1881 et en science en 1887. Il devient assistant à l’École pratique des hautes études. Il dirige ensuite le laboratoire de Concarneau et finit sa carrière comme maître de conférence à la Faculté de science de Lyon. Il étudie le vol des oiseaux et des insectes. Il démontre notamment le mécanisme de double équilibre chez les coléoptères. Il étudie également la tuberculose et l’embryologie. CHAFFANJON (Jean), 1854-1913 : Explorateur. Né en 1854, après avoir accompli trois voyages dans le bassin de l’Orénoque (1884-1891), Jean Chaffanjon exécute en Asie, avec Mangini et Gay (1894-1896), une exploration qui le mène de la région transcaspienne à Vladivostock par le Turkestan russe, la Mongolie et la Mandchourie. Connu pour avoir publié L’Orénoque et la couard, il décède à Tijitlim (Indes néerlandaises) en 1913. CHAGALL (Marc), 1887-1985 : Peintre. Né à Vitebsk (Russie), en 1887, Marc Chagall est originaire d’une modeste famille juive. Il étudie d’abord à l’école des arts de Saint-Pétersbourg, puis est l’élève de Léon Baskt. Venu à Paris dès 1910, il devient l’ami du poète Blaise Cendrars et s’installe à la Ruche avec Modigliani, Soutine, Léger, Lipchitz. Utilisant le cubisme, il transpose ses souvenirs de Russie et ses visions imaginaires, Moi et le village, en 1911. Avec la guerre, il rentre en Russie, et lors de la Révolution de 1917, il est nommé commissaire des Beaux-Arts de la province de Vitebsk. Revenu en France en 1923, il illustre les Ames mortes de Gogol, les Fables de La Fontaine et la Bible. Un voyage en Palestine, Syrie, Egypte l’ayant marqué profondément. Peu avant 1940, l’angoisse de la guerre se traduisit dans ses tableaux comme avec La Chute de l’ange. Il se réfugie aux Etats-Unis pendant la guerre et ne revient en France qu’en 1948 où il continue ses œuvres. Il meurt à Saint-Paul-de-Vence en 1985. CHAIGNET (Anthelme-Edouard), 1919-1901 : Professeur et écrivain. Né à Paris en 1819, Chaignet est successivement professeur à la faculté des lettres de Poitiers et, de 1877 à 1890, recteur de l’académie de Poitiers. Il est, depuis 1876, correspondant à l’Académie des sciences morales. Ses principaux ouvrages sont : La Vie et les écrits de Platon (1871) ; La Tragédie grecque (1877) ; La Rhétorique et son histoire (1888) ; Histoire de la psychologie des Grecs (1888-1890), son œuvre capitale. Il décède à Paris en 1901. CHAILLEY-BERT (Joseph Chailley, dit), 1854-1928 : Economiste et homme politique. Né à Saint-Florentin (Yonne) en 1854, Joseph Chailley s’est spécialement occupé des questions coloniales et il a été chargé des missions diverses pour poursuivre des études de coloniasation comparée en Indochine (1886), aux Indes néerlandaises (1897), aux Indes anglaises (1900-1901, 1904-1905). Il a publié : Paul Bert au Tonkin (1887) ; La colonisation de l’Indochine (1892) ; Les Hollandais à Java (1900) ; L’Inde britannique (1910). Il a dirigé, avec Léon Say, le Dictionnaire d’économie politique (1890-1894). Il a fondé : l’Institut colonial international (1893), la Société des études économiques (1893), la revue : La Quinzaine coloniale (organe de l’Union coloniale française). Représentant de la Vendée à la Chambre des députés en 1906, il décède à Paris en 1928. CHALAMET (Arthur), 1822-1895 : Professeur et homme politique. Né à Vernoux (Ardèche) le 19 décembre 1822, agrégé de lettres et professeur de philosophie, , Arthur Chalamet siège avec la gauche républicaine à la Chambre lorsqu’il entre dans le « grand ministère » de Gambetta comme sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction publique du 16 décembre 1881 au 29 janvier 1882. Il décède à Paris le 5 décembre 1895. CHALLEMEL-LACOUR (Paul-Armand), 1827-1896 : Philosophe, ambassadeur et homme politique. Né à Avranches (Manche) en 1827, Paul Challemel-Lacour, élève à l’Ecole normale en 1846, est reçu premier de l’agrégation de philosophie en 1849, puis devient professeur de philosophie à Pau. Profondément républicain, il est emprisonné en 1852 et doit s’enfuir à l’étranger. Il fait des conférences en Belgique, exerce le professorat à Zurich et rentre en France en 1859. Challemel-Lacour fait la critique littéraire au Temps, est gérant de la Revue des Deux Mondes et directeur de la Revue politique qu’il fonde avec Gambetta. Nommé préfet du Rhône en 1870, ce franc-maçon est ensuite élu député des Bouches-du-Rhône en 1873 puis sénateur des Bouches-du-Rhône en 1876. Ambassadeur en Russie en 1879 puis en Angleterre en 1880, il refuse de faire partie du ministère Gambetta mais est nommé ministre des Affaires étrangères à partir du 21 février 1883 dans le cabinet Ferry. Il s’engage alors en faveur de l’expédition du Tonkin et défend la politique française vis-à-vis de la Chine, mais c’est surtout le président du Conseil qui dirige les relations internationales. Il démissionne pour des raisons de santé, le 20 novembre 1883, et retrouve sa place au Sénat dont il est vice-président en 1888. Traducteur de l'Histoire de la Philosophie de Ritter, membre de l’Académie fraçaise depuis 1893, il succède, comme président du Sénat, à Jules Ferry le 23 mars 1893, et préside les deux Congrès pour l’élection présidentielle de Casimir-Perier en 1894 et de Félix Faure en 1895. Il meurt à Paris le 26 octobre 1896. CHAMBERLAND (Charles-Edouard), 1851-1908) : Savant. Né à Chilly-le-Vignoble (Jura) en 1851, collaborateur actif de Pasteur, inventeur d’un filtre, Chamberland a été, de 1885 à 1889, député du Jura. Il a publié : Recherches sur l’origine et le développement des organismes microscopiques (1879) ; le Charbon et la vaccination charbonneuse d’après les travaux récents de Pasteur (1883) ; Les Eaux d’alimentation dans l’hygiène et les maladies épidémiques (1885). Il décède à Paris en 1908. CHAMBORD (Henri-Charles-Ferdinand-Marie-Dieudonné d'Artois, duc de Bordeaux, comte de), 1820-1883 : Prince. Né à Paris le 29 septembre 1820, le comte de Chambord est l’uniue héritier de la branche ainée des Bourbons. Il est le petit-fils du roi Charles X de France et le fils posthume du second fils de celui-ci, Charles Ferdinand d'Artois (1778-1820) et de son épouse Marie Caroline des Deux-Siciles (1798-1870). À sa naissance et jusqu'à l'abdication de son grand-père il est titré duc de Bordeaux. Puis en exil, il prend le titre de courtoisie de « comte de Chambord », du nom du château qui lui avait été offert par une souscription nationale. Après la mort de son grand-père en 1836 puis de son oncle en 1844, Henri d'Artois devient l'aîné de la famille. Ses partisans, les légitimistes, restent dans l'opposition sous la monarchie de Juillet de Louis-Philippe Ier, la Deuxième République et le Second Empire. Dès la chute de l’Empire, Otto von Bismarck fait organiser des élections pour négocier le traité de Francfort. Cette assemblée majoritairement royaliste est divisée entre légitimistes et orléanistes. Pour permettre la restauration monarchique souhaitée par cette assemblée, un accord intervient entre les deux partis sur la prééminence du « comte de Chambord » sur le « comte de Paris ». Celui-ci est reconnu par les orléanistes et certains légitimistes héritier du « comte de Chambord », sans enfant (alors que le cousin le plus proche du « comte de Chambord » selon la loi salique est le « comte de Montizón » Jean de Bourbon (1822-1887)). En 1873, l'accès au trône du « comte de Chambord » semble inéluctable et il fait réaliser une série de carrosses (visibles au Château de Chambord) pour son entrée à Paris. Il est prévu que le président Mac-Mahon mène le « comte de Chambord » à l'Assemblée pour l'y faire reconnaître roi par acclamation. Toutefois celui-ci, par le manifeste du drapeau blanc du 5 juillet 1871 réitéré par lettre le 23 octobre 1873, refuse d'abandonner le drapeau blanc pour le drapeau tricolore, héritage de la Révolution, ruinant les espoirs d'une restauration monarchique rapide. Les orléanistes et certains légitimistes dépités décident alors d'attendre la mort du « comte de Chambord » pour présenter un candidat plus diplomate, le « comte de Paris » Philippe d'Orléans (1838-1894). Pour ce faire, ils décident de la durée de sept ans pour le mandat présidentiel d'une république envisagée comme temporaire. A la mort du comte de Chambord, la république a tout fait pour s’installer durablement : les groupes parlementaires sont cassés, l’emprise de l’Etat sur l’école commence à se faire sentir dans les mentalités, et l’anticléricalisme devient la nouvelle religion d'Etat. On peut donc dire que c’est le 20 novembre 1873 que le comte de Chambord quitte définitivement la scène politique : ne voulant pas devenir le jeu d’un parti, il préfère l’exil, et quitte cette maison de Versailles pour reprendre la route de Froshdorf (Autriche) où il décèdera le 24 août 1883. À la mort d'Henri d'Artois, son cousin et beau-frère, Jean de Bourbon (né en 1822), lui succède comme aîné des Capétiens, Henri d'Artois n'ayant pas de descendance directe. MAYEUR (J.-M.) : Les débuts de la IIIe République, Paris, Le Seuil, 1973. CHAMPETIER DE RIBES (Auguste), 1882-1947 : Avocat et homme politique. Né à Antony () le 30 juillet 1882, Auguste Champetier de Ribes est le fils d’un notaire, et petit-fils d’avocat. Ancien élève du Collège Stanislas, il débute à Paris une carrière « d’homme de robe » tout en s’initiant à la politique, dans le sillage de son maître et ami Albert de Mun. Sympathisant du Sillon de Marc Sangnier, il se range alors parmi les partisans du christianisme social, une doctrine qui ouvre une troisième voie entre individualisme libéral et syndicalisme révolutionnaire. Plusieurs fois blessé pendant la guerre de 1914-1918, Champetier de Ribes devient en 1924 député des Basses-Pyrénées et fonde la même année une nouvelle formation politique, le Parti Démocrate Populaire (PDP), inspiré par le catholicisme social, qui comptera une quinzaine de membres à la Chambre. Sous-secrétaire d’Etat aux Finances du 3 novembre 1929 au 20 février 1930 dans le premier ministère Tardieu, il est ensuite nommé ministre des Pensions du 2 mars au 12 décembre 1930 dans le second ministère Tardieu et du 27 janvier 1931 au 19 février 1932 dans les deux premiers cabinets Laval puis ministre des Pensions et régions libérées du 20 février au 2 juin 1932 dans le troisième cabinet Laval. Il fait alors voter la loi instituant le retraite du combattant et augmente la pension des grands invalides et des veuves de guerre. Elu sénateur en 1934, Champetier de Ribes refuse le poste de garde des Sceaux que lui propose Sarraut en 1936 car il ne veut pas renoncer au barreau. Au moment du Front populaire, il tente en vain de convaincre Blum d’annoncer « l’union nationale » afin de sauver la paix. Il est ministre des Anciens Combattant et des Pensionnés du 10 avril 1938 au 13 septembre 1939 dans le troisième ministère Daladier puis, dans le même ministère, il est nommé sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil, à la Défense nationale et à la Guerre et aux Affaires étrangères du 13 septembre 1939 au 20 mars 1940. De nouveau sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères du 21 mars au 10 mai 1940 dans le cabinet Reynaud, il reprends les pourparlers avec le Vatican, lutte de son mieux pour le maintien de la paix en essayant de dialoguer avec l’Allemagne, fait condamner l’invasion de la Finlande par l’URSS et aide les réfugiés basques. Il quitte le gouvernement lorsqu’il apprend que les troupes françaises viennet d’entrer en Belgique Le 10 juillet 1940, les deux Chambres réunies à Vichy votent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Champetier de Ribes fait partie des quatre-vingts parlementaires qui votent contre. Il se retire aussitôt dans le Béarn où il devient président départemental du mouvement de résistance Combat, ce qui lui vaudra d’être arrêté et interné en 1942. A la Libération, il continue sa carrière politique et ce, jusqu’à sa mort à Paris le 6 mars 1947. CHANOINE (Charles), 1835-1915 : Général et homme politique. Né à Dijon (Côte-d’Or) le 18 décembre 1835, Charles Chanoine, ancien élève de Saint-Cyr, est chef d’état-major en Chine de 1860 à 1862 avant d’être envoyé au Japon pour organiser l’armée nippone. Il est fait prisonnier en 1870. Après la guerre, il est nommé attaché militaire en Russie. « Chétif » et n’ayant « aucune disposition pour le cheval » disent les rapports, il entre dans le second cabinet Brisson comme ministre de la Guerre du 17 septembre au 31 octobre 1898 en remplacement de Zurlinden. En raison de l’affaire Dreyfus, le portefeuille de la Guerre use en effet rapidement ses titulaires. Convaincu de la culpabilité de Dreyfus, le général Chanoine démissionne d’ailleurs à l’annonce de la transmission à la cour de cassation de la demande de révision du procès, entraînant avec lui tout le cabinet. Il décède à Baudemont (Manche) le 9 janvier 1915. CHANSONS POPULAIRES : Au début de la Troisième République, la chanson populaire devient l’apanage des professionnels et trouve refuge dans les cabarets artistiques. A l’origine, on est en présence de deux genres assez différents. Le premier cabaret connu, fondé par Emile Goudreau au Quartier latin, le Club des Hydropathes, est fréquenté par des étudiants et des artistes, peintres, poètes et musiciens tels que Jean Richepin, Paul Arène, Maurice Rollinat ou François Coppée. Le succès est considérable et pousse Goudeau à tenter en 1881 une nouvelle expérience, moins élitiste, en créant Le Chat noir à Montmartre : poètes et musiciens sont toujours présents mais cette fois rencontrent le grand public. Et au Chat noir renaît la chanson satirique à caractère souvent politique et social, renouant ainsi avec une veine ancienne de la chanson populaire. La vogue du Chat noir, devenu pour les touristes étrangers une station obligatoire de leur tournée parisienne, provoque la multiplication des cabarets artistiques dans la Butte-Montmartre demeure le lieu d’élection. Ainsi naissent le Mirliton d’aristide Bruant, les Quat’z-Arts, le Lapin à Gill, l’Ane Rouge ou les Noctambules, tous utilisant la même recette : présence d’artistes en renom, de chansonniers et ouverture à un large pulic français et étranger venu autant par snobisme que pour écouter une chanson populaire de qualité. Assez différents sont les « cafés-concerts » puis les « music halls » qui ne piquent ni de goût artistique ni d’originalité, mais qui offrent au grand pulic le distraction d’un lot de chansons aux genre codifiés : le comique troupier, la chanson patriotique, la chanson réaliste et la romance sentimentale. Si le succès de certains interprètes est considérale, assurant la célébrité à Mistinguett, à Maurice Chevalier, à Mayol ou à Polin, la qualité des chansons est médiocre et les effets convenus. Avec quelques nuances, et avec une plus grande qualité dans l’interprétation des chansons, cette veine se poursuit jusqu’en 1939. La chanson mélodramatique avec Berthe Sylva, la chanson réaliste avec Fréhel, Damia puis, après 1935, avec Edith Piaf connaissent d’énormes succès et un vaste public. Il est vrai que celui-ci se trouve considérablement élargi par le développement de la radio dans les années 30. L’usage du micro a pour effet de faire disparaître les chanteurs à voix au profit des « chanteurs de charme » qui peuvent désormais chanter d’une voix douce modulée par le micro : c’est l’origine de la carière de Jean Sablon et de Tino Rossi qui débutent l’un et l’autre en 1927-1928, puis de Georges Guétary et Luis Mariano, interprètes d’opérettes, ou de Lucienne Boyer qui triomphe en 1930 avec Parlez–moi d’amour. Dans ces temps difficiles et grâce à la radio, le Français voient dans la chanson populaire un dérivatif qui leur procure à satiété, larmes sur des destins fictifs, émotion devant des amours suaves ou fantaisie qui permet l’évasion. C’est d’ailleurs dans ce dernier domaine que réside la véritable novation de la chanson populaire de l’après Première Guerre mondiale. Avec l’arrivée du jazz, la France découvre un art rythmé, syncopé qui induit au dépaysement et à l’exotisme, mais où les intellectuels et les artistes trouvent aussi motif à enthousiasme. Ainsi s’exlique le succès de Joséphine Baker qui symbolise le nouveau style de la chanson populaire fantaisiste sur des rythmes endiablés ou celui de Ray Ventura et ses collégiens qui inventent le Sketch chanté et vont réussir la synthèsse entre les inquiétudes des années trente et la fantaisie d’un jazz à la portée du grand public avec un air comme Tout va très bien Madame la Marquise. Parmi ces rénovateurs de la chanson française dans les années trente, il convient encore de citer Mireille et Jean Nohain qui retrouvent la veine de la chanson poétique (Le Petit chemin, Couchés dans le foin) ou de la narquoise chanson populaire traditionnelle (Quand un gendarme…). La plus belle réussite est sans doute celle de Charles Trenet qui, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, va incarner les aspirations au bonheur et à la joie de vivre d’une jeunesse sur laquelle pèse la menace omniprésente d’une guerre. Il tente de conjurer le sort en faisant du « fou chantant » et de grands succès (Y’a d’ la joie, Boum, Je chante, Fleur bleue), le symbole de sa volonté de jouir de la vie. BRUNSCHWIG (C.), CALVET (L.J.), KLEIN (J.C.) : Cent ans de chanson française, Paris, Seuil, 1972. VERNILLAT (F.) et CHARPENTREAU (J.) : Dictionnaire de la Chanson française, Paris, Larousse, 1968. VERNILLAT (F.) et CHARPENTREAU (J.) : La chanson française, Paris, PUF, 1971. CHAPPEDELAINE (Louis de), 1876-1939 : Avocat et homme politique. Né à Saint-just (Ille-et-Vilaine) le 21 juin 1876, Louis de Chappedeleine est le fils d’un officier de marine. Il est avocat lorsqu’il entre au groupe d’action libérale à la Chambre. Il fait un très court passage au gouvernement en tant que sous-secrétaire d’Etat à l’Agriculture du 23 février au 1er mars 1930 dans le 1er cabinet Chautemps. L’année suivante, il est nommé par Laval, dans ses trois cabinets successifs, ministre de la Marine marchande du 27 janvier 1931 au 19 février 1932, sujet sur lequel il s’est largement penché deuis plus de vingt ans en tant que député. Il travaille alors à la réorganisation de ses services, sur les questions sociales (invalides, terre-neuviens, journées de huit heures, salubrité à bord, licenciements économiques, etc.) et sur la place de l’Etat aussi bien vis-àvis des chantiers navals que des compagnies maritimes. Apprécié pour sa cordialité et sa culture, « ce républicain [qui] avait conservé la pature d’un gentilhomme » selon Herriot, fait partie par la suite de plusieurs cabinets ministériels. Ministre des Colonies du 20 février au 2 juin 1932 dans le troisième ministère Tradieu, il se préoccupe des questions financières, notamment des impôts en Indochine et des taxes sur le rhum. Toujours sensibles aux questions navales, il s’inquiète des services maritimes en Océanie. Il est ministre de la Marine militaire du 30 janvier au 8 février 1934 dans le second cabinet Daladier et deux fois il retrouve le portefeuille de la Marine marchande : du 24 janvier au 3 juin 1936 dans le deuxième cabinet Sarraut et du 10 avril 1938 au 13 septembre 1939 dans troisième ministère Daladier. Il suit toujours de près les dossiers sociaux, et favorise le renouvellement de la flotte de commerce. Il doit démissionner pour des raisons de santé et meurt deux mois plus tard à la Ville-d’Avray ( ), le 9 décembre 1939. CHAPSAL (Fernand), 1862-1939 : Professeur et homme politique. Né à Limoges (Haute-Vienne) le 10 mars 1862, docteur en droit, maître des requêtes au Conseil d’Etat et professeur à l’Ecole libre des sciences politiques, Fernand Chapsal fait carrière entre 1892 et 1914 dans les cabinets ministériels et la haute administration. Chargé du ravitaillement civil pendant la guerre, il est promu grand-croix de la Légion d’honneur en 1919 pour l’excellence de son travail. Il entre alors en politique : maire de Saintes en 1919, conseiller général de la Ch arente-Inférieure, il devient sénateur de ce département siègeant avec la gauche démocratique et entre au gouvernement comme ministre du Commerce et de l’Industrie du 23 juin au 18 juillet 1926 dans le dixième ministère Briand. Il retrouve ce portefeuille du 22 juin 1937 au 17 janvier 1938 dans le troisième ministère Chautemps. Il s’efforce alors de réduire le déficit commercial tout en se refusant de dénoncer des accords commerciaux avec nos partenaires. Son passage éclair au ministère de l’Agriculture du 18 janvier au 12 mars 1938 dans le quatrième cabinet Chautemps est trop bref pour qu’il puisse gérer autre chose que les affaires courantes. Le 10 février 1939, il trouve la mort dans un accident de circulation à Neuilly-sur-Seine. CHARASSON (Epouse Johannet, née Henriette), 1884-19 : Femme de lettres. Née au Havre (Seine-Inférieure) le 6 janvier 1884, épouse de l’écrivain René Johannet, elle publie d’abord des poèmes : Attente (1919) ; Les Heures du foyer (1926) ; Deux petits hommes et leur mère, puis des essais : Jules Tellier ; La Littérature féminine ; Faut-il supprimer la gynécée ?; La Mère ; Sœur Claire de Jésus ; Grigri ; Mon Seigneur et mon Dieu ; Le Sacrifice du soir, etc ; des pièces de théâtre : Le Saut du diable ; Les réalités invisibles ; Madame est san bonne ; une adaptation des Chouans ; Un jour sans lendemain et un pamphlet : Monsieur de Porto-Riche ou le Racine juif. Madame Charasson, écrivain et journaliste chrétien, a collaboré au Mercure de France, à La Croix, à La Vie catholique où elle a surtout écrit des articles de critique littéraire, à la Revue des Deux Mondes, aux Ecrits de Paris, à La Dépêche tunisienne. CHARCOT (Jean-Baptiste), 1867-1936 : Médecin et explorateur. Jean-Baptiste Charcot naît à Neuilly-sur-Seine, le 15 juillet 1867. Son père n’est autre que Jean-Martin Charcot, illustre médecin, professeur à l’hôpital parisien de la Salpetrière et initiateur de la neuro-pathologie. L’enfant rêve de grands horizons, joue à l’explorateur dans les jardins de la demeure familiale, emplie ses cahiers d’écoliers de dessins de bateaux. A Ouistreham, sur la côte normande, il s'initie aux choses de la mer en fréquentant les pêcheurs du port. Cependant, suivant les vœux paternels et conformément aux mœurs du temps, sa carrière est déjà toute tracée : il sera médecin. Brillant externe, Jean-Baptiste Charcot effectue son service militaire dans un bataillon de chasseurs alpins. A son retour à la vie civile, il est reçu interne des hôpitaux en 1891 et travaille ensuite auprès de son père. Jean-Baptiste Charcot soutient sa thèse en 1895. Après la mort du professeur Charcot cependant, il s’oriente vers la biologie et entre à l'Institut Pasteur, récemment créé, entreprenant par la suite des recherches sur le cancer. Grâce aux relations de son épouse, Jeanne Victor-Hugo, belle-fille d’Édouard Lockroy, ministre de la Marine à l’époque, Jean-Baptiste Charcot est nommé médecin auxiliaire de la flotte. Toujours attiré par l’océan, il navigue fréquemment, lorsque l’été arrive, à bord de son yacht, le Courlis, puis à partir de 1893 sur le Pourquoi pas ?, un cotre d'une longueur de 19,50 mètres. Construit selon ses plans, celui-ci le mène fréquemment en croisière le long des côtes britanniques. En 1901, Charcot se rend ainsi aux îles Féroé. Cette expérience de la mer lui permet de rédiger un Guide, publié par le Yacht-club de France, à destination des plaisanciers. Celui-ci vient compléter un précédent opuscule, La Navigation mise à la Portée de Tous. L’année suivante, Jean-Baptiste Charcot est envoyé en mission officielle par le ministère de la Marine, qui le charge d'étudier les pêcheries de l'île Jan-Mayen, possession norvégienne dans l'Arctique, alors fréquentée par les baleiniers. A cette époque, Charcot, qui se préoccupe des contrées septentrionales, déplore le fait que, depuis la monarchie de Juillet et Jules Dumont d’Urville, la France se soit détournée de l'étude des régions polaires. D'autres pays y multiplient les expéditions scientifiques. En 1897-1899, à bord du Belgia, Adrien de Gerlache réalise ainsi l’exploit d’hiverner pour la première fois dans l'Antarctique. A son retour, un Congrès international de géographie, réuni à Berlin, appel à l'exploration systématique du continent austral, qui demeure si mystérieux. L'initiative crée des vocations puisqu’en 1902, quatre équipes sont présentes dans ces régions : une anglaise, celle de Robert Falcon Scott sur la Discovery, une autre allemande dirigée par Erich von Drygalski à bord du Gauss, Otto Nordenskjôld et ses hommes sur l'Antartica, et une écossaise, celle de William Speirs Bruce sur la Scotia. La France est donc absente, ce qui décide Charcot, d'abord tenté par un voyage en Arctique, à se lancer dans l'aventure. A Saint-Malo, il se fait construire à ses frais un navire d'exploration polaire : Le Français. Celui-ci possède une coque en chêne, renforcée pour la navigation dans les glaces, est gréé en trois-mâts goélette et est muni d'une machine à vapeur auxiliaire d’une puissance de 125 chevaux. Celle-ci se révélera insuffisante. Au début de l’année 1903, l’opinion s'inquiète du sort de l’explorateur Nordenskjôld, dont on est sans nouvelles. Aussi Charcot décide-t-il de partir pour l'Antarctique et les mers du Sud. Mais il lui faut pour cela obtenir une aide financière, des concours officiels. Émile Loubet, le président de la République, lui accorde son patronage, suivi bientôt de celui de l'Académie des sciences et du Muséum d'histoire naturelle. La Société de géographie, le Bureau des longitudes se joignent à l’entreprise, tandis que la Marine nationale concède à l’expédition cent tonnes de charbon. Seule la Commission des Missions du ministère de l'Instruction publique se refuse à toute subvention. De son côté, Jean-Baptiste Charcot, usant de la notoriété de son nom, lance une souscription qui ne recueille cependant que vingt mille francs. Le directeur du journal Le Matin, Bunau-Varilla, lui offre allures cent cinquante mille francs-or. Ceux-ci permettent d'achever les préparatifs. Quant au programme scientifique, il est défini avec le concours de l'ingénieur hydrographe Antoine Bouquet de la Grye, directeur du Service hydrographique de la Marine, l'astronome Jean Mascart, les géologues Albert de Lapparent et Edmond Perrier, le paléontologue Albert Gaudry. Il s’agit ainsi pour l'expédition d’effectuer des différents travaux dans la partie du continent antarctique située au sud de la Patagonie, dans le secteur des terres de Graham et d'Alexandre Ier. L'équipage du Français comprend dix-neuf hommes, dont deux officiers de marine : le lieutenant de vaisseau Matha et l'enseigne Rey, que la Marine a consenti à détacher, avec "solde à terre". Quant au navire, il est encombré de matériel en tout genre (dont une maison démontable) et de vivres en prévision d’une longue campagne d'hiver. Le charbon s'entasse un peu partout... Enfin l’expédition quitte le port du Havre, le 15 août 1903, pour gagner Buenos Aires où l’on embarque également une tonne de galetas, des biscuits argentins. De nouveau en mer à partir du 23 décembre suivant et en direction de la Terre de Feu, Le Français se dirige ensuite vers le sud à destination de la terre de Graham, au mois de janvier 1904. Bientôt, il se heurte aux mêmes difficultés que ses prédécesseurs. La navigation est approximative, car le point ne peut être fait qu’à l'aide d'instruments encore très sommaires et dans des mers inconnues. L’équipage ne doit sous aucun prétexte relâcher son attention, car la présence des icebergs menace, tout comme celles d’éventuels récifs non repérés. Enfin, le 2 février 1904, Le Français arrive en vue d'un chapelet d'îles qui bordent le continent austral, au sud-ouest de l'archipel des Shetlands du Sud. A cette époque, seuls des navires baleiniers ou d’éventuels pêcheurs de phoques ont fréquenté es eaux. Le travail de relevé commence. Les courants, le contour des terres, etc., doivent figurer sur les nouvelles cartes. Le Français progresse lentement à travers les chenaux taillés dans les points faibles de la glace. A proximité de la côte, Charcot et ses hommes sont également à l’affût du moindre abri pour y passer la nuit. Les paysages éblouissent ces hardis navigateurs, peu habitués à ces horizons. Le 8 février a lieu la première descente à terre sur la banquise. Il leur est alors impossible d'établir un campement. C’est à l’abri d’une tente que l'enseigne Rey effectue ses observations magnétiques. Tandis que des hommes d’équipage réparent une nouvelle fois la chaudière, le lieutenant de vaisseau Matha s’occupe du marégraphe enregistreur, le naturaliste Turquet empaille des oiseaux et le géologue Gourdon recueille des échantillons de roche. D’autres chassent le phoque et le pingouin pour nourrir les chiens de l'expédition. Leur graisse est également utilisée comme combustible pour faire fondre la glace qui fournit l'eau douce. Au début du mois de mars 1904, l'expédition se prépare à hiverner et se fixe dans une baie de l'île Wandel, par 65,5° de latitude sud, dépassant d'un degré le point le plus au sud atteint par Otto Nordenskjold. Dans les semaines qui suivent et malgré les températures très basses, les travaux scientifiques se poursuivent, des études bactériologiques notamment. Dans cet environnement austère, l'atmosphère à bord demeure excellente. Jean-Baptiste Charcot organise ainsi des réjouissances pour la fête nationale argentine, le 14 juillet ou Noël. Suivant une tradition ancienne dans la marine française, des séances d'enseignement sont également proposées à l’équipage. Celui-ci s’enrichit par la fréquentation de l’abondante bibliothèque dont dispose Le Français. En décembre, il faut à présent songer à regagner l’océan. Avant cela, l’équipage doit débloquer le navire pris dans les glaces. La mélinite, un explosif puissant, utilisé également par les prédécesseurs de Charcot pour briser les blocs de glace, se révèle inefficace. Il faut donc s’employer à évacuer la couche de neige en surface, avant de scier la banquise ! Enfin, le jour de l'appareillage arrive. Celui-ci s’effectue avec le seul recours de la voile, sans l’aide de la machine à vapeur, de nouveau en panne. Malgré le temps défavorable, Le Français pousse en direction de la terre de Graham. Le 15 janvier 1905 cependant, c’est l’accident. Le navire heurte un rocher à fleur d'eau. Puisqu’on ne peut réparer, les pompes lutent contre la voie d'eau, au prix d'un service épuisant pour l’équipage. Enfin, Le Français quitte l'Antarctique et arrive à Buenos Aires, le 29 mars. C’est au gouvernement argentin qu’il reviendra de remettre en état le navire, après son achat à la France. Salués par le croiseur Dupleix, Jean-Baptiste Charcot et ses hommes s'embarquent sur le paquebot Algérie. L'expédition rapporte des résultats importants, si bien que le ministre de la Marine, Gaston Thomson, ainsi que les milieux scientifiques, réservent aux explorateurs un accueil enthousiaste au mois de juin 1905. Charcot se consacre dans les mois qui suivent à la publication du bilan scientifique de l’expédition, tout en songeant à repartir vers les régions polaires qu’il vient de quitter. Favorable à une nouvelle expédition, Paul Doumer, récemment élu président de la Chambre des députés, obtient du gouvernement une subvention de six-cent mille francs. D’autres subventions, venues de la principauté de Monaco comme de nombreux particuliers, permettent à Charcot d’envisage la construction d'un nouveau navire. Celui-ci, baptisé le Pourquoi pas ?, est lancé à Saint-Malo, le 18 mai 1908. Ce trois mâts barque de 445 tonneaux, qui dispose comme son prédécesseur d’une propulsion auxiliaire à vapeur, a été conçu tout particulièrement pour la navigation dans les mers polaires. A l’intérieur de sa coque renforcée, il dispose d'aménagements spacieux et confortables, de trois laboratoires, de deux bibliothèques prévues pour recevoir plus de deux mille volumes. Le 15 août 1908, le Pourquoi pas ? et ses vingt-deux hommes d'équipage quittent Le Havre en direction de l'Antarctique. Après avoir exploré la terre de Graham, reconnu l'île Adélaïde, aperçue en 1831 mais dont elle précise les dimensions et la configuration, l’expédition se dirige vers la terre Alexandre Ier, alors quasi inconnue. Vers la fin du mois de novembre 1909, le Pourquoi pas ? mouille aux îles Shetland du Sud et se ravitaille. Il repart ensuite vers le Sud-ouest et atteint, par 70° sud et 75° ouest, une terre nouvelle. Les glaces cependant l'empêchent d'approcher. Plus tard d’ailleurs, Jean-Baptiste Charcot et son équipage sont en vue de l’île Pierre Ier, baptisée ainsi par le navigateur russe Fabian Gottlieb von Bellingshausen en 1820, le seul à l’avoir jusqu’ici approchée. Par la suite, l’explorateur français franchit le 70° sud et cartographie deux mille kilomètres de côtes inexplorées du continent antarctique. Le 5 juin 1910, le Pourquoi pas ? est de retour à Rouen. Plus tard, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, le monde savant salue l'exploit de Charcot. D’autant plus que la moisson scientifique collectée par l’expédition est considérable. Le Pourquoi pas ? est ensuite placé sous le patronage de l'École pratique des hautes études. En 1911, l’institution organise une croisière océanographique en Manche. Jean-Baptiste Charcot ne parvenant pas à subvenir à son entretien, la Marine marchande en fait un navire-école destiné à la formation des futurs capitaines au long cours. A son capitaine revient de les conduire dans les eaux islandaises, avant d’être mobilisé en 1914. L’année suivante, il commande, avec le grade de lieutenant de vaisseau auxiliaire, un navire baleinier armé par un équipage franco-anglais et dont la mission est de patrouiller au large des îles Féroé. Peut-être les autorités allemandes y ont-ils établi une base pour leurs sous-marins ? Afin de lutter contre ces terribles submersibles, Charcot conçoit un bateau-piège, que la Marine adopte. Il prend dès lors le commandement de l’un d’entre-eux, la Meg, jusqu'à la fin du conflit. Promu capitaine de corvette en 1920, Charcot retrouve son Pourquoi pas ?, à présent armé par la Marine nationale. A partir de 1925, il multiplie à son bord les missions au Groenland. Devenu Conseiller scientifique du Service hydrographique de la Marine, le capitaine au long cours accède également aux honneurs. Élu à l'Académie des Sciences en 1926, Charcot reçoit le prix Albert de Monaco, avant d’être reçu en 1929 au Bureau des Longitudes. Après avoir présidé à l’organisation de l'Année polaire internationale, il se préoccupe de l'établissement d'une station scientifique au Scoresby Sound. En 1933, le Pourquoi pas ? tente l'exploration de la côte dite "de Blosseville", puis installe au Groenland la mission ethnographique, dirigée par Paul-Émile Victor, qui séjournera pendant un an à Angmagsalik, dans le Sermilikfjord. Le 14 juillet 1936, Charcot et son Pourquoi pas ? quittent le Groenland oriental et Saint-Servan. L’exploration de la région est rendue possible cet été là par la faible épaisseur de la banquise. Cependant les tempêtes se multiplient et rendent la navigation périlleuse. Dans l'une d'elles, après avoir lutté toute la nuit contre les éléments déchaînés, Jean-Baptiste Charcot disparaît avec son bâtiment, fracassé sur les rochers au large d'Alftanes en Islande, le 16 septembre 1936, à une heure quinze du matin. Des quarante hommes de l'équipage, un seul survit au drame : le maître timonier Le Gonidec, jeté à la côte par une lame. CHARCOT (Jean Martin), 1825-1893 : Médecin. Né à Paris en 1825, Jean Martin Charcot est l’un des fondateurs de la neurologie moderne et l'un des plus grands cliniciens français. Il fut l'un des plus illustres médecins français de la fin du XIXe siècle. Par son esprit d'observation et grâce à son ascendant sur ses malades et sur ses disciples, il orienta la médecine mentale vers des voies originales et fécondes. Si quelques-unes de ses théories furent assez rapidement abandonnées, il n'en reste pas moins le précurseur de la psychopathologie; il rénova, en outre, la pathologie nerveuse. Alors que Charcot enseignait l'anatomie pathologique à l'Université de Paris (1860-1893), il fut nommé en 1862 à l'hôpital parisien de la Salpêtrière, où il devait rester de longues années et où il ouvrit en 1882 ce qui allait devenir la plus grande clinique neurologique d'Europe. Professeur réputé, il attira des étudiants de toutes les parties du monde. Le plus célèbre d'entre eux fut, en 1885, Freud, dont l'intérêt pour les origines psychologiques de la névrose fut stimulé par l'emploi que faisait Charcot de l'hypnose, en vue de découvrir une base organique à l'hystérie. Sa contribution à l'étude de la physiologie et de la pathologie du système nerveux a été fondamentale. On lui doit notamment la description de la sclérose en plaques et de la sclérose latérale amyotrophique (maladie de Charcot). Brillant conférencier, excellent écrivain, il fut élu membre de l'Académie de médecine (1873) et de l'Académie des sciences (1883). Ses cours, à la Salpêtrière, étaient des événements scientifiques et mondains. Son ouvrage le plus important est le recueil de ses Leçons sur les maladies du système nerveux faites à la Salpêtrière, qui ont été publiées en trois volumes en 1885-1887, puis traduites dans toutes les langues. Sous son influence, la maladie mentale commença à être systématiquement analysée; et l'hystérie, à l'étude de laquelle il se consacra à partir de 1870, fut distinguée des autres affections de l'esprit. Ses travaux ont conduit à écarter le soupçon de simulation de la part des malades dans la manifestation des crises ou des symptômes hystériques, et il a été le premier à employer l'hypnose comme moyen de traitement. Il demeurait convaincu que la cause fondamentale de l'hystérie résidait dans une dégénérescence, d'origine héréditaire, du système nerveux; interprétation que Sigmund Freud, qui fut son élève d'octobre 1885 à février 1886, devait définitivement réfuter. Jean-Martin Charcot est le père du célèbre médecin et explorateur français Jean-Baptiste Charcot, auteur de campagnes et travaux océanographiques dans les régions polaires, mort en mer sur le "Pourquoi-Pas". Après cette présentation sommaire du Docteur Jean-Martin CHARCOT qui a donné son nom à notre établissement, il nous est apparu nécessaire de mieux présenter les traits dominants de son oeuvre et de sa vie, ainsi qu'un certain nombre de réserves, voire de critiques concernant ses travaux. Lorsqu'il commence à s'intéresser à l'hypnose en 1878, CHARCOT est arrivé au faîte de sa carrière. Il est l'une des gloires de la médecine française. Ses travaux de neurologie lui ont valu une réputation internationale et l'on créera pour lui en 1882, la première chaire mondiale de neurologie. A cette période de sa vie, CHARCOT fut attiré par la philosophie, la psychologie, et l'étude des mécanismes des fonctions cérébrales. ll choisit en dehors de ses élèves des collaborateurs appartenant aux disciplines philosophiques et écrivit ces lignes: "Jusqu'à présent, on s'est habitué à mettre la psychologie à part, on l'enseigne au collège, mais c'est une psychologie à l'eau de rose qui ne peut servir beaucoup. C'est une autre psychologie qu il faut créer, une psychologie renforcée par les études pathologiques auxquelles nous nous livrons". CHARCOT était essentiellement neurologue, il n'était pas psychiatre; en tant que neurologue, il s'occupait de la physiologie de l'hypnotisé, de ses mouvements, de ses réflexes et il passait complètement à côté des phénomènes psychologiques. CHARCOT, qui expérimentait surtout chez les hystériques, considèrait l'état hypnotique développé chez eux comme une véritable névrose constituée essentiellement par trois états différenciés que l'on peut transformer, l'un en l'autre, au moyen de différents artifices techniques. Ces trois états sont ... Le premier : l'état de léthargie. Il s'obtient par fascination, soit par compression des globes oculaires à travers les paupières baissées. Le second : l'état cataleptique. Les membres restent immobilisés dans l'attitude qu'on leur donne. Le troisième : l'état somnambulique qui peut être obtenu par fixation du regard et par diverses pratiques. Ces trois phases constituent ce que CHARCOT a appelé: le grand hypnotisme ou la grande névrose hypnotique. A côté du grand hypnotisme, il y a de petits hypnotismes dont les phénomènes sont moins tranchés, comme il y a la grande hystérie et les états hystériques mineurs. CHARCOT parlait de transfert, sans l'intervention de la suggestion, par un simple phénomène physique et physiologique dû à l'aimant. Malheureusement, si les travaux de CHARCOT sur l'hystérie et les névroses furent fréquemment l'objet de critiques erronées, ses recherches sur l'hypnose, la rnétalloscopie, la métallothérapie, publiées par lui-même ou par ses collaborateurs, ont soulevé des objections souvent justifiées. Certains de ses élèves parmi les plus brillants, s'ils ne tarissent pas d'éloges sur la valeur du maître ont été cependant critiques. Par exemple, BERNHEIM a démontré formellement que l'hypnotisme de la Salpêtrière avec ses trois phases et ces phénomènes caractéristiques de léthargie, de catalepsie et de somnambulisme, les phénomènes de transfert n'existent pas, que ces phénomènes divers ne se produisent pas tant que le sujet ne sait pas s'ils doivent se produire. La suggestion seule et l'imitation les ont réalisés. De son côté, le Professeur GUILAIN a écrit très justement : "CHARCOT a eu le tort de ne pas surveiller ses expériences. Il assurait le matin son service d'hôpital avec une régularité et une conscience exemplaires. Mais, comme tous les médecins de cette génération, il ne revenait pas dans son service l'après-midi. Ce furent donc ses chefs de clinique, ses internes, ses assistants qui préparaient les malades, les hypnotisaient, organisaient les expériences." Par ailleurs, BABINSKI, reconnaît que CHARCOT "eut le tort de faire ses cliniques sur la grande hystérie et sur l'hypnotisme non seulement pour des médecins mais aussi pour un public non médical; ses leçons attiraient les gens du monde, des acteurs, des littéraires, des magistrats, des journalistes, des hommes politiques et quelques médecins. La présentation des sujets en état de léthargie, de catalepsie, de somnambulisme, de sujets présentant des crises violentes, ressemblaient trop à de la mise en scène théâtrale". Enfin, FREUD évoquant sa rencontre avec CHARCOT dans son ouvrage "Ma vie et la psychanalyse" rapporte: "en octobre 1885, j'entrai comme élève à la Salpêtrière, mais j'y fus, au début, perdu parmi tous les élèves accourus de l'étranger, donc peu considéré. Un jour j'entendis CHARCOT regretter que le traducteur allemand de ses leçons n'eût plus donné signe de vie depuis la guerre. Il aimerait que quelqu'un entreprît la traduction de ses "Nouvelles Leçons". Je lui écrivis pour m'offrir à lui, je me souviens même que la lettre contenait ce bout de phrases: je n'étais affecté que de l'aphasie motrice, mais non de l'aphasie sensorielle du français. CHARCOT m'agréa, m'introduisit dans son intimité et depuis lors j'eus ma pleine part de tout ce qui avait lieu à la clinique". FREUD dit encore: "de tout ce que je vis chez CHARCOT, ce qui me fit le plus d'impression, ce furent ses dernières recherches, poursuivies en partie encore sous mes yeux. Aussi, la constatation de la réalité et de la légalité de phénomènes hystériques, la présence fréquente de l'hystérie chez l'homme, la production de paralysies et de contractures hystériques de par la suggestion hypnotique, et ceci que ces productions artificielles présentassent jusque dans le détail les mêmes caractères que les manifestations spontanées. Bien des démonstrations de CHARCOT avaient chez moi, comme chez d'autres élèves étrangers, éveillé d'abord de l'étonnement et une tendance à la contradiction. CHARCOT répondait toujours à nos objections avec affabilité et patience, mais aussi avec beaucoup de décision ; dans l'une de ces discussions, il laissa tomber ces mots: "Ca n'empêche pas d'exister", paroles qui devaient s'imprimer en moi de façon inoubliable. On sait que tout ce que CHARCOT nous enseignait alors ne s'est pas maintenu. Une partie en est devenue incertaine, une autre n'a évidemment pas subi l'épreuve du temps. Mais il est demeuré assez de cette oeuvre pour pouvoir constituer un patrimoine durable de la science. Avant que je ne quittasse Paris, je concertai avec le Maître le plan d'un travail ayant pour but la comparaison entre les paralysies hystériques et les organiques. Je voulais y démontrer la thèse que, dans l'hystérie, les paralysies et anesthésies des diverses parties du corps sont délimitées suivant la représentation populaire (non anatomique), que s'en font les hommes. Il était d'accord avec moi, mais on pouvait aisément voir qu'au fond il n'avait aucune prédilection pour une étude psychologique approfondie de la névrose. Il était venu de l'anatomie pathologique." "Je ne puis dissimuler une question qui s'est posée souvent à mon esprit. Il y avait autour de CHARCOT des assistants d'une haute valeur scientifique, doués d'un esprit critique pénétrant, d'une valeur morale absolue. Il me paraît impossible que plusieurs d'entre eux n'aient pas eu de doute sur la sincérité des sujets, n'aient pas compris l'invraisemblance de certains faits. Pourquoi' n'ont-ils pas mis en garde CHARCOT ? La seule explication que je conçois avec toutes les réserves qu'elle comporte, c'est qu'ils n'ont pas osé alerter CHARCOT, craignant les réactions violentes du Maître, que l'on appelait le César de la Salpêtriêre." CHARCOT lui-même, un peu tardivement d'ailleurs, finit par se rendre compte, peu avant sa mort, que le terrain sur lequel il s'était engagé était fort peu solide, aussi prit-il la décision de reprendre dans son ensemble la question de l' hystérie et de l' hypnose. Malheureusement, souffrant d'une insuffisance coronarienne chronique sévère, il devait mourir à peu de temps de là en 1893 d'un infarctus du myocarde. CHARDONNE (Jacques Boutelleau, dit Jacques), 1884-1968 : Ecrivain. Né à Berbezieux (Charente) le 2 janvier 1884, il décède à La Frette (Val-d’Oise) le 29 mai 1968. CHARDONNET (Hilaire, comte Bernigaud de), 1839-1924 : Chimiste et physicien. Né à Besançon le 1er mai 1839, le jeune Hilaire de Chardonnet est issu d’une famille de robe. Admis à l’Ecole polytechnique en 1859, il manifeste en 1861sa volonté de ne pas servir l’Empire et, la grave question du serment lui ayant fait donner sa démission, il sort de l’école comme ingénieur des ponts et chaussées. Nommé peu de temps après gentilhomme du comte de Chambord, il le suit en exil à la petite cour de Frosdorff, en Autriche. Royaliste sincère, Hilaire de Chardonnet prit une part active aux derniers événements carliste de 1872 à 1876. Il défendit la « cause légitime » de toute son âme, de tout son coeur. Après la mort, en 1883, du comte de Chambord, Hilaire de Chardonnet s’éloigne de la politique, cherchant à oublier les désillusions qu’elle lui avait apportées en échange de son dévouement. Dès lors, il s’occupe plus complètement des questions scientifiques auxquelles, depuis de longues années déjà, il consacrait la plus grande partie de son temps. Neveu de Henri de Ruoltz par son mariage avec Marie-Antoine-Camille de Ruoltz-Montchal, il suit l’exemple de son oncle en créant dans sa maison de Besançon, un important laboratoire. Le labeur de cet homme a de nombreuses ramifications dans le vaste domaine des sciences mathématiques, physiques et chimiques. Il aborde les problèmes les plus divers avec la même lucidité d’esprit, et les solutionne presque tous avec la même hardiesse. Le chef-d’oeuvre de sa longue carrière de chercheur inlassable a été l’invention de la soie artificielle. Il y consacra trente ans de sa vie. Chargé d’une étude sur la sériciculture, à un moment où la maladie frappe encore le ver à soie et met l’industrie en péril, il se penche avec ses yeux de naturaliste, de physicien et de philosophe, sur le précieux insecte. Il a l’idée d’essayer de reproduire en laboratoire, puis dans l’industrie, une des créations les plus délicates de la nature. Il tente d’étirer les fils d’une soie artificielle à l’aide du collodion filtré et injecté dans des tubes capillaires ou filières. Par une suite d’opérations, simples en apparence mais hérissées de difficultés, il réussit, en 1884, à créer une industrie nouvelle. Membre de l’Académie des Sciences, de l’Académie de Besançon et de la Société d’Emulation du Doubs, il décède le 12 mars 1924 à Paris. CHARLES-CHAUMET (Jean-Charles-Joseph Chaumet, dit), 1866-1932 : Journaliste et homme politique. Né à Prignac-et-Marcamps (Gironde) le 21 février 1866, Charles-Chaumet commence sa carrière publique dans le journalisme comme rédacteur à La Gironde, puis rédacteur en chef de L’Avenir, fondateur de La Tribune agricole. Elu député en 1902 à 1919, il s’inscrit au groupe de l’Union démocratique à la Chambre. Passionné par les questions économiques et sociales, il entre au gouvernement comme sous-secrétaire d’Etat aux Travaux publics et aux Postes et Télégraphes du 2 mars 1911 au 21 mars 1913 dans les cabinets Monis et Caillaux, le premier cabinet Poincaré, les troisième et quatrième ministères Briand. Il travaille alors à l’amélioration de la situation du personnel et à l’extension des services postaux maritimes avec les colonies et différents pays, en particuliers les Etats-Unis. Président de la commission de la marine de guerre au cours du premier conflit mondial, il est nommé ministre de la Marine du 10 août au 15 novembre 1917 au cours du premier conflit mondial dans le cinquième cabinet Ribot et le premier ministère Painlevé. Il modifie alors certaines dispositions du code maritime de justice militaire. Elu sénateur de la Gironde en 1923, il retrouve le gouvernement comme ministre du Commerce et de l’Industrie du 17 avril au 28 octobre 1925 dans le second ministère Painlevé. Ce franc-maçon a laissé quelques ouvrages, dont Socialistes et anarchistes (1894) et La Politique nouvelle (1930). Il meurt à Paris le 27 juillet 1932. CHARLES-DUPUY (Charles-Alexandre Dupuy, dit), 1851-1923 : Professeur et homme politique. Né au Puy (Haute-Loire) le 5 novembre 1851, Charles Dupuy a dirigé le gouvernement à trois reprises, toujours en période de crise et pour une durée brève. Normalien de formation et agrégé de philosophie, professeur puis inspecteur d’académie, Charles-Dupuy est élu député républicain en 1885. Rapporteur du budget de l’Instruction publique pendant trois ans, il devient ministre de l’Instruction publique, des Beaux-Arts et des Cultes dans les deux premiers ministères Ribot (décembre 1892-avril 1893). Après le retrait de ce dernier, les échecs de Méline et Develle, le président de la République Carnot le charge le 4 avril 1893 de constituer un nouveau gouvernement. L’élévation de cet homme neuf, honorablement connu par plusieurs publications, maque la volonté de tourner la page du scandale de Panama qui continue d’infester le climat politique. Lié avec la plupart des jeunes parlementaires, d’une corpulence que beaucoup jugent rassurante – on le surnomme le pachyderme – et d’une intégrité irréprochable, Charles-Dupuy a pour mission de donner un second souffle à la République. S’il reprend la plupart des ministres du cabinet précédent, le nouveau président innove en confiant son premier portefeuille à Raymond Poincaré et en marquant, dès sa déclaration aux Chambres, son désir de rompre avec un passé marqué par des enrichissements illicites. Sa volonté réformatrice se concrétise par la loi du 15 juillet 1893 qui pose la première pierre d’une politique sociale d’envergure avec la mise en place de l’assistance médicale gratuite pour les plus défavorisés. Le 13 octobre suivant, il reçoit une escadre russe à Toulon, geste qui scelle publiquement le rapprochement franco-russe et prélude à la future alliance. Sortie de la spirale des affaire et de l’isolement diplomatique, la France reprend son rang et le régime son assise. Charles-Dupuy tente de capitaliser sa toute jeune popularité en favorisant l’intégration des catholiques. « Notre nation n’a pas peur des hommes nouveaux » déclare-t-il dans un discours à Toulon. Ce déplacement vers la droite du centre de gravité politique se confirme par ses discours très antisocialistes qui fustigent « les doctrines qui, sous des vocables divers, collectivisme ou autres, prétendent substituer la tyrannie anonyme de l’Etat à l’initiative individuelle ». Il joint les actes à la parole en faisant intervenir la troupe à Paris en juillet, suite à un début d’émeutes au Quartier latin. Les législatives ne bouleversent pas l’équilibre de forces existant puisque les républicains de gouvernement sont largement majoritaires. Elles n’en soulignent pas moins le recul des conservateurs, l’échec des ralliés et la poussée des socialistes. Clemenceau, victime de l’onde de choc de Panama, est battu tout comme Floquet. Jaurès et Millerand déposent en novembre un ordre du jour condamnant « la politique rétrograde et provocatrice du gouvernement ». Charles-Dupuy persiste, en réfutant publiquement la célèbre formule de Brisson selon laquelle « il n’y a pas d’ennemis à gauche ». Cette fois, c’en est trop pour les radicaux qui quittent le ministère, entraînant la démission du cabinet le 3 décembre 1893. Charles-Dupuy succède alors à la présidence de la Chambre, ce dernier étant investi comme président du Conseil. Le 9 décembre, l’explosion en pleine discussion d’une bombe posée par l’anarchiste Vaillant souligne son courage et son sang-froid : « Messieurs, la séance continue », commente-t-il simplement, attirant sur sa personne un élan de popularité qui l’impose à nouveau à la tête du gouvernement après la chute de Casimir-Perier. Son deuxième ministère composé le 30 mai 1894, s’ouvre largement à la jeune génération montante dont il est maintenant l’incarnation. La plupart de ses ministres comme Raymond Poincaré, Félix Faure, Hanotaux, Delcassé, Leygues ou Barthou accéderont aux plus hautes fonctions de l’Etat en marqueront de leur empreinte l’histoire ultérieure du régime. La politique sociale est poursuivie avec la loi du 29 juin 1894 qui institue les caisses de retraite et de secours des mineurs. En novembre sont fondés le Crédit agricole mobilier et les habitations à bon marché (H.B.M.). Mais l’opinion publique est surtout obsédée par la menace anarchiste. Elle se concrétise dès le 24 juin 1894 par l’assassinat du président de la République Carnot, poignardé par Caserio. Le Congrès porte Casimir-Perier à la présidence, Charles-Dupuy n’arrivant qu’en deuxième position. Selon l’usage, ce dernier présente sa démission au nouveau président le 1er juillet 1894. Réinvesti, il innove dans son troisième cabinet en ne procédant à aucun remaniement au sein de son cabinet. En outre, il marginalise d’emblée Casimir-Perier, le traitant en quantité négligeable. Les deux têtes de l’exécutif ne s’aiment guère et ne s’entendent sur rien, ce qui engendre une cohabitation d’autant plus conflictuelle que le nouveau chef de l’Etat entend réhabiliter sa fonction et jouir pleinement de ses prérogatives. Sauf la répression de l’anarchie qui fait l’objet d’une loi ad hoc (29 juillet 1894), le pouvoir exécutif s’affaiblit et va s’écrouler. Début janvier 1895, le conseil d’Etat rend un avis favorable aux Compagnies de chemin de fer dans le bras de fer qui les oppose alors au gouvernement. Barthou, ministres des Travaux publics, démissionne, s’estimant désavoué. La Chambre rebondit en mettant en minorité le gouvernement. Logiquement, Charles-Dupuy démissionne le 26 janvier 1895, entraînant dans sa foulée le départ de Casimir-Perier qui prend acte du vote de défiance parlementaire pour constater la désagrégation de la majorité et quitter ses fonctions. Trois et demi plus tard, Charles-Dupuy retrouve le pouvoir en plaine affaire Dreyfus. Pour avoir participé au conseil restreint qui a ordonné l’arrestation du capitaine en octobre 1894, il connaît parfaitement le dossier. Comme ce fut le cas lors de la crise boulangiste, l’heure est à la « concentration républicaine ». Le quatrième gouvernement composé par Charles Dupuy le 1er novembre 1898 regroupe à parité radicaux et modérés. La nomination de Freycinet à la Guerre, poste qu’il a occupé avec succès de 1888 à 1893, témoigne de la prépondérance du pouvoir politique dans la question militaire. Le gouvernement marquant le point de départ de la politisation totale de l’affaire, la mort du président de la République Félix Faure, le 16 février 1899, précipite la crise. Elle affaiblit le régime – le chef de l’Etat étant décédé dans les bras de sa « connaissance » - au moment où il a le plus besoin de sa respectabilité. Elle porte les tensions à leur paroxysme, le président défunt étant connu pour son antidreyfusisme alors que son successeur, Emile Loubet, passe pour un révisionniste. Les ligues passent aussitôt à l’action et franchissent un degré de plus dans leur hostilité à la République. Paul Déroulède, qui a annoncé dès l’élection de Loubet son intention de recourir à un coup d’Etat, tente en vain de soulever l’armée le jour des obsèques du président Félix Faure. Le gouvernement réplique en l’arrêtant et en faisant lever son immunité parlementaire. De même, il fait poursuivre les ligues en justice afin d’obtenir leur dissolution. Or les ligues sont condamnées à de simples amendes tandis que Déroulède est acquitté fin mai par la cour d’assises. Le gouvernement paraît d’autant plus affaibli que Freycinet a démissionné début mai, laissant son portefeuille à Krantz, jusqu’alors détenteur du portefeuille des Travaux publics et qui ne jouit pas du même prestige que son prédécesseur. Sur ces entrefaites, le 3 juin 1899, la Cour de cassation annule le jugement dont Dreyfus avait été victime en 1894 et le renvoie devant un nouveau Conseil de guerre, à Rennes. Le lendemain, le président Loubet est vivement pris à partie par les antidreyfusards et molesté. Estimant la modération dépassée, Charles-Dupuy réagit avec vigueur. Il ferme des clubs royalistes, engage des poursuites contre l’avocat général et le président de la cour d’assises, suspectés de bienveillance envers Déroulède, demande à la Chambre la mise en accusation du général Mercier, dépose le 9 juin un projet de loi qui renvoie devant les tribunaux correctionnels les délits d’outrage ou de diffamation contre le président de la République et les corps constitués. Deux jours plus tard, il déploie un imposant appareil policier lors de la manifestation de protestation dreyfusarde orchestrée par Jaurès à Longchamp. Sa volonté d’éviter la guerre civile est interprétée par les gauches comme un outrage aux républicains, traités sur le même pied que les nationalistes. Interpellé par le député Vaillant, le ministère est renversé le 22 juin. Attaqué par les deux camps, il ne pouvait de toute façon plus espérer se maintenir. Durant ces deux derniers ministères – le cinquième ayant été constitué à l’occasion de l’élection de Loubet – Charles Dupuy a dû également gérer la délicate question de Fachoda. Delcassé, le ministre des Affaires étrangères, met fin à la crise en rappelant Marchand et en signant avec son homologue britannique un traité reconnaissant la domination de la Grande-Bretagne sur le bassin du Nil. Certes, la France subit un échec mais elle préserve l’avenir en préparant les voies de l’Entente cordiale. Elu sénateur de la Haute-Loire en 1900, Charles-Dupuy siège à la Chambre haute jusqu’à sa mort survenue à Ille-sur-têt (Pyrénées-orientales), le 23 juillet 1923. Fachoda, Panama, la crise anarchiste, Dreyfus : les cinq gouvernements de l’ancien universitaire ont été placés sous le signe de la crise politique. Ajoutons-y la mort brutale de deux présidents de la République, Carnot et Faure – « C’est le second qui me claque dans les mains », comme le « pachyderme » qui aura dû également gérer une cohabitation tendue avec un troisième (Casimir-Perier) et l’agression physique d’un quatrième (Loubet). Tout cela sans jamais pouvoir gouverner dans la durée, donc faire prévaloir la vision politique d’une République pacifiée qui s’esquissait dans son rapprochement avec les ralliés et ses lois sociales. Etrange destin en définitive, empli de paradoxes puisque ce modéré dut travailler dans l’urgence et la fermeté, échoue à l’intérieur tandis qu’il avait réussi à l’extérieur en rapprochant la République de la Russie et de l’Angleterre. CHARLOT (Etienne), 1865-1946 : Ingénieur et homme politique. Né à Pommard (Côte-d’Or) le 27 septembre 1865, Etienne Charlot, fils d’un tonnelier, devient ingénieur civil et s’engage dans le syndicalisme. Gérant de la Revue sociale, premier périodique de Dijon, puis secrétaire au comité de la fédération des travailleurs socialistes de l’Est. En 1915, il abandonne le parti socialiste, et, seize ans plus tard, adhère au parti radical-socialiste. Adjoint au maire de Dijon, conseiller général de la Côte-d’Or, il est député de ce département de 1919 à 1932. A la Chambre, il s’intéresse particulièrement aux questions des mines et des travaux publics. Il entre dans le premier cabinet Chautemps du 23 février au 1er mars 1930 comme sous-secrétaire d’Etat aux Travaux publics et prend en charge le dossier des transports. L’expérience Chautemps étant de courte durée, Charlot retrouve son siège à la Chambre avant d’être nommé sous-secrétaire d’Etat à l’Agriculture du 23 décembre 1930 au 26 janvier 1931 dans le ministère Steeg. Il décède à Paris le 13 janvier 1946. CHARPENTIER (Gustave), 1860-1956 : Compositeur. Né à Dieuze (Moselle) le 23 juin 1860, son père, boulanger, le pousse à apprendre la musique. A la guerre de 1870, la famille refuse de vivre sous un gouvernement allemand et se réfugie dans le Nord de la France, à Tourcoing, sur la frontière belge. Il prend des cours de violon et en 1876 entre à l'orchestre symphonique municipal. Il est embauché dans une filature, fonde une société musicale et enseigne le violon à son employeur, Albert Lorthiois, qui finance son entrée au conservatoire de Lille en 1778. Suite à la qualité de ses résultats, la ville de Tourcoing lui alloue en 1779 une pension annuelle pour lui permettre de suivre les cours du Conservatoire national de Paris. Il prend goût à la vie montmartroise, à la bohème et à une certaine rebellion contre l'autorité. L'intransigeance de son professeur de violon (Massard) qui ne supporte pas ses irrégularités, l'oblige à quitter temporairement le conservatoire. Après avoir joué quelques temps dans un orchestre, il reprend les cours d'harmonie avec Pessard en 1881, mais le service militaire l'empêche d'intégrer la classe de composition de Massenet en 1884. En 1887, il obtient le premier grand prix de Rome pour sa cantate Didon qui est mise au programme des concerts Colonne en 1888. Il est un pensionnaire indocile de la Villa Médicis de Rome. Souvent absent en raison de nombreux voyages à Paris, il est en opposition ouverte avec le directeur, le peintre Hébert, particulièrement à propos de la présence des femmes à la Villa. . Il y compose une suite orchestrale, Impressions d'Italie et La vie du poète, un drame symphonique qui semble être une version naturaliste du Lelio romantique de Berlioz ; Le premier acte et pratiquement tout le livret de Louise, son opéra célèbrissime, d'une trivialité audacieuse pour l'époque, écrit à partir de scènes de la vie contemporaine de Montmartre, dans un style réaliste teinté d'idéologie anarchiste. Les personnages principaux sont une couturière et un poète menant la vie de bohème à Montmartre. Il revient définitivement à Paris en 1890. En 1891 Ses Impressions d'Italie font un triomphe aux Concerts Lamoureux.Il achève Louise en 1896, certainement avec la complicité du poète Saint-Pol-Roux.Charpentier décline plusieurs offres de création partielle de son oeuvre jusqu'à ce qu' Albert Carré décide de marquer sa nomination à la direction de l'Opéra-Comique de Paris avec la création intégrale de Louise. Le 2 février 1900 l'immense succès emporte les contradicteurs (en 1950 on approche la millième représentation). Les mots de Paul Dukas sont restés célèbres : Le premier acte, et surtout le quatrième, sont déjà d'un maître. Les deux autres d'un homme. Prodige rare par le temps qui court, où nous entendons tant de soi-disant oeuvres d'art dont les auteurs ne sont ni des hommes, ni des maîtres, ni hélas des artistes. Gounod déclare aussi son admiration dans une lettre à Charpentier. Le 30 avril, Carré distribue 400 places gratuites aux couturiers parisiens. La même année Charpentier est promu Chevalier de la Légion d'honneur En 1902, il crée le conservatoire Populaire Mimi Pinson (héroïne d'Alfred de Musset) où les femmes peuvent recevoir une instruction musicale gratuite. En 1912, il succède à Massenet à l'Académie des Beaux-Arts. Il est promu officier de la légion d'honneur. Louise devait être le premier volet d'une trilogie. En 1913, le second volet, Julien ou la vie du poète, à un grand succès, interrompu par le départ soudain pour Bruxelles (6 mois après la première, le 4 juin 1913) du ténor Charles Rousselières (1875-1950) qui tient le rôle titre. La première guerre mondiale ne permet pas de remonter l'oeuvre. En 1913, il annonce une autre trilogie formée de trois opéras en 2 actes : L'amour au Faubourg, Comédiante et Tragédiante. Aucun n' été mené à bien. On cite parfois L'amour du Faubourg comme troisième volet qui aurait dû compléter Louise (Roman musical) et Julien (drame lyrique). Mais on mentionne aussi (Delmas) le projet d'un opéra Marie, fille de Louise pour compléter Louise et Julien En 1930, il est promu commandeur de la Légion d'honneur En 1938 il supervise une version cinématographique de Louise dirigée par Abel Gance. En 1950 il est promu Grand officier de la Légion d'honneur. Après la seconde guerre mondiale il vit replié dans sa demeure de Montmartre. Il laisse aussi des chansons, ses Poèmes chantée† Paris 18 février 1956. CHARRON (Auguste), : CHARTREUX (affaire des) : Comment une accusation de corruption sans preuve, lancée dans le Petit dauphinois puis reprise dans " L'intransigeant " mit en péril le gouvernement d'Émile Combes en 1905 ? Comment le sénateur Alfred Mascuraud, disciple de Léon Gambetta, fut accusé d'avoir accepté des Pères Chartreux un million de francs-or pour circonvenir des députés et les faire voter en faveur du maintien de leur abbaye à Saint-Pierre des Chartreux ? Comment un simple fait divers se transforme-t-il en affaire nationale ? DUNEZ (P.) : L’affaire des Chartreux, L’Harmattan, Paris, 2001. BOURGEOIS (R.) : L’expulsion des Chartreux. 1903, Paris, Coll. Evènements, 2000. CHASSIN (Henri), 1887-1964 : Poète. CHATEAUBRIAND (Alphonse de), 1877-1951 : Écrivain. Né à la Prévalaye (Ille-et-Vilaine) le 22 mars 1877, Alphonse de Chateaubriand passe toute son enfance dans le bocage vendéen, au château de La Motte. Son grand-père était peintre, son père musicien. En 1911, le prix Goncourt le révèle au grand public avec son roman Monsieur des Lourdines, histoire d’un gentilhomme campagnard du XIXe siècle, qui utilisait dans l’intrigue des thèmes sans grande originalité, mais s’imposait par la puissance de son évocation du bocage. Artiste solitaire, n’ayant d’autre ami que Romain Rolland, alphonse de Chateaubriand, mobilisé dès 1914, connaît, pendant les quatre années de la Première Guerre mondiale, une expérience boulversante de cette période qui doit déterminer son évolution future : socialement, il a le sentiment d’un retour aux sources élémentaires dans le naufrage du rationalisme occidental. Spirituellement, une sorte d’extase mystique en 1915 fera désormais de Chateaubriant un chercheur de Dieu, mais indépendant des églises et du dogme. La Brière, en 1923, qui obtient le grand prix du roman de l’Académie, reste dans l’inspiration de Monsieur de Lourdines, avec ses harmonies rustiques son association des passions humaines assez sauvages et des énergies du monde animal. La Réponse du Seigneur, en 1933, est déjà moins l’œuvre d’un romancier que d’un mystique. Chateaubriant proteste contre le matérialisme moderne, contre les conceptions égoïstes de la vie et rêve d’un nouveau moyen-âge. C’est dans le national-socialisme allemand qu’il croit le trouver. Au retour d’un voyage outre-Rhin en 1937, il salue dans La Gerbe des Forces, une religion nouvelle capable de liquider l’individualisme et de retrouver l’ivresse des communions avec la terre primitive. A partir de 1940, Chateaubriant milite dans le collaborationnisme. Exilé en Allemagne, il vit caché dans les montagnes du Tyrol jusqu’à sa mort à Kitzbühel (Autriche) le 2 mai 1951. CHAUMIÉ (Joseph), 1849-1919 : Avocat et homme politique. Né à Agen (Lot-et-Garonne), le 17 mars 1849, Joseph Chaumié est docteur en droit, avocat républicain à Paris puis à Agen dont il devient maire. Elu sénateur du Lot-et-Garonne en 1897, ce franc-maçon Joseph devient rapidement « l’un des orateurs les plus écoutés du Sénat ». Nommé ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts du 7 juin 1902 au 23 janvier 1905 dans le cabinet Combes, il appuie largement la tâche du président du Conseil en faveur de la laïcité. Mais il prend aussi le temps de mettre ne place la réforme du secondaire en 1904, d’intégrer l’Ecole normale supérieure à l’Université de Paris, ou encore d’encourager le Salon des Indépendants. C’est lui qui représente le gouvernement aux obsèques de Zola où il prononce le discours, ainsi qu’à l’inauguration du monument de Renan. En tant uqe responsable des Beaux-Arts, il décore Debussy et célèbre à Rome le centenaire de la villa Médicis. Le succès de ses activités la fait apprécier et lui vaut d’être nommé garde des Sceaux du 24 janvier au 13 mars 1906 dans le cabinet Rouvier. Il intervient en faveur de la séparation des Eglises et de l’Etat, mais avant tout pour tenter d’apaiser les conflits. Il favorise ainsi la gestion des biens acclésiastiques par des associations de prêtres. Enfin, c’est lui qui met un point final à la phase judiciaire de l’affaire Dreyfus. Il décèdera à Clermont-Dessous (Lot-et-Garonne), le 19 juillet 1919. CHAUSSON (Ernest), 1855-1899 : Compositeur. Né à Paris le 20 janvier 1855, Ernest Chausson est issu d'un milieu aisé. Son père, Prospère Chausson est entrepreneur des travaux publics et son fils Ernest bénéficie de l'instruction d'un précepteur, soucieux des disciplines artistiques et de la vie mondaine, qui le mène aux concerts, aux expositions et l'introduit, vers 1871 dans les salons. Chausson fréquente ainsi celui de Madame Jobert (la marraine de Musset), mais aussi à partir de 1874, celui de Madame Saint-Cyr de Rayssac. Il y rencontre des personnalités comme Fantin-Latour et Odilon Redon, Chenavard, l'abbé Lacaria et Vincent d’Indy. Il écrit quelques nouvelles, ébauche un roman, s'essaie un peu au dessin. Il entre à la faculté de droit en octobre 1875, obtient sa licence en avril 1876, puis soutient son doctorat le 7 mai 1877. Il devient avocat à la cour d'appel de Paris, mais n'effectue pas son stage pratique. En octobre 1879, il s'inscrit en auditeur libre dans la classe de composition du Conservatoire de Jules Massenet. Il avait déjà quelques compositions à son actif : deux sonatines pour piano à quatre mains, des variations, des chansons. Mais les plus anciens manuscrits conservés sont des compositions d'étude corrigées pas Massenet. Il tente le Prix de Rome en 1880 avec la cantate l'Arabe (pour ténor et choeur masculin), mais échoue au concours. Il étudie alors, jusqu'en 1883, au Conservatoire puis en privé, avec César Franck, auquel il a été présenté par Vincent d'Indy (classe d'orgue faisant fonction de classe de composition). En 1882, il assiste à la création de Persifal à Bayreuth en compagnie de Vincent d'Indy. En 1883, il épouse Jeanne Escudier et se rend avec elle à Bayreuth (il fera de nouveau le « pèlerinage » en 1889). En 1886, il devient pour une dizaine d'années, le secrétaire de la Société Nationale de Musique (fondée par Saint-Saëns en 1870). Il se lie d'amitié avec Duparc, Fauré, Bréville, Debussy qui fréquentent son salon renommé 22 rue de Courcelles à Paris, ainsi que Mallarmé, Régnier, Tourguéniev Albeniz, Isaye, Monet, Puvis de Chavan, etc. Il rassemble une importante collection de tableaux impressionnistes. Le 10 juin 1899, en roulant en vélo dans la propriété du baron Laurent-Atthalin au Limay (Seine-et-Oise), il heurte de la tête un des murs d'enceinte de sa propriété et succombe d'une fracture du crâne. On classe traditionnellement l'oeuvre de Chausson en trois périodes : -1878-1886, serait, héritage de Massenet, une période de mélodies élégantes et parfois un peu mièvres, avec des chansons comme Le charme (1879), Les papillons (1880) et la Sérénade Italienne (1880). Cette période comprend aussi une évolution de l'étoffe harmonique et formelle influencée par la musique de Wagner, comme l'orchestration de Viviane en 1882, et par celle de César Frank comme dans les chansons Nany (1880), La dernière feuille (1880), Les Quatre mélodies op.8 (1882-1888), l'Hymne védique (1886), et oeuvre majeure, La caravane (1887). -Le début de la seconde période coïnciderait avec sa nomination au secrétariat de la Société de Musique en 1886. On prête à sa fréquentation des milieux artistique et plus particulièrement à celle des compositeurs l'émergence d'un caractère dramatique marqué. On met aussi cela au compte de son caractère pessimiste, ou au fait qu'il désirerait se défaire de l'image de riche dilettante qu'on peut lui prêter. Parmi les oeuvres les plus remarquables de cette période, on compte le Poème de l’amour et de la mer (1882-1893), La légende de Sainte-Cécile (1891), son opéra Arthus (1886-1895) dont il écrit également le livret, la symphonie en si op.20 (1889-1890), et le concerto op.21 pour piano, violon et quatuor de cordes (1889-1891). -La mort de son père en 1894 marquerait le début de la troisième période, caractérisée par l'influence des poètes symbolistes et la lecture des écrivains russes comme Dostoïevski, Tourgueniev ou Tolstoï.. De cette période datent le cycle des Serres chaudes (1893-1896) sur des poésies de Maeterlinck, la Chanson perpétuelle (1898), le Poème op.25 pour violon et orchestre, créé par Ysaye et très apprécié par Debussy. Reflet d'une ontologisation des vieilles habitudes périodisantes historicistes, ce découpage est illusoire, il est une sorte de fantaisie psychologisante tendant à expliquer la plasticité créatrice par des événements remarquables (quitte à en grossir l'importance). Chausson est un amateur qui a du goût et du savoir faire. Il bénéficie d'un environnement très propice, mais il entame sa vie de compositeur avec un bagage technique relativement léger. Ce qui lui manque, il l'acquiert, le découvre et l'invente au fil du temps et de ses oeuvres. C'est peut être pour cela qu'il compose lentement. Arthus, qu'on classe dans la seconde période, reste sur le métier 9 années durant. C'est en fait une oeuvre de la prétendue troisième période. Au cours des années, l'oeuvre de chausson gagne constamment dans la maîtrise de la forme et se dote d'une harmonie brillante, souvent originale, parfois audacieuse, qui sont un travail sur l'héritage de César Frank, même si cela est teinté par l'admiration portée à la musique wagnérienne. BRETAUDEAU (I.) : Aspects du langage d'Ernest Chausson à travers Serres chauds (thèse), Université de Lyon-Lumière 1982. CHAUTEMPS (Camille), 1885-1963 : Avocat et homme politique. Né à Paris le 1er février 1885, Camille Chautemps appartient à une famille républicaine originaire de Haute-Savoie dont plusieurs membres se sont engagés dans la vie politique de la Troisième République. Il est le fils de Emile Chautemps, sénateur et ancien ministre des Colonies. Il s’intéresse très tôt à la politique et, à 17 ans, il devient secrétaire particulier à son oncle, Alphonse Chautemps, pour la campagne des élections législatives de 1902 à Tours. Après des études de droit, il s’installe ensuite comme avocat dans cette ville, reprenant le cabinet de rené Besnard, alors élu député. Chautemps y conduit la liste radicale aux élections municipales de 1912 et est élu conseiller, puis adjoint au maire. Après la mort de ce dernier, en 1917, il revient à Tours alors qu’il avait contracté un engagement volontaire et était parti pour le front, et prend de fait la responsabilité de la municipalité. Il est élu maire en 1919 puis devient député radical d’Indre-et-Loire en novembre de la même année. A partir de cette date, et jusqu’en 1940, il est presque constamment parlementaire. Réélu aux élections législatives de 1924 en Indre-et-Loire à la tête de la liste d’Union des gauches, il devient député du Loir-et-Cher lors d’une élection législative partielle le 26 juillet 1929, après avoir été battu aux législatives de 1928 dans la circonsciption de Chinon ; réélu député de la première circonscription de Blois en 1932, il devient sénateur du Loir-et-Cher le 23 septembre 1934, lors d’une élection partielle, et s’inscrit alors au groupe de la Gauche démocratique. Chautemps s’impose progressivement au Parti radical comme l’un des lieutenants d’Edouard Herriot et se reconnaît dans la ligne de gauche suivie par celui-ci. Le choix qu’il fait ensuite d’une position plus modérée explique sans doute sa présence dans de nombreux ministères : il devient ainsi ministre de l’Intérieur dans le premier cabinet Herriot (juin 1924-avril 1925), ministre de la Justice dans le troisième cabinet Painlevé (octobre-novembre 1925) avant de retrouver l’Intérieur dans le huitième cabinet formé par Aristide Briand (novembre 1925-mars 1926). Favorable à l'alliance des radicaux et du centre droit, il est un très éphémère président du Conseil en février 1930. Le 17 janvier, il est élu président du groupe radical de la Chambre, en remplaçement d’Edouard Daladier. Plus souple que son prédécesseur, il cherche à sortir le parti de son isolement et à rendre possible son retour au pouvoir grâce à la réalisation d’une formule de « concentration républicaine ». A cet effet, il provoque le 17 février la chute du cabinet Tardieu. Le président de la République Doumergue fait logiquement appel à lui comme dirigeant le groupe le plus nombreux de l’opposition. Le refus de Tardieu empêchant la réalisation de la « concentration républicaine », le ministère qu’il présente le 21 février, orienté à gauche, n’obtient pas la confiance de la Chambre et est remplacé par un nouveau cabinet Tardieu le 2 mars 1930. Après la victoire de l’Union des gauches aux élections législatives de 1932, Chautemps redevient ministre de l’Intérieur dans la cabinet Herriot, portefeuille qu’il conserve dans les ministères Paul-Boncour (décembre 1932-janvier 1933), Daladier (janvier-octobre 1933) et Sarraut (octobre-novembre 1933). Après la chute de ce dernier, le président de la République Albert Lebrun l’appelle à former un nouveau gouvernement. La composition de ce ministère formé le 25 novembre 1933 essentiellement dirigé par des radicaux-socialistes, diffère peu de celle des ministères précédents. Grâce à l’abstention des socialistes et au soutient des « néos » du parti socialiste de France, il peut faire adopter des mesures destinées à redresser la situation financière du pays, notamment une restriction budgétaire de six milliards de francs mais il est atteint par les développements de l'affaire Stavisky. Beau-frère du procureur général Pressard qui avait accepté dix-neuf remises du procès de Stavisky, Chautemps est en effet victime, au bébut de l’année 1934, d’une campagne menée par l’Action française, relayée par la presse et les hommes politiques de droite. Tous l’accusent d’être le protecteur de Stavisky, puis d’avoir ordonné son assassinat. Le gouvernement est fragilisé par l’agitation qui s’empare, plusieurs jours durant, des rues autour de la Chambre. Et lorsque Chautemps a la maladresse de s’opposer à la constitution d’une commission d’enquête sur l’affaire, le ministère est contraint à la démission le 30 janvier 1934. Il doit attendre deux ans pour revenir au gouvernement, comme ministre des Travaux publics dans le cabinet Sarraut (janvier-juin 1936). Rallié au Front populaire, il devient ministre d’Etat de Léon Blum de juin 1936 à juin 1937 puis lui succède à la tête du gouvernement le 22 juin 1937. Chautemps doit alors tenir compte de l’état d’esprit des socialistes et des communistes, qui forment l’essentiel de sa majorité, mais il doit aussi ménager le Sénat, dont l’attitude est approuvée par une large fraction de l’opinion.. L’accord du Conseil national de la SFIO obtenu, Chautemps, qui ne prend aucun portefeuille, dirige le gouvernement, avec une équipe peu renouvelée. Léon Blum devient vice-président du Conseil, apportant ainsi sa caution. Après que le ministre des Finances Georges Bonnet a révélé la gravité de la situation financière, le président du Conseil obtient les pleins pouvoirs qui avaient été refusés à Léon Blum. Les principales décisions du cabinet sont d’ordre économique. Il met au point le statut de la Société nationale des chemins de fer français et développe une politique classique d’économies et de majorations fiscales. Il détache le franc de l’or et le soumet à la loi du marché, se fait accorder des avances par la Banque de France supérieures à celles de son prédécesseur, augmente les taxes et accentue la progressivité de l’impôt sur le revenu. Enfin, il réduit de façon notable les projets de grands travaux. Mais ces mesures ne suffisent pas pour rétablir les grands équilibres : la balance des paiements, la balance commerciale, le budget restent en déficit. A partir de l’automne 1937, commence une vague de grèves avec l’occupation des entreprises. Dans ce contexte, et alors que le gouvernement Chautemps semble faire preuve d’immobilisme en politique étrangère et coloniale, l’union des gauches se fissure lentement. Le 14 janvier 1938, Chautemps est pris à partie à la Chambre par le communiste Arthur Ramette, qui lui reproche de ne pas appliquer le programme convenu, dresse le bilan des espoirs populaires déçus et annonce que les communistes s’abstiendront lors de la question de confiance demandée par le ministère. Le président du Conseil rétorque qu’il ne juge plus nécessaire la présence des communistes dans la majorité, ce que tout le monde considère comme une ouverture en direction des modérés. Les ministres communistes en tirent les conséquences et se retirent du gouvernement. Le 15 janvier, Chautemps démissionne. Après les echecs de Léon Blum et de Georges Bonnet a former un nouveau gouvernement, le président de la République Albert Lebrun fait de nouveau appel à Chautemps dont la réputation de conciliateur est maintenant solidement établie dans les milieux politiques. Son quatrième et dernier cabinet de janvier à mars 1938 ne comprend plus de socialistes. Mais, s’il bénéficie d’une unanimité ambigüe à la Chambre, le nouveau cabinet manque d’autorité. Alors que la situation financière apparaît de plus en plus alarmante, le chef du gouvernement demande les pleins pouvoirs pour appliquer une politique d’austérité et d’inflation. Le groupe parlementaire SFIO fait alors savoir qu’il refusera ses voix. Camille Chautemps choisit de démissionner le 10 mars 1938, sans affronter le vote, dans un climat de très forte tension internationale. Il ne fait pas patie du cabinet suivant que forme alors Léon Blum. D’avril 1938 à mars 1940, il est vice-président du Conseil du gouvernement Daladier, où il est chargé de la coordination des services à la présidence du Conseil. Camille Chautemps, qui en 1937-1938 n’avait pas su tenir compte de la gravité de la situation internationale, approuve la politique extérieure de Georges Bonnet et justifie la conférence de Munich par le pacifisme de l’opinion publique. Il reste vice-président du Conseil dans le cabinet Reynaud, mais, en raison de l’absence de toute sympathie entre lui et le chef du gouvernement, ne se voit confier ques des responsabilités secondaires. Lors du conseil des ministres le 16 juin 1940, il propose de demander à l’Allemagne les conditions d’armistice et d’en informer le gouvernement anglais. Resté vice-président du Conseil dans le gouvernement du maréchal Pétain, Chautemps refuse d’être président de la délégation d’armistice et, mécontent de la montée en puissance de Pierre Laval, annonce le 26 juin au maréchal sa décision de quitter le gouvernement. En novembre 1940, il part pour Washington et choisit d'y demeurer jusqu'en 1944, date à laquelle il gagne l'Afrique du Nord. Après la Libération, il ne reprendra plus d’activité politique et partagera sa vie entre Paris et Washington, où il y meurt le 1er juillet 1963. JANKOWSKI (P.) : Cette vilaine affaire Stavisky, Histoire d’un scandale politique, Paris, Fayard, 2000. CHAUTEMPS (Emile), 1850-1918 : Médecin et homme politique. Né à Valleiry (Haute-Savoie) le 2 mai 1850, Emile Chautemps, médecin, devient président du conseil municipal de Paris en 1889. C’est lui qui organise à ce titre le fameux banquet des 13.000 maires de France. Député radical socialiste et franc-maçon, il intervient très fréquemment à la tribune sur les sujets les plus divers. Ministre des Colonies du 17 janvier au 31 octobre 1895 dans le troisième cabinet Ribot, il défend son budget et gère les affaires courantes avant de retrouver son siège à la Chambre, puis d’être élu sénateur en 1905. Il devient ministre de la Marine du 9 au 13 juin 1914 dans le quatrième cabinet Ribot. Il décèdera à Paris le 10 décembre 1918. CHAUVEAU (Auguste), 1827-1917 : Physiologiste. CHAUVEAU (Claude), 1861-1940 : Médecin et homme politique. Né à Pouilly-en-Auxois (Côte-d’Or) le 22 août 1861, Claude Chauveau est médecin, spécialiste de laryngologie. Député attaché aux questions agricoles, il est ministre de l’Agriculture du 20 février au 2 juin 1932 dans le troisième cabinet Tardieu. Il décèdera à Pouilly-en-Auxois le 27 février 1940. CHAUVEAUD (Gustave-Louis), 1859-1933 : Botaniste-anatomiste. Gustave Cheauveaud est né à Aigre en décembre 1859. Issu d'un milieu modeste, il poursuit un apprentissage de mécanicien. En autodidacte, il observe plantes et insectes qu'il élevait pour étudier leur métamorphose. Mais, attiré par la science, il part pour Paris à l'âge de 20 ans, où il mène de front son métier et ses études. Licencié es-sciences naturelles à 29 ans, docteur es-sciences à 32 ans, docteur en médecine à 33 ans. En 1890, il entre au laboratoire de l'école pratique des Hautes Études dont il deviendra directeur par la suite. Docteur du Muséum d'Histoire Naturelle. Directeur des travaux pratiques de botanique à la faculté des sciences de Paris pendant 30 ans. Maître de conférence à la Sorbonne, il a passé sa vie dans les laboratoires. Il est mort en 1933, laissant l'image du savant d'un autre siècle. Pour suivre ses recherches, il a dû affronter l'opposition de ses maîtres dont il bousculait les théories. Jusqu'à ce que la reconnaissance de ces mêmes maîtres lui offre le seul honneur qu'il ait recherché. CHAUVET (Gustave), 1840-1933 : Archéologue. Né à Pérignac (Charente), le 17 février 1840, après avoir été élève du collège de Saintes, Gustave Chauvet son baccalauréat en 1858 et arrête là ses études scolaires. Devenu clerc de notaire à Pons, puis notaire lui-même à Edon et à Ruffec, il cède son cabinet en 1913 et se retire alors à Poitiers. Dès sa jeunesse, il s’est passionné pour la géologie et surtout pour la préhistoire que Boucher de Perthes venait de révéler en France. Fouillant inlassablement les grottes de sa province, il fait de nombreuses communications aux sociétés savantes, publie des monographies sur l’archéologie, les découvertes paléolithiques et les sépultures préhistoriques de la région charentaise (Statistique et bibliographie des sépultures préromaines du département de la Charente, 1899). Son étude sur Les Grottes de Chaffaud est sa publication la plus importante. Il meurt à Poitiers en 1933. CHAUVIN (Georges), 1885-1953 : Bâtonnier et homme politique. Né à Tilleul-Lambert (Eure) le 16 novembre 1885, Georges Chauvin est bâtonnier d’Evreux et député d’union républicaine. Du 28 novembre 1925 au 8 mars 1926, il est sous-secrétaire d’Etat aux Finances, chargé des Régions libérées dans le huitième ministère Briand. En un peu plus de trois mois, il n’a que le temps de prolonger les délais d’examen des dossiers et de débloquer des crédits provisoires. Il décèdera à Evreux (Eure), le 1er mars 1953. CHAVAGNES (Jean-Ludovic Picart-Chavagne, dit René), 1883-1956 : Journaliste et homme politique. Né à Paris le 10 octobre 1883, Chavagnes est élu député du Loir-et-Cher en mai 1924, comme républicain. Militant de la ligue de la République, il en est le secrétaire général. Il ne se représente pas en 1928 et fait paraître un livre sur le Maroc et la Syrie. Il fonde la ligue contre la spoliation financière pour lutter contre les requins de la Bourse. Franc-maçon actif, il décède à Paris le 1er mars 1956. CHEMINS DE FER : GET (F.) et LAJEUNESSE (D.) : Encyclopédie des chemins de fer, Éditions de La Courtille, 1980. BRONCARD (Y.) : Les plus belles années des Trains français, Sélection du Reader's Digest, 1997 Le Patrimoine de la SNCF et des chemins de fer français, Flohic éditions, 1999 FAVRE (T.) : Le Train s'affiche, La Vie du rail, 2005 CHÉREAU (Gaston), 1874-1937 : Romancier. Né à Niort (Deux-Sèvres) le 6 novembre 1874, Gaston Chéreau, pessimiste de vocation et de système, se rattache à Flaubert et à Zola autant qu’à Balzac. Dès ses débuts, il montre un sens des intrigues nouées autour d’un personnage qui fait corps avec son milieu. Son exemple nous montre que le roman social fait bien partie de l’héritage naturaliste. Chéreau est le peintre vigoureux des paysans et de la bourgeoisie de province. S’étant fait connaître par Monseigneur voyage (1904), il donne ensuite le roman qui lui vaut une certaine notoriété Champi-Tortu (1906). Puis viennent la Part du feu (1909), la Prison de verre (1911) et l’Oiseau de proie (1914). Ajoutons Le Monstre (1914), où l’on trouve peut-être ses pages les plus fortes, ainsi que Valentine Pacquault (1921), La Maison de Patrice Perrier, le Flambeau des Riffault, une grande fresque paysanne (1925), et un volume de contes tout à fait remarquable : le Despelouquero (1923). Toute son œuvre, en somme, se fonde sur l’observation de la bourgeoisie de la ville et des champs. Le 5 mai 1926, Gaston Chéreau est élu à l’Académie Goncourt. Il décèdera à Boston (Etats-Unis), le 20 avril 1937. CHÉRON (Adolphe), 1873-1951 : Homme politique. Né à Levallois-Péret le 27 mars 1873, Adolphe Chéron est président de l’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire et député radical socialiste. Il est le spécialiste de ces questions à la Chambre. C’est en cela qu’il est nommé sous-secrétaire d’Etat à l’Education nationale, chargé de l’Education physique du 26 novembre 1933 au 29 janvier 1934 dans le second cabinet Chautemps. Il a seulement le temps de lancer les nombreux projets qu’il défend depuis des années car le gouvernement démissionne au bout de deux mois. Chéron décèdera à Saint-Maur-des-Fossés le 27 novembre 1951. CHÉRON (Henry), 1867-1936 : Avocat et homme politique. Né à Lisieux (Calvados) le 11 mai 1867, Henry Chéron, fils d’un modeste représentant de commerce poursuit son droit grâce à un emploi de préparateur en phamarcie. Il devient avocat à la cour de Caen puis maire de sa ville natale de 1894 à 1908. Conseiller général en 1908, Henry Chéron est élu député républicain modéré en 1906, il entre la meme année au gouvernement. Sous-secrétaire d’Etat à la Guerre du 25 octobre 1906 au 23 juillet 1919 dans le premier cabinet Clemenceau, il devient rapidement la « bonne fée barbue » des troupiers dont il améliore sensiblement les conditions de vie. Nommé ensuite sous-secrétaire d’Etat à la Marine du 24 juillet 1909 au 2 novembre 1910 dans le premier cabinet Briand, il met fin par la négociation à la grève des inscrits maritimes et travaille à la réorganisation d’une partie de l’administration. Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale du 22 mars au 8 décembre 1913 dans le ministère Barthou, il sa fait l’avocat des petis épargnants et prépare la loi sur les conventions collectives qui ne verra le jour qu’àaprès la guerre. Elu sénateur en 1913, il va siéger au Palais du Luxembourg à la chute du cabinet et ne retrouve le gouvernement que dix ans plus tard. Ministre de l’Agriculture du 15 janvier 1922 au 28 mars 1924 dans le second cabinet Poincaré, il va tout faire pour promouvoir la production agricole, convaincu qu’elle est la source de la richesse nationale et de l’équilibre budgétaire. « L’épi sauvera le franc ! ». Il libère alors les exportations et contrôle les importations. Cependant, les prix montent rapidement et il devient « Chéron-vie-chère », mais il ne remet pas pour autant sa politique en cause et parle plutôt de la responsabilité des « mercantilistes ». Soucieux de la modernisation de l’agriculture, il favorise l’électrifiaction des campagnes, la baisse des tarifs de marchandises des chemins de fer, la création d’abattoirs coopératifs, la production d’engrais chimiques et lutte contre le morcellement des exploitations. Il intervient aussi dans le domaine de l’enseignement, des chambres d’agriculture, de l’assurance et de la prévoyance sociale. Ministre du Commerce, de l’Industrie et des Postes et Télégraphes du 14 septembre au 10 novembre 1928 dans le quatrième cabinet Poincaré, il démissionne quelques semaines plus tard avec le gouvernement, n’ayant eu le temps de régler que les affaires courantes. Ministre des Finances du 3 novembre 1928 au 20 février 1930 dans le 1er ministère Tardieu, il met en place une politique d’économie tout en diminuant les charges des petis agriculteurs et des petits commerçants et en réajustant les pensions. Il parvient effectivement à rétablir l’équilibre et tente, la suite du scandale de La Gazette de Paris, de mieux protéger l’épargne. Tardieu le conserve dans son second ministère comme ministre de la Justice du 17 novembre 1930 au 26 janvier 1931. Il tente de « nettoyer » les milieux financiers au moment où les affaires se succèdent. Le 18 décembre 1932, il accepte d’entrer dans le cabinet Paul-Boncour comme ministre des Finances. C’est qu’il doute de la fidélité de la droite au régime parlementaire et veut ramener le calme par l’équilibre budgétaire. Comme ses amis politiques s’indignent et que la gauche est méfiante, son programme d’économie et d’augmentation des impôts est repoussé, entrainant sa déssion et celle du gouvernement le 30 janvier 1933. Garde des Sceaux du 9 février au 15 octobre 1934 dans le gouvernement « d’union nationale » de Doumergue, il favorise l’éclosion de la vérité, mais lui aussi est bientôt mis en cause dans l’affaire Prince. Sa bonhomie et sa bonne humeur disparaissent alors définitivement de la scène politique. Il décèdera à Lisieux le 14 avril 1936. CHEVALIER (Maurice), 1888-1972 : Chanteur et acteur. Maurice Chevalier est né le 12 septembre 1888 à Paris. Il fait de modestes débuts dans les caf'conc' de Ménilmontant dès la fin du XIXe siècle. C'est en 1909 qu'il se lie avec Mistinguett et qu'il quitte la chanteuse Fréhel pour elle. Malheureusement, leur liaison s'arrêtera en 1919. Désormais jeune premier, il incarne pendant les années folles un personnage de dandy frivole à l'accent faubourien qu'il garde lorsqu'il parle, parfaitement, anglais. Le phonographe relaie ses succès à la scène dans diverses revues et opérettes. Valentine et Dans la vie faut pas s'en faire sont des triomphes des années 1920, toutes écrites par Albert Willemetz. En 1928, il se marie avec Yvonne Vallée et commence cette même année, une carrière cinématographique à Hollywood qui l'éloigne de la France jusqu'en 1935 où il s'illustre notamment en 1934 dans les deux versions anglaise et française de La Veuve joyeuse d'Ernst Lubitsch. Il fera la rencontre de Duke Ellington qu'il fera engager pour faire sa première partie à Broadway et rencontrera à Hollywood l'époustouflante Marlène Dietrich qui lui vaudra son divorce avec Yvonne.En perte de vitesse à Hollywood, il décide de rompre avec MGM et de rentrer en France. Nous sommes en 1935, ce sont de nouveaux succès de la chanson : Prosper (1935), Ma Pomme (1936), Y a d’la joie (1938) qu'il crée pour un jeune auteur dont le nom deviendra célèbre, Charles Trenet. et est décédé le 1er janvier 1972 à Paris CHEVALIERS DU GLAIVE (Les) : Organisation secrète indépendante du CSAR mais ayant des contacts avec lui, créée en 1906 à Nice. Animés par le docteur Jean Faraud, le dirigeant des groupes antisémites de la Côte d’Azur, Les Chevaliers du glaive sont traqués par la police au moment de l’affaire de la Cagoule. Anticommuniste, et antisémite, le groupe cesse toute activité à partir de 1938. CHIAPPE (Jean), 1878-1940 : Administrateur et homme politique. Né le 3 mai 1878 à Ajaccio (Corse), Jean Chiappe fait des études de droit et devient fonctionnaire au ministère de l’Intérieur. En 1927, il est nommé préfet de police de Paris. Réputé pour la répression des manifestations communistes et des activités de gauche son comportement contratse avec la complaisance dont il fait preuve de complaisance concernant l’action des ligues d’extrême-droite. Devenu très populaire, certains voient en lui un gardien de l’ordre efficace. Cette attitude est justifiée fin 1933-début 1934, lorsque L’affaire Stavisky éclate et stimule les manifestations d’extrême-droite. Aussi, la gauche aspre-t-elle à voir Chiappe quitter la préfecture de police. Or, Plusieurs gouvernements successifs ont tenté de déloger ce haut-fonctionnaire, en vain. Après la cute du cabinet Chautemps, les socialistes font du départ du préfet de police l’une de leurs conditions de leur soutien parlementaire au gouvernement Daladier. Le 3 février 1934, enfin, le nouveau président du Conseil, le révoque s’aprecevant que la préfet de police avait bloqué pendant plusieurs semaines dans son bureau le dossier Stavisky. Daladier lui propose en échange le poste de Résident général au Maroc que Chiappe refuse, menaçant le chef du gouvernement de manifestations de rues. Devant le palais Bourbon, les ligues d’extrême-droite et anciens combattants de l’UNC organisent alors une grande manifestation de soutien le 6 février, qui dégénère vite en émeute contre la République et le gouvernement. Devenu un symbole de l’activisme de droite contre la majorité de gauche, Chiappe peut entamer une carrière politique. En 1935, il est élu au Conseil municipal de Paris qui le porte à sa présidence. Aux élections législative sde 1936, il devient député de la Seine et, dans cette Chambre du Font populaire, sera l’un des avocats des ligues et l’un des principaux orateurs de l’extrême-droite. Le 10 juillet 1940, il vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain et accepte du gouvernement de Vichy, à l’automne, le poste de haut-commissaire de France au Levant. Le 27 novembre 1940, l’avion qui le menait à son poste, au Liban, est abattu par erreur par des avions italiens au cours de la bataille aéronavale de Tarente. CHICHÉ (Albert), 1854-1937 : Avocat et homme politique. Né à Bordeaux (Gironde) le 09 septembre 1854, Albert Chiché milite très tôt pour l’Empire, puis dans les milieux dextrême gauche. Orateur et bretteur redoutable, il combat avec fougue l’ancien ministre David Raynal, candicat dans la Gironde, dans les réunions publiques et même sur le pré où il entraîne un jour son adversaire. A la fois socialiste et boulangiste, il se présente en 1889 aux élections législatives à Bordeaux et est élu contre Ernest Monis, futur président du Conseil, alors député sortant. Battu en 1893, il prend sa revanche à une élection partielle, en 1897, et est réélu en 1898. Il s’inscrit au groupe parlementaire antisémité président par Drumont et se signale à la Chambre par ses propositions de lois nationalistes, visant la main-d’œuvre immigrée et les compagnies d’assurances étrangères, ainsi que par ses interventions en faveur de l’amnistie politique et contre la corruption électorale. Il est l’un des fondateurs de la Bourse indépendante du travail de Bordeaux et l’un des organisateurs de la première manifestation du 1er mai, en 1890. Mis en échec aux élections de 1902 et 1906, il se retire à Arcachon où il dirige L’Avenir d’Arcachon. Il est l’auteur de quelques livres dont L’Affaire de Panama. Il décède à Arcachon (Gironde) le 5 septembre 1937. CHICHERY (Albert), 1888-1944 : Industriel et homme politique. Né au Blanc (Indre), Albert Chichery, propriétaire d’une usine de cycles, est élu député radical socialiste en 1932. Il accepte de rentrer dans le cabinet Reunaud avec la responsabilité du Commerce et de l’Industrie du 5 au 16 juin 1940 puis favorable à l’armistice, il entre quelques jours plus tard dans le cabinet Pétain comme ministre de l’Agriculture et du Ravitaillement du 16 juin au 12 juillet 1940. Membre du Conseil national de Vichy, il est exécuté par des maquisards au Blanc le 15 août 1944. CHOISEUL-PRASLIN (Eugène-Antoine-Horace, comte de), 1837-1915 : Officier et homme politique. Né à Paris le 23 février 1837, Horace de choiseul-Praslin est issu d’une illustre et ancienne famille d’hommes politiques. Il est le fils du duc de Praslin, pair de France et député sous la monarchie de Juillet. Officier de marine puis de cavalerie, avant de se lancer dans la politique, il est élu député d’opposition libérale en 1869 en Seine-et-Marne où il vote contre la déclaration de guerre à la Prusse en 1870. Réélu député de Seine-et-Marne de 1871 à 1885, il vote pour l’amendement Wallon et pour l’ensemble des lois constitutionnelles de la Troisième République. Jules Ferry le nomme dans son premier cabinet sous-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères du 28 septembre 1880 au 13 novembre 1881. Député de la Corse de 1889 à 1893, il décède à Paris le 6 décembre 1915. CHRISTOPHE (Georges Colomb, dit), 1856-1945 : Ecrivain. Né le 25 mai 1856 à Lure (Haute-Saône), ancien élève de l’Ecole normale supérieure, Georges Colomb a une paisible carrière de professeur – il est sous-directeur du laboratoire de botanique de la Sorbonne - , mais à côté de nombreux manuels scolaires qu’il publie sous son nom, il se divertit à composer des albums de bandes dessinées, où il fait preuve d’un humour charmant qui n’exclu pas un sens satyrique très vif. Publiés d’abord en feuilleton dans un journal pour enfant, Le Petit Français illustré, sous le pseudonyme de Christophe, puis en volumes, La Famille Fenouillard (1895), ouvrage « destiné à donner à la jeunesse française le goût des voyages », les Facéties du sapeur Camember (1896), l’Idée fixe du savant Cosinus, les Malices de Plick et Plock (1904) et les Mémoires de Gazelle connaissent un succès très vif auprès de leurs jeunes lecteurs, succès qui atteint bientôt le monde des adultes. Ces petits récits, illustrés de façon charmante, n’ont rien perdu ni de leur fraîcheur ni de leur malice. Il peut-être amusant de rappeler que le personnage savant Cosinus est inspiré à Christophe par Henri Poincaré qui habitait le même immeuble que l’auteur et que celui-ci détestait, ainsi d’ailleurs que Paul Painlevé, et que Tristan Bernard reçut des leçons particulières, mais de sciences naturelles. La grande passion de la vie de ce singulier savant est l’identification d’Alaise (Doubs) avec Alésia, identification qu’il est d’ailleurs le seul à peu près à soutenir et qui lui vaut d’être statufié de son vivant par les habitants d’Alaise reconnaissants. Il décèdera à Nyon (Drôme) le 3 janvier 1945. CHRISTOPHLE (Albert-Silas-Médéric-Charles), 1830-1904 : Avocat, homme politique et administrateur. Né à Domfront (Orne) le 13 juillet 1830, Albert Christophle est docteur en droit, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation puis nommé préfet de l’Orne en 1870. Il démissionne et est élu par son département député à l’Assemblée nationale de 1871 à 1902 avec une interruption de deux ans en 1885-1887. Il siège au centre gauche à la Chambre lorsque Dufaure lui offre le portefeuille des Travaux publics du 9 mars au 11 décembre 1876 dans son quatrième cabinet puis dans le ministère Simon du 12 décembre 1876 au 16 mai 1877. Il place alors des ingénieurs des Ponts à la tête de tous les services du ministère et s’intéresse particulièrement au développement des chemins de fer. Il est nommé ensuite gouverneur du Crédit foncier de France de 1878 à 1895. Il revient au Parlement en 1887. Il a publié un Traité théorique et pratique des travaux publics. Il décèdera à Paris le 23 janvier 1904. CIMETIÈRES : CINÉMA : C’est en 1895 que les frères Louis et Auguste Lumière qui viennent de déposer le brevet du cinématographe, font la démonstration, devant des scientifiques, du premier film de l'histoire du cinéma La sortie des usines Lumière puis devant le public avec L’Arroseur arrosé et Entrée en gare du train de la Ciotat. Le cinéma est alors exclusivement muet et la barrière de la langue n'existe pas. On estime que la France produit alors près de 80% des films dans le monde. Les Français viennent même filmer aux Etats-Unis et, Edison, furieux, obtient l'expulsion des équipes de tournage françaises et fait notamment fermer en avril 1897 la filiale américaine de la compagnie Lumière. Pressentant l’avenir de ce qui n’est encore qu’une curiosoté, Charles Pathé fonde en 1900 une maison de production de films, imité par la suite par Léon Gaumont. Le film passe alors des baraques foraines où il s’était alors cantonné aux théâtres spécialisés. Si le film est clairement documentaire, sans mise en scène ni scénario, l'un des premiers à envisager le cinéma non plus comme un témoignage mais comme un art est Georges Méliès. Il utilise les trucs et astuces en usage dans le monde des illusionnistes et les adapte pour le cinéma. En 1902, son Voyage dans la Lune, premier film de fiction de 14 minutes est sans doute le premier spectacle organisé à vocation commerciale. Le public fera un triomphe à cette oeuvre qui ouvrira la voie au grand spectacle cinématographique. Il va acquérir ses lettres de noblesse à partir de 1908 avec la vogue du film d’Art, c’est à dire du théâtre filmé dont la première grande œuvre et le premier grand succès est, en 1908, L’Assassinat du duc de Guise, pionnier d’une série qui va comporter tous les succès du théâtre national. Si le film d’art s’adresse à l’élite intellectuelle, c’est le grand public qui vise les ciné-romans, films à épisodes, dont les maîtres sont Victorien Jasset (qui tourne la série des Nick Carter, puis celle des Zigomar) ou Louis Feuillade, rendu célèbre par la série des Fantomas, Judex, Les Vampires, avant de connaître la gloire, après la Première Guerre mondiale avec Les deux gamines ou L’Orpheline. Mais le succès le plus considérable est celui du film comique dont Max Linder est le véritable maître, faisant des émules en France comme dans le monde entier, au point de devenir avant 1914 la première star de l’histoire du cinéma. Le problème du son mobilise quelques esprits et on met en place à Paris plusieurs salles sonorisées dès 1912, le Gaumont Palace au premier chef. Les compagnies sont toutefois hostiles à cette évolution et parviennent à bloquer toute évolution en ce sens. L'enjeu linguistique était déterminant car la France, désormais grignotée par les productions américaines et danoises notamment, ne pouvait pas se permettre le luxe de se contenter du seul marché francophone. On attendra donc deux décennies pour progresser à ce niveau, mais les compagnies françaises n'ont plus alors le gabarit de leurs homologues d'avant-guerre. Dès le déclenchement de la Première Guerre mondiale, tous les tournages sont interdits, la pellicule coûtant trop chère en matières premières, toutes dévolues à l'effort de guerre. Les Américains profitent de l'aubaine et dès 1919, 80% des entrées en France sont réalisés par des films américains. De plus, les règles du jeu cinématographique ont changé avec l'avènement du long métrage. Le cinéma français se relève et voit émerger un mouvement souvent oublié, « l'avant-garde » qui représente une première école de cinématographie d'importance. Elle se pose, comme il se doit, en réaction à la génération précédente et tire l'essentiel de sa substance d'une aversion définitive contre la guerre. Comme réaction, l'Etat a implanté en 1928 un contingent de films de 1:7 (un film français par sept films étrangers doit être montré aux cinémas française) pour secourir le film français. C’est autour de Louis Delluc, critique et cinéaste, que naît en France l’école « impressionniste », illustrée par Germaine Dulac, Marce L’Herbier ou Abel Gance. Il s’agit moins pour cette école de raconter une intrigue que de peindre une atmosphère en insistant sur le décor, le paysage, la psychologie des personnages. Citons : Eldorado ou L’Homme du Large de Marcel L’Herbier ; Fièvres de Louis Delluc et, de manière moins prononcéee, La roue (1923) ou Napoléon (1927), d’Abel Gance, unanimement considérée comme l'une des oeuvres les plus novatrices de l'époque, tant par la modernité de son montage que par l'établissement d'une sorte de sémantique du film dans la mesure ou il tend à proposer voire à imposer une palette des différents sens d'une même figure de style (l'iris et la surimpression notamment). C’est à la fin des années vingt que le cinéma muet va atteindre son somment avec des recherches esthétiques conduites par l’avant-garde intellectuelles qui voit dans le septième art un vecteur idéal de ses tentatives de création. Dadaïstes et surréalistes s’essayent au cinéma. René Clair réalise Entr’acte sur un scénario du peintre Picabia, le premier et le plus garnd film dadaïste. Le surréalisme donne des œuvres comme La Coquille et le clergyman de Germaine Dulac sur un scénario d’Antonin Artaud, ses chefs d’oeuvre érant réalisés par Luis Buñel (Un chien andalou, L’Age d’or). Toutefois, ces œuvres élitistes destinées à un public restreint ne résument pas à elles seules la fécondité du cinéma français des années vingt. Il faudrait prendre également en compte l’école documentaire française, préocupée de réalité sociale, avec des films comme Zone de Georges Lacombe, Nogent, Eldorado du dimanche de Marcel Carné ou A propos de Nice de Jean Vigo. Enfin, le cinéma populaire destiné au grand pulic connaît une extraodinaire expansion avec l’adaptation pour le cinéma d’œuvres célèbres de la littérature française. Ainsi se fonde le succès de Baroncelli , auteur de film comme Le Père Goriot, d’après Balzac, Nène, adaptation du roman d’Ernest Pérochon, ou Pêcheurs d’Islande et Ramuntcho, d’après Pierre Loti. Dans le millier de films produits par le cinéma d’adaptation, il faut faire un sort particulier aux oeures de Jacques Feyder qui connaît le succès avec L’Atlantide, Crainquebille et surtout Thérèse Raquin, d’après le roman de Zola, et à celle de René Clair qui trouve son style avec une adaptation du vaudeville de Labiche et Michel Un chapeau de paille d’Italie. Ces dernières années du cinéma muet sont aussi celles de la réalisation du film qui en est l’un des sommets, La passion de Jeanne d’Arc tournée à Paris par la cinéaste danois Carl Dreyer. L'arrivée du cinéma parlant constitue une grande révolution qui bouleverse le cinéma mondial au même moment où la crise économique mondiale se répercute également sur le cinéma français. 20 salles sonorisées sont recensées en France en 1929 ; elles sont déjà 1..000 en 1931 et 4.250 en 1937. La France compte dans ses salles 150 millions de spectateurs en 1929, 234 en 1931 puis 453 en 1938. En ces temps de crise, le cinéma offre la possibilité d’évasion dont la population a besoin. L’heure est à ce que Georges Sadoul a appelé le « réalisme poétique ». A la base, des situations héritées du réel et vues selon le naturalisme littéraire. Dans le traitement cinématographique, une vision poétique qui doit beaucoup aux recherches de l’avant-garde surréaliste. Véritable chef de file de cette école du réalisme poétique des années trente, René Clair réalise une série de chefs-d’œuvre qui en font définitivement l’un des maîtres du cinéma français avec Sous les toits de Paris (1930), Le Million (1931), considéré comme son œuvre maîtresse, A nous la liberté et 14 Juillet (1932), Le dernier milliardaire (1934). Au même moment s’affirme le talent de Jean Renoir qui unit au réalisme populiste la critique sociale avec La Chienne (1931), La nuit du carrefour (1932), Boudu sauvé des eaux (1932), Madame Bovary (1934). Quant à Jean Vigo, il réalise en deux ans deux films originaux Zéro de conduite et L’Atlande, chef d’œuvre du réalisme poétique français. De 52 films en 1929, la production passe à 98 en 1930, 156 en 1931, 157 en 1932, puis 120 en 1934 où les grandes sociétés connaissent des difficultés et Pathé déclare faillitte. René Clair quitte la France pour les Etats-Unis. L’année 1935 constitue un tournant pour le cinéma français avec Jean renoir qui apparaît comme le chef de file de cette renaissance. Le crime de M. Lange (1935), La Grande illusion (1937), La Marseillaise (1937), films qui allient la veine naturaliste avec les aspirations d’une population qui porte au pouvoir le Front populaire et réclame la paix, la liberté et la justice sociale. C’est le même but que vise le cinéaste en adoptant des œuvres littéraires célèbres, Une partie de campagne d’après Maupassant (1936), Les Bas-Fonds d’après Gorki la même année et, en 1938, le roman de Zola La Bête Humaine. Enfin, c’est en 1939 que sort le film le plus ambitieux de Renoir, La Régle du jeu qui tente de traduire le malaise français de l’avant-guerre, le désarroi qui suit les accords de Munich et l’échec du Front populaire. A côté de Renoir, cette fin des années trente voit l’ascension de Marcel Carné (Drôle de drame en 1937, Quai des Brumes et Hôtel du Nord en 1938, Le Jour se lève en 1939) ; la poursuite de la brillante carrière de Jacques Feyder, revenu d’un decevant séjour américain, qui réalise La Kermesse héroïque en 1935 et La loi du Nord en 1939 ; la révélation de Julien Duvivier avec Golgotha (1935), La Belle Equipe (1936), Pépé le Moko (1936), Un carnet de bal (1937) et La femme du boulanger (1938). Il convient enfin de noter le succès des films de Sacha Guitry qui sont avant tout du théâtre filmé et se réclament de l’esprit boulevardier mais qui connaissent une vogue réelle enFrance comme à l’étranger. Cette période est celle où le cinéma français est servi par une pléiade d’acteurs de grand talent qui fidélisent leur public, lequel va voir des films pour les retrouver en faisant désormais des vedettes appréciées : Harry Baur, Jules Berry, Raimu, Louis Jouvet, Saturnin Fabre, Pierre Brasseur ou Elvire Popesca, pour la génération la plus ancienne en constituent des ons exemples. Mais la fin des années trente voit aussi de jeunes acteurs commencer une carrière prestigieuse qui se poursuivra après la Libération comme Danièle Darrieux, Pierre Fresnay, Jean Gain, Michèle Morgan. La défaite de 1940 devait avoir pour le cinéma français de redoutables conséquences. Nombres de grands cinéastes se réfugient à l’étranger comme Julien Duvivier, René Clair, Jean Renoir, Jacques Feyder. BETTON (G.) : Histoire du cinéma (des origines à 1982), Paris, PUF, 1984. LONJON (B.) : Émile Reynaud, le véritable inventeur du cinéma, Editions du Roure, 2007. NOËL (B.) : L'Histoire du cinéma couleur, Press'communication, 1995. SADOUL (G.) : Histoire générale du cinéma - tome I, Éditions Denoël, Paris, 1947-1975. SADOUL (G.) : Le cinéma français (1890-1962), Paris, Flammarion, 1962. SAUVAGE (Léo) : L'affaire Lumière, Éditions Lherminier, Paris 1985. CISSEY (Ernest-Louis-Octave Courtot de), 1810-1882 : Général et homme politique. Né à Paris le 23 décembre 1810, Cissey étudie à St Cyr, puis entre dans l'armée en 1832, et devient capitaine en 1839. Il sert en Algerie, et devient chef d'escadron en 1849 puis lieutenant-colonel en 1850. Il prend part comme colonnel à la Guerre de Crimée, et reçoit le grade de Général de Brigade après la bataille d'Inkerman. Il est promu général de division en 1863. Pendant la guerre de 1870, il fait partie de l'armée du Rhin, où il commande la 1ère Division d'Infanterie du 4ème Corps d'Armée où il se rend avec Bazaine à Metz. Prisonnier après la capitulation de Metz, il se retrouve interné à Hambourg. Il est libéré à la fin de la guerre, et prend part à la répression de la Commune. Il participe sous les ordres de Mac-Mahon à la reconquête de Paris sous la commune. Il commande les troupes dans le 7ème arrondissement. Le 26 mai il fait fusiller à genoux sur les marches du Panthéon Jean-Baptiste Millière député de la Seine mais il faut dire à sa décharge que les fédérés venaient de fusiller 49 otages. Député à partir de juillet 1871, le 28 mai 1871, Thiers à la faveur d'un remaniement le nomme ministre de la Guerre, il y restera jusqu'au 24 mai 1873, jour du renversement de Thiers. Il sera ministre de la Guerre à nouveau dans les deux gouvernements suivants et s'occupera de la réorganisation de l'armée. Le 22 mai 1874, Mac-Mahon nomme d’autorité ce général expérimenté avec lequel il entretien une forte et ancienne amitié. Autant dire que Mac-Mahon impose un autre lui-même, en attendant de trouver de trouver le moyen de réunir les droites. La combinaison révèle rapidement ses limites. Homme de paille, Cissey n’a pas d’autorité sur ses collègues et encore moins sur les parlementaires. Dès juillet, Cissey doit accepter les démissions de Magne et de Fourtou, ses deux ministres bonapartistes, Cissey démissionne mais Mac-Mahon, faute de solution de rechange, l’oblige à rester sur place. Dégoûté, il se cantonne dès lors à la gestion de son département, laissant l’influence principale à la Commission des Trente qui met la dernière main aux lois constitutionnelles. Début janvier 1875, il démissionne à nouveau, la Chambre ayant refusé à Mac-Mahon de donner la priorité législative à l’édification du Sénat. A nouveau, le maréchal-président le conjure de rester jusqu’à l’adoption des nouvelles institutions. Cissey reste pour l’essentiel étranger aux tractations qui entraînent le vote de l’amendement Wallon (30 janvier 1875) puis, les 24 et 25 février suivants, des deux premières lois constitutionnelles relatives au Sénat et à l’organisation des pouvoirs publics. L’adoption du compromis constitutionnel marque la fin de son intérim qui aura tout de même duré près d’un an. Le 10 mars 1875, Cissey démissionne. En le nommant, Mac-Mahon a commis la faute de laisser passer la réalité du pouvoir à la Chambre sans parvenir à réunir les différentes droites dans l’intervalle. Militaire traditionaliste, Cissey manquait d’expérience pour espérer jouer un rôle d’envergure. Aussi le conservatisme continue-t-il à travers lui sa décadence, un nombre croissant des membres du centre droit ralliant les positions de Thiers sur la nécessité d’établir la République dans la durée. A nouveau ministre de la Guerre dans les cabinets Buffet et Dufaure, Cissey restera loyal au maréchal qu’il continuera à soutenir comme sénateur inamovible. En 1880, alors qu'il assure un commandement du XIème Corps à Nantes, on découvre qu'il est l'amant d'une certaine Baronne Kaula, accusée d'être une espionne à la solde de l'Allemagne. En 1881, l'enquête le disculpe du chef d'accusation de trahison, mais conclut qu'il a dilapidé les fonds secrets de son ministère. Il est contraint à démissionner. Il meurt à Paris le 15 juin 1882. CITROËN (André), 1878-1935) : André Citroën naît à Paris en 1878 dans une famille juive aisée. Son père est un immigré hollandais, négociant en diamant reconnu dans ce milieu très fermé. Après quelques années passées au lycée Condorcet, Citroën intègre l’école Polytechnique à partir de 1898. En 1900, ses études achevées avec succès, il effectue son service militaire au 31e régiment d’Artillerie, au Mans. Cependant, son rang de sortie lui barre les carrières les plus prestigieuses, au service de l’État. Contrairement à la majorité de ses camarades de promotion, il délaisse la carrière militaire. Profitant des relations familiales, il se fait entrepreneur et fonde avec un associé, en 1902, une entreprise de fabrication d’engrenages à chevrons taillés, procédé dont il a acheté le brevet deux années auparavant. D’abord installé rue Saint Denis à Paris mais rapidement à l’étroit, son atelier est transféré quai de Grenelle. Cette société en commandite devient en 1912 la Société Anonyme des Engrenages Citroën. Celui-ci en délaisse pourtant la direction. Il avait été nommé quelques années auparavant directeur général et administrateur des automobiles Mors. La firme prend alors de l’ampleur et fait face à la concurrence : sa production s’accroît (300 modèles en 1908, 800 en 1913) et se normalise. Les usines Mors parviennent à négocier grâce à son nouveau directeur cette étape décisive de l’industrialisation du secteur automobile. L’outil de production se modernise. Pour financer cet investissement, André Citroën fait appel à son réseau de relations dans la communauté juive. Lui et sa nouvelle équipe technique, composée de polytechniciens, sont également au fait des dernières innovations technologiques : en 1912, Citroën se rend aux États-Unis et visite les usines Ford, vouées à l’époque à la production du modèle T. Le 1er août 1914, il est mobilisé puis rejoint le front quelques jours plus tard avec le 2e régiment d’Artillerie Lourde. Profitant de son expérience d’industriel, il propose le 14 janvier 1915 au général Baquet, directeur de l’armement au ministère de la Guerre, et à son adjoint Louis Loucheur (tous deux polytechniciens…) de monter dans un délai de trois mois une usine qui fabriquerait un modèle unique de projectile, des obus à balle de 75 mm, à la production standardisée et à une cadence importante (5.000 à 10.000 pièces par jour). Ce projet correspond aux besoins de l’armée et aux attentes des décideurs du gouvernement. Le 10 février, Citroën signe à cet effet un contrat avec la Direction des Forges et de l’Artillerie et acquiert bientôt 12 hectares de terrain, quai de Javel à Paris afin d’y établir une usine. Les problèmes se multiplient (achat des presses à emboutir aux États-Unis, manque de qualification de la main d’œuvre en raison des départs massifs des ouvriers au front) et les délais s’allongent. Bientôt, au mois de décembre, 5.000 obus à shrapnells sortent par jour de l’usine de Javel ; cette production s’élève à 10.000 obus en 1916 et atteint enfin 50.000 obus en 1917 ! Au cours de ces années, l’usine et ses installations ont pris de l’ampleur : 13.000 employés, ouvriers et surtout ouvrières (80 % de l’effectif total, les fameuses "munitionnettes"), y travaillent. Sa contribution à l’effort de guerre ne s’arrête pas là. A l’appel du gouvernement, il rationalise l’arsenal national de Roanne et optimise ainsi son fonctionnement. En novembre 1918, André Citroën se trouve à la tête d’un outil vaste et performant : l’usine de Javel. Il décide de le reconvertir en une unité de production moderne de véhicules automobiles. Suivant ses conceptions, développées avant guerre lors de sa collaboration avec les frères Mors, il faut simplifier la gamme des modèles proposés et les produire de façon massive. La production débute l’année suivante. Il s’agit de la torpédo 10 HP, "la première voiture française construite en grande série", comme le fait remarquer le slogan publicitaire de l’époque. Citroën en commercialise 2.500 exemplaires en 1919 et 20.000 en 1920. Puis vient la 5 HP, un modèle moins onéreux (8.500 F tout de même…) destiné à élargir le marché de la firme. Un vrai succès. Il s’en vendra 80.000 entre 1921 et 1926. Cette réussite est également celle de la stratégie commerciale d’André Citroën. Ces années 1920 voient se constituer un réseau de concessionnaires (295) et de succursales (3) autour .A.C., la première société européenne de crédit à la consommation. Ce sont les premiers actes d’une longue série d’innovations. Entre temps, les usines de Javel se sont agrandies. Elles ont une superficie de 200.000 m2. S’y adjoint un laboratoire de recherche, tandis que les forges sont transférées à Suresnes en 1922. Le besoin de place est tel que depuis l’année précédente Citroën loue également l’usine Clément-Bayard de Levallois. Celle-ci produit le nouveau modèle de la marque : la 5 HP. En 1924 est constituée la Société Anonyme André Citroën. L’année précédente, en 1923, la marque s’installe en Angleterre puis en Belgique, en Italie, en Suisse… La production atteint bientôt plus de 60.000 véhicules, les usines comptent 16.000 employés. Citroën est le premier constructeur automobile français. Cependant, il se heurte bientôt à certaines contraintes techniques liées notamment à l’utilisation du bois. La course à l’innovation technologique s’engage. En 1926, Citroën lance la B14 tout acier, pour laquelle un brevet d’emboutissage a été acheté en 1923 aux États-Unis. 1928 voit le lancement de deux nouveaux modèles : la C4 et la C6, dotée en 1932 d’un moteur flottant (brevet Chrysler). Pour mettre au point ces différents modèles, Citroën s’entoure de nombreux ingénieurs (polytechniciens notamment) qu’il envoie régulièrement "en formation" aux États-Unis, à Détroit. L’année 1929 est celle des records. 102.891 véhicules sont produits, ce qui représente le tiers de la production nationale. 45 % sont destinés à l’exportation. Les lieux de production se sont multipliés en région parisienne (Suresnes, Clichy, Saint Ouen, Quai de Javel, Grenelle) ce qui représente une surface de 850.000 m2. Ils comprennent des effectifs de 32.000 salariés. Citroën est alors le premier constructeur européen et le deuxième dans le monde. Ces années ont vu apparaître des innovations publicitaires destinées à propager le renom de la marque aux chevrons : l’installation de panneaux de signalisation sur lesquels figure le sigle Citroën dans 12.000 communes de France, la commercialisation de jouets-répliques des modèles produits (échelle 1 / 10ème) -, le passage d’avions publicitaires dans le ciel de Paris, l’illumination de la Tour Eiffel lors de l’inauguration de l’Exposition Internationale des arts décoratifs en 1925, l’organisation de raids à travers l’Afrique puis l’Asie en automobile. Ces "Croisière Noire" (1924-1925) et "Croisière Jaune" (1931-1932) qui s’effectuent avec des autochenilles sont l’occasion de tester l’invention de l’ingénieur Kégresse. André Citroën est au faîte de la réussite sociale : il est nommé en 1931 grand officier de la Légion d’Honneur. Sa vie de manager et d’entrepreneur qui réussit se double d’une existence de dandy maniant l’argent et fréquentant les lieux à la mode à Paris comme à Deauville. Il y fait sensation en 1924 en battant des records de gain au casino. 1930, 1931,1932... Les effets de la crise économique se font sentir en France. Le marché est en récession ; la production annuelle des usines Citroën est en baisse (70.000 puis 48.000 exemplaires par an), tout comme le chiffre d’affaires ainsi que les bénéfices de l’entreprise. Ceux-ci sont grevés par les investissements considérables effectués les années précédentes pour améliorer l’outil de production (achat de presses et de brevets américains) et pour proposer des modèles attractifs grâce au recours à l’innovation technologique. Citroën persiste dans sa stratégie offensive et présente trois nouveaux modèles, les 8, 10 et 15 CV qui renouvellent entièrement la gamme proposée par la marque. Il inaugure également sa nouvelle succursale de Lyon, "la station service la plus moderne du monde", en présence des concessionnaires et de journalistes. Il répond ensuite à son principal concurrent sur le marché français, Louis Renault, qui a agrandi et modernisé ses installations de l’île Seguin à Boulogne-Billancourt. Le 10 mars 1933, les travaux de rénovation et de réaménagement de l’usine de Javel débutent. Ceux-ci prévoient l’installation d’une chaîne unique de production, achevant ainsi le processus de taylorisation de l’entreprise. Cependant le 29 mars commence dans les usines Citroën un mouvement de grève très dur qui a pour origine une baisse générale des salaires de 10 %. Celle-ci ne s’achève qu’au mois de mai suivant. Le coup est rude pour cet entrepreneur adepte de l’écoute et de la concertation, qui a toujours attaché à l’aspect social de la vie dans l’entreprise une grande importance. En effet, ses usines sont dotées dès le début des années 1920 d’installations sanitaires et sociales (crèches, pouponnières, cantines…) inédites pour l’époque. Cette attention envers ses ouvriers se manifeste également en 1927, année où Citroën est le premier employeur de France à rémunérer d’un treizième mois ses employés. Les problèmes financiers arrivent bientôt en 1934. Les banques annoncent à l’industriel qu’elles refuseront de couvrir les déficits prévus. Elles refusent également les offres de conciliation proposées par Citroën, puis par la Banque de France. Le 15 décembre, la Société Anonyme André Citroën est en dépôt de bilan. Pierre-Etienne Flandrin, Président du Conseil sollicité par Citroën, refuse toute intervention de l’État. La liquidation judiciaire est prononcée. Cette année-là, le nouveau modèle de la marque, la 7 CV traction avant présentée aux différents salons automobiles, crée l’événement. Dessinée par l’italien Bertoni, cette automobile à la ligne révolutionnaire combine toutes les innovations de l’époque (traction avant, carrosserie monocoque, etc.). Vingt années plus tard, la Traction-avant, dont la production se poursuit (760.000 exemplaires en 1957), est devenue l’un des mythes de l’histoire de l’automobile… Le 12 janvier 1935, Michelin prend la contrôle de la société. A la demande de Pierre Michelin, André Citroën demeure le président du conseil d’administration. Quelques jours plus tard, le 18 février, il est admis à la clinique Georges Bizet, à Paris, puis opéré au mois de mai sans succès. Il décède d’un cancer le 3 juillet. CLAMAGERAN (Jules), 1827-1903 : Avocat et homme politique. Né à La-Nouvelle-Orléans (Louisiane, Etats-Unis) le 29 mars 1827, Jules Clamageran est naturalisé français en 1846. Dicteur en droit protestant et avocat à Paris, il est l’un des artisan de la « résistance légale » contre le Second empire. Conseiller municipal en 1876, conseiller d’Etat en 1879, il se spécialise dans les questions financières et est élu sénateur inamovible en 1882. Alors que la presse célèbre sa prudence et sa sagesse, il est naturellement désigné pour occuper le portfeuille des Finances du 6 au 16 avril 1885 dans le premier cabinet Brisson. Cependant, il tente tout de suite de mettre ses idées en place qui divergent quelque peu de la « gestion de bon père de famille » que la majorité appelait de ses vœux. Il veut en effet tout simplement supprimer les trésoriers-payeurs généraux et intermédiaires en bourse. Réalisant rapidement que le gouvernement ne le suit pas, il présente sa démission pour raison de santé dis jours après sa nomination. Il décèdera à Limours (), le 4 juin 1903. CLARAZ (Jules), 1868-1944 : Professeur. Né en 1868, d’abord prêtre au diocèse d’annecy et vicaire à Paris en 1895, il devient un militant de la libre pensée en 1911 et publie plusieurs livres anticatholiques notamment Le mariage des prêtres (1911) ; La faillite des religions (1912) et Le confessionnal (1913). Rallié au socialisme, il écrit La fin d’un régime à la veille de la Seconde Guerre mondiale (1939). Il meurt à l’hôpital de Nice en 1944. Il s’était réconcilié avec l’Eglise. CLAUDE (Georges), 1870-1960 : Physicien. Né à Paris le 24 septembre 1870, chimiste de formation, ancien élève de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris, George Claude commence sa carrière de technicien par ses travaux sur la dissolution de l’acétylène dans l’acétone, découverte qui conduit à l’utilisation industrielle de ce gaz. En 1902, Claude met au point la fabrication de l’oxygène liquide à partir de l’air. Poursuivant ses travaux sur les gaz rares, qu’il a obtenus par distillation de l’air liquide, Georges Claude met à profit l’émission lumineuse qui accompagne le passage de la décharge électrique dans un tube à gaz : la mise au point d’enduits fluorescents le conduit ainsi, en 1910, à la réalisation de l’éclairage au néon, d’abord utilisé dans les enseignes lumineuses. Il découvre également, en 1913, avec Arsène d'Arsonval, les propriétés explosives de l’air liquide, qui seront utilisées pendant la Première Guerre mondiale (mines à l’air liquide et au noir de fumée), et un procédé de synthèse de l’ammoniac sous haute pression. Claude se préoccupe aussi des problèmes de la production d’énergie et, à partir de 1926, il étudie et expérimente une méthode de production de l’électricité fondée sur la différence de température entre la surface (source chaude) et le fond (source froide) des mers chaudes (énergie maréthermique). Il se passionne également pour la politique. Dès 1919, il publie Politiciens et Polytechniciens, critique du parlementarisme. Candidat en 1928 en Seine-et-Marne, il est battu, ce qui le brouille définitivement avec un système qui permattait à un politicien de l’emporter sur un savant. Il se rapproche alors de l’action française qu’il aide quelques temps de ses deniers. Mais en mai 1940, il s’en écarte tout à fait et prône la politique de collaboration franco-allemande dans des conférences et des articles. Son attitude collaborationniste le conduit à être jugé au lendemain de la Libération et est exclu de l'Académie des sciences où il avait été élu en 1924. Condamné à la réclusion perpétuelle en 1945, il est libéré de prison en 1950 et se consacre ensuite à des recherches sur l'utilisation de l'énergie des mers. Il décède à Saint-Cloud le 23 mai 1960. CLAUDEL (Camille), 1864-1943 : Sculptrice. Soeur de l'écrivain Paul Claudel, Camille naît à Fère-en-Tardenois (Aisne) le 8 Décembre 1864. Elle passera une partie de son enfance à Villeneuve-sur-Fère. Désireuse de devenir sculpteur, elle s'installera à Paris dès l'âge de dix-sept ans. Camille, élève de Rodin à partir de 1883, deviendra sa maîtresse. Les deux artistes s'influenceront mutuellement. La Jeune Fille à la gerbe, de 1887, annoncera la Galatée de Rodin, et les Trois Faunesses seront à l'origine des figures féminines de la Vague de Camille Claudel. Le point culminant de leur liaison se situera en 1892, dans leur atelier commun hébergé dans le château délabré du XIIIème siècle - appelé "la folie Payen" - situé boulevard d'Italie, à Paris. Camille sculptera cette année là deux danseurs nus que Dayot souhaitera voir revêtir d'une draperie. Elle acceptera de les couvrir et l'exposera ainsi au Salon de 1893. Le motif complexe de draperies qui entourait les jambes de la danseuse n'affectera pas la puissante suggestion érotique de l'oeuvre. Jules Renard remarquera alors : "Et ce groupe de la Valse où le couple semble vouloir se coucher et finir la danse par l'amour." La Valse, reprise en 1895, sera éditée en de nombreux exemplaires par Eugène Blot après 1905. C'est à partir de 1893 que les rapports du couple se dégradent davantage, par des conflits avec Rose Beuret, mais aussi avec Rodin, dont Camille Claudel commence à rejeter l'opportunisme et le soucis de sa réputation à laisser croire que certaines de ses créations sont de lui ou de son inspiration. C'est une séparation progressive et douloureuse, Camille Claudel s'enferme dans son domicile qu'elle transforme en atelier, tandis que Rodin ne pense qu'à sa gloire, grisé qu'il est par le succès et les commandes officielles. Camille, incapable d'évincer Rose Beuret de la vie de Rodin, quittera son amant en 1898. Elle ne se remettra jamais de cette séparation, même si son art parviendra à s'affranchir de l'influence de son illustre maître. L'Age mûr témoignera du cruel abandon de Rodin. Camille l'implore à genoux pour rejoindre alors que le sculpteur retourne auprès de Rose. Désormais, seule, Camille écrira à son frère Paul consul à New York: "Je suis toujours attelé à mon groupe de trois. Je vais mettre un arbre penché qui exprimera la destinée". Personne ne connaissant l'existence de cette oeuvre, elle demandera à Paul de ne montrer les croquis à quiconque. "Un mouleur, ajoutera-t-elle, pour se venger à détruit à mon atelier plusieurs choses finies." Cette phrase sera l'un des premiers signes de la paranoïa qui allait anéantir Camille Claudel très affectée par la perte de son amant et le départ de son frère pour les Etats-Unis. L'aspect le plus profondément originale de l'oeuvre de Camille se situera à l'aube du nouveau siècle, quand elle adoptera un nouveau style issu du japonisme alors en vogue et profondément ancré dans l'Art nouveau (les Causeuses, 1897, et la Vague, 1900). Utilisant l'onyx, matériau rare, elle fondera ses compositions sur d'élégants jeux de courbes. Rodin ne retira pas son soutien à Camille lorsque les symptômes de la maladie se manifesteront plus régulièrement. Il écrira alors à Gauchez : "... vous êtes sévère pour moi, mais ce qui me console, c'est que vous rendez justice à mon élève, qui est un grand sculpteur." Il obtiendra qu'une oeuvre de Camille Claudel soit offerte à Puvis de Chavannes à l'occasion de son soixante-dixième anniversaire. La commission choisira "Clôtho", une figure du Destin en vieille femme. Délaissée par Rodin, et peu à peu abandonnée par sa famille, elle sombre au fil des années qui suivent dans la misère matérielle et s'enferme dans la solitude maladive d'une névrose obsessionnelle grandissante. Elle va jusqu'à détruire une partie de ses dernières œuvres, et à détruire aussi ses papiers, et sa correspondance. Camille, devenue totalement folle en 1906, fut internée à Montfavet. En 1913, elle est admise à l'Hôpital Psychiatrique de Ville-Evrard, avant d'être transférée à l'Hôpital de Montdevergues, près d'Avignon, en proie à un délire de persécution complexe. Elle manifestera le souhait de revenir dans la maison familiale: "Quel bonheur si je pouvais me retrouver à Villeneuve, ce jolie Villeneuve qui n'a rien de pareil" dira t'elle en 1927. Elle n'y reviendra jamais. Allant en s'aggravant d'année en année jusqu'au 19 octobre 1943 où elle meurt après trente années de séquestration. DELBÉE (A.) : Une femme, Camille Claudel, Paris, Fayard, 1988. CLAUDEL (Paul-Louis-Charles-Marie), 1868-1955 : Ecrivain. Né à Villeneuve-sur-Fère (Aisne), le 6 août 1868. Paul Claudel passe les premières années de sa vie en Champagne. Il est d’abord à l’école chez les sœurs, puis au lycée de Bar-le-Duc, avant d’entrer au lycée Louis-le-Grand en 1882, date à laquelle ses parents s’établissent à Paris. Il fréquente ensuite la faculté de droit et l'Ecole des Sciences Politiques et ressent cependant une "faim spirituelle" que le naturalisme ambiant ne parvient pas à satisfaire. A quinze ans il écrit son premier essai dramatique : L’Endormie, puis, dans les années 1890, ses premiers drames symbolistes (Tête d’Or, La Ville). Mais c’est l’année 1886 qui allait se révéler décisive pour le jeune Claudel, par sa rencontre avec la foi en Dieu, lors d’une fulgurante conversion, la nuit de Noël à Notre-Dame. Il songe alors à se faire moine, renonce, est confronté au péché de chair, se marie. Le second choc de son existence est la lecture de l'oeuvre de Rimbaud. Foi et poésie, Claudel n'a de cesse de souligner le lien qui les unit de façon intrinsèque : il élabore pour cela une rhétorique originale, le "verset claudélien". En 1889 il écrit Tête d'or, drame de la résistance du converti aux exigences de la conversion. Parallèlement à ses activités d’écrivain, Paul Claudel devait mener pendant près de quarante ans une carrière de diplomate. Reçu en 1890 au petit concours des Affaires étrangères, il est nommé en 1893 consul suppléant à New York, puis gérant du consulat de Boston en 1894. De la Chine (1895-1909) à Copenhague (1920), en passant par Prague, Francfort, Hambourg (où il se trouve au moment de la déclaration de guerre) et Rio de Janeiro, ses fonctions le conduisent à parcourir le monde. C’est au titre d’ambassadeur de France qu’il séjourne à Tokyo (1922-1928), Washington (1928-1933), et enfin à Bruxelles, où il doit achever sa carrière en 1936. Ses voyages lui fournissent références et cadres d'action divers pour la rédaction de ses poèmes et de ses drames lyriques. Il compose l'Echange (1893) à Boston. De 1894 à 1909 il est en Chine, écrit Connaissance de l'Est, Partage de midi (1905). Pour lui, le verset ou le vers est le rythme catholique par excellence. La parole du poète est création divine. De 1909 à 1917, Claudel reste en Europe. L'Annonce faite à à Marie (1912) conte le débat tragique de l'orgueil et de la charité. Violaine est l'hostie d'un sacrifice consenti qui la conduit à la sainteté. Le vers de Claudel est à la fois sensuel et mystique, c'est là son grand attrait. A Tokyo où Claudel obtient son premier poste d'ambassadeur, il rédige le Soulier de satin, tentative de créer un théâtre total où se mêle notre monde et le monde divin, où l'étendue céleste se compare à l'étendue terrestre, jamais assez grande pour l'homme. Claudel est nommé ambassadeur à Washington de 1927 à 1933, puis à Bruxelles de 1933 à 1935. Sa pièce Le Partage de midi illustre parfaitement ses thèmes de prédilection, oscillant entre péché et rédemption. Claudel a aussi livré plusieurs commentaires de la Bible, portant sur le Livre sacré un regard de poète plutôt que de théologien. Son œuvre est empreinte d’un lyrisme puissant où s’exprime son christianisme. C’est à la Bible qu’il emprunte sa matière préférée : le verset dont il use autant dans sa poésie (Cinq grandes Odes), ses traités philosophico-poétiques (Connaissance de l’Est, Art poétique) que dans son théâtre (Partage du Midi). Œuvres de maturité, la trilogie dramatique : L’Otage — Le Pain dur — Le Père humilié, puis L’Annonce faite à Marie, et enfin Le Soulier de satin, son œuvre capitale, devaient lui apporter une gloire méritée. Le Soulier de satin, pièce épique et lyrique à la fois, où convergent tous les thèmes claudeliens, et d’une longueur inhabituelle pour la scène, fut représentée à la Comédie française pendant l’Occupation. Mais nul n’en tint rigueur à Claudel, pas plus que de son Ode au maréchal Pétain, car là aussi sa conversion fut rapide. Il avait très amèrement ressenti son échec devant Claude Farrère, en 1935, qui apparut à beaucoup comme un scandale. Il devait être, onze ans plus tard, élu à l’Académie française, sans concurrent, le 4 avril 1946, à presque quatre-vingts ans, « l’âge de la puberté académique » comme il se plaisait à dire, par 24 voix au fauteuil de Louis Gillet. Il n’avait effectué aucune des visites rituelles, pas plus qu’il n’avait fait acte de candidature. On lui doit un mot resté célèbre, la première fois qu’il participa à un vote académique : « Mais c’est très amusant, ces élections : on devrait en faire plus souvent ! ». Sa vie de diplomate, de 1893 à 1936, le conduit à séjourner presque constamment à l'etranger dans divers pays, consul de France à Prague, Francfort, Hambourg, ministre Plenipotentiaire à Rio de Janeiro, à Copenhague, ambassadeur de France à Tokyo, Washington, enfin à Bruxelles, de 1933 à I955, où se terminera sa brillante carrière. Sa vie littéraire conduite parallèlement s'épanouira glorieusement, au terme de son rôle de diplomate, dans sa propriété de Brangues, aux confins de la Savoie et du Dauphiné. Ses conceptions, en étroit rapport avec les idées religieuses, l'incitent à préciser le rôle du poète dont le langage doit traduire l'unité fondamentale du monde des choses et de 1'esprit, correspondant à une véritable "co-naissance" abolissant la contradiction objet-sujet. A la retraite, il se consacre essentiellement à des ouvrages religieux, une relecture symbolique des Ecritures. Il remanie aussi ses pièces, sans toujours les améliorer. Grace à Jean-Louis Barrault, Claudel connait dès son vivant une vraie gloire théâtrale. Barrault a créé le Soulier de Satin en 1943, lorsqu'il était pensionnaire à la Comédie Française. Le Théâtre de l'Odéon a représenté : - l'Otage (1915), créé par le Théâtre de l'Oeuvre, et à nouveau joué en 1928 -l'Annonce faite à Marie (1956) Tête d'or, premier spectacle de Barrault comme directeur de l'Odéon, en 1959, et repris en 1968 (dernier spectacle de Barrault à l'Odéon) - Christophe Colomb (1960) (mise en scène de J-L.Barrault) - le Partage de midi (1961) repris en 1966 (mise en scène de J-L.Barrault) - le Soulier de Satin en 1963, mise en scène de J-L.Barrault Mort le 23 février 1955. CLAVEILLE (Henry), 1867-1936 : Homme politique. Né à Mouleydier (Dordogne), le 1er janvier 1865, Henry Claveille entre à seize ans comme commis auxiliaire aux Travaux publics et grimpe petit à petit tous les échelon de la hiérarchie. Il passe en plus son baccalauréat et une licence ès sciences. Directeur du personnel au ministère des Travaux publics en 1906, il est nommé ensuite directeur des chemins de fer de l’Etat. Secrétaire général d’Albert-Thomas à l’Equipement au début de la Première Guerre mondiale, il est chargé des fabrications puis des transports et des importatations. Dans le sixième cabinet Briand, il est sous-secrétaire d’Etat aux Travaux publics, aux Transports et au Ravitaillement, chargé des Transports, du 14 décembre 1916 au 19 mars 1917 puis du 20 mars au 11 septembre 1917 dans le cinquième cabinet Ribot. Moins d’un an plus tard, il est ministre des Travaux publics et des Transports du 12 septembre 1917 au 5 mai 1919 dans le second cabinet Clemenceau puis du 5 mai 1919 au 19 janvier 1920 avec le même portefeuille en ajoutant la Marine marchande, parachevant ainsi sa remarquable ascension. Il étudie alors les rapports entre les chemins de fer de l’Etat et les compagnies privées et les tarifs, et tente de réduire les séquelles de la guerre dans ce domaine. Elu sénateur durant un peu plus d’un an avant de mourir le 6 septembre 1921 à Mouleydier, au moment même où il venait d’être élu à la tête de la commission fluviale du Rhin. CLEMENCEAU (Georges), 1841-1929 : Médecin, journaliste et homme politique. Quand Clemenceau devient ministre puis président du Conseil en 1906, pour la première fois à l’âge de la retraite (65 ans), il est tout sauf un inconnu du monde parlementaire. Né à Mouilleron-en-Pareds (Vendée), le 28 octobre 1841, Clemenceau est issue d’une famille bourgeoise et ardemment républicaine. Georges Clemenceau est un étudiant révolutionnaire qui fait ses études au lycée de Nantes où il acquiert une vaste culture classique. Désirant devenir médecin comme son père, il poursuit ses études à Paris, à partir de 1861, à la faculté de Médecine. Il y fréquente les milieux étudiants républicains et antibonapartistes. Il se lie notamment avec Auguste Scheurer-Kestner, puis fonde avec quelques amis un journal en décembre 1861 : Le Travail. Celui-ci cependant ne connaît que huit numéros, dans lesquels le jeune militant expose ses convictions républicaines. Ceci lui vaut d’être arrêté et placé en détention à la prison de Mazas au mois de mars 1862. Libéré après deux mois et demi d’incarcération, Clemenceau fonde un nouveau périodique, Le Matin, qui a une existence aussi éphémère que son prédécesseur. Le 13 mai 1865 enfin, il soutient sa thèse de médecine : De la Génération des éléments anatomiques. Il entreprend ensuite un voyage en Angleterre. Après avoir fait la rencontre d’Herbert Spencer et de John Stuart Mill à Londres, Clemenceau s’engage auprès de ce dernier à traduire en français son ouvrage intitulé Auguste Comte et le positivisme. Il gagne ensuite les États-Unis, où il s’intéresse particulièrement au fonctionnement de la démocratie américaine, qui sort à peine de la guerre de Sécession. Il fait parvenir à ce propos quatre-vingts quinze lettres au journal parisien Le Temps, qui se charge de les publier au mois de septembre et d’octobre 1867, non sans avoir opéré quelques coupures dans le texte de son correspondant. Ayant installé un cabinet médical à New-York, Clemenceau se marie en 1869 avec une américaine, Mary Plummer. De retour à Paris, sa carrière politique active commence après la chute de Napoléon III. Le 4 septembre 1870, Clemenceau participe à la prise du Palais-Bourbon et, le 5, son ami Arago, membre du Gouvernement de Défense nationale, lui offre alors la mairie du 18e arrondissement de la capitale (Montmartre), qu’il administre pendant le siège, poste auquel le confirment les élections du 5 novembre. Il est ensuite élu député de la Seine, le 8 février 1871, sur une liste composée de Républicains radicaux mais démissionne le 27 mars suivant de l'Assemblée nationale (qui siège à Bordeaux), marquant ainsi son désaccord d’avec la signature des préliminaires de paix. Ceux-ci prévoient en effet l’annexion de l’Alsace-Moselle par le IIe Reich. Dans la nuit du 17 au 18 mars 1871, Adolphe Thiers, fraîchement désigné comme « chef du Pouvoir Exécutif de la République Française », décide de faire enlever les canons de Paris, groupés à Belleville et Montmartre. Ceci provoque la colère des Parisiens, malgré l’intervention de Clemenceau qui tente de s’interposer. Des émeutes éclatent à Montmartre. Après avoir démissionné de ses fonctions de maire, Georges Clemenceau quitte alors la capitale et n’y revient qu’après la Semaine Sanglante qui met fin à la Commune, au mois de mai suivant. Il se distingue néanmoins pendant ces événements, en tentant de s'interposer entre les Communards et le gouvernement de Versailles au sein de la Ligue d’Union Républicaine des Droits de Paris, fondée le 4 avril 1871. Le 30 juillet 1871, il se fait élire conseiller municipal du quartier de Clignancourt (XVIIIème arrondissement) à Paris, sous l’étiquette Radicale. En 1875, il est pendant quelques mois président du conseil municipal de Paris. Il démissionne de cette assemblée en 1876, après avoir été élu député radical de Montmartre le 20 février. Clemenceau commence de manière éclatante sa carrière de parlementaire en prononçant, le 16 mai suivant à la Chambre, un discours sur la Commune. A la tribune pour la première fois, il demande au gouvernement Dufaure l’amnistie des Communards, arguant que « c’est une preuve de force ». Clemenceau apparaît alors comme le leader de l’extrême gauche, tout à la fois adversaire sans concession de la droite monarchiste et cléricale et censeur impitoyable des républicains « opportunistes », sans rejoindre les socialistes dont il condamne la doctrine. A la Chambre des députés, l’orateur vindicatif acquiert le réputation d’un « tombeur de ministères », participant à la chute des ministères Gambetta , Freycinet et surtout Ferry dont il condamne la politique coloniale à de nombreuses reprises. C’est au cours de cette période que Clemenceau reçoit le surnom du « Tigre ». En 1880, il fonde un nouveau journal, La Justice, dont le premier numéro paraît le 16 janvier. L’homme de presse s’entoure alors d’une équipe de rédacteurs, dont fait partie Camille Pelletan, et qui soutient le courant radical. Répliquant au grand exposé doctrinal du président du Conseil le 31 juillet 1885, Clemenceau s’écrie ainsi à la tribune : « mon patriotisme à moi est en France ! ». La même année, il est réélu, mais sous l'étiquette de député du Var. Après avoir soutenu l’entrée du général Boulanger dans gouvernement Freycinet en janvier 1886, comptant sur lui pour républicaniser l’armée, Clemenceau s’en détache cependant, au moment où se forme un parti boulangiste dont le discours se teinte d’antirépublicanisme et menace le régime. Il participe avec Ranc et Jules Joffrin à la création de la Société des Droits de l’Homme et du Citoyen qui entend défendre la régime contre le pouvoir personnel. Le Tigre prend aussi une part active à la démission du président Jules Grévy, le 2 décembre 1887, suite au scandale des décorations. Après la démission du président de la République, Clemenceau contribue à l’échec de son vieil ami Jules Ferry à l’élection présidentielle de 1887. Il subit de plein fouet le scandale de Panama, auquel il se trouve mêlé en raison de ses liens privilégiés avec Cornélius Herz, un des principaux protagonistes de l’affaire. En vingt ans de vie politique, Clemenceau s’est fait beaucoup d’ennmis par sa forte personnalité. Sévèrement battu aux élections législatives de 1893, il entame une traversée du désert d’une dizaine d’années. Il se convertit alors dans le journalisme, publiant notamment un article quotidien dans La Justice, écrivant dans La Dépêche de Toulouse et Le Journal. Il rédige lui-même quelques articles dans son propre quotidien. Le 21 octobre 1897, celui-ci cesse de paraître, faute de moyens financiers. Aussi, Clemenceau entame-t-il à cette époque une collaboration fructueuse avec L’Aurore d’Ernest Vaughan. Il mène simultanément une vie mondaine intense, fréquentant des salons républicains où il rencontre romanciers, acteurs et poètes. Il se lie d’amitié avec Alphonse Daudet, Anatole France avec lequel il se brouille ensuite, le scandinave Georg Brandès et des artistes impressionnistes, notamment Claude Monnet. L’affaire Dreyfus lui permet de revenir au premier plan. Clemenceau se convainc progressivement de l’innocence du capitaine et, comme rédacteur au journal L’Aurore, participe activement à la campagne en sa faveur : c’est lui qui trouve le titre du célèbre article de Zola, « J’accuse » du 13 janvier 1898. Du 7 au 23 février suivant, on voit également Clemenceau aux côtés de l’écrivain lors du procès qui lui est intenté par la Chambre. Après la grâce de Dreyfus, il fonde un nouveau journal, Le Bloc et milite activement pour la réhabilitation d’Alfred Dreyfus. Mais son activité d’écrivain et de journaliste ne lui suffit plus. Il accepte en 1902 un poste de sénateur dans le Var. Pourtant la vague radicale de la même année ne le porte pas au ministère. Son hostilité à l’égard d’Emile Combes, son opposition à la politique étrangère expliquent cette position de retrait. Et Clemenceau chef historique du radicalisme, n’adhère pas au parti radical naissant, son indépendance foncière s’accommodant mal de toute réforme de soumission. Faute d’exercer le pouvoir, il cherche alors à apparaître comme un des sages de la République. Enfin ministre de l’Intérieur dans le gouvernement composé par Jean Sarrien en mars 1906, Clemenceau prend des mesures d’apaisement qui correspondent à es convictions, il constaste que le Saint-Siège refuse toute conciliation et durcit alors sa position. Il découvre ainsi par expérience que doctrine et pratique sont deux choses différentes et qu’on ne gouvernerne pas comme on écrit un éditorial. Nommé président du Conseil le 23 octobre suivant, tout alors l’appelle à la tête du gouvernement : la victoire de la gauche aux législatives de mai, sa riche expérience et sa forte personnalité, la vigueur qu’il a montrée au ministère de l’Intérieur comme briseur de grèves. Le nouveau gouvernement est dominé par les radicaux. La création du ministère du Travail et de l’Hygiène, ainsi que d’autres réalisations de son cabinet - le vote le 13 juillet 1907 autorisant une femme mariée à disposer librement de son salaire, par exemple – montrent l’intérêt de Clemenceau pour la question sociale, bien que l’on ait retenu de son premier ministère la répression des mouvements sociaux. Attisée par le syndicalisme révolutionnaire et l’adoption par la CGT le 13 octobre 1906 de la Charte d’Amiens, les grèves se développent en effet spectaculairement dans la seconde moitié de la décennie. Pour Clemenceau, on ne peut admettre « l’oppression du corps social par une minorité » ; il ne faut pas que « les ouvriers soient des tyrans ». En 1907, il brise la grève des viticulteurs du midi en faisant intervenir la troupe à Narbonne et Montpellier. Le 30 juillet 1908, après la répression sanglante le 1er juin de la grève des ouvriers des sablières de Draveil-Vigneux, il fait encore intervenir la troupe contre les ouvriers du bâtiment en grève à Villeneuve-Saint-Georges. Le lendemain, le gouvernement ouvre contre les dirigeants et les chefs de la CGT, organisateurs de la manifestation, une instruction judiciaire pour crimes de rébellion et fait arrêter l’état-major du syndicat. Pour la droite, Clemenceau, qui a modernisé la police (avec notamment la création des « brigades du Tigre » et de la brigade mondaine), devient un homme d’ordre, sauveur de l’ordre bourgeois face à la révolution menaçante ; pour la gauche, c’est au contraire un « criminel », une « bête rouge », « le premier flic de France ». Lors des débats à la Chambre, Jean Jaurès reproche à Clemenceau non seulement sa politique de combat à l’égard des travailleurs, mais aussi la brutalité de sa pratique politique : « vous n’avez usé de votre pouvoir parlementaire pour terroriser les gouvernants avant de terroriser les gouvernés ». Toujours, dans l’opposition, comme dans le gouvernement, votre objet est de dominer, de despotiser », lance le responsable socialiste au chef du gouvernement le 9 avril 1908. Clemenceau parvient à gouverner pendant presque trois ans. Mais le 20 juillet 1909, abandonné par une partie des radicaux qui récusent l’attitude autoritaire qu’il a manifestée dans sa lutte contre la CGT, et privé du soutien d’une droite qui espère un véritable reclassement politique, il est renversé lors du vote d’un ordre du jour sur les problèmes de la marine. « Le gouvernement de dictature et de police qui n’avait de républicain que le nom s’effondre sous une révolte de la conscience politique et du patriotisme indigné », écrit H. Béranger dans L’Action. Le premier ministère Clemenceau a été l’un des plus longs de la Troisième République. On retiendra surtout de ces trois années la mise en place du nouveau statut des cultes, consécutif à la séparation des Eglises et de l’Etat, et, en politique étrangère, les efforts pour dissiper les querelles franco-allemandes à propos du Maroc, alors régi par « l’internationalisation » établie par la conférence d’Algésiras. De 1909 à 1914, Clemenceau poursuit ses activités de journaliste. Après avoir effectué un voyage en Amérique du Sud au mois de juin 1910, il fonde en 1913 un nouveau journal, baptisé L'Homme libre, qui paraît pour la première fois le 5 mai. Il se déclare partisan de la loi portant le service militaire à trois ans, mesure qui lui paraît nécessaire pour fournir les effectifs nécessaires à une défense immédiate de la France, mais qu’il souhaiterait voir accompagner d’une réforme des structures militaires. En 1914, Clemenceau, venu de l’extrême gauche, apparaît rejeté vers des dispositions plus conservatrices, du fait de son désir d’ordre, de son souci de l’Etat et de son hostilité au socialisme. Si son intransigeance et son patriotisme finissent par en faire un homme nécessaire au gouvernement de la France en guerre, il n’est appelé aux responsabilités qu’en 1917, souffrant jusque là de l’inimitié persistante d’une grande partie de la classe politique, et notamment celle du président de la République Poincaré, élu en 1913 contre Jules Pams, le candidat des radicaux et Clemenceau lui-même. Avec l’entrée en guerre de la France contre les puissances centrales, les conditions de la vie politique ont en effet changé. Clemenceau passe les trois premières années de la guerre dans l'opposition, répétant sans cesse que « les Allemands sont à Noyon » pour alerter les autorités sur la gravité de la situation. Selon lui, certains se complaisent ainsi dans l’inaction depuis la stabilisation du front et l'écartement d'une menace directe sur le cœur du pays.. Pendant ces trois premières années, l’audience politique de Clemenceau ne cesse de se renforcer grâce à ses activités journalistiques et parlementaires. A travers les articles de son journal, désormais rebaptisé L’Homme enchaîné depuis le 1er octobre 1914, après l'instauration de la censure et du contrôle de la presse, il construit son personnage de patriote intransigeant en dénonçant les « embusqués ». Le Tigre préside à partir de novembre 1915 deux grandes commissions sénatoriales, celle de l’Armée et celle des Affaires étrangères, ce qui lui donne un pouvoir considérable. Les circonstances ne permettant pas aux parlementaires de s’exprimer sans précautions en séance publique, les commissions prennent alors une place de premier plan : la commission sénatoriale de l’armée siège 113 fois en 1915 et adopte plus de 300 rapports entre 1915 et 1918 ; les ministres redoutent d’y venir pour les « auditions ». Pendant ces trois années, Clemenceau ne ménage ni le haut commandement, dénonçant ses insuffisances, son manque de bon sens et sa fréquente irresponsabilité, ni les ministres, en particulier Aristide Briand, président du Conseil d’octobre 1915 à mars 1917, ni le président de la République Raymond Poincaré. Refusant en tant que président de la commission sénatoriale, les visites « organisées », il entreprend de nombreuses visites surprises sur le front qu’il observe avec une attention passionnée, interrogeant les chefs et inspectant le matériel. Aucun homme politique n’est alors aussi bien placé que lui pour avoir une idée d’ensemble de la guerre, de la politique étrangère, de la fabrication et de l’utilisation des armements. Les incessants appels de Clemenceau à l’énergie nationale, sa parfaite connaissance des dossiers diplomatiques et militaires, son image du gardien du temps républicain qu’il défend depuis un demi-siècle le font apparaître comme un recours possible en cas de crise. Clemenceau, qui refusait toute autre responsabilité ministérielle que la présidence du Conseil, savait que Poincaré ne ferait appel à lui que dans des circonstances dramatiques. Or, l’année 1917 est justement marquée par une série de crises. Poincaré n’a alors qu’un choix limité. Ou il fait appel à Joseph Caillaux, ce qui semblerait ouvrir la voie à une politique de compromis avec l’Allemagne, ou il fait appel à Clemenceau : « Clemenceau me paraît en ce moment désigné par l’opinion publique, parce qu’il veut aller jusqu’au bout dans la guerre et dans les affaires judiciaires, et que je n’ai pas le droit , dans ces conditions, écrit-il dans Au service de la France. « Le diable d’homme a pour lui l’opinion des patriotes et, si je ne l’appelle pas, sa force légendaire fera la faiblesse d’un autre cabinet. » C’est ainsi que le vieux leader radical revient au pouvoir. D’opposant, Clemenceau devient responsable. Le formidable travailleur qu’il a toujours été, connaît, entre soixante-seize et soixante-dix-huit ans, le paroxysme de son activité. L’assise politique du nouveau ministère, constitué en vingt-quatre heures, est assez étroite puisque les socialistes ont refusé d’y entrer et que la droite n’y a pas été conviée. Les radicaux obtiennent en conséquence la majorité des ministères, Clemenceau, s’attribuant le portefeuille symbolique de la Guerre. Bien qu’aucun élu de la minorité parlementaire n’y figure, le ministère Clemenceau est accueilli avec sympathie par les grands journaux parisiens modérés ou de droite, comme L’Echo de Paris, Le Figaro ou Le Gaulois. Le 20 novembre, le nouveau président du Conseil se présente devant la Chambre des députés, avec « l’unique pensée d’une guerre intégrale » et la foi dans la victoire : « un jour, de Paris au plus humble village, des rafales d’acclamations accueilleront nos étendards vainqueurs, tordus dans le sang, dans les larmes, déchirés des obus, magnifique apparition de nos grands morts. Ce jour…, il est dans notre pouvoir de la faire. Pour des résolutions sans retour, nous vous demandons, messieurs, le seau de votre volonté ! » Et il résume son programme le 8 mars 1918 dans une envolée restée célèbre : « Ma politique étrangère et ma politique intérieure, c’est tout un. Politique intérieure : je fais la guerre. Politique extérieure : je fais la guerre. Je fais toujours la guerre » Il obtient le soutien de 418 parlementaires contre 65 (dont 64 socialistes) et 40 abstentions (les autres socialistes, dont Pierre Laval, et un certain nombre de radicaux). Mais pour la première fois dans la France en guerre, des mouvements révolutionnaires se développent au début de 1918, en région parisienne et dans la région stéphanoise, ce qui contredit la légende d’une France toute entière rassemblée derrière le Tigre. L’arrivée aux affaires de Clemenceau se traduit par un renforcement de la présidence du Conseil et par une modification des équilibres politiques au profit de l’exécutif. L’ambassadeur britannique, sir Francis Bertie, constate que le ministère Clemenceau est « le ministère d’un seul homme ». Clemenceau a choisi en effet des ministres assez effacés, ne faisant appel à aucun ténor du parlement, contrairement aux choix qu’il avait effectués en 1906. En 1917, les ministres sont là pour exécuter. Au quotidien, Clemenceau gouverne avec un petit nombre de collaborateurs : ses deux chefs de cabinet, Georges Mandel pour le cabinet civil et le général Mordacq pour le cabinet militaire, ses secrétaires Jean Martet et Georges Wormser, les sous-secrétaires d’Etat à la présidence du Conseil, Jules Jeanneney jouent le rôle d’ « office interministériel » : ils peuvent être chargés d’affaires importantes mettant en cause plusieurs administrations ; cette création est un élément montrant la volonté de Clemenceau de renforcer l’hôtel Matignon. Pour échapper à l’autorité du président de la République, Clemenceau réunit volontiers des conseils de cabinet, dont le conseil des ministres présidé par Poincaré entérine ensuite les décisions. Ce dernier se plaint dans ses Mémoires d’être réduit à faire figuration : « Suivant une habitude décidément prise, ni Clemenceau, ni Pichon ne traitent aucune affaire et ne proposent aucune solution. Le premier s’amuse cinq minutes avec des broutilles et ne dit mot des grandes questions politiques ou militaires ; le second, qui voit toujours Clemenceau seul à seul et qui règle tout avec lui directement, lit des télégrammes, donne connaissance de quelques réponses, mais ne demande l’avis du Conseil sur rien […]. Les pouvoirs sont donc concentrés dans les mains d’un seul homme, à tel point que certains, comme Abel Ferry, ont parlé d’une dictature clemenciste. Clemenceau, en effet, entend limiter l’action d’une censure dont il a lui même souffert. Dès son arrivée au pouvoir, il trace des limites très strictes : seules pourront être frappées les publications dangereuses pour l’effort de guerre. Au nom de la liberté, il laisse se manifester des opinions hostiles à son effort de salut public, par exemple en ne s’opposant pas à la diffusion d’une pétition populaire en faveur de Malvy. Et si Clemenceau résiste aux manifestations les plus intempestives du contrôle parlementaire sur le gouvernement en refusant des interpellations et en déférant pas systématiquement aux convocations des commissions parlementaires, le régime conserve cependant les caractères essentiels du parlementarisme. Pour Clemenceau, c’est la République qui doit gagner la guerre. Le gouvernement ne prend de mesures législatives que sur habilitation du Parlement. Seule une loi, celle du 10 février 1918, donne au gouvernement le pouvoir d’agir par décrets pour prohiber certaines importations et pouvoir régler la production et le commerce des denrées alimentaires. Clemenceau, en novembre 1917, avait annoncé aux députés : « Nous sommes sous votre contrôle. La question de confiance sera toujours posée ». Il la pose en effet à plusieurs reprises, vérifiant ainsi qu’il dispose toujours d’une majorité solide. Les parlementaires utilisent d’ailleurs largement la liberté qui leur est laissée : au début 1918, le ministère Clemenceau rencontre à la Chambre une opposition violente surtout de la part des socialistes. Arrivé au pouvoir, Clemenceau entreprend d’abord de lutter contre le défaitisme ambiant. Depuis le débute 1917, dans son journal, en commission et à la tribune, il dénonçait sans relâche les menées pacifistes, synonymes pour lui de trahison. Il s’en prenait tout particulièrement au ministre de l’Intérieur Malvy, accusé de ne rien faire pour les réprimer, au sénateur Charles Humbert et à l’ancien président du Conseil Joseph Caillaux, dénoncé pour avoir multiplié les contacts suspects. Afin des montrer sa détermination, Clemenceau engage des poursuites contre ces trois hommes qu’il juge nuisible au pays. Sur le plan économique, le ministère Clemenceau introduit dans la dernière année de guerre un véritable dirigisme d’Etat, marqué notamment par l’instauration de la carte d’alimentation. Surtout, sa détermination à « faire la guerre » le conduit à s’impliquer directement dans le conflit et dans la conduite des opérations militaires. Comme à l’époque où il présidait la commission sénatoriale de l’armée, Clemenceau fait des tournées sur le front, jusqu’à l’extrême limite des positions françaises, pour rendre visite aux soldats, aller dans les quartiers généraux, rencontrer les généraux et les hommes politiques britanniques. Le commandement militaire tend à prendre le liberté d’initiative et de manœuvre considérable dont il avait disposé jusque là, puisque Clemenceau, fidèle à la tradition de la Révolution française, ne cesse d’affirmer la suprématie du pouvoir civil sur le pouvoir militaire. Il tente également de résoudre la crise des effectifs en essayant de constituer des divisions étrangères, en accroissant le recrutement de troupes coloniales et en faisant la chasse aux « embusqués », enfin en cherchant à hâter l’arrivée des troupes américaines par tous les moyens. Après l’offensive allemande de juin 1918 sur le Chemin des Dames, Pétain et Foch que le président de la République et le monde parlementaire souhaitaient désavouer. Lorsque, à l’automne 1918, l’Allemagne envoie au président américain Wilson une demande d’armistice et de paix, Clemenceau se montre peu enclin à poursuivre une guerre gagnée, tandis que Poincaré le met en garde contre « le danger de couper les jarrets à nos troupes » par une acceptation prématurée de l’armistice. Furieux de cette admonestation du président de la République, Clemenceau menace alors de démissionner dans des termes virulents. Le 11 novembre 1918, le Tigre accueilli à la Chambre des députés par une véritable ovation, apparaît comme le principal artisan de la victoire, ce dont se plaint amèrement Poincaré dans ses Mémoires : « Pour tout le monde, il est le libérateur du territoire, l’organisateur de la victoire. Seul, il personnifie la France. Foch a disparu ; l’armée a disparu. Quant à moi, bien entendu, je n’existe pas. Les quatre années de gouvernement pendant lesquelles j’ai présidé l’Etat et qu’il a consacrées à une opposition sans merci contre les gouvernements successifs sont oubliées. » Son hostilité à l’égard de Clemenceau ne pousse-t-elle pourtant Poincaré a un jugement excessif ? A la Chambre, l’orateur incomparable rend hommage aux soldats avec des paroles inoubliables : « Honneur à nos grands morts qui ont fait cette victoire […]. Grâce à eux, la France, hier soldat de Dieu, aujourd’hui soldat de l’Humanité, sera toujours le soldat de l’idéal », et le vote des parlementaires associe Georges Clemenceau et le maréchal Foch, qui « avaient bien mérité de la patrie ». Après l’armistice, le « père la Victoire » reste encore plus d’un an à la présidence du Conseil et, pendant cette période, ine fait subir à son gouvernement que quelques modifications. La tâche principale du ministère consiste désormais à réussir la paix. Clemenceau exige que la négociation des traités soit conclue entre ses mains. Le Parlement ne choisit aucun des négociateurs et ne parvient même pas à peser sur leur choix. Clemenceau, désigné comme président de la Conférence de la Paix, demande à la Chambre de ne pas lancer d’interpellations sur les questions débattues à la conférence, sauf quand il paraîtrait absolument nécessaire de renseigner le Parlement sur la position prise par le gouvernement. Si Clemenceau ose adopter une telle attitude, c’est parce qu’il est convaincu qu’il tient son pouvoir du peuple : « En ayant l’air de m’adresser au Parlement, confia-t-il à son secrétaire Jean Martet, c’est toujours au pays que je me suis adressé. Mes discours ont toujours passé par-dessus la tête des députés et des sénateurs et j’ai toujours laissé entendre aux députés et aux sénateurs que, battu ou non, c’est toujours, en dernier ressort, le pays qui me jugerait et les jugerait, eux. » Lors des longues discussions avec les Américains et les Anglais, Clemenceau comprend la nécessité d’accepter des compromis et fait donc preuve d’une relative modération. Les revendications françaises sur la Sarre et sur la rive gauche du Rhin donnent lieu à d’âpres débats, les intérêts économiques y étant déterminants - le charbon sarrois est indispensable pour compenser les grâves dommages subis par les houillères du Nord et du Pas-de-Calais – et la demande française invoque aussi des « droits historiques », puisqu’une partie de la région avait appartenue à la France avant 1815. Les Anglo-Saxons faisant valoir que l’argument historique est douteux et que l’arrêt de production dans les gisements charbonnier français ne sera que temporaire, le Tigre se trouve contraint à une position de repli : le territoire de la Sarre sera administré pendant quinze ans par la Société des Nations (par la France dans la pratique). Clemenceau renonce à demander le « détachement » des territoires de la rive gauche du Rhin et la formation d’un Etat rhénan, mais il obtient la démilitarisation de la rive gauche et d’une zone de cinquante kilomètres de large sur la rive droite, assortie de l’occupation pour quinze ans de la rive gauche et trois têtes de pont (Cologne, Coblence, Mayence), avec évacuation par tiers tous les cinq ans. Seul le Palatinat rhénan devait rester occupé jusqu’à la quinzième année. Après la signature du traité de paix le 28 juin 1919, Clemenceau doit également se préoccuper des affaires intérieures. Dans une Europe où de nombreux pays sont touchés par des mouvements révolutionnaires, la France n’échappe pas à d’importante grèves, notamment en mai et en juin. L’influence de la révolution soviétique de fait sentir chez les travailleurs. Le gouvernement tente de limiter le développement du mouvement social en faisant voter la loi fixant à huit heures la durée quotidienne du travail, l’une des plus anciennes revendications ouvrières. Le 19 février 1919, l'anarchiste Cottin lui tire dessus à trois reprises, sans le blesser grièvement. Six jours plus tard pourtant, il reprend ses activités, faisant preuve d'une santé remarquablement vigoureuse pour son âge. La situation politique, quant à elle, devient de plus en plus difficile pour le président du Conseil. Beaucoup connaissant son omnipotence, trouvent qu’il est au pouvoir depuis trop longtemps et s’impatientent : le corps électoral tarde à être convoqué. L’approbation des socialistes au projet de la CGT de déclencher une grève générale pour les 20 et 21 juillet 1919 s’explique par la volonté de voir Clemenceau démissionner. Clemenceau, à soixante-dix-neuf ans, envisage alors de se présenter à la présidence de la République, d’autant que Raymond Poincaré, écœuré par son impuissance et les avanies qu’il a dû subir, ne sollicite pas le renouvellement de son mandat. Il refuse cependant de faire campagne auprès des parlementaires et d’annoncer formellement sa candidature, autorisant seulement ses amis à le faire pour lui. Ainsi, lors du vote préliminaire, le 16 janvier 1920, il n’obtient que 389 voix contre 408 à Paul Deschanel. Les causes de cet échec sont multiples. Les catholiques ne lui pardonnent pas son anticléricalisme et son refus de rétablir les relations diplomatiques avec le Vatican. Beaucoup de socialistes lui restent violemment hostiles et certains radicaux ne lui ont pas pardonné son attitude à l’égard de Caillaux. Tous les parlementaires qu’il a heurté pendant un demi-siècle se liguent dans l’ombre contre sa candidature. La fronde rassemble notamment Poincaré, le maréchal Foch et Aristide Briand, redoutable manouvrier parlementaire qui sait qu’il ne retrouvera pas la présidence du Conseil si Clemenceau devient président de la République et qui agite devant les nombreux parlementaires catholiques la perspective d’obsèques civiles au cas où Clemenceau décéderait au cours de son mandat. Le 18 janvier, avant même que le nouveau président de la République, élu la veille, ait pris ses fonctions – Deschanel a souhaité lui rendre visite, mais il a refusé de le recevoir – Clemenceau présente sa démission à Raymond Poincaré. Le rôle du président du Conseil a donc été, sous le second gouvernement Clemenceau, fort différent de ce qu’il avait été jusqu’alors. Sa position s’est renforcée de manière à répondre aux exigences d’une situation qui appelait des mesures de salut public. Son autorité a largement échappé aux entraves inhérentes à la domination du Parlement et à la primauté que le président de la République avait conservée en matière diplomatique. Clemenceau a justifié ce primat par le consensus populaire, esquissant une sorte de présidentialisme dont le centre de gravité serait le président du Conseil et non le chef de l’Etat. Il a ainsi bouleversé une tradition constitutionnelle, sans fonder un nouveau modèle politique ou institutionnel. Il reste en effet étranger au grand débat qui instaure dès les années de guerre, et se développe dans les années 1920 et 1930, sous la forme de l’Etat. Son gouvernement a été un gouvernement de guerre fortement personnalisé, mais néanmoins réellement républicain et greffé sur le schéma parlementaire. Trois jours à peine après la signature de l’armistice, le 21 novembre 1918, les 23 académiciens siégeant l’élisent à l’unanimité. Le Président du Conseil ne se montre d’ailleurs guère enchanté de son nouveau statut et pas une seule fois il ne vient siéger sous la coupole, où il redoutait — disait-on — d’être reçu par son ennemi intime, Raymond Poincaré. Pendant ses dernières années, il entreprend, malgré son âge, une série de voyages (en Égypte puis aux Indes au mois de septembre 1920 et aux États-Unis à l’automne 1922). Il continue à observer la vie politique, se partage entre sa maison à la campagne de Saint-Vincent-sur-Jard, en Vendée, et sa résidence parisienne de la rue Franklin, appuie la réalisation du musée de l’Orangerie pour la présentation des Nymphéas de son ami Claude Monet et rédige des livres, Démosthène en 1925, Au soir de la pensée, publié en 1927, Claude Monet et les Nymphéas en 1928, et l’émouvant Grandeurs et misère d’une victoire, qui ne paraîtra qu’en 1930, après sa mort, survenue à Paris le 24 novembre 1929. BECKER (J.-J.) : Clemenceau l’intraitable, Paris, Liana Levi, 1998. BOCK (F.) : Un parlementarisme de guerre, 1914-1919, Paris, Belin, 2002. CLEMENCEAU (G.) : Grandeur et misère d’une victoire, Paris, Plon, 1930. COLIN-LALU (C.) : Georges Clémenceau, Président du Conseil de 1906 à 1909 et 1917 à 1920, vu par les Vendéens à travers la presse locale, maîtrise d'histoire, Université de Poitiers, 1984. DAUDET (L.) : La Vie orageuse de Clemenceau, 1938. DUROSELLE (J.-B.): Clemenceau, Paris, Fayard, 1988. ERLANGER (P.) : Clemenceau, Paris, Grasset, 1968. GUIRAL (P.) : Clemenceau en son temps, Paris, Grasset, 1984. JULLIARD (J.) : Clemenceau briseur de grèves, Paris, Julliard, 1965. MARTET (J.) : M. Clemenceau peint par lui-même, 1930. MINART (G.) : Clemenceau journaliste (1841-1929). Les combats d’un républicain pour la liberté et la justice, Paris, L’Harmattan, 2005. MONNERVILLE (G.), Clemenceau, Paris, Fayard, 1968. MORDACQ (H.), Clemenceau, Paris, les Éditions de France, 1939. RATINAUD (J.), Clemenceau ou la Colère et la Gloire, Paris, Fayard, 1958. SUAREZ (G.) : La Vie orgueilleuse de Clemenceau, 1930. CLÉMENTEL (Etienne), 1864-1936 : Notaire et homme politique. Né à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) le 29 mars 1864, Etienne Clémentel, après des licences en droit et en lettres, se lance dans la peinture et la sculpture, mais sa famille le dissuade d’entrer aux Beaux-Arts. Il devient alors receveur de l’Enregistrement, puis achète une étude de notaire en 1889. Attiré par la politique, il devient élu d’abord conseiller municipal, puis maire de Riom, conseiller général et préside l’assemblée générale de 1912 à 1930. Elu député du Puy-de-Dôme de 1900 à 1919, ses nombreuses interventions le font assez vite remarquer et il est, durant cette période quarte fois ministre. D’abord nommé ministre des Colonies du 24 janvier 1905 au 13 mars 1906 dans les second et troisième cabinets Rouvier, son idée est de favoriser la collaboration avec les populations indigènes. Six ans plus tard, il est ministre de l’Agriculture du 22 mars au 8 décembre 1913 dans le cabinet Barthou, puis des Finances du 9 au 13 juin 1914 dans l’éphémère cabinet Ribot, il n’ a le temps que de régler les affaires courantes. Vice-président de la Chambre et rapporteur général du Budget, il est nommé ministre du Commerce, de l’Industrie et des Postes et Télégraphes du 29 octobre 1915 au 12 décembre 1916 dans le cinquième cabinet Briand, du 20 mars au 15 novembre 1917 dans le cinquième Ribot et le premier ministère Painlevé et du 5 mai 1919 au 19 janvier 1920 dans le second gouvernement Clemenceau. Il garde le même portefeuille du 12 décembre 1916 au 19 mars 1917 en cumulant avec l’Agriculture et le Travail dans le sixième cabinet Briand. Il met alors tout en œuvre pour que les départements placés sous sa responsabilité participent de leur mieux à l’effort de guerre. Responsable du ravitaillement de la France et de l’approvisionnement des armées, il obtient l’aide indispensable des Anglais et des Américains, profite des pouvoirs exceptionnels accordés au gouvernement pour réorganiser l’économie et la mobiliser le plus efficacement possible. Il parvient à fournir aux exploitations agricoles une baise du prix du blé à Londres. Ministre des Transports maritimes et de la Marine marchande du 16 novembre 1917 au 5 mai 1919 dans le second cabinet Clemenceau, il représente la France au conseil alliés des transport maritimes, étend à la marine marchande la procédure de conciliation dans les conflits du travail qu’il a mise au point dans les autres professions, réforme l’enseignement maritime et crée l’Office des pêches. Après la guerre, il favorise la création de la Confédération générale du patronat français, des groupes régionaux de chambres de commerce et de la chambre de commerce internationale installée à Paris. Lors de la victoire du cartel des gauche, Clémentel est nommé le 14 juin 1924 ministre des Finances dans le premier ministère Herriot. Il démissionne le 3 avril 1925, en désaccord avec le président du Conseil sur les remèdes à apporter à la crise financière. En 1929, lors de la chute du onzième cabinet Briand, il et pressenti par le président de la république pour former un nouveau gouvernement, mais la tentative échoue. En 1930, malade, il se retite de la vie politique et retourne à la peinture. Il décèdera à Prompsat (Puy-de-Dôme) le 25 décembre 1936. CLERMONT (Emile), 1880-1916 : Ecrivain. Né à La Combelle (Puy-de-Dôme) le 15 août 1880, Emile Clermont est élève de l’Ecole normale supérieure et décide de se consacrer au roman. Il commence par écrire Histoire d’Isabelle, qu’il laisse inachevé et dont les fragments seront publiés après sa mort (1917). Il fait paraître ensuite Amour promis (1910), et l’année suivante, Laure, roman d’analyse d’une fort belle tenue. Ces trois ouvrages témoignent déjà d’une certaine maîtrise. Clermont s’y révèle avant tout comme un sagace observateur de l’âme humaine. Nul n’a exprimé mieux que lui la puissance de l’idéal – qui finit par décolorer toute la vie quotidienne. Il est tué devant l’ennemi à Maisons-de-Champagne le 5 mars 1916. CLERMONT (L.) : Emile Clermont, sa vie, son œuvre, 1919. CLOUÉ (Georges), 1817-1889 : Vice-amiral et homme politique. Né à Paris le 20 août 1817. Georges Cloué, est nommé par Thiers, en août 1871, gouverneur de la Martinique qu'il administre pendant trois ans. Promu vice-amiral en décembre 1874, Cloué est envoyé en février 1875 comme préfet maritime à Cherbourg qu'il quitte en décembre 1876 pour prendre la direction du Dépôt des Cartes et Plans. Appelé en novembre 1878 à la tête de l'escadre d'évolutions dans la Méditerranée, où il succède à l'amiral de Dompierre d'Hornoy, il hisse son pavillon sur le Richelieu. Le 23 septembre 1880, Cloué accepte le portefeuille de la marine et des colonies dans le premier cabinet Ferry. Il succède, dans ce poste, à l'amiral Jauréguiberry. Son action est importante dans la réorganisation de la flotte. Il obtient du roi Pomaré la cession des iles de la Société. Il lance en 1881 la construction du chemin de fer du Sénégal (Saint-Louis-Dakar). Il se consacre par ailleurs au problème de la Tunisie. En août 1882, le vice-amiral Cloué fait valoir ses droits à la retraite, après cinquante ans de services effectifs dont trente-deux passés à la mer. Il consacre ses dernières années à la rédaction de nombreux ouvrages scientifiques. Il participe aux travaux du Bureau des Longitudes et du conseil d'État où il est nommé an janvier 1888 à Paris le 25 décembre 1889. COCHERY (Adolphe), 1819-1900 : Avocat et homme politique. Adolphe Cochery, né le 26 août 1819 à Paris, est reçu avocat en 1839. Nommé chef de cabinet du ministre de la Justice en 1848, il se consacre ensuite à la défense dans certaines affaires de presse à caractère politique (opposition républicaine) et semble ne pas s'être départi depuis lors d'un positionnement politique républicain « de centre gauche ». Il est le fondateur de l'Indépendant de Montargis en 1868. En 1869, il est sans interruption, de 1869 à 1888, député du Loiret de l’opposition démocratique et fait partie de la délégation chargée de porter au gouvernement de la Défense nationale l’adhésion de l’Assemblée. Commissaire de la défense à Orléans, il entre, lors de la commune de Paris, à quatre reprises, au péril de sa vie, sous pavillon parlementaire, dans Paris insurgé, et fut brièvement inquiété malgré un sauf-conduit signé de la main d'Adolphe Thiers, qui, le 4 septembre 1871, le remerciE pour son courage, devant une commission d'enquête parlementaire. Spécialiste des questions financières, il est appelé par le président du Conseil Dufaure, le 1er mars 1878, au sein du sous-secrétariat d'État aux Finances, directeur du service des Postes et Télégraphes, fonction qui est transformée pour lui en ministère à part entière le 5 février 1879. Il occupe ce poste durant six ans, dans huit gouvernements successifs jusqu'au 30 mars 1885 : du 5 février 1879 au 21 décembre 1879 dans le gouvernement Waddington, du 28 décembre 1879 au 19 septembre 1880 dans le premier gouvernement Freycinet, du 23 septembre 1880 au 10 novembre 1881 dans le premier gouvernement Ferry, du 14 novembre 1881 au 26 janvier 1882 ministre des Postes et Télégraphes dans le Gouvernement Gambetta, du 30 janvier au 29 juillet 1882 dans le second Gouvernement Freycinet, du 7 août 1882 au 28 janvier 1883 dans le gouvernement Duclerc, du 29 janvier au 17 février 1883 dans le gouvernement Fallières et du 21 février 1883 au 30 mars 1885 dans le second gouvernement Ferry. Au titre de ses responsabilités sur les postes et télégraphes, il préside le Congrès de l'Union postale à Paris en 1878, fonde le 4 novembre 1878 l'École supérieure de télégraphie, assiste au Congrès télégraphique de Londres, est à l'origine de l'Exposition internationale d'électricité (Paris, 1881) et préside la première Conférence pour la protection des cables sous-marins. Il organise la Caisse d’épargne, le service des recouvrements, la distribution des paquets et le pneumatique dans Paris. Dans le même temps, il parvient à augmenter le traitement des facteurs et à baisser les taxes. Il décède le 13 octobre 1900 à Paris. BRACONNE (C.) : Un grand parlementaire : Adolphe Cochery, maîtrise d'histoire, Université d'Orléans, 1988. . COCHERY (Georges), 1855-1914 : Homme politique. Né à paris le 20 mars 1855, Georges Cochery est le fils du précédent. Il fait polytechnique en 1875 avant de devenir le chef du cabinet de son père. Il est sans interruption député du Loiret depuis 1885 et, rapporteur général puis président de la commission du budget, il se fait rapidement remarquer par ses compétences financières. Vice-président de la Chambre, il est nommé ministre des Finances du 29 avril 1896 au 27 juin 1898 dans le cabinet Méline puis du 24 juillet 1909 au 2 novembre 1910 dans le premier ministère Briand qui souhaite un « modéré rassurant » pour effacer l’image de Caillaux. Sa volonté est d’assurer l’équilibre du budget et, pour cela, il met en place un certain nombre d’impôts nouveaux. Mais les « vignettes Cochery » (taxes sur le vin et les alcools) doivent être abandonnées sous la pression de l’opinion. Il décèdera à Paris le 10 août 1914. COCHIN (Denys), 1851-1922 : Homme politique et écrivain. Né à Paris le 1er septembre 1851, Denys Cochin, fils de l’ancien maire du Xème arrondissement de Paris, fait ses études à Louis-le-Grand et au collège Stanislas, avant de faire du droit, puis de se lancer dans les sciences et la philosophie. Député du VIIIème arrondissement de Paris, il se fait l’avocat de la monarchie parlementaire et des scientifiques. Homme de droite, il croit en la grandeur de la France et fonde la ligue pour la liberté de l’enseignement. Lors de la Première Guerre mondiale, qui lui ôte ses deux fils, il entre dans le cinquième gouvernement Briand comme ministre d’Etat du 29 octobre 1915 au 12 décembre 1916 et va plaider avec succès en Grèce en faveur du camp allié. La sécurité du corps expéditionnaire est assurée. Nommé sou-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangèress, chargé du blocus du 14 décembre 1916 au 2 août 1917 dans le sixième cabinet Briand et le cinquième ministère Ribot, il prends des contacts officieux avec le Vatican afin de conserver la paix religieuse qui le pousse à démissionner, considérant que « l’union sacrée » n’existe plus. Il était membre de l’Académie française depuis 1911. Il décèdera à Paris le 24 mars 1922. COCHINCHINE : 1848-1883 : Règne de Tu Duc. Il est hostile aux étrangers et aux missionnaires chrétiens et entend s'appuyer sur la Chine sans mesurer l'extrême faiblesse de celle-ci. 1858 : À la suite du martyre de l'abbé Chapdelaine au Kouangsi et de celui de plusieurs dominicains espagnols au Tonkin, la France et l'Angleterre décident d'agir contre la Chine et, en mai, un corps expéditionnaire allié s'empare des forts défendant le Pei Ho (la rivière qui se jette dans le golfe du Petchili) et ouvre ainsi la route de Pékin. L'empereur chinois préfère traiter et les forces du contre-amiral Rigault de Genouilly devenues disponibles sont dirigées vers les côtes d'Annam. Formée de treize bâtiments français et d'un aviso espagnol venu des Philippines, la flotte arrive devant Tourane (Danang) le 31 août 1858. Contrairement à ce qui s'était passé en Chine, l'amiral ne peut remonter la rivière de Hué et se refuse, en raison de la faiblesse relative de ses effectifs, à prendre le risque d'une marche par voie de terre contre la capitale annamite. Février 1859 :Profitant de la mousson d'hiver, l'amiral Rigault de Genouilly dirige sa flotte vers la Cochinchine, remonte la rivière de Saigon et prend d'assaut la citadelle le 17 février. Novembre 1859 : L'amiral Page, qui remplace Rigault de Genouilly, propose à la cour de Hué une paix n'impliquant aucune cession territoriale mais la simple installation d'un chargé d'affaires et de trois consuls. Convaincu que ces demandes modérées ne faisaient que témoigner de la faiblesse des envahisseurs, le souverain annamite refuse les propositions françaises. 1860 : Alors que l'amiral Page est parti rejoindre l'expédition franco-anglaise engagée contre la Chine - qui aboutira à la prise de Pékin et au sac du Palais d'été - la garnison de Saigon résiste victorieusement aux assauts vietnamiens. Février 1860 : L'amiral Charner, de retour de Chine, entre en rade de Saigon avec soixante-dix bâtiments, une brigade d'infanterie, douze compagnies de marins et des chasseurs d'Afrique, le tout appuyé par une puissante artillerie. Il disperse ainsi sans difficultés, les 24 et 25 février, les troupes vietnamiennes du maréchal Nguyen Tri Phuong. 1862 : Alors que ses forces sont dispersées et détruites en Cochinchine, l'empereur Tu Duc doit faire face au Tonkin à une révolte qui le contraint à traiter avec les Français. Un accord est conclu à Saigon le 5 juillet 1862. Le souverain annamite reconnaît aux missionnaires la liberté de prêcher la religion catholique et autorise l'ouverture de trois ports au commerce français. Il abandonne par ailleurs en pleine propriété au vainqueur les provinces de Bien Hoa, Gia Dinh et Vinh Tuong, c'est-à-dire toute la moitié orientale de la Cochinchine, ainsi que l'île de Poulo Condore. Il était ainsi contraint d'accepter des conditions autrement dures que celles qu'il avait refusées en 1860. Conclu le 14 avril 1863, le traité de Hué confirme l'accord de Saigon de l'année précédente. 1862-1879 : Période dite du « gouvernement des amiraux », ceux-ci se trouvant durant cette période investis du gouvernement de la Cochinchine française. La Marine joue alors un rôle déterminant dans les débuts de la colonie. Dès 1862, c'est autour d'un missionnaire, le père Legrand de La Liraye, responsable d'un Bureau de renseignement sur les coutumes et les institutions indigènes, que se réunissent de jeunes officiers qui apprennent la langue locale, se consacrent à la pacification du pays en luttant contre les pirates et s'efforcent d'administrer le territoire sous autorité française. Ils font fonction d'officiers des affaires indigènes et recrutent des auxiliaires autochtones dont ils contrôlent l'action. À partir de 1873, la Marine établit un collège de stagiaires où ces officiers sont formés à leurs nouvelles fonctions, sous l'autorité du lieutenant de vaisseau Luro, chargé d'un cours « d'administration annamite ». Mai 1863-avril 1868 : L'amiral de La Grandière exerce les fonctions de gouverneur de la Cochinchine et l'étend vers l'ouest avec l'annexion, en juin 1867, des trois provinces de Vinh Long, Soc Trang et Chau Doc occupées dès mars 1866. 1863 : Établissement du protectorat français sur le Cambodge. Juin 1863 : Arrivée en France d'une ambassade annamite conduite par le mandarin Phan Tanh Gian. Il est très bien reçu par Napoléon III, d'autant que l'un des officiers du corps expéditionnaire, le lieutenant de vaisseau Aubaret, fait valoir l'intérêt pour la France de respecter l'intégrité territoriale du Vietnam et de se contenter du contrôle de quelques ports et d'un protectorat très souple. Mai 1864 : Nommé consul à Bangkok, Aubaret se rend à Hué pour négocier avec Tu Duc, le souverain annamite, une éventuelle rétrocession des provinces cochinchinoises mais, une fois de plus, son interlocuteur interprète comme un aveu de faiblesse les propositions françaises et ne les retient pas ; comme dans le même temps tout un courant se développait en France en faveur d'une exploitation coloniale du sud de l'Indochine (il s'exprime à travers la publication par le lieutenant de vaisseau Rieunier - sous le pseudonyme d'Abel - de La question de la Cochinchine du point de vue des intérêts français), il apparut que l'opposition de la cour de Hué rendait impossible toute présence limitée. 4 novembre 1864 : Le ministre de la Marine Chasseloup-Laubat remet à Napolén III un rapport qui conclut à la nécessité de conserver la Cochinchine. Les perspectives d'une rétocession s'éloignent ainsi définitivement. Janvier 1865 : Ratification par la France du traité de Hué. Juin 1866 : Doudart de Lagrée et Francis Garnier quittent Saigon pour entamer la remontée du Mékong, dans l'espoir de trouver ainsi une voie d'accès vers la Chine du Sud, que les Anglais cherchent dans le même temps à atteindre à partir de la Birmanie. Doudart de Lagrée meurt en mars 1868 après être arrivé à deux jours de marche du Yang tsé Kiang que son second pourra descendre jusqu'à Shanghaï. Ce remarquable voyage d'exploration a cependant montré que la véritable voie d'accès à la Chine à partir de l'Indochine n'est pas le Mékong mais le fleuve Rouge, ce qui va conduire les Français à tourner leurs regards vers le Tonkin. Sous le Second Empire et au début de la IIIe République, la France semble cependant se satisfaire du contrôle de la Cochinchine et du Cambodge - qui correspondent aux régions indochinoises les plus riches et les moins peuplées - et les consignes envoyées depuis Paris aux amiraux-gouverneurs leur interdisent toute entreprise contre la monarchie annamite visant à la conquête du nord du pays. 1871 : Le commerçant et trafiquant d'armes français Jean Dupuis pénètre au Tonkin en venant du Yunnan, s'installe à Hanoi et y fait flotter le drapeau français sur ses canonnières, ce qui entraîne les protestations de la cour de Hué. L'amiral-gouverneur Dupré décide alors, pour trouver une solution de compromis, d'envoyer sur place Francis Garnier, simplement accompagné d'une force modeste (de l'importance d'une compagnie). 20 novembre 1873 : Inquiet des préparatifs guerriers mis en oeuvre par les forces annamites commandés par Nguyen Tri Phuong, Francis Garnier prend l'initiative des hostilités et s'empare de la citadelle de Hanoi avant d'entamer la conquête du delta tonkinois mais il est tué dans une embuscade en janvier 1874. 15 mars 1874 : Un traité est conclu entre la France et l'Annam. Il est signé à Saigon par le lieutenant de vaisseau Philastre. Les Français renoncent à leurs conquêtes du Tonkin et Dupuis doit évacuer Hanoi mais l'Annam reconnaît en contrepartie la pleine souveraineté de la France sur les trois provinces de Cochinchine conquises par l'amiral de La Grandière en 1867. Les ports de Hanoi, Haïphong et Qui Nonh sont ouverts au commerce français et des consuls y sont installés. L'empire d'Annam accepte enfin de conformer sa politique extérieure à celle de la France. Le 31 août suivant, un traité de commerce est signé par l'amiral Krantz. Mars 1882 : Le gouverneur Le Myre de Vilers, premier gouverneur civil de Cochinchine, constate l'inéxécution du traité de 1874 et décide d'établir à Hanoi une petite garnison forte de trois compagnies et placée sous les ordres du commandant Rivière qui s'empare de la ville le 27 avril. 19 mai 1883 : Encerclé par les forces chinoises infiltrées dans le bassin du fleuve Rouge, le commandant Rivière trouve la mort au cours d'une tentative de sortie. C'est un casus belli pour la France et Jules Ferry décide de l'envoi en Indochine d'un corps expéditionnaire appelé à agir en Annam et au Tonkin. 17 juillet 1883 : Mort de l'empereur d'Annam Tu Duc. Son successeur, le prince Hiep Hoa, suspect de sympathies profrançaises, est contraint de s'empoisonner en 1884. Il est remplacé par Kien Phuoc dont le règne est tout aussi éphémère. Le pouvoir appartient en réalité à deux régents, Ton That Tuyet (très hostile aux Français) et Nguyen Van Tuong. 25 août 1883 : Le gouvernement annamite signe avec la France le traité Harmand reconnaissant son protectorat. 11 mai 1884 : Après une campagne qui a permis d'obtenir la reddition des places du delta tonkinois (dont Sontay, Bac Ninh et Thai Nguyen), le traité de Tien Tsin oblige les Chinois à se retirer complètement du Tonkin. 6 juin 1884 : Le traité Patenôtre signé à Hué précise les conditions d'application du protectorat et le rôle du résident français en Annam. 31 juillet 1884 : C'est un enfant de douze ans, Ham Nghi, qui accède au trône mais ce sont les régents qui conservent la réalité du pouvoir. 1885 : L'incident de Bac Lé survenu en juin 1884, consécutif au retrait incomplet des troupes chinoises, conduit Jules Ferry à exiger du gouvernement de Pékin, sous la forme d'un ultimatum, une lourde imdemnité. Une fois expiré le délai fixé, la flotte de l'amiral Courbet bombarde Fou Tchéou alors que le corps expéditionnaire du général Brière de l'Isle marchant vers le nord s'empare de Langson, sur la frontière chinoise, le 13 février 1885. Pendant qu'une partie des forces françaises se porte au secours du commandant Dominé assiégé dans Tuyen Quang, le général de Négrier est grièvement blessé lors du combat de Hoa, ce qui conduit son subordonné, le colonel Herbinger, à ordonner une retraite totalement injustifiée. Quand la nouvelle arrive à Paris, cet épisode mineur est transformé par la presse et l'opposition parlementaire en « désastre de Langson » et se révèle fatal, le 30 mars, au cabinet Jules Ferry. En fait, rien n'était compromis au Tonkin et les victoires remportées par l'amiral Courbet à Formose et aux iles Pescadores obligent le gouvernement de Pékin à traiter rapidement. 9 juin 1885 : Deuxième traité franco-chinois de Tien Tsin. Il reconnaît le protectorat français sur l'Annam et le Tonkin. 5 juillet 1885 : Le régent Ton That Thuyet fait attaquer sans succès la concession française de Hué, défendue par le général de Courcy ; le régent et le jeune empereur prennent alors le maquis mais le premier gagne rapidement la Chine, dans l'espoir d'y trouver des soutiens. Les Français en profitent pour installer sur le trône en 1886 un autre prince de la lignée royale, Dong Khanh. 1886 : Paul Bert remplace le général de Courcy comme résident général de l'Annam et du Tonkin. Soucieux de réussir la pacification, il crée un conseil des notables et cherche à rétablir les structures administratives locales, passées désormais sous contrôle français. Il obtient de la cour de Hué la nomination d'un vice-roi au Tonkin. Vaincu et arrêté en 1888, l'ex-empereur Ham Nghi est exilé en Algérie. La résistance cesse alors en Annam mais la pacification sera plus longue à obtenir au Tonkin où les bandes des Pavillons Noirs ajoutent le banditisme aux manifestations de résistance nationale. La mise en valeur du pays et l'installation d'infrastructures modernes (télégraphe, voie ferrée) - combinées avec les opérations proprement militaires - permettent cependant à une pléiade de grands chefs tels que Pennequin, Gallieni et Lyautey d'accomplir efficacement leur mission. 1887 : Constitution administrative de l'Union indochinoise par le rattachement au ministère de la Marine et des Colonies de l'Annam et du Tonkin, qui dépendaient jusque là des Affaires étrangères. Ces deux pays sont alors placés, avec la Cochinchine et le Cambodge, sous l'autorité d'un gouverneur dépendant du ministère des Colonies. Un cinquième territoire, le Laos, sera rattaché à cet ensemble en 1897, à l'issue des voyages d'exploration menés par Auguste Pavie dans cette région centrale et longtemps inconnue de la péninsule indochinoise. 1887 : Mise en exploitation des mines de charbon ciel ouvert de Hongay, au Tonkin. 1889-1907 : Règne de Thanh Thai, qui est finalement destitué et exilé à la Réunion. Son successeur, Duy Tan, connaîtra le même sort en 1916. 1891-1894 : De Lanessan exerce les fonctions de gouverneur général. 1892-1897 : Les dernières résistances armées sont vaincues au Tonkin, d'abord dans le delta, puis dans les périphéries montagneuses. 1897-1902 : Gouvernement de Paul Doumer. Il se consacre au développement économique de l'Indochine mais substitue l'administration directe au système de protectorat prévu par les traités. 1897 : Le pharmacien de Marine Raoul rapporte de Malaisie à Saigon deux mille plants d'hévéa qui seront à l'origine de la production locale de caoutchouc, entamée en 1898 par le planteur Berland qui réalise sa première récolte dès 1905. Du fait de la demande mondiale, la nouvelle culture connaîtra un essor très rapide au cours des années 1920. 26 juillet 1897 : Disparition de la fonction de vice-roi du Tonkin qui maintenait l'illusion d'une souveraineté de l'empereur d'Annam. Il est remplacé par un résident français au Tonkin qui prend le contrôle de toute l'adminsitration locale. Le pouvoir traditionnel des mandarins est progressivement annihilé. Octobre 1897 : Le gouverneur décide la disparition du conseil impérial traditionnel, remplacé par un conseil des ministres présidé par le résident supérieur français en Annam. 1898 : Le gouvernement de Hué perd le pouvoir de percevoir l'impôt, désormais levé par l'administration française. Une liste civile est accordé à l'empereur Thanh Thai, désormais privé de tout pouvoir réel. Des fonctionnaires français du Corps des services civils de l'Indochine sont investis des diverses responsabilités administratives. Des services généraux chargés des douanes, de l'agriculture, des grands travaux ou du commerce sont créés pour l'ensemble de l'Indochine qui se voit également attribuer un budget propre, alimenté par les régies de l'alcool et du sel ainsi que par diverses taxes et droits de douane. Le bilan économique se révèle positif, d'autant que sont entrepris de grands travaux d'infrastructure : pont Paul-Doumer de Hanoi, Transindochinois et ligne de chemin de fer du Yunnan, aménagement des ports, grands travaux d'urbanisme à Hanoi, grandes entreprises d'aménagement hydraulique dans le sud...) L'oeuvre culturelle du gouverneur Paul Doumer n'est pas moindre, marquée par l'institution de grands services chargés de différents domaines (géographie, météorologie, géologie...), par la création d'une faculté de médecine et par celle de l'Institut français d'Extrême-Orient. 1904-1905 : Guerre russo-japonaise. La victoire nippone sur l'Empire russe contribue à l'éveil d'une réaction nationaliste dans tous les pays d'Asie orientale. Au Vietnam, quelques lettrés occidentalisés font le choix de partir au Japon pour y appeler au réveil de l'Asie. Ils emmènent avec eux le prince Cuong Dê, un descendant de l'empereur Gia Long. 1906 : Création près de Hanoi d'une école où des professeurs vietnamiens enseignent le français et les sciences. En 1907, le gouverneur général Beau fonde la première Université indochinoise qui doit contribuer à la diffusion de la culture française dans les élites indigènes. 1908 : Un mouvement de rébellion mêlant lutte nationale et banditisme affecte l'ensemble du Tonkin. 1911 : Nomination d'Albert Sarraut comme gouverneur général. Il exerce ces fonctions jusqu'en 1914, multiplie écoles et hôpitaux, développe le réseau routier et ouvre aux indigènes l'enseignement secondaire. Il abolit dans le même temps les concours littéraires propres à la culture mandarinale (le dernier a lieu à Nam Dinh en 1915). 1914-1918 : La France fait venir en métropole environ cent mille Vietnamiens qui, dans le cadre de l'effort de guerre, sont surtout employés comme ouvriers. 1916 : Albert Sarraut occupe de nouveau le poste de gouverneur général. Complot du roi Duy Tham monté sur le trône en 1907, qui est déposé et exilé à la Réunion. 1916-1925 : Règne de l'empereur Khai Dinh. 1918 : Création à Hanoi de l'Université indochinoise. 1925-1928 : Alexandre Varenne exerce les fonctions de gouverneur général. Il crée une chambre des représentants du peuple en Annam et au Tonkin et recrute des Vietnamiens comme cadres dans la fonction publique. Il prend des mesures sociales de protection de la main d'oeuvre des plantations et institue en 1926 un Crédit populaire agricole visant à mettre fin aux pratiques usuraires qui ruinaient les petits paysans. Ces réformes suscitent l'hostilité des tenants de la colonisation et cette politique ne connaît pas le développement espéré par son initiateur. 1925 : Bui Quang Chieu et Nguyen Phan Long fondent le parti constitutionnaliste en Cochinchine et adressent au gouverneur Varenne le Cahier des voeux annamites. Leurs revendications sont modérées, tout comme celles formulées par deux journalistes tonkinois, Pham Quynh et Nguyen Van Vinh. Ces opposants réclament des réformes et demandent qu'une plus grande place soit faite aux élites indigènes et que soient appliqués honnêtement les traités de protectorat. 1930 : Fondateur du parti national du Vietnam en 1927, Nguyen Thai Hoc déclenche dans la nuit du 10 février, dans la haute vallée du fleuve Rouge, l'insurrection de la garnison de Yen-bai. Quelques attentats sont également perpétrés à Hanoi et des grèves éclatent dans les plantations de coton et d'hévéa. Ce mouvement est rapidement réprimé. L'administration française n'eut pas à faire face à d'autres soulèvements jusqu'à la seconde guerre mondiale. À cette époque, c'est en URSS et en France, dans le cadre du Parti communiste, que sont formés les futurs cadres révolutionnaires. C'est notamment le cas de Nguyen Ai Quoc, le futur Ho Chi Minh, né en 1890 dans une famille de lettrés et parti en 1911 pour s'employer sur des paquebots ; il est ainsi passé en de nombreux pays dont les USA et l'Angleterre où il séjourne avant de s'installer à Paris en 1919. Présent au congrés de Tours en décembre 1920, il représentera le Parti communiste au congrès de l'Internationale paysanne de Moscou en 1923 avant de gagner Canton où le leader nationaliste Phan Boi Chau avait attiré de nombreux intellectuels vietnamiens hostiles à la colonisation française. Communiste et proche de Borodine, le représentant de la IIIe Internationale, il y fonde, en 1925, avec Pham Van Dong un parti nationaliste, l'Association de la jeunesse révolutionnaire vietnamienne (Thanh Nien) proche des communistes. En février 1930, après avoir quitté la Chine où les nationalistes se sont retournés contre les communistes, il sera le fondateur à Hong Kong du Parti communiste vietnamien, qui prendra quelques mois plus tard le nom de Parti communiste indochinois. 1930 : Création de l'Office indochinois du riz, qui développe la recherche agronomique et permet ainsi l'augmentation des rendements. 1932 : Avènement du jeune empereur Bao Dai, après une régence de sept ans. Il appelle à la commission des réformes un jeune ministre, Ngo Dinh Diem, issu d'une famille mandarinale convertie au catholicisme, mais celui-ci renonce en 1933 devant l'hostilité des autorités coloniales. 1936 : La victoire remportée en France par le Front populaire permet au Parti communiste indochinois de sortir de la clandestinité et des hommes tels que Vo Nguyen Giap et Pham Van Dong, qui compteront parmi les principaux acteurs de la lutte d'indépendance engagée en 1945, peuvent alors s'exprimer dans la presse. À la veille de la seconde guerre mondiale, le bilan de la colonisation française présente des aspects incontestablement positifs sur le plan économique, bien que le Vietnam ait subi alors les effets de la crise mondiale des années trente. En Cochinchine, la superficie des espaces cultivés en riz est passée de 522 000 hectares en 1880 à 2 200 000 hectares en 1937. Elle a donc plus que quadruplé en une soixantaine d'années et permis l'autosuffisance alimentaire du Sud mais également d'importantes exportations. Les gains de surface agricole sont moins importants au Tonkin ou en Annam faute de nouveaux espaces disponibles dans des régions densément peuplées et exploitées depuis longtemps. La culture de l'hévéa, qui s'est installée sur les espaces antérieurement forestiers, est un succès incontestable ainsi que l'exploitation des ressources charbonnières du Tonkin. La période coloniale correspond au début de la révolution démographique, conséquence de l'augmentation des ressources alimentaires et de la révolution médicale marquée par le développement des campagnes de vaccination et par la lutte contre la lèpre et la malaria. Le population a triplé en un demi-siècle, ce qui n'est pas sans conséquence au Tonkin où, faute de pouvoir développer dans les mêmes proportions les ressources alimentaires, la misère paysanne persiste. Les cadres sociaux traditionnels sont également bouleversés alors que s'accroît rapidement la masse des salariés qui, chassés par l'exode rural, sont venus s'employer sur les plantations d'hévéa, dans les grandes propriétés agricoles qui se constituent alors ou dans les mines et les usines qui commencent à apparaître. COCTEAU (Jean) : Écrivain. Né à Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise), le 5 juillet 1889, issu d’une famille de la haute bourgeoisie, Cocteau perd son père à dix ans et vit, dès lors, avec sa mère, son frère et sa sœur, chez son grand-père qui possède un hôtel particulier à Paris. Il fait ses études aux lycée Condorcet, dans un cours privé, puis au lycée Fénelon, cependant qu’il rencontre les célébrités de l’époque chez son grand-père et que celui-ci lui faisait découvrir les œuvres de Beethoven, Berlioz et Wagner. Il donnait en même temps ses premiers recueils : La Lampe d’Aladin (1909), Le Prince frivole (1910), La Danse de Sophocle (1912). Entré en contact avec Diaghilev, pour lequel il compose un argument de Ballet : Le Dieu bleu (1912), et Stravinski, Cocteau comprend, grâce à leur intention amicale, qu’il fait fausse route. Il renonce à Paris, au succès trop facile, et retiré à la campagne Il décèdera à Milly-la-Forêt (Seine-et-Oise) le 11 octobre 1963. CODE DE LA FAMILLE : CODET (Louis), 1876-1914 : Écrivain. Né le 8 octobre 1876 à Perpignan, Louis Codet, après avoir terminé ses études secondaires au lycée Condorcet et fait – sans enthousiasme – son droit, se présente à la députation en 1909 dans la Haute-Vienne où il est élu, mais ne reste député qu’un an.. Enlevé aux lettres française par la Première Guerre mondiale, Codet illustre le roman régionaliste : le Roussillon, la Gascogne, le Limousin mais aussi Paris, forment le cadre de ses intrigues. Des cinq romans qu’il écrit, deux seulement paraissent de son vivant : La Rose du jardin (1907) et La Petite Chiquette (1908), lequel obtient d’emblée l’audiance des lettrés. Dans César Capéran (1918), le talent de l’auteur est loin de se démentir. Blessé grièvement le 4 novembre 1914 en Belgique, il meurt le 27 décembre de la même année. La Fortune de Bécot (1921) aggrave encore les regrets pour sa disparition prématurée. COEN (Antonio), 1886-1956 : Avocat. Militant socialiste, Antonio Coen est l’un de ceux qui poussent les congressistes de Tours, en 1920, à voter l’adhésion à la IIIème Internationale. A l’issue du congrès, il fait partie de la direction du jeune parti communiste (SFIC). Il rompt, au bout de quelques années, avec les communistes, mais ce franc-maçon n’en demeure pas moins l’avocat de la CGTU, la centrale syndicale controlée par le PC. COHEN (Gustave), 1879-1958 : Historien. Né à Saint-Josse-Ten-Noode (Belgique) le 24 décembre 1879, on doit à Gustave Cohen le renouveau des études littéraires médiévales, qu’il a servie pendant un demi siècle au sein de l’université où il enseigne à la Sorbonne comme professeur de littératire française médiévale à partir de 1931. Dès 1906, paraît son Histoire de la mise en scène dans le théâtre religieux français du Moyen-Age. Il complètera entre 1928 et 1931 cette thèse monumentale par un Tableau du théâtre français au Moyen Age auquel il convient d’ajouter Etude sur un grand romancier d’amour et d’aventure au XIIe siècle : Chrétien de Troyes et son œuvre (1931). Dès lors, il collaborera à de nombreux ouvrages collectifs, notamment La Civilisation occidentale du Moyen Age du XIe au milieu du XVe siècle (1933) dans la célèbre collection « Histoiure générale » dirigée par Gustave Glotz. Il s’intéressera plus particulièrement à L’Art du Moyen Age avec Louis Réau (1935) et à La Formation du génie moderne dans l’art de l’Occident. Il complète son enseignement à la Sorbonne par la création, en 1933, d’un groupe théâtral, « Les Théophiliens », qui sera chargé de faire connaître au grand public le théâtre du Moyen Age. Cette véritable révolution pédagogique au sein d’une Sorbonne encore très traditionnaliste aura un immense succès. Cependant, elle n’étonne guère de la part d’un esprit qui est assez eccléctique et original pour donner, en 1928, à l‘occasion d’un cours en Sorbonne une explication cosmique et tout à fait singulière, restée célèbre dans les annales universitaires, du Cimetière marin de Paul Valéry. Il décèdera à Paris le 11 juin 1958. COHL (Émile Courtet, dit Émile), 1857-1938 : Dessinateur et animateur. Né à Paris le 4 janvier 1857, Emile Cohl est considéré comme l'inventeur du dessin animé cinématographique. Il fut l'élève du caricaturiste André Gill, Emile Cohl crée le dessin animé sur pellicule de cinéma, Fantasmagorie, qui est projeté pour la première fois le 17 août 1908, au théâtre du Gymnase à Paris, pour la société Gaumont. Il est cependant important de noter qu'Émile Reynaud projeta des dessins animés de plus de 500 images, sur le théâtre optique, un système proche du projecteur de cinéma, dès le 28 octobre 1892. De 1908 à 1923, Émile Courtet réalise plus de deux cents films d'animation. Il fait également du théâtre, de la photographie, de l'illustration de livres, et beaucoup d'autres choses. Il travaille comme indépendant, puis pour les compagnies cinématographiques françaises comme Lux, Gaumont, Pathé, Eclipse, Éclair pour qui il travaille à Fort Lee aux États-Unis de 1912 à 1914 comme directeur d'animation. Il fréquente les cabarets du Chat noir et du Lapin Agile à Paris, appartient aux deux groupes artistiques Hydropathes et Incohérents, et fréquente de nombreux écrivains comme Victor Hugo ou Verlaine. Il rencontre également de nombreux cinéastes comme Georges Méliès, dont il est l'un des amis les plus fidèles, ou Sacha Guitry. Parmi es œuvres, citons : Fantoche (1908) ; Les Allumettes animées (1908) ; le premier film de marionnettes Le Tout petit Faust (1910) ; le premier dessin animé en couleur Le Peintre néo-impressionniste (1910) ; le premier dessin animé éducatif, La Bataille d'Austerlitz (1910) ; La pixilation, Jobard ne peut pas voir les femmes travailler (1911); le premier dessin animé tiré d'une bande dessinée Les Aventures des Pieds Nickelés (1917) ; la première série de dessins animés Le Chien Flambeau (1917). Il décède à Villejuif le 20 janvier 1938. COLETTE (Sidonie-Gabrielle Collette, dite), 1873-1954 : Femme de lettres. Sidonie-Gabrielle Colette naît le 28 janvier 1873 à Saint-Sauveur-en-Puisaye, dans l'Yonne. Sa mère, Sidonie Landoy, avait épousé Jules Robirieau-Duclos de qui elle eut deux enfants. Après le décès de ce premier mari, elle épouse le capitaine Joseph-Jules Colette le 20 décembre 1865. Ce dernier est un ancien officier de carrière. De ce second mariage, avant le futur écrivain, était né Léo. La jeune fille fréquente l'école communale et cette éducation s'achève au moment où elle passe avec succès son brevet élémentaire, les 1er et 2 juillet 1889 dans la ville voisine d'Auxerre. La même année, la maison familiale de Saint-Sauveur est vendue par autorité de justice. Les Colette sont à présent très endettée, Joseph-Jules Colette ne s’étant pas montré à la hauteur des responsabilités financières qui lui incombent. Ils doivent quitter la ville et se réfugier à Châtillon-Coligny, dans le Loiret, chez Achille, devenu médecin. L’adolescente regrettera longtemps l’éloignement et la disparition de la maison de son enfance. Trois années plus tard, le 15 mai 1893, Sidonie-Gabrielle Colette se marie à Henri Gauthier-Villars, dit « Willy », le fils cadet d'Albert Gauthier-Vilars, ancien camarade de promotion du Capitaine Colette devenu un grand éditeur. Le couple s'installe peu après à Paris, puis rue de Courcelle en 1901. A l'époque, Willy collabore à L'Écho de Paris, à La Revue blanche, à la Revue encyclopédique ... Le journaliste est aussi un homme de lettres, qui s'est fait connaître par le passé en publiant une série de romans « légers » : La Môme Picrate, Un petit Vieux bien propre, Suzette veut me lâcher ... Fort goûté pour son esprit et ses calembours dans les salons à la mode, Willy initie sa femme à la vie du Tout-Paris littéraire. Celle-ci fait d'ailleurs bientôt partie de ses « nègres », une équipe de tacherons des lettres, à l'origine d'une abondante production. En 1900, est ainsi publié Claudine à l'école, sous le seul nom de Willy, puis Claudine à Paris, un volume signé cette fois ci « Willy et Colette Willy », Claudine en ménage en 1902 et enfin Claudine s'en va l'année suivante, qui clôt la série. Colette rédige et publie ensuite sous son seul nom Dialogues de bêtes en 1904. Ce dernier volume, où elle montre pour la première fois toute la tendresse qui la lie au monde des animaux, est préfacé par le poète Francis James. Colette s'éloigne à présent de son mari et habite avec la fille du duc de Morny, « Missy » la scandaleuse, divorcée d'avec le marquis de Belbeuf, qui fume le cigare et s'habille en homme. Le divorce d’avec Willy ne sera cependant prononcé que le 21 juin 1910, après une séparation de corps et de biens. Dès le début de l'année 1906, Colette prend des leçons de pantomime avec Georges Waag, dit « Wague », un comédien de renom qui a renouvelé l'art du mime. Dans les années qui suivent, de 1907 à 1912, elle joue en sa compagnie de nombreuses pièces sur les scènes parisiennes : Le Désir, L'Amour, L'Oiseau de nuit ... Enfin, le 3 juillet 1907, la comédienne fait scandale au Moulin rouge, en apparaissant dans un léger déshabillé avec Missy dans une autre pantomime baptisée Rêve d'Égypte. Deux années plus tard, elle joue dans la pièce En camarades, au théâtre des Arts. Colette poursuit également son activité d'écrivain. Elle publie Les Vrilles de la vigne en 1908, qui raconte notamment son expérience de la scène, puis L'Ingénue libertine l'année suivante et La Vagabonde en 1910. A ce dernier volume, le jury du prix Goncourt attribue trois voix. Elle prête également sa plume au journal La Vie parisienne. L'écrivain fait ainsi la connaissance du rédacteur en chef du grand quotidien, Henry de Jouvenel des Ursins, avec lequel elle se marie le 19 décembre 1912. Le couple aura une fille, prénommée également Colette mais surnommé par sa mère « Bel-Gazou », qui nait le 3 juillet 1913. Peu après le commencement du premier conflit mondial, Colette assure les gardes de nuit auprès des blessés soignés au Lycée Janson-de-Sailly, qui est transformé en hôpital. La Paix chez les bêtes paraît en 1916, puis Les Heures longues en 1917 et enfin Dans la foule, à l'heure où l'armistice du 11 novembre met fin aux combats. C’est l’heure de la reconnaissance. Le 25 septembre 1920, Colette se voit décerner la Légion d'honneur. Grâce à son talent de plume, elle reçoit bientôt la direction littéraire du journal Le Matin. Pendant quatre années, jusqu’au mois de décembre 1923, Colette se rend ainsi chaque jour de la semaine à son bureau, situé au quatrième étage et qui donne sur le boulevard Poissonnière, afin d’y préparer les pages qui sont de son ressort. Outre la chronique dramatique et le panorama des dernières nouveautés littéraires, elle doit ainsi sélectionner les manuscrits que lui font parvenir divers auteurs et qui alimentent sa rubrique des « Mille et un matins ». En 1920, paraît Chéri. C’est un nouveau succès, qui se prolonge avec La Fin de Chéri. Vient ensuite Le Blé en herbe en 1922, un court roman consacré aux amours de jeunesse. L'écrivain se sépare bientôt d'André de Jouvenel. Le divorce sera prononcé le 6 avril 1925. Elle entame une tournée de conférences dans le Midi de la France, à partir du 9 novembre 1923, et adopte à cette époque le simple nom de « Colette » pour signer ses ouvrages. D'avril à septembre 1924, poursuivant une collaboration jusque là fructueuse avec la presse parisienne, elle donne chaque dimanche un article de chronique pour Le Figaro dans une rubrique intitulée « L’Opinion d"une femme ». Au mois de mars 1925, a lieu la première représentation à l'Opéra de Monte-Carlo de L'Enfant et les sortilèges, un opéra de Maurice Ravel dont l'écrivain a rédigé le livret. L'œuvre suscite l'enthousiasme du public et Colette s’illustre ainsi dans un nouveau registre. A cette époque, elle se lie à Maurice Goudeket, un homme d'affaires. De retour d’un voyage au Maroc, Colette quitte son appartement du boulevard Suchet et s'installe près du Palais-Royal, où elle résidera définitivement en 1938. L'écrivain acquiert également une villa, La Treille muscate, à Saint-Tropez, « au bord d'une route que craignent les automobiles ». De nouveaux romans sont édités dans les années qui suivent : La Naissance du jour en 1928, La Seconde l'année suivante, Sido en 1930. Colette, qui est maintenant reconnu comme une des grandes femmes de lettres de son temps, reprend également ses tournées de conférences, d'abord au Maroc puis en Europe (en Allemagne, en Suisse et en Belgique). Le 1er juin 1932, elle ouvre un institut de beauté, à Paris, rue Miromesnil. Précédant Duo, La Chatte est publiée en 1933, année où Colette renoue avec la critique dramatique dans les colonnes du Matin. Le 9 mars 1935, l’écrivain féministe se marie pour la troisième fois, à Maurice Goudeket. Au mois de juin, les deux époux sont à bord du paquebot Normandie, qui effectue sa première traversée de l'Atlantique à destination de New-York. Peu après la déclaration de guerre à l'Allemagne nazie, Colette anime une émission radiophonique à Paris-Mondial, à destination des pays d'outre-mer. A la fin du printemps 1940, elle fuit Paris, comme des milliers de français jetés dans l’exode, et gagne Curemonte, en Corrèze, où réside sa fille. Le 11 septembre, après la signature de l'armistice, l'écrivain est de retour dans la capitale, alors que commence l'occupation. En 1941, ses souvenirs paraissent sous le titre de Journal à rebours. Bientôt cependant, Colette est clouée au lit par les crises d'arthrite. Une nouvelle épreuve l’attend ensuite. Au mois de décembre 1941, son mari est arrêté et interné au camp de Compiègne, en raison de ses origines juives. L’écrivain, à force de démarches, parvient à le faire libérer le 6 février 1942. De ma fenêtre en 1942, puis Le Képi et enfin Trois-six-neuf sont publiés pendant la guerre. En 1945, Colette est élue à l'Académie Goncourt, devenue après un demi-siècle d’existence une institution du monde des lettres. Elle en devient la présidente en 1949. Cette année-là, les Éditions du Fleuron fondées par son mari entament la publication de ses œuvres complètes. Le 3 août 1954, Colette décède à Paris. COLLIARD (Pierre), 1852-1925 : Homme politique. Né à Jons (Isère), le 30 avril 1852, député de gauche de Lyon, Pierre Colliard, ministre du Travail et de la Prévoyance sociale du 16 novembre 1917 au 2 décembre 1919, tente d’allier une politique sociale du travail avec les exigences de la guerre ou de l’immédiat après-guerre. Il doit ainsi se pencher sur l’acquisition de petites propriétés rurales par les victimes de guerre, de la démilitarisation des usines, des réparations aux victimes civiles, etc. Il intervient aussi dans le débat sur l’extension de la capacité civile des syndicats. Il décèdera à Jons le 19 mai 1925. COLLIN (Louis-Joseph-Raphaël), 1850-1916 : Peintre. Né à Paris en 1850, élève de Bouguereau, puis de Cabanel, Raphaël Collin obtient une seconde médaille avec un tableau Le Sommeil, exposé en 1873. En 1875, l’Etat acquiert sa gracieuse Idylle et expose en 1877, Daphnis et Chloé puis, en 1884, une importante composition : L’Eté. Depuis, il a donné : Fin d’été (1887) ; un Plafond (1891) pour le foyer de l’Odéon ; La Poésie, paneau pour le Salon des lettres, à l’hôtel de Ville de Paris ; Eveil et Primrose (1894). Dans toutes ses œuvres, la figure nue joue un rôle important. Durant les années 1898-1899, Collin a exécuté, pour le petit foyer de l’Opéra-Comique, un plafond : La Vérité dans la fiction, un panneau central : L’Inspiration musicale, et deux panneaux latéraux : L’Ode et La Chanson. Il a peint en outre un grand nombre de portraits, surtout de femmes et d’enfants. Artiste remarquable par la finesse du dessin, la grâce des attitudes et la délicatesse de la couleur, il a été également professeur à l’Ecole des beaux-arts et membre de l’Académie des beaux-arts en 1909. Il décède à Brionne (Eure) en 1916. COLOMB (Joséphine-Blanche Bouchet, épouse), 1833-1892 : Femme de lettres. Né en 1833 à La-Roche-sur-Yon, Colomb a écrit pour la jeunesse un grand nombre d’ouvrages, particulièrement : Le Violoneux de la Sapinière (1873) ; La Fille de Carilès (1874) ; Le Bonheur de Françoise (1877) ; Les Etapes de Madeleine (1881) ; etc. Elle décède à Villerville (Calvados) en 1892. COLOMBEY (Charles-Hippolyte Tardiveau, dit), 1852-1931 : Acteur. Né à Châteaubriant (Loire-Inférieure) en 1852, Colomb débute à Nantes, joue à Rouen, à Bruxelles. Après être passé par le Vaudeville et l’Odéon, où il tient l’emploi des comiques, il crée avec succès des rôles importants aux Folies-Dramatiques, au Gymnase, au Palais-Royal, au Vaudeville et aux Nouveautés. C’est à ce dernier theâtre qu’il remporte ses plus éclatants succès, notamment dans L’Hôtel du Libre-échange, La Tortue, Le Sursis, Le Contrôleur des wagons-lits, La Dame de chez Maxim, La Petite fonctionnaire, Loute, etc. Il décède en 1931. COLOMBIER (Marie), 1844-19 : Actrice et femmes de lettres. Née à Auzances en 1844, Marie Colombier joue à l’Odéon en 1872, à l’Ambigu-Comique (1878) et accompagne, en 1880, dans une tournée en Amérique, Sarah Bernhardt, dont elle est l’amie , mais avec qui elle se brouille dans la suite et qu’elle attaque dans Les Mémoire de Sarah Barnum (1884). On lui doit entre autres ouvrages : Le Carnet d’une parisienne (1892) ; La Plus jolie femme de Paris (1887) ; etc. COLONIAL (Office) : Appelé depuis 1920 Agence générale des colonies, institution officielle, créée en 1899, relevant du ministère des Colonies, et destinée à fournir au public les renseignements sur les débouchés offerts au commerce français dans les colonies françaises, et au commerce des colonies dans la métropole. COLONIALE (Médaille) : Instituée par l’article 75 de la loi du 26 juillet 1893, la médaille militaire est accordée sur leur demande aux militaires er marins de tous grades ayant obtenus le bénéfice de campagne de guerre pour participation aux opérations de guerre effectuées aux colonies. Elle l’a été aussi à quelques explorateurs. La médaille, en argent, du module de 3 cm., porte d’un côté l’effigie de la République et, de l’autre côté, un globe terrestre entouré d’attributs militaires. Elle est suspendue à un ruban bleu à trois raies blanches, traversé par une ou plusieurs agrafes d’argent ou d’or, sur chacune desquelles est gravé le nom de la colonie où le titulaire a fait campagne. COLONIALE (politique) : En 1870, la France possède déjà des colonies plutôt qu’un empire colonial, en ce sens que ce sont des éléments dispersés. De l’ancien régime, elle avait conservé en 1815 en Amérique Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que le droit de pêche exclusif sur les bancs de Terre-Neuve, la Martinique et la Guadeloupe et quelques postes en Guyane – en Afrique les trois comptoirs du Sénégal, Saint-Louis, Gorée et Rufisque, et l’île Bourbon, devenue l’île Chandernagor, Yanaon, Pondichéry, Karikal et Mahé. La Restauration et la monarchie de Juillet avaient ajouté l’Algérie, Assinie et Grand Bassam en Côte-d’Ivoire, Mayotte et Nossi-Bé dans les Comores, dans le Pacifique les îles Marquises et Tahiti. Le Second Empire enfin avait construit le Sénégal, et acquis Obock à la sortie de la mer Rouge, commencer à former l’Indochine française par l’acquisition de la Cochinchine et le protectorat accordé au Cambodge, annexé dans le Pacifique les îles Loyalty et la Nouvelle-Calédonie. Mais les hésitations des différents régimes ont montré qu’il n’y avait pas de véritable politique coloniale. La Troisième République au contraire, du moins à partir de 1880, a témoigné d’une volonté d’une politique coloniale que l’on retrouve du reste chez les autres états européens mais qui ne passionne pas véritablement l’opinion publique. Les causes de cette politique sont multiples : Cause intellectuelle. Faidherbe avait déjà encouragé les enquêtes ethnographiques, et les voyages de découverte avaient eu déjà pour raison profonde la curiosité scientifique. La Société de Géographie, créée à Paris en 1821, qui a végété jusqu’en 1870, prend une importance nouvelle et essaime en province. Elle ne cache pas que la science n’est pas sa seule préoccupation, mais le souci est également national, politique, économique, afin d’encourager la mission civilisatrice de la France ; puis d’autres sociétés se sont fondées, d’ethnologie, de botanique, d’acclimatation, des comités, le Jardin colonial de Nogent et l’Union coloniale de 1889. Cause économique. L’Europe est devenue un foyer de consommation accrue de thé, cacao, tabac, sucre, etc. La possession de colonies est l’assurance de débouchés. Il faut donc assurer un marché d’approvisionnement. Inversement, l’industrie a besoin de débouchés pour une production accrue par le machinisme, d’autant plus que le protectionnisme va s’étendre à la fin des années 1880. Cause financière. « Les colonies sont, pour un pays riche, un placement de capitaux des plus avantageux » (J. Ferry). L’accumulation de capitaux inemployés provenant des excédents de la balance des paiements fait baisser le taux d’intérêt et rechercher des investissements plus rentables. Pour Jules Ferry, les territoires conquis devaient être des colonies de capitaux. Il faut cependant reconnaître que les Français ont préféré prêter à des pays européens plutôt que de l’investir dans leurs territoires coloniaux. Cause nationale. Le sentiment commun à tous les pays d’Europe est celui de la supériorité de la civilisation européenne : dans son discours du 28 juillet 1885, Jules Ferry affirme le les droits et les devoirs des races supérieures. La France a en outre une raison particulière : il faut effacer la défaite par l’action ; « la politique du recueillement ou d’abstention c’est tout simplement le grand chemin de la décadence ». Cause morale et religieuse. Le XIXe siècle est un siècle d’évangélisation, surtout après 1870. L’Europe retrouve sa vocation missionnaire, comme au XVIe siècle, pour convertir, mais aussi pour améliorer les conditions de vie des indigènes. C’est aussi le cas des missions laïques, telle l’installation du docteur Schweitzer à Lambaréné (AEF) en 1913. Causes individuelles. Ce sont souvent les initiatives de missionnaires, d’explorateurs, de militaires ou d’aventuriers, qui mettent le gouvernement devant le fait accompli. Les colonies sont aussi un excellent exutoire pour les populations des départements pauvres, qui trouvent aux colonies un moyen de promotion sociale : la masse des petits blancs, pour qui la vie en métropole restait médiocre, et qui ont l’espoir d’acquérir pouvoir et richesse. A ces raisons s’ajoute bientôt la faiblesse démographique de la France, qui pousse à chercher aux colonies une main d’œuvre à bon marché et une force militaire d’appoint. Contre cette politique coloniale le mouvement anticolonial reste faible : il peut être le fait des paysans, qui forment l’essentiel de l’armée, et qui ont l’impression de financer les expéditions en payant la part la plus grande de l’impôt. Il peut-être suscité par le nationalisme, les expéditions affaiblissant la France et la détournant de la revanche. Certains radicaux-socialistes mettent en cause la forme d’exploitation de l’indigène par les grandes compagnies. Toutes ces causes expliquent que les oppositions au colonialisme ont tendance a s’estomper à la fin du XIXe siècle. La droite s’y rallie par nationalisme, les radicaux par patriotisme et jacobinisme. les seuls véritables adversaires de la politique coloniale sont les socialistes. Paul Louis publie en 1905 Le Colonialisme dans la Bibliothèque socialiste ; il condamne l’exploitation capitaliste de l’indigène, la concurrence apportée à la main-d’œuvre européenne et la possibilité, par la création de superbénéfices, de payer un sursalaire aux ouvriers français pour les écarter de la révolution. Mais les socialistes finissent par admettre la validité d’une colonisation qui ne serait pas simplement une exploitation des indigènes mais qui leur apporterait les bienfaits de la civilisation. Au début du Xxe siècle, les Français se satisfont de savoir qu’ils possèdent un empire immense, ce qui fait d’eux une grande puissance, sans que pour autant cette satisafaction entraîne de leur part une adhésion profonde au fait colonial. De même sont-ils réservés envers l’idée d’assimilation progressive des peuples indigènes par la conversion ou l’éducation qui avait été dans un premier temps la justification morale de la conquête coloniale. Ce refus de l’assimilation est confortée par les travaux des sociologues et des etnologues, tels que Durkheim et Lévy-Bruhl, sur les mentalités et les institutions primitives qui leur fournissent une base scientifique en montrant l’incompatibilité entre les indigènes et les Européens. La tendance dominante en la matière est bien résumée par l’ouvrage de Jules Harmand, médecin colonial en Indochine, paru en 1910 et intitulé Domination et colonisation. Il y affirme que l’assimilation est un boulet qui ne peut qu’affaiblir la métropole, alors que le but des colonies est de la renforcer. Pour cette raison, les colonies doivent être des « dominations » où le Gouverneur général représentant la France établira la souveraineté de l’Etat français sur des indigènes dont il doit respecter les traditions et les coutumes sans tenter de les assimiler. D même, les colonies ne doivent pas avoir barre sur la politique générale et financière de la métropole. Il n’est donc pas question qu’elles aient une représentation parlementaire, mais tout au plus des conseils locaux consultatifs destinés à renseigner le gouverneur. Globalement, telle sera la politique suivie par la France dans ses colonies, le terme « association » remplaçant celui, jugé choquant, de « domination ». Elle est soutenue au Parlement et diffusée dans l’opinion par le « parti colonial », groupe de pression organisé par un député d’Oran, Eugène Etienne. Parallèlement à ces théories élaborées par les hommes politiques, les militaires et les administrateurs coloniaux mettent au point sur place des méthodes d’administration coloniale fort diverses. La première étape est celle de l’assimilation tentée par Galliéni à Madagscar à la fin du XIXe siècle. Conquérant du Sénégal et du Tonkin, Gallieni est envoyé en 1896 à Madagascar pour pacifier l’île. Il y supprime la monarchie hova et met au point une méthode de pacification par « tâche d’huile ». Chaque petit poste devant créer son marché, ses écoles, ses routes, rassurer les habitants, gagner les dissidents, selon l’initiative des officiers locaux qui jouissent d’une large autonomie. Pour organiser et administrer le pays, Gallieni préconise de s’appuyer sur l’ethnie dominante en l’associant à la gestion de la région et d’assurer ainsi la promotion économique, l’assistance médicale, l’enseignement, le levée de l’impôt. Quant à Lyautey, il reçoit en 1902 la charge de pacifier les confins algéro-marocains, puis en 1912 la fonction d’administrer le Maroc en proie à l’anarchie. Administrateur du passé indigène, des civilisations locales, il entend, contrairement à Gallieni les préserver, et pour se faire, se monter attacher à la pratique du protectorat. Il restaure les vieilles coutumes, préserve un Etat fortement centralisé aux mains du sultan. Il encourage les élites indigènes se contentant de contrôler leur action. Pour lui, le régime de protectorat doit être définitif. Le Maroc doit certes devenir un champ d’expansion française mais le peuple marocain doit participer aux bénéfices de l’expansion. En Afrique noire, l’essentiel du pouvoir appartient aux administrateurs des services civiles, les « commandant » qui disposent dans leur ressort de tous les pouvoirs (ordre, justice, police, voirie, architecture, enseignement, assistance médicale). Successeurs des rois locaux , ils exercent une administration directe, ne laissant en place les chefferies que ci celles-ci leur obéissent. Volontiers paternalistes, ils se font les défenseurs des Noirs contre les colons qui cherchent à les utiliser comme main d’œuvre. Jusqu'à la Première Guerre mondiale, le système mis ainsi en place fonctionne sans trop de heurts. Durant la guerre, l'Empire envoie 500.000 combattants et 5 millions de tonnes de marchandises. La victoire va porter l'Empire français à son maximum puisque aux colonies et aux protectorats s'ajoutent les mandats qui lui sont confiés par la Sociétés des Nations (SDN) sur les anciennes colonies turques de Syrie et du Liban et les anciennes colonies allemandes du Togo et du Cameroun. La France se satisfait ainsi de posséder le second empire colonial au monde, ce qui permet d'évoquer, comme le fait le général Mangin, la « France des cent millions d'habitants ». Organisée par Lyautey au bois de Vincennes, l'exposition coloniale de 1931 bénéficie d'un immense succès de curiosité et manifestera la satisfaction naïve des Français devant la possession d'un gigantesque empire. En revanche, la guerre a introduit dans le phénomène colonial des germes de dissolution dont la France ne prend guère conscience. C'est ainsi que les « Quatorze points » du président américain Wilson en affirmant de droit des peuples (y compris des peuples coloniaux) à disposer d'eux-mêmes apparaît comme une condamnation du fait colonial. Le nouveau système des « mandats » en est d'ailleurs une des applications puisque la mission de la puissance mandataire est de préparer à l'indépendance des territoires qu'elle administre. Considéré comme une simple clause de style, le système des mandats est pris au sérieux par les plus évolués des peuples indigènes. Avec la révolution bolchevique, les communistes se faisant propagandistes de l'indépendance des peuples coloniaux. Or ces évènements restent pratiquement sans influence sur les conceptions coloniales françaises. Si Albert Sarraut, ancien gouverneur général de l'Indochine, plaide pour un développement économique des colonies, de manière à les rendre complémentaires de la métropole et préconise une large décentralisation administrative, l'association triomphe plus que jamais et seules des mesures limitées sont prises : création d'un Conseil supérieur des Colonies, purement consultatifs, de conseils locaux pour répondre aux premières manifestations du nationalisme, de Délégations financières (en Algérie et Madagascar), des Grands Conseils d'Indochine et de Tunisie, du Conseil de Gouvernement du Maroc. Mais les attributions de ces dernières institutions sont purement économiques et financières, et, si des indigènes y siègent, ils sont toujours en nombre inférieur à celui des Européens et désignés par les organisations économiques et non par le suffrage. Seuls les mandats de Syrie et du Liban ont un statut de Républiques semi-autonomes. Pour autant le bilan de la politique coloniale de la France est fort loin d'être négligeable. Il entame un progrès démographique grâce aux hôpitaux et aux instituts Pasteur. Les progrès économiques sont inégaux. La colonisation a développé les moyens de communication et certaines richesses minérales et agricoles (houille au Tonkin, hévéa en Annam et au Cambodge, mines du Maroc, arachide du Sénégal, café de Côte d'Ivoire, etc). Les compagnies qui mettent les colonies en valeur disposent d'une forte influence à Paris. Mais sur place, elles se heurtent souvent aux gouverneurs et aux administrateurs qui s'efforcent de protéger les indigènes et les intérêts de la colonie, perdant souvent leur bataille contre les bureaux parisiens qui obtiennent fréquemment la rappel d'administrateurs ou de gouverneurs trop peu compréhensifs. Les progrès scolaires sont toujours insuffisants, même si un effort de scolarisation réel est entrepris. Une partie seulement de la population d'âge scolaire est effectivement. Toutefois le développement de l'instruction aboutit à un double résultat : la naissance d'une élite indigène pétrie de culture française, mais aussi d'une masse pourvue du certificat d'études qui dédaigne les métiers manuels, mais à qui l'administration coloniale n'offre pas les postes administratifs qu'elle ambitionne, ce qui provoque son aigreur. C'est de la conjonction de ces élites et des mécontentements que naissent les premiers mouvements nationalistes. Les indigènes, mêmes instruits restent en effet des sujets auxquels il n'est nullement question de confier les leviers de commande ni de les associer au sort de leur pays. A partir de là naissent des nationalismes d'inspirations diverses. Les uns sont d'essence traditionaliste ; représentants des chefferies indigènes, milieux religieux nobles s'indignent des changements apportés par les Européens à l'état de chose traditionnel : les dieux, les ancêtres, les tabous ne sont plus respectés. Aussi préconisent-ils, dans une inspiration xénophobe et réactionnaire, le départ des colonisateurs. Très différent est le nationalisme des élites évoluées qui accepte au contraire les progrès apportés par la colonisation, mais, au nom des idées des colonisateurs, réclament la fin de la domination de ceux-ci. Les uns agissent au nom du droit des peuples a disposer d’eux-mêmes, se réclamant de l’héritage des idées françaises de liberté et d’égalité ; les autres exigent, au nom de la lutte contre l’impérialisme, la fin de la domination coloniale. Or, face à ces mouvements, la France ne répond que par la répression. Seule la période du front populaire qui voit arriver au pouvoir les socialistes qui ont compati aux révoltes de l’intelligentsia indigène et penchent vers l’assimilation est le théâtre d’une timide tentative d’évolution de la politique coloniale. Le gouvernement Blum crée sous la présidence du professeur socialiste Charles-André Julien un Haut Comité méditerranéen ; le projet Blum-Viollette pour l’Algérie prévoit l’octroi du droit de vote à 25.000 musulmans ; le sous-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Pierre Viénot, prépare des traités donnant l’indépendance à la Syrie et au Liban, cependant que Marius Moutet, ministre des Colonies, crée une Commission d’enquête sur les colonies et prépare un programme de travaux publics utiles aux indigènes. Mais la chute du cabinet Blum en juin 1937 et l’opposition de la majorité du monde politique aux initiatives des socialistes feront achopper ces projets. Au demeurant, le Front populaire n’a jamais envisagé de donner la moindre satisfaction au nationalisme indigène. La Seconde Guerre mondiale va, par la force des choses, conduire à une évolution de la politique coloniale de la France qu’elle se refusait jusqu’en 1940 à admettre. La défaite a pour résultat immédiat de couper l’Empire en deux parties : la première, obéissant aux gouverneurs fidèles à Vichy (Afrique du Nord, Afrique occidentale française, Madagascar, Antilles, Syrie, Liban) et la seconde ralliée à la France libre et poursuivant la guerre dans le camp britannique (Afrique équatoriale française). MEYER (J.), TARRADE (J.) : REY-GOLDZEIGUER (J.), THOBIE (J.) : Histoire de la France coloniale. Des origines à 1914, Paris, A. Colin, 1991. THOBIE (J.), MEYNIER (G.), COQUERY-VIDROVITCH (C.), AGERON (C.-R.) : Histoire de la France coloniale 1914-1990, Paris, Armand Colin, 1990. DESCHAMPS (H.) : Méthodes et doctrines coloniales de la France, Armand Colin, 1953. COLONIAUX (Ordres) : Reconnus par le gouvernement depuis 1896, il en existe cinq : l’ordre du Cambodge, le Dragon de l’Annam, l’Etoile Noire du Bénin (ou de Porto-Novo), le Nichan el-Anouar de Tad-jourah et l’Etoile d’Anjouan. Ces ordres coloniaux ont pour grand maître le président de la République, et sont conférés par décision présidentielle, sur le rapport du ministre des Colonies, après avis du Conseil de la Légion d’honneur. Nul ne peut être décoré d’un ordre colonial s’il n’a dix ans de services. Il faut deux ans d’ancienneté dans un grade pour être promu au grade supérieur. Toute attribution de décoration dont le titre n’est pas enregistré par la Grande Chancellerie dans un délai de six mois sera considérée comme nulle et non avenue. L’enregistrement donne lieu aux droits de chancellerie ci-après : 20 francs pour les brevets de chevalier, 40 pour ceux d’officier, 60 pour ceux de commandeur, 80 pour ceux de commandeur et 100 pour ceux de grande-croix. (décret du 15 mai 1926). Les dispositions disciplinaires de la Légion d’honneur sont appliquables à tous les titulaires. COLONIES (Ministère des) : L’administration de colonies, longtemps rattachée au ministère de la Marine, y est devenue un sous-secrétariat d’Etat à partir de 1881, puis a été érigée en ministère avec la loi du 20 mars 1894. L’administration centrale des colonies comprend : 1° le cabinet du ministre ; 2° une direction politique ; 3° une direction économique ; 4° une direction des services militaires ; 5° une direction du contrôle ; 6° une direction du personnel et de la comptabilité ; 7° une inspection générale des travaux publics ; 8° une inspection générale du service de santé ; 9° un service de la marine marchande. Du ministère des Colonies dépendent également divers établissements publics comme l’agence générale des colonies, l’école coloniale, le jardin colonial. Un service administratif des colonies, établi dans les quatre grands ports de commerce (Marseille, Bordeaux, Nantes, Le Havre), relève, enfin, de l’administration centrale. Auprès du ministre fonctionnent un certain nombre de commissions permanentes dont les membres sont recrutés soit parmi les fonctionnaires du ministère, soit parmi les spécialistes connu. Les principales de ces commissions sont les suivantes : conseil supérieur des colonies ; commissions des concessions coloniales et du domaine ; commissions de surveillance des banque coloniales ; comité supérieur consultatif du contentieux des colonies, comité supérieur consultatif de l’instruction publique des colonies ; commissions supérieures des archives ; etc. COLONNE (Jules-Edouard Jula, dit), 1838-1910 : Violoniste et chef d’orchestre. Né à Bordeaux en 1838, Colonne obtient, au Conservatoire, le premier prix d’harmonie et le premier prix de violon. Admis à l’orchestre de l’Opéra, il le quitte pour fonder, en 1871, le Concert national, dont les séances se donnaient à l’Odéon, et qui, avec l’Association artistique, se transporte dans la salle du Châtelet. C’est là que Colonne commence à populariser les œuvres de Berlioz : L’Enfance du Christ, La Damnation de Faust, Roméo et Juliette, Les Troyens, et force le public à rendre justice au génie de ce maître alors tant discuté ; c’est là qu’il fait entendre le premier oratorio de Massenet, Marie-Magdeleine, et nombre d’œuvres de jeunes compositeurs français; c’est là, enfin, qu’il fait connaître des œuvres ou fragments d’œuvre de musiciens étrangers célèbres : Richard Wagner, Tchaïkowsky, Rimsky-Korsakow, etc. Colonne est, en 1892, premier chef d’orchestre de l’Opéra, où il monte Salammbô, Samson et Dalila, et La Walkyrie. Il décède à Paris en 1910. COLRAT DE MONTROZIER (Maurice) : 1871-1954 : Avocat et homme politique. Né à Sarrazac (Lot) le 29 septembre, Maurice Colrat, jeune avocat, est choisi comme secrétaire de Poincaré et devient vice-président de l’Union républicaine en 1899. Directeur de l’Opinion de Paul Doumer, il est élu député sur la liste conduite par Tardieu en 1919. Sous secrétaire d’Etat du 17 janvier 1921 au 13 janvier 1922 dans le septième cabinet Briand, il est ensuite sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères, chargé de la présidence du Conseil du 15 janvier au 5 octobre 1922 dans le second ministère Poincaré. Lors de la démission de Barthou il est garde des Sceaux du 5 octobre 1922 au 28 mars 1924 dans les deuxième et troisième cabinets Poincaré. Il garde le même portefeuille du 19 au 22 juillet 1926 dans le second ministère Herriot. Il décèdera à Paris le 5 mars 1954. COLSON (Clément), 1853-19 : Ingénieur et administrateur. Né à Versailles en 1853, ingénieur des ponts et chaussées, Clément Colson entre au Conseil d’Etat où il est successivement conseiller, président de section et vice-président. Il a professé à l’Ecole des ponts et chaussées l’économie politique. Il a publié : Transports et Tarifs (1890 et 1898) ; Les Chemins de fer et le Budget (1896) ; Cours d’économie politique professé à l’Ecole des ponts et chaussées (1902-1903). Il a été élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1910. Il décède à le. COLSON (Louis), 1875-1951 : Général et homme politique. Né à Toul (Meurthe-et-Moselle), le 27 octobre 1875, Louis Colson entre à l’Ecole polytechnique en 1896, puis à l’Ecole d’application de Fontainebleau. Capitaine en 1904, il est admis peu après à l’Ecole de guerre. Pendant la Première Guerre mondiale, il sert comme chef de bataillon et lieutenant-colonel dans divers états-majors d’armée. En 1920, Louis Colson est mis à la disposition u maréchal Pétain alors vice-président di conseil supérieur de la guerre. Il poursuit une carrière militaire brillante.. Promu général de division en août 1931, il entre au conseil supérieur de guerre en 1936. Ala vieille de la Seconde Guerre mondiale, il est chef d’état major auprès du général Gamelin. Le 16 juin 1940, le maréchal Pétain le nomme ministre-secrétaire d’Etat à la guerre jusqu’au 12 juillet 1940 dans son gouvernement. Après l’armistice, sa tâche va notamment conister à régler le sort des jeunes incorporés et à appliquer la convention d’armistice en livrant des armes à l’armée allemande. Traduit devant la Haute Cour de justice, Colson bénéficiera d’un non-lieu pour fait de résistance. Il décèdera à Paris le 7 mars 1951. COMBARIEU (Jules), 1859-1916 : Musicologue. Né à Cahors en 1859, Jules Combarieu fonde en 1901 la Revue musicale (la deuxième du même nom) et professe au Collège de France (1904-1910). On lui doit une thèse sur Les Rapport de la musique et de la poésie (1893), des Etudes de philolophie musicale (1896-1898) ; des travaux sur la musique et la magie ; un ouvrage de vulgarisation : La Musique, ses lois, son évolution (1907) ; une Histoire de la musique (1913) continuée après sa mort, aux idées fécondes, mais érronées par endroits. Il décède à Paris en 1916. COMBES (Justin-Louis-Emile), 1835-1921 : Professeur, médecin et homme politique. Emile Combes naît le 6 juin 1835 à Roquecourbe (Tarn). Fils d'un fabricant de bonnets et de bas de laine, sa famille est assez pauvre. Son oncle, curé de campagne, lui fait faire ses études au petit séminaire de Castres puis les poursuit au séminaire des Carmes à Paris. Détenteur d’une licence ès-lettres à la Sorbonne puis élève au Grand Séminaire d’Albi, Combes devient professeur de philosophie dans des écoles catholiques, notamment au collège de l’Assomption de Nimes. Il soutient une thèse de théologie sur Saint Thomas d'Aquin en 1860 ainsi qu'une thèse de latin sur Saint Bernard et Abélard puis enseigne la philosophie au collège de Pons (Charente-Inférieure) de 1860 à 1862. Combes paraît alors promis à une carrière de professeur de premier plan. Devinant ses doutes et ses inquiétudes, ses supérieurs refusent de lui conférer les ordres majeurs. Ayant perdu la foi, il abandonne l'Eglise et l’enseignement, se marie puis s’établit à Paris. Il entreprend des études de médecine qu’il clôt sur l’hérédité des maladies avant d’ouvrir un cabinet médical à Pons. Tard venu à la politique, il devient succèssivement maire de Pons en 1876 (il le restera jusqu'en 1919), conseiller général en 1879 et élu en 1885 sénateur de la Charente Inférieure, il fonde le groupe parlementaire de la Gauche Démocratique qui rassemble les sénateurs radicaux. Consciencieux et de bon sens, ses discours sont de qualité et il étudie à fond ses dossiers. Spécialiste de l'enseignement, il mène une enquête pour le Sénat en Algérie de 1892 à 1894. Il défend la justice et la liberté, le progrès social. Il devient en 1893 vice-président du Sénat. Deux ans plus tard, il devient ministre de l’Instruction publique et des Cultes, dans le gouvernement de Léon Bourgeois (novembre 1895-avril 1896) où il réforme l'enseignement qui passe sous la tutelle exclusive de l'Etat et crée une chaire de philosophie positiviste au Collège de France. Inaugurant le lycée de Beauvais, il déclare : « A l’époque où les vieilles croyances plus ou moins, en tout cas erronées, tendent à disparaître, c'est dans les loges que se réfugient les principes de la vie morale ». Partisan de la révision du procès de Dreufus, il mène une lutte passionnée pour la « défense républicaine et laïque ». Concernant les cultes, il s'oppose au Vatican pour la nomination des évêques. Depuis leur congrès de 1869, les radicaux sont conscients qu'il faut écarter la mainmise de l'Eglise sur la jeunesse et qu'il faut conforter l'esprit public pour affermir pleinement la République. La solution réside dans l'expulsion des congrégations hors du champ scolaire. Ce sera l'œuvre au concret de Combes qui va rejeter l'irruption du cléricalisme dans la sphère publique mais admettre la foi, restreinte à l'espace privé. Emile Combes préside la commission du Sénat qui prépare la future loi de 1901 sur les associations laquelle va réglementer la création et la fonction pédagogique des congrégations. A la direction du Parti radical, il prépare les législatives de 1902 avec pour objectif de supprimer la loi Falloux (1850) qui laisse l'école primaire à l'Eglise alors qu'en 1830 les prêtres-enseignants avaient été écartés des enseignements. Il veut appliquer énergiquement la loi de 1901 sur les associations pour éliminer les congrégations. Le résultat des élections donne 339 républicains élus contre 251 candidats pour la droite, avec seulement 200.000 voix d'écart sur 11 millions de votants, soit 2 % de l'électorat. Anticlérical, il n'est pas hostile à la religion et il apparaît comme le successeur naturel de Waldeck-Rousseau, quand, malade, il se décide à quitter le pouvoir. Ainsi, le 7 juin 1902, il lui succéde à la présidence du Conseil avec le portefeuille de l’Intérieur et des Cultes jusqu’au 18 janvier 1905. Sa vocation contrariée et son précoce engagement maçonnique expliquent pour beaucoup une conception républicaine passionnément anticléricale, conférant à son ministère un caractère de croisade laïque. Le cabinet resserré, composé le 15 juin en vingt-quatre heures, constitué à parité de députés et de sénateurs, compte onze ministres et un sous-secrétaire d’Etat. Combes désigne son propre fils Edgar comme secrétaire général du ministère. Dans la séance inaugurale du 10 juin 1902, il prononce un discours-programme en dix points. En tête, arrive l’application de la loi sur les associations du 1er juillet 1901 – Combes emploie le terme de combat : « exécuter ». Vient ensuite l’abrogation de la loi Falloux de 1850. Les aspects économiques ne sont traités que plus loin : réalisation d’économie, projet d’impôt sur le revenu. Les points 5 et 6 concernent les nécessaire réforme de l’armée, avec l’institution du service militaire de deux ans. Puis Combes évoque le rachat par l’Etat d’une partie du réseau ferroviaire français et la mise sur pied des retraites ouvrières. Les deux derniers points concernent la justice et l’approfondissement de l’alliance avec la Russie. Combes innove par sa volonté de stabiliser le gouvernement. S’il peut s’appuyer sur les radicaux, récemment constituer en parti, il demeure sous la menace d’une scission socialiste, les amis de Jaurès pratiquant à son encontre le soutien sans participation afin de préserver leur liberté d’action. Pour commencer la difficulté, il décide de créer une structure commune qui décidera, en amont, de la politique à suivre. Il s’agit de la Délégation des gauches qu’il considère comme le « rouage essentiel » de son ministère. Dans cette formation, on trouve des déléguès élus de chaque groupe de la majorité gouvernementale (Union démocratique, radicaux, radicaux-socialistes et socialistes jaurésiens), proportionnellement à son importance. La priorité est donc donnée à l’application de la loi sur les associations, dont Combes va faire le pillier de son grand dessein. Pour les congrégations non autorisées, les choses sont simples. Les établissements scolaires leur appartenant procédent d’une association qui n’a pas d’existence juridique. Par définitions, ils sont donc non autorisés. Mais deux catégories apparaîssent : les établissements ouverts avant le 1er juillet 1901 et ceux ouverts après. Le 27 juin 1902, Combes fait fermer ces derniers par décrets éxécutoire sans délai (125 écoles sont concernées, an majorité des écoles de filles). Reste le cas de ceux fondés avant la loi di 1er juillet 1901, qui sont plus de 3.000. En théorie, la loi de 1901 ne les concerne pas, en vertu du principe de non-rétroactivité. Waldeck-Rousseau s’était d’ailleurs engagé verbalement en ce sens auprès des responsables de ces établissements puis auprès du Vatican. Malheureusement pour eux, Waldeck-Rousseau n’a assorti ces promesses d’aucune garantie législative. Le 10 juillet, Combes enjoint donc les préfets par circulaire de faire fermer les établissements d’enseignement religieux en infraction avec la loi : 2.900 obtempèrent, quelques-uns résistèrent. Puis il se focalise sur le dossier des demandes d’autorisations. Il découvre qu’une loi est nécessaire pour empêcher l’existence d’une congrégation. Combes décide alors de supprimer ce frein en faisant modifier la loi par le truchement du Conseil d’Etat. Le 16 août, il soumet à la Chambre une loi d'agrément des congrégations : sur 1.667 congrégations, 914 sont autorisées et 760 non autorisées parmi lesquelles 300 s'auto-dissolvent et 460 redemandent l'agrément. Emile Combes s’exclame à la tribune : « La piété et la charité sont le masque pour suggérer au fanatisme et à l'intolérance l'opposition à la modernité, aux institutions de la République et à ses lois. Supprimer les congrégations, c'est faire œuvre de salut public ». Lors de la loi d'examen de 54 demandes d'agrément en décembre 1902, Waldeck-Rousseau demande d'ajouter une nouvelle catégorie, celle des congrégations d'Outre-Mer et de l'étranger. La loi est votée. Ainsi, seules cinq demandes d’autorisation venant de congrégations masculines obtiennent un avis favorable. Il s’agit de communautés charitables et hospitalières : Frères de Saint-Jean de Dieu, Pères blancs, Missions africaines de Lyon, Trappistes de Cîteaux et Cisterciens de Lérins. Ainsi, un an après son entrée en fonction, Combes pouvait-il considérer que le premier point de son discours-programme avait été « exécuté ». Pendant l’année 1903, il travaille au deuxième point : l’abrogation de la loi Falloux. En dépit des réserves grandissantes de sa majorité, Combes dépose en février son projet interdisant l’enseignement aux congrégations, « ce n’est pas, s’enflamme-t-il à la tribune, manquer à la liberté que d’empêcher la formation dans le corps social d’institutions faites pour la détruire. » Il est voté cinq mois plus tard, entraînant la fermeture immédiate de 2.500 écoles religieuses. L’été 1903 est consacré essentiellement à l’examen des demandes des congrégations de femmes non-autorisées beaucoup plus nombreuses que celles des hommes. 81 congrégations de « bonnes sœurs » font des demandes d'agrément. A l’exception des maisons mères, des congrgations charitables et hospitalières, toutes sont repoussées. Malgré les pressions, il réagit fermement : « C'est non. Il faut mettre un terme à l'esprit de réaction ». Le refus d'agrément est voté par 16 voix de majorité sur 589 députés. Waldeck-Rousseau dira à Emile Combes : « La loi de 1901 est une loi de contrôle, vous en faites une loi d'exclusion ". Emile Combes est qualifié d' « Attila des congrégations ». En 1904, Emile Combes interdit l'enseignement aux congrégations sauf pour l'outre-Mer et l'étranger. La partie législative est terminée. Reste la liquidation des biens des congrégations. Emile Combes n'a pas faibli. Le traumatisme est considérable chez les catholiques. A la Chambre, des voix s’élèvent pour dénoncer l’intolérance du cabinet et Waldeck-Rousseau au seuil de la tombe, fustige ainsi la politique religieuse de son successeur, l’accusant de détourner une loi de contrôle en une loi d’exclusion. Le président du Conseil sent le danger. Il craint de ne pouvoir finir ce qu’il appelait son « œuvre ». Mais, avec la mort de Waldeck-Rousseau le 8 août 1904, l’opposition semble très amoindrie. A la rentrée parlementaire de 1904, il se situe dans la logique d’accélération qui le pousse à rompre ouvertement avec la papauté. Depuis plusieurs mois déjà, Combes est entré en conflit avec le pape. Le premier échange hostile avait opposé les deux gouvernements sur la formule précise à adopter pour les bulles d’institutions canonique. Après une nouvelle passe d’armes à l’institutions de de trois nouveaux évêques, la querelle rebondit au sujet de deux prélats français : Monseigneur Geay, évêque de Laval, accusé par la population de son diocèse et par la hiérarchie de fréquenter de trop près le couvent des carmélites de sa ville, et Monseigneur Le Nordez, évêque de dijon, suspecté de franc-maçonnerie. Chef de l’Eglise, le pape veut les démettre et les convoque à Rome mais Combes, arguant du Concordat, s’y oppose. Les deux évêques démissionnent. Exaspéré, le président du Conseil prend prétexte de la réaction hostile du Vatican à une visite du président de la République Emile Loubet à Rome en avril 1904 – la papauté n’a pas encore ratifié l’unité italienne parachevée par l’invasion de la ville sainte en 1870 – pour rappeler son ambassadeur auprès du Saint-Siège puis prononcer la rupture des relations diplomatiques. Le 4 septembre 1904, dans un discours prononcé à Auxerre, le « petit père » Combes prône le « divorce » entre le pouvoir civil et le pouvoir religieux. Pourtant, il reste difficile de savoir si Combes était intimement convaincu de l’opportunité de la séparation. Après tout, le système concordataire promettait au gouvernement d’exercer depuis près d’un siècle un contrôle précieux sur la nomination et l’action des évêques. Quoi qu’il en soit, Combes ne peut plus reculer. La séparation constitue le terme logique de sa politique anticléricale. Si elle prive le gouvernement d’influence sur le spirituel, elle scelle le programme de Belleville et donne à son chef l’aura d’un guerrier de la Laïcité, dernière discipline d’un positivisme radical illustré à la génération précédente par Jules Ferry, dont il s’affirme le disciple, et par la célèbre formule popularisée par Gambetta : « Le cléricalisme voilà l’ennemi ». Pour s’imposer, Combes gouverne avec une poigne de fer, comme le révèle sa célèbre circulaire aux préfets : « Votre devoir vous commande de réserver les faveurs dont vous disposerez seulement à ceux de vos administrés qui ont donné des preuves non équivoques de fidélité aux institutions républicaines. » Les adversaires du combisme dénoncent l’orchestration partisane d’une camapgne d’espionnage et de délation contraire à l’esprit du régime et à la neutralité nécessaire de l’Etat. Au quotidien, la France vit selon eux sous la coupe des réseaux occultes, des comités radicaux et des tracasseries administratives. Ses contemporains se sont étonnés de la facilité avec laquelle le président du Conseil a pu asseoir son pouvoir dans la durée. Il faut d’abord rappeler sa capacité à fortifier sa majorité grâce au système de délégation des gauches. L’affaire Dreyfus a soudé des liens et « gouvernementalisé » le socialisme qui, derrière Jaurès, soutient le ministère. En bon manœuvrier, Combes perfectionne le système en instituant une séance hebdomadaire unique pour les interpellations, ce qui laisse au gouvernement le temps nécessaires pour affûter ses répliques. Il substitue également au système des commissions temporaires celui des grandes commissions temporaires celui des grandes commissions permanentes, plus faciles à contrôler. Enfin, il dispose d’appuis solides en province, notamment au sein d’une petite bourgeoisie locale, souvent voltairienne, et qui constitue les gros bataillons du radicalisme militant. Pourtant, l’opposition à sa politique se développe avec les années, au Parlement comme dans les provinces. Elle s’appuis d’abord sur les catholiques. C’est ainsi qu’on voit le commandant Le Roy Ladurie et plusieurs officiers démissionner pour ne pas avoir à expulser les congégations. Les paroissiens de Saint-Pierre-du-Gros-Caillou, dans le VIIème arrondissement de Paris font une chaîne humaine autour de l’édifice pour empêcher que les forces de police n’expulsent les écclésiastiques, tandis que dans le Béarn les fidèles introduisent des ours dans les églises pour empêcher les envoyés du gouvernement d se saisir de leur prélats. Sur le plan parlementaire, l’opposition regroupe, outre les droites, les amis de Ribot, Waldeck-Rousseau et Leygues tandis que Caillaux et Clemenceau, très influents, multiplient les critiques. Doumergue, quant à lui, fustige « les procédés bonapartistes » du cabinet. Cependant, l’opposant le plus constant, irréductible, est le socialiste Millerand qui joue un rôle essentiel dans la chute finale du cabinet en entraînant derrière lui une large partie de ses camarades. Peu de politiques ont été aussi haïs et injurié que lui. Le surnom de « Petit Père Combes », entré dans l’histoire, fait allusion à la taille courte et au passé de séminariste du chef du gouvernement. Et le député Baudry d’Asson s’adressait toujours à lui en débutant par la formule « Monsieur l’abbé ». Les caricaturistes, tels Caran d’Ache, Forain ou Moloch, s’en donnaient aussi à cœur joie. En dépit de la stabilité de son cabinet et probablement à cause de son obcession anticléricale, le reste de son programme demeure inachevé, à commencer par la politique fiscale – l’instauration de l’impôt sur le revenu est repoussée. Le bilan est meilleur en ce qui concerne la réforme de l’armée : à la Guerre, le général André prépare la célèbre loi des deux ans et modernise l’armement. A Camille Pelletan, en charge de la Marine, on doit la construction de torpilleurs et de sous-marins. Combes s’aliène pourtant la plupart des amiraux, qu’il prend plaisir à humilier en refusant de les recevoir tandis qu’il accueille avec ferveur les grêvistes des arsenaux. Les questions sociales ne sont pas oublées pour autant, même si les socialistes auraient souhaité une politique nettement plus volontaire en la matière. Mentionnaons la bonification de la retraite des mineurs, l’assistance obligatoire aux vieillards, infirmes et incurables, l’abaissement de la durée quotidienne du travail à dix heures dans la mine et la création f’écoles d’infirmières. Reste la politique extérieure. On cite souvent sa remarque effectuée en Conseil à l’occasion d’une discussion diplomatique : « Laissons cela, c’est l’affaire de M. le président de la République et M. le ministre des Affaires étrangères. » Delcassé eut en conséquences les mains libres pour œuvrer à son souhait, exception faite des relations franco-vaticanes pour lesquelles Combes voulait tout savoir et tout contrôler. Le ministre orchestra avec brio l’Entente cordiale. La rentrée parlementaire de 1904 est la dernière du cabinet. Le 28 octobre, le député Guyot de Villeneuve accuse le secrétaire adjoint au Grand Orient de France de transmettre depuis 1901 des fiches sur les officiers « suspects » de royalisme et de cléricalisme au ministère de la Guerre. L’affaire des fiches commence. Le général André, qui n’est pas franc-maçon, mais qui s’est entouré d’officiers membres des loges, nie en bloc. Mais, quarente-huit heures plus tard, Le Figaro le confond en révélant l’existence de deux dossiers archivés au ministère, envoyés par le Grand Orient. Dans « Corinthe », on trouve répertoriés les officiers républicains à promouvoir, tandis que « Carthage » abrite les dossiers des dégradés dont la carrière doit être cassée. Le 4 novembre, Millerand passe à l’offensive et démonce le retour du « régime des suspects ». Le député nationaliste Syveton giffle le ministre qui quitte la Chambre. Le 9, alors que Combes tente de justifier ses méthodes, Ribot le cloue au pilori par la célèbre adresse : « votre défaite ne sera pas la revanche d’un parti mais celle de la conscience publique. » Et Millerand porte l’estocade, flétrissant « la domination la plus abjecte que jamais gouvernement ait entrepris de faire peser sur l’honneur et les intérêts de ses citoyens ». Au Sénat, Clemenceau sonne le glas et dénonce le « jésuitisme retourné » du président du Conseil. Le 14 janvier, Combes obtient encore une maigre majorité mais se sentant perdu préfère démissionner le 18. Dès lors, Emile Combes entre alors dans une semi-retraite et ne jouera plus de rôle de premier plan bien qu'il préside le Parti radical en 1911 et 1912 et qu'il devient ministre d'État dans le cabinet d’Union Nationale d’Aristide Briand, de novembre 1915 à décembre 1916. S’estimant injustement attaqué, il avait pris soin de rédiger ses Mémoires qui ne seront publiés que longtemps après sa mort. Emile Combes décède à Pons le 24 mai 1921 à 86 ans. COMBES (E.) : Mon Ministère, 1902-1905, Paris, Plon, 1956. MERLE (G.) : Emile Combes, Paris, Fayard, 1995. COMBES DE LESTRADE (Gaétan-Guillaume, vicomte), 1859-1918 : Economiste. Né à Castres (Tarn) en 1859, Combes de Lestrade est connu pour avoir publié : La Liberté (1885) ; L’Empire ruse en 1885 (1885) ; Eléments de sociologie (1888) ; Actual condition of the Russian peasant (1890) ; La Russie économique et sociale (1896) ; Le Droit politique contemporain (1900) ; Les Monarchies de l’Empire allemand (1904) ; etc. Il décède en 1918. COMBES DE PATRIS (Bernard), 1884-1965 : Ecrivain. Né à Rodez (Aveyron) en 1884, fils d’un avocat ruthénois, Bernard Combes de Patris fait ses études à Toulouse, couronnées par le grade de docteur en droit, et à Paris, où il obtient le diplôme de l’Ecole libre des sciences politiques. En 1909, paraît sa thèse L’Esprit financier des Girondins. Il participe déjà au mouvement politique et littéraire si fortement marqué par Maurice Barrès et Charles Maurras. Il collabore à diverses publications historiques et à plusieurs feuilles de droit, dont Le Journal de l’Aveyron (de 1902 à la guerre) ou Le Journal des Débats. Il dirige la Revue des Etudes historiques (de 1920 à la guerre) et fait éditer une quinzaine d’ouvrages comme L’Affaire Fualdès ; Que veut Hithler ?; Les Vivants contre les morts. Il appartient depuis 1927 à l’association professionnelle de la presse monarchique et catholique des départements. Il décède le 26 mars 1965. COMBY (Jules), 1859-19 : Médecin. Né à Pompadour (orrèze en 1853, spéialisé en médecine infantile, Jules Comby a créé le dispensaire de la Villette et a été chef du service à l’hôpital Trousseau et aux Enfants-Malades. Il a dirigé un Traité des maladies de l’enfance, écrit de nombreux volumes de pratique pédiatrique et fondé les Archives de médecine des enfants. COMERRE (Léon-François), 1850-1916 : Peintre. Né à Trélon (Nord) en 1850, élève de Cabanel, Léon Comerre remporte, en 1875, le prix de Rome. Samson et Dalila, peinture exposée en 1881, lui vaut une médaille de 2ème classe, et est achetée par sa ville natale. Citons encore : Albine morte, et Une Etoile (1882) ; L’Eté et l’Automne, panneaux décoratifs pour la mairie du IVème arrondissement de Paris, et La Mort de Timophane. Ses portraits élégants lui valent aussi une réputation distinguée. Il décède à Paris en 1916. COMITÉ CENTRAL : Comité républicain, chargé, après la capitulation du 28 janvier 1871, de relier tous les bataillon de la garde nationale, afin de leur conserver leurs armes. Son premier acte officiel est la proclamation qu’il fait afficher dans Paris le 1er mars, jour de lentrée des Prussiens aux Champs-Elysées, proclamation par laquelle il installe audacieusement son pouvoir à côté du gouvernement régulier. Ses principaux membres sont alors Arnould, Bergeret, Chauvière, Varlin. Après la journée du 18 mars, dont il est l’instigateur, le Comité central se substitue dans Paris au gouvernement de Thiers, retiré à Versailles. Dans la nuit du 18 au 19 mars, il s’installe à l’Hôtel de Ville, fixe au 22, puis au 26, la date des élections municipales et dépose ensuite ses pouvoirs entre les mains des membres de la Commune. En réalité, il ne cesse d’exercer sur elle une pression occulte, et reparaît officiellement, lors de l’entrée des troupes de Versailles, pour diriger la suprême résistance de l’insurrection. COMITÉ D’AIDE AUX VICTIMES DU FASCISME HITLÉRIEN : Organisation antifasciste créée en France après l’arrivée de Hitler au pouvoir. Son premier geste est de protester contre l’arrestation en Allemagne du chefcommuniste Ernst Thaelmann, en « mobilisant la conscience humaine en vue de ce grand procès politique san précédent ». Parmi ses dirigeants, figurent : Francis Jourdain qui en est le principal animateur, Henri Barbusse, Jean-Richard Bloch, Félicien Challaye, le docteur Jean d’alsace ; Georges Duhamel, André Gide, le professeur Langevin, Bernard Lecache, le professeur Lévy-Bruhl, André Morizet, Charles Rappoport, Romain Rolland, etc. COMITÉ DE LIAISON PARLEMENTAIRE : L’acceptation des accords de Munich puis le débat de la politique étrangère indiquaient que le courant pacifique était fort à la Chambre des députés en 1938-1939. Néanmoins, le vote des crédits de guerre prouvait que la majorité des parlemantaires acceptaient la guerre. Les « anti-bellicistes » étaient assez bien placés ; plusieurs d’entre eux occupaient même des postes-clés comme les ministres Anatole de Monzie ou Georges Bonnet, Jean Bonnet Mistler présidait la commission des affaires étrangères de la Chambre, et Henry Bérenger, celle du Sénat, à laquelle appartenaient les sénateur Henry Haye, Camille Ferrand, Pierre Laval. Il y avait aussi l’ancien président du Conseil Flandin, au palais Bourbon, et l’ancien président du Conseil Joseph Caillaux, au Luxembourg. Pour que les « anti-bellicistes » soient moins isolés, un Comité de liaison parlementaire avait été discrètement créé. Pierre-Etienne Flandin le dirigeait avec Jean Montigny, député de la Sarthe. Dans ce comité, il y avait autant d’hommes de gauche que de modérés ou de gens de droite. Il s’est réunit six ou sept fois au palais Bourbon. Le 2 septembre 1939, Gaston Bergery tenta den être le porte-parole. COMITÉ DE LIBERATION DE THAELMANN : Ce comité fondé en 1933 pour faire campagne en faveur de la libération du chef communiste allemand emprisonné par les nazis, étend son activité et organise agitation et manifestations pour « toutes les victimes du fascisme ». Siègeant à Paris, il avait pour président André Malraux et pour présidents d’honneur André Gide, Paul Langevin et Romain Rolland. COMITÉ DES JEUNES DU REDRESSEMENT FRANÇAIS : Le Redressement français a été créé en 1926 par l’industriel Ernest Mercier avec l’aide, entre autres appuis prestigieux, d’une brochette de hautes personnalités du monde modéré. Très tôt, c’est à dire dès l’hiver 1926-1927, l’équipe réunie autour de Mercier a nourri le projet de constituer un « comité des jeunes », destiné à relayer l’action d’un grupement tourné vers la réflexion, la propagande et l’influence au sein des différents réseaux de puvir. Des contacts ont été pris, en particuliers par l’intermédiaire de Jean-Henri Adam (ancien responsable du Groupement universitaire pour la SDN) et de Robert Garric, animateur des Equipes sociales. Le Comité des jeunes a vu officiellement le jour au début du mois de mars 1927. Sn président, François Legueu, était un familier des cercles modérés et il était envisagé, en 1925, de lui confier la directin d’une « Commission des jeunes » de la Fédération républicaine. Spécialiste des questions économiques et financières, François Legueu a travaillé ultérieurement auprès d’André François-Poncet et de Paul Reynaud. COMITÉS NATIONALISTES DE LA SEINE : Groupement fondé et animé par Armand Bernardini, Alexandre d’Aste, Bertin-Schueller et le baron Plinval. Composé d’une petite équipe d’hommes résolus, anciens combattants de la Première Guerre mondiale et jeunes gens, il participe à diverses manifestations nationalistes au cours des années 1932-1933. Le comités nationalistes de la Seine, qui étaient membre du bureau politique international, également dirigé par Bernardini, avaitent un journal : Le Soleil. COMITÉS DE VIGILANCE DES INTEL-LECTUELS ANTIFASCISTES : Dès l'origine, l'idéologie du Comité de vigilence des intellectuels antifascistes ou CVIA est une idéologie de résistance antifasciste. C’est au lendamain des émeutes du 6 février 1934 que des intellectuels non engagés dans la politique, croyant en un complot fasciste en France, décident d’un appel à l’union de la gauche contre le fascisme. A l’origine du CVIA se trouvent le Syndicat national des Instituteurs dirigé par André Delmas et un jeune auditeur à la Cour des Comptes, François Walter dit Pierre Gérôme. Ils rédigent alors un manifeste aux travailleurs qu’ils font signer par trois importants intellectuels de gauche comme Paul Rivet, Paul Langevin et Alain. Le Comité de vigilence des Intellectuels antifascistes ou CVIA est ainsi crée le 5 mai 1934 avec un comité directeur composé le 8 mai constitué en grande partie d’intellectuels apolitiques. Dans le manifeste, la dimension belliqueuse du fascisme, due à sa liaison avec le capitalisme nationaliste, est soulignée. Le CVIA partage l'analyse de la gauche et de l'extrême gauche tenant la « politique de Versailles » pour responsable de l'avènement de Hitler. La lutte pour la révision des injustices des traités priverait, selon cette analyse, le fascisme de son aliment nationaliste, notamment en Allemagne et permettrait d'envisager un désarmement progressif. En 1934, le CVIA, toutes tendances confondues, ne sépare pas l'antifascisme de la lutte pour la révision des traités et le désarmement. Si les scandales récents sont dénoncés, le manifeste proclame nettement la volonté de ne pas laisser détourner l'indignation et le mécontentement des classes moyennes touchées par la crise. L'analyse qui est donnée du fascisme dans ce texte est alors la plus courante à gauche et à l'extrême gauche : le fascisme est défini comme un mouvement de défense du capitalisme. Le CVIA prendra au sérieux son rôle de critique intellectuelle contre le fascisme à travers son bulletin mensuel Vigilance, participe à la rédaction de brochures et se dote d’environ 200 comités locaux en 1935. Cependant dès la fin de l’année, l'unanimité qui a présidé à sa naissance se brise sur l'analyse de la situation internationale à propos de la montée en puissance de l'Allemagne hitlérienne, du tournant de la politique diplomatique de l'URSS (pacte franco-soviétique de mai 1935), de la réoccupation de la Rhénanie par Hitler en mars 1936. La majorité reste fidèle au pacifisme traditionnel composée des disciples d’Alain (le philosophe Michel Alexandre, le journaliste Francis Delaisi, l’enseignant Léon Emery) ou les membres du Courant Gauche révolutionnaire de la SFIO (Colette Audry, Hélène Modiano) s’oppose au groupe autour de Paul Langevin, (Jean-Richard Bloch, André Wurmser) composé des communistes et des sympathisants, préconisant la fermeté à l'égard des revendications hitlériennes. Celui-ci mis en minorité au congrès du 21 juin 1936, qui quitte les organismes dirigeants critiquant la tendance du pacifisme extrême du CVIA. Après cette crise, le CVIA continue, partagé entre une tendance pacifiste extrême (Michel Alexandre, Léon Emery) qui lie pacifisme et antistalinisme et la tendance symbolisée par Paul Rivet et Pierre Gérôme qui refuse d'identifier l'antifascisme au pacifisme notamment pendant la guerre d'Espagne, puis quitte le comité après Munich. Le CVIA prend place alors dans la mouvance du « pacifisme de gauche ». DELMAS (A.) : A gauche de la barricade. Chronique syndicale de l'avant-guerre, Paris, Editions de l'Hexagone, 1950. RACINE-FURLAUD (N.) : « Pacifistes et antifascistes. Le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (1934-1939) » in Des années trente. Groupes et ruptures, Paris, Editions du CNRS, 1985. Nicole Racine, "Le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes" in Dictionnaire historique de la vie politique française, sous la direction de J-F Sirinelli, PUF, 1995, Dictionnaire des intellectuels français, sous la direction de J. Julliard et M. Winock, Seuil, 1996. COMITÉ FRANCE-ALLEMAGNE : Association fondée en novembre 1935 par le député aveugle de guerre, Georges Scapini, le journaliste Fernand de Brinon, le député Jean Goy, président de l’Union nationale des combattants. Il est, avec le Cercle du Grand Pavois, créé deux ans après, l’une des oraganisations groupant les partisans de la réconciliation franco-allemande avant le guerre. COMITÉ MONDIAL DES FEMMES CONTRE LA GUERRE ET LE FASCISME : Groupement féminin de tendance communiste fondé en 1934 et disparu au début de la Seconde Guerre mondiale, siégeant à Paris où était publié le mensuel Femmes dans laction mondiale. Gavrielle Duchène, collaboratrice de l’Humanité, en était la présidente. COMMERCE EXTÉRIEUR (Office national du) : Etablissement d’utilité publique, crée par la loi du 4 mars 1898 auprès du ministère du Commerce, pour favoriser le développement du commerce français à l’étranger et aux colonies et fournir tous les renseignements utiles aux intéressés. L’office a été déclaré institution d’Etat et complètement réorganisé par la loi du 27 août 1919, complèté depuis par divers décrets et réglements d’administration publique. L’office nationale du commerce extérieur est administré, sous l’autorité du ministre du Commerce, par un directeur assisté d’un conseil d’administration composé de dix-neuf membres, dont deux membres désignés par le Sénat, deux membres désignés par la Chambre des députés, le président de la Chambre de commerce de Paris ou son délégué, quatre membres désignés par l’assemblée des présidents des Chambres de commerce, dix membres désignés par arrêté du ministre du Commerce. L’office correspond directement avec les diverses administration publiques, les attachés, agents et offices commerciaux des postes diplomatiques et consulaires de France à l’étranger. COMMERCE ET DE L’INDUSTRIE (Ministre du) : Le ministère du Commerce et de l’Industrie créé en 1828, érigé en département spéial en 1881, concentre les services publics intéressant le développement du commerce et de l’industrie. C’est notamment de lui que dépendent l’administration des poids et mesures, celle de la propriété industrielle, celle des encouragements à la marine marchande et à la pêche maritime, de l’enseignement commercial et technique, etc. C’est auprès de lui que sont accrédités les divers organes consultatifs représentant le commerce et l’industrie française. Liste des ministres du Commerce : 1870 Joseph MAGNIN, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1871 Félix LAMBRECHT, Ministre de l'Agriculture et du Commerce1871 Victor LEFRANC, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1872 Eugène de GOULARD, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1872 Pierre TEISSERENC DE BORT, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1873 Joseph de LA BOULLERIE, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1873 Alfred de SEILLIGNY, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1874 Louis GRIVART, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1875 Camille de MEAUX, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1876 Pierre TEISSERENC de BORT, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1877 Camille de MEAUX, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1877 Jules OZENNE, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1877 Pierre TEISSERENC de BORT, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1879 Charles LEPERE, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1879 Pierre-Emmanuel TIRARD, Ministre de l'Agriculture et du Commerce 1881 Maurice ROUVIER, Ministre du Commerce et des Colonies 1882 Pierre-Emmanuel TIRARD, Ministre du Commerce 1882 Pierre LEGRAND, Ministre du Commerce 1883 Anne-Charles HERISSON, Ministre du Commerce 1884 Maurice ROUVIER, Ministre du Commerce 1885 Pierre LEGRAND, Ministre du Commerce 1885 Lucien DAUTRESME, Ministre du Commerce 1886 Edouard LOCKROY, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1887 Lucien DAUTRESME, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1888 Pierre LEGRAND, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1889 Pierre-Emmanuel TIRARD, Président du Conseil et Ministre du Commerce et de l'Industrie 1890 Jules ROCHE, Ministre de l'Industrie et des Colonies (Sous-Secrétaire d'Etat au Commerce à partir de février 1892) 1892 Jules SIEGFRIED, Sous-Secrétaire d'Etat au Commerce (Ministre du Commerce et des Colonies à partir d'avril 1893) 1893 Jean TERRIER, Ministre du Commerce, de l'Industrie et des Colonies 1893 Jean MARTY, Ministre du Commerce 1894 Victor LOURTIES, Ministre du Commerce 1894 André LE BON, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1895 Gustave MESUREUR, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1896 Henry BOUCHER, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1898 Emile MARUE JOULS, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1898 Paul DELOMBRE, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1899 Alexandre MILLERAND, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1902 Georges TROUILLOT, Ministre du Commerce 1905 Fernand DUBIEF, Ministre du Commerce 1906 Georges TROUILLOT, Ministre du Commerce 1906 Gaston DOUMERGUE, Ministre du Commerce 1906 Jean CRUPPI, Ministre du Commerce 1909 Jean DUPUY, Ministre du Commerce 1911 Alfred MASSE, Ministre du Commerce 1911 Christian COUYBA, Ministre du Commerce 1912 Fernand DAVID, Ministre du Commerce 1913 Gabriel GUIST-HAV, Ministre du Commerce 1913 Alfred. MASSE, Ministre du Commerce 1913 Louis MALVY, Ministre du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télégraphes 1914 Marc REVILLE, Ministre du Commerce 1914 Gaston-Arnold-Marie THOMSON, Ministre du Commerce, des Postes et Télégraphes 1915 Etienne CLEMENTEL, Ministre du Commerce et des P.T.T. (Ministre de l'Economie Nationale comprenant l'agriculture, le travail, le commerce et l'Industrie et les P.T.T. à partir de décembre 1916) 1917 Louis DUBOIS, Ministre du Commerce et des P.T.T. 1920 Auguste-Paul-Louis ISAAC, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1921 Lucien DIOR, Ministre du Commerce 1924 Louis LOUCHEUR, Ministre du Commerce et des P.T.T. 1924 Pierre-Etienne FLANDIN, Ministre du Commerce 1924 Jean-Jacques, dit Eugène RAYNALDI, Ministre du Commerce et de l'Industrie 1925 Charles CHAUMET, Ministre du Commerce 1925 Charles-Daniel-Vincent, dit DANIEL-VINCENT, Ministre du Commerce 1926 Fernand. CHAPSAL, Ministre du Commerce 1926 Louis LOUCHEUR, Ministre du Commerce 1926 Maurice BOKANOVSKI, Ministre du Commerce 1928 Georges BONNEFOUS, Ministre du Commerce 1929 Pierre-Etienne FLANDIN, Ministre du Commerce 1930 Georges BONNEFOUS, Ministre du Commerce 1930 Pierre-Etienne FLANDIN, Ministre du Commerce 1930 Louis LOUCHEUR, Ministre de l'Economie Nationale , du Commerce et de l'Industrie 1931 Louis ROLLIN, Ministre du Commerce (Ministre du Commerce et des P.T.T. à partir de février 1932) 1932 Julien DURAND, Ministre du Commerce 1933 Louis-Léonard SERRE, Ministre du Commerce 1933 Laurent-André EYNAC, dit LAURENT EYNAC Ministre du Commerce et de l'Industrie 1934 Jean MISTLER, Ministre du Commerce 1934 Lucien LAMOUREUX, Ministre du Commerce 1934 Paul MARCHANDEAU, Ministre du Commerce 1935 Laurent EYNAC, Ministre du Commerce 1935 Georges BONNET, Ministre du Commerce 1936 Paul RAMADIER, Ministre du Commerce 1936 Paul BASTID, Ministre du Commerce 1937 Ferdinand CHAPSAL, Ministre du Commerce 1938 Pierre COT, Ministre du Commerce 1938 Fernand GENTIN, Ministre du Commerce 1940 Louis ROLLIN, Ministre du Commerce et de l'Industrie COMMUNE DE MARSEILLE : Dès le lendemain de la défaite de Forbach, une grande agitation se manifeste à Marseille. 40000 personnes ayant à leur tête Gaston Crémieux, Naquet, Brochier, Rouvier et quelques autres manifestent devant la préfecture. L'arrestation d'Alfred Naquet provoque une recrudescence de colère et aussitôt se forme un Comité central d'action révolutionnaire, la foule occupe bientôt la mairie et les membres du Comité sont portés au pouvoir sous les acclamations populaires. Ce Comité, comprenant surtout des membres de l'Internationale (en l'absence de Bastelica, la section marseillaise reçut très vraisemblablement les ordres directs de Bakounine) et quelques républicains radicaux, et présidé par Gaston Crémieux, se trouve ainsi à la tête d'un pouvoir révolutionnaire issu du peuple. Malheureusement, ses délibérations sont de courte durée, car une escouade de policiers, dispersant la foule aussi prompte à s'enthousiasmer qu'à devenir d'une passivité extrême, bloque les insurgés dans la mairie et, après un court échange de coups de feu, capture les membres du Comité. Les prisonniers, au nombre d'une trentaine environ, sont enfermés au Fort Saint-Jean et entassés dans un cachot puant. Le 10 août, sur ordre de l'impératrice régente, l'état de siège est proclamé et le 27 ils sont jugés. Le préfet Esquiros s'oppose à Gambetta et au gouvernement provisoire. Au Conseil municipal un affrontement se produit entre les modérés et les révolutionnaires et très vite, la Garde nationale (bourgeoise) commandée par le Colonel Marie va s'opposer à la Garde civique et l'Internationale. La réaction populaire est immédiate et spontanée, l'hôtel de ville, défendu par les gardes nationaux est occupé et la Commune révolutionnaire est proclamée aussitôt. Un comité d'une vingtaine de membres est formé qui représente toutes les nuances de l'opposition radicale et socialiste parmi lesquels plusieurs membres de l'Internationale dont Bastelica, Chachouat, Job, Cartoux, etc. Le général Cluseret qui vient d'arriver à Marseille après l'échec de la Commune de Lyon se joint bientôt à eux, et la Commune prend l'héritage de la Ligue du Midi. Mais Esquiros qui jouit de l'estime populaire se retire (son fils atteint de typhoïde meurt et ce deuil l'abat profondément); il est remplacé par Alphonse Gent qui, à la faveur des circonstances (un attentat manqué contre lui qui soulève la réprobation générale) va reprendre le pouvoir en main pour le compte du Gouvernement et écarter tous ceux qui pouvaient raffermir la volonté populaire. Le 13 novembre, le préfet télégraphie à Gambetta « l'Ordre tout entier règne à Marseille »... Le 21 mars 1871, une dépêche télégraphique du préfet, le contre-amiral Cosnier indique : Marseille est tranquille. Tous les rapports qui m'arrivent sur l'état des esprits dans le département sont rassurants. La proclamation de Thiers, flétrissant l'insurrection parisienne et exhortant à l'union est affichée sur les murs de la ville. Cette proclamation qui parle en termes favorables de Canrobert et de Rouher apparaît aux Marseillais comme une traîtrise et, le soir même, devant plus de 1.000 personnes, Gaston Crémieux, prononce un discours extrêmement violent : Le gouvernement de Versailles a essayé de lever sa béquille contre ce qu'il appelle l'insurrection de Paris, mais elle s'est brisée entre ses mains, et la Commune en est sortie. Ainsi Citoyens, les circonstances sont graves. Avant d'aller plus loin, je veux vous poser une question. Quel est le gouvernement que vous reconnaissez comme légal ? Est-ce Paris ? Est-ce Versailles? Toute la salle unanime, crie : "Vive Paris!" À ces cris unanimes qui sortent de vos mille poitrines nous nous unissons et nous crions : "Vive Paris!". Mais ce gouvernement va être combattu par Versailles. Je viens vous demander un serment, c'est celui de le défendre par tous les moyens possibles, le jurez-vous? - Nous le jurons! - Et nous aussi, s'il faut combattre, nous nous mettrons à votre tête. Nous serons obligés de le défendre dans la rue. Rentrez chez vous, prenez vos fusils, non pas pour attaquer, mais pour vous défendre... Le 23 mars, le contre-amiral Cosnier organise une contre-manifestation en faveur du gouvernement de Versailles, mais depuis l'aube, les gardes nationaux des quartiers populaires s'étaient rassemblés, et une foule immense se regroupe autour d'eux. La préfecture est envahie, les autorité destituées, une commission départementale est formée, présidée par Crémieux et comprenant 12 membres. Elle représente équitablement les diverses fractions de l'opinion publique : les Radicaux avec Job et Étienne, l'Internationale avec Alérini, la Garde nationale avec Bouchet et Cartoux, et trois membres délégués par le Conseil municipal. La Commission déclare : À Marseille, les citoyens prétendent s'administrer eux-mêmes, dans la sphère des intérêts locaux. Il serait opportun, que le mouvement qui s'est produit à Marseille fût bien compris, et qu'il se prolongeât. Nous voulons la décentralisation administrative avec l'autonomie de la Commune, en confiant au conseil municipal élu dans chaque grande cité les attributions administratives et municipales. Le 26 mars, le général Espivent de la Villeboisnet, officier réactionnaire et clérical s'il en fut, qui s'était réfugié à Aubagne avec ses troupes, et qui calque sa conduite sur celle de Versailles, proclame le département des Bouches-du-Rhône en état de guerre. Le 27 mars, le conseil municipal (composé de républicains modérés et bourgeois) rompt avec le conseil départemental. Cette rupture accroît les difficultés matérielles auxquelles devait faire face la Commune après le départ de nombreux fonctionnaires. Le 28 mars, arrivée à Marseille de trois représentants en mission envoyés par la Commune de Paris (May, Amouroux et Landeck). Malheureusement, ils sont tous trois incapables et vont s'immiscer dans les affaires marseillaises portant de graves préjudices à l'action locale. Le 1er avril, le Conseil municipal est dissout. Le 3 avril au soir, Espivent fait marcher ses troupes (6 à 7000 hommes) sur Marseille. Il a l'appui de trois navires qui croisent au large du port. En pleine nuit, les soldats parcourent les 17 km qui les séparent de Marseille. Pendant ce temps, des barricades sont dressées autour de la préfecture et quelques hommes se rassemblent. Les soldats d'Espivent prennent la gare, le fort Saint-Nicolas et le fort de Notre-Dame-de-la-Garde, ils effectuent un mouvement d'encerclement complété par le débarquement des marins. Pourtant, la population réagit. Une foule immense, armée en partie et tumultueuse, se réunit. Deux bataillons d'infanterie fraternisent levant leurs chassepots en l'air aux applaudissements de la foule. Mais Espivent, après avoir reçu sèchement Crémieux, venu parlementer, fait bombarder la ville (300 obus tomberont sur la préfecture). Les combats acharnés se déroulent jusqu'au soir et la préfecture est finalement investie par les marins. La Commune de Marseille avait vécu, la répression cléricale et réactionnaire allait s'exercer impitoyablement jusqu'en 1875. Charles ALÉRINI Comme Bastelica, il était d'origine corse puisque né à Bastia le 20 mars 1842. Devenu professeur, il enseignait au Collège de Barcelonnette où il était en même temps correspondant de l'Internationale, ce qui lui vaudra d'être suspendu de ses fonctions en avril 1870 et arrêté quelques jours après toujours pour le même motif. S'étant établi à Marseille, il participe ensuite, à l'occupation de l'hôtel de ville et à l'organisation de l'éphémère commune révolutionnaire du 8 août 1870. Puis il sera membre de la Commission départementale insurrectionnelle de mars 1871. Actif, énergique, intelligent, il mettra toutes ses connaissances au service de l'action révolutionnaire et de l'Internationale, organisant notamment la résistance armée, requérant les fusils, les munitions, et prenant une part des plus actives à tous les actes de l'insurrection. Le 4 avril, il reste un des derniers à la préfecture, alors que la plupart ont fui le danger. Après l'échec de la Commune, il réussit à passer en Espagne où il va poursuivre son action militante pendant que le Tribunal militaire le condamne à mort par contumace (il sera gracié en 1889). Très vite, il est admis parmi les intimes de Bakounine et devient un militant actif de l'Alliance et, à ce titre, il sera toujours mêlé, aussi bien sur le plan espagnol que sur le plan français, à la vie de l'Internationale anti-autoritaire contre les agissements de Marx et de ses amis. James Guillaume, dans ses Souvenirs parlera du cœur chaud, de la droiture, de la vaillance simple et sans phrases de cet homme qui sera délégué de la Fédération régionale espagnole à La Haye, où il signera la déclaration Bakouniniste; qui assistera au Congrès de Saint-Imier dont il sera l'un des trois secrétaires; qui participera au Congrès de Genève (septembre 1873) en tant que représentant de la FRE et de diverses sections françaises (dont plusieurs illégales) et qui après avoir fait deux ans de prison à Cadix, fera partie en 1877 du Comité fédéral de la fédération française de l'AIT. Gaston CRÉMIEUX : Né à Nîmes, le 22 juin 1836, il est issu d'une famille israélite. Après de brillantes études au lycée de sa ville natale, il obtient sa licence de droit à Aix-en-Provence, en 1856. Avocat à Nîmes, il se fait vite remarquer par son éloquence et sa générosité. Très vite aussi on le surnomme avec une pointe de mépris, l'avocat des pauvres. Cette réputation de désintéressement va le suivre à Marseille où il s'établit en 1862. Sa générosité naturelle, son caractère affable et doux, ses allures paisibles et ouvertes, attiraient toutes les sympathies. Et par le fait même qu'il était toujours disposé à défendre les miséreux, il entra tout naturellement en contact avec les milieux républicains de l'époque. Porté par sa sympathie presque instinctive vers les classes opprimées, il fut également en liaison quasi permanente et amicale avec l'Internationale. Mais, malgré ses qualités de cœur, son désir de soulager la misère, il ne fut jamais, en dépit de quelques discours ou de quelques articles violents, un homme d'action véritable. Il n'en reste pas moins que le 8 août 1870 il se trouve porté à la tête d'un pouvoir révolutionnaire issu du peuple. Arrêté, emprisonné dans un sombre cachot du fort Saint-Jean et bientôt condamné à 6 mois de prison qu'il va purger à la prison Saint-Pierre, il est libéré avec ses camarades par une foule de plus 20 000 personnes dans la nuit du 4 au 5 septembre. C'est lui qui, le 7 septembre, accueille Esquiros à la gare Saint-Charles et l'accompagne à la préfecture. Dans le cadre de l'épuration (destitution des magistrats compromis sous l'Empire), Crémieux est ensuite nommé au poste de procureur de la république, où il ne restera en fonction que quelques semaines. Puis, après la création de la Ligue du Midi (qui groupait 15 départements), il parcourt la province comme envoyé en mission, il signe peu après une proclamation qui indique notamment : Nous sommes résolus à tous les sacrifices, et, si nous restons seuls, nous ferons appel à la révolution, à la révolution implacable et inexorable, à la révolution avec toutes ses haines, ses colères et ses fureurs patriotiques. Nous partirons de Marseille en armes, nous prêcherons sur nos pas la guerre sainte... Bientôt la Ligue va entrer en opposition ouverte contre le gouvernement de la défense nationale et, au cours d'un meeting organisé à l'Alhambra, le 19 octobre, comme on lui demandait les moyens de réagir devant une telle situation, il s'écria : La Ligue du Midi, et la Commune Révolutionnaire! C'est ainsi qu'il fait partie, dès le 1er novembre, de la Commission départementale insurrectionnelle qui ratifie les pouvoirs de la Commune révolutionnaire et qu'il appelle les Marseillais à prendre les armes. Mais, la Commune écrasée par la réaction, Crémieux refusant de s'enfuir est arrêté et le 8 avril, il est condamné à mort comme factieux incorrigible. Six mois après sa condamnation, malgré la multitude de démarches entreprises de tous côtés pour obtenir sa grâce, Crémieux est fusillé sur ordre de "Monsieur" Thiers. Le 30 novembre 1871, à 7 heures du matin, au Pharo, tombait l'un des hommes les plus intègres que le mouvement ouvrier ait connu. Sa mort provoqua une profonde émotion dans toute la ville. André BASTELICA Né à Bastia le 28 Novembre 1845, il apparaît à 23 ans dans l'histoire de l'Internationale. Anarchiste, il le fut jusqu'au bout des ongles, alors même que le mot n'était pas encore inventé. En effet, tour à tour employé de commerce et typographe, il possédait une culture étonnante pour son âge et sa condition. Une immense curiosité, toujours en éveil, l'avait poussé à s'instruire dans tous les domaines. Journaliste de talent, il écrivait dans de très nombreux journaux : L'Égalité de Genève, L'Internationale de Bruxelles, La Marseillaise de Paris, L'Égalité et Le Peuple de Marseille, et dans des revues littéraires, avec un style précis et fougueux, plein de flamme et de vivacité, un style qui traduit la pensée et surtout la parole, car Bastelica était aussi un brillant orateur. C'est son éloquence surtout qui explique le véritable ascendant que ce tout jeune homme exerçait sur les masses. À l'idéal généreux qui l'animait, il joignait l'immense avantage de posséder un sens pratique de l'organisation, un souci méthodique et lucide de l'action révolutionnaire. Son camarade de combat, Albert Richard, disait de lui : Il avait besoin de vivre, d'agir, de produire... et de défendre, à la lumière, l'idée qu'il incarnait en lui. Voilà l'homme qui constitua, avec Eugène Varlin et Benoît Malon à Paris, Émile Aubray à Rouen et Albert Richard à Lyon, la génération spontanée de la renaissance du socialisme français. Alors même que Tolain, découragé, pensait que l'Association Internationale des Travailleurs était morte en France, elle allait renaître avec des hommes nouveaux et des idées nouvelles, des hommes jeunes, des hommes issus des milieux ouvriers. D'abord isolés dans la clandestinité, du fait de la répression ils vont peu à peu se trouver en contact, unis dans une même cause et par une amitié jamais démentie. Bientôt, ils vont coordonner leurs efforts dans une parfaite égalité d'action, sans qu'aucun d'entre eux n'essaie de dominer les autres et cela aussi bien en France qu'à l'étranger, lors des congrès de l'Internationale, et cela à tel point qu'un éminent historien pourra écrire : Leur activité commune, parallèle, évitant toute hiérarchie est un remarquable exemple d'autonomie, de libre initiative de décentralisation volontaire au sein d'une organisation perfectionnée qui rêvait précisément de fonder la société nouvelle sur des bases fédéralistes. (A. Olivesi, La Commune de 1871 à Marseille). Nous ne nous attarderons pas sur l'influence que Bakounine exerça sur Bastelica. Elle n'eut aucun rapport de maître à élève mais de compagnon de lutte à son frère d'armes, d'ami à ami. En effet, dès son adhésion à l'Internationale, Bastelica avait écrit à Albert Richard: Nous voulons le non-gouvernement parce que nous voulons la non-propriété, et vice versa. La morale humaine détruira les religions révélées, le socialisme supprimera le gouvernement et la question politique. Si le peuple comprend aujourd'hui surtout la question politique, c'est que dans sa conception théorique, il croit que le gouvernement représente la société (on croit entendre Bakounine). Et c'est sous l'impulsion de cet homme, qui fait preuve d'une activité prodigieuse d'organisateur et de propagandiste, que Marseille, ralliée au communisme non-autoritaire de Bakounine allait devenir l'une de bases de la Révolution mondiale que l'Internationale souhaitait et pour laquelle elle œuvrait de toutes ses forces. Fondée en juillet 1867, la section marseillaise de l'Internationale connut dès la fin de l'année suivante (arrivée de Bastelica) une rapide extension. Organisée strictement selon les principes proudhoniens, elle compte 27 corporations groupées dans la fédération marseillaise, une des mieux organisées de France. Les adhérents atteignent bientôt le nombre de 4 500. Infatigable, Bastelica laisse à ses camarades (Poletti, Combes, Pacini, Roger, Alérini) le soin de s'occuper des affaires locales et parcourt la campagne, en de perpétuels déplacements, pour créer de nouvelles sections dans les départements voisins : Aix (600 adhérents), La Ciotat, Saint-Tropez, Cogolin, Callabrières, Gonfaron, La Garde-Freinet, Toulon, La Seyne, Draguignan deviennent à leur tour des foyers actifs. Il ira jusque dans l'Hérault et les Basses-Alpes, pour convertir à la cause les populations rurales. Le 28 avril 1870, il écrit à James Guillaume : La section marseillaise marche résolument dans la voie des grands progrès... Je suis de retour d'une excursion parmi les populations révolutionnaires du Var. Quel enthousiasme l'Internationale a soulevé sur le passage de son propagateur ! J'ai acquis cette fois la preuve invincible, irrécusable que les paysans pensent, et qu'ils sont avec nous... Tout ce mouvement brise mes forces mais augmente mon courage. Quatre jours auparavant, il écrivait dans Le Mirabeau (journal socialiste) à propos des grèves du Creusot : Jugulée par une politique honteuse et réactionnaire, la grande voix du peuple, pour se faire entendre, emprunte un autre organe plus terrible: la grève. La grève c'est l'irruption endémique du mal social. Organiquement, la société actuelle aboutit à la grève : ce n'est ni la paix, ni la justice. La théocratie et l'aristocratie reprennent courage et essayant l'offensive sur la Révolution trahie par la bourgeoisie, sa fille aînée... Que l'État, l'Église et les bourgeois se coalisent pour une œuvre d'imposture et d'ignominie, le peuple vengeur, les confondra dans une même ruine. Le principe autour duquel le peuple doit se grouper c'est la solidarité... les fruits de cinq révolutions seraient perdus pour nous si nous ne nous redressions forts, et défiant les traînards de la civilisation d'oser porter la main sacrilège sur le sanctuaire de la justice sociale. Mais le gouvernement s'inquiétait du développement de l'Association. Le Congrès retentissant tenu à Lyon en mars 1870, présidé par Varlin et auquel assistaient Bastelica et Bakounine, avait affirmé la volonté des fédérations françaises d'intensifier leur action révolutionnaire. Aussi Émile Ollivier, décide de sévir : il télégraphie aux préfets de poursuivre l'Internationale et surtout ajoute-t-il : Frappez à la tête ! Varlin et Richard sont arrêtés. Bastelica se réfugie à Barcelone (il était en contact étroit avec les bakouninistes catalans de l'Internationale). Le mouvement est momentanément désorganisé, mais il est trop puissant pour périr et il aboutira aux événements grandioses que l'on connaît, que certains regrettent, avec raison sans doute, puisqu'ils furent le tombeau du mouvement ouvrier, la porte ouverte au socialisme autoritaire et autres dictatures du prolétariat. Ainsi, un des rares révolutionnaires de valeur que Marseille possédait fut envoyé à Paris (on sait qu'en échange, la Commune de Paris délégua à Marseille trois représentants en mission qui ne l'égalèrent pas, c'est le moins qu'on puisse dire), et là, d'une honnêteté scrupuleuse, il manipula des millions sans en distraire un centime, en dirigeant avec beaucoup d'intelligence le service des contributions directes et indirectes de la Commune de Paris. Bastelica, qui fut incontestablement l'un des hommes les plus brillants de son époque, Bastelica qui aurait pu utiliser ses talents à des fins ambitieuses et qui aurait certainement réussi, Bastelica qui préféra se vouer avec un rare désintéressement à la cause ouvrière et socialiste, mourut, exilé en Suisse, en 1884, à l'âge de 39 ans, brisé par l'écrasement de son grand rêve de révolution internationale. Son seul défaut, en effet, fut d'être vulnérable au découragement: il ne put supporter la défaite du socialisme, refusa de s'abaisser aux compromissions politiques et mourut dans la pauvreté et la tristesse. Tel fut l'homme de réelle valeur qui fit de Marseille une des capitales du socialisme. COMMUNE DE PARIS : Pendant deux mois (18 mars-27 mai 1871), la Commune marque profondément la naissance de la Troisième République et le mouvement ouvrier français. La guerre déclarée à la Prusse par Napoléon III, en juillet 1870, avait accumulé, en France, les désastres militaires. Le 4 septembre, sous la poussée populaire, la République est proclamée. Un gouvernement – auquel participent le général Trochu, président, Jules Favre et Jules Ferry – est chargé, en principe, de continuer la guerre. Le peuple de Paris assiégé par les Prussiens à partir du 19 septembre, supporte avec un courage exemplaire le froid, la faim et les bombardements. Mais il s’avère bientôt que le gouvernement dit de la Défense nationale n’est nullement décidé à la lutte, tandis que le peuple de Paris réclame la guerre à outrance. 380.000 hommes constituent la garde nationale, groupée dans ses conseils de famille et dirigée par le Comité central. Dans chaque arrondissement se sont constitués, pendant le siège, des comités de vigilance. De son côté, le Comité central républicain des vingt arrondissements, composé de délégués ouvriers, dont beaucoup appartiennent à l’Internationale, siège depuis le 5 septembre rue de la Corderie. Deux pouvoirs commencent à s’opposer : celui de l’État bourgeois, représenté par le gouvernement du 4 septembre ; celui du peuple, encore vague et incontrôlé. Les souvenirs de la Commune de 1793, de la révolution de 1848 que la bourgeoisie avait accaparée à son profit et qui s’était terminée en juin par le massacre des ouvriers de Paris, sont encore vivants dans les esprits et subsistent, malgré les mesures de coercition prises par le second Empire. Le 31 octobre, jour où le peuple de Paris apprend l’échec de la sortie du Bourget, la capitulation de Metz et les négociations de paix, les gardes nationaux, à l’instigation des comités de vigilance, demandent la déchéance du gouvernement du 4 septembre aux cris de « Vive la Commune ! ». Le 7 janvier, L’Affiche rouge , rédigée en partie par Jules Vallès au nom du Comité des vingt arrondissements, réclame une attaque en masse, la réquisition générale, le rationnement gratuit, enfin le gouvernement du peuple. Le 22 janvier, les gardes nationaux réclament, devant l’Hôtel de Ville, la guerre à outrance : les mobiles bretons tirent sur la foule. Les clubs, où depuis le siège s’est formé l’esprit révolutionnaire, ainsi que les journaux républicains sont supprimés. De nombreuses arrestations sont effectuées. Le 29 janvier, on apprend la conclusion d’un armistice qui doit permettre l’élection d’une assemblée nationale. Les conditions en sont draconiennes : désarmement de l’enceinte fortifiée de Paris, occupation des forts, paiement de deux cents millions en quinze jours. La province, qui, elle, veut dans son ensemble la paix à tout prix, élit une assemblée réactionnaire, tandis qu’à Paris la délégation des vingt arrondissements, l’Association internationale des travailleurs et la Chambre fédérale des sociétés ouvrières présentent des candidats, dont le programme est nettement socialiste et révolutionnaire : ils veulent une république qui donnerait aux ouvriers leurs instruments de travail, comme celle de 1789 remit la terre aux paysans, une république qui réaliserait à la fois la liberté politique et l’égalité sociale. Paris élit des bourgeois démocrates comme Victor Hugo ou Edgar Quinet, des jacobins comme Delescluze, des représentants comme Pyat, Malon, Gambon et Tolain. Soutenu par cette Assemblée en majeure partie composée de ruraux, le chef du pouvoir exécutif, Thiers, symbole même de la bourgeoisie, a les mains libres pour traiter avec l’Allemagne. La France devra payer un tribut de cinq milliards, abandonner l’Alsace, moins Belfort, et le tiers de la Lorraine. Le 1er mars, l’Assemblée ratifie le traité, malgré la protestation désespérée des députés alsaciens et lorrains. Délivrée de la guerre extérieure, l’Assemblée des ruraux, des hobereaux et des notables que la province a élus n’a plus devant elle que ces ouvriers, ces artisans, ces petits-bourgeois de Paris, à la fois socialistes, républicains et patriotes, qu’il faut mater. Des mesures sont prises immédiatement contre la population parisienne exténuée par les souffrances du siège : la suppression des trente sous accordés aux gardes nationaux, la suppression des moratoires concernant les loyers et les effets de commerce touchent à la fois les ouvriers, les artisans et le petit commerce. De plus, l’entrée des Prussiens dans Paris, prévue pour le 27 février, apparaît aux Parisiens comme un déshonneur. La foule manifeste et ramène les canons, payés par les souscriptions de la population parisienne, vers les hauts lieux populaires de la capitale : Montmartre, les Buttes-Chaumont, Belleville. Ces canons, ni les Prussiens ni M. Thiers ne les prendront. Les Allemands n’entrent que le 1er mars dans les beaux quartiers et en sortent le 2. Mais les mesures contre Paris continuent. Des journaux sont suspendus. Flourens et Blanqui sont condamnés à mort par contumace, pour avoir participé à la journée du 31 octobre, tandis que Jules Vallès est mis en prison pour six mois. Thiers et le général d’Aurelles de Paladine adressent deux proclamations aux habitants de Paris. Ils les mettent en garde contre les agissements d’un « Comité occulte » (le Comité central de la garde nationale), font appel aux sentiments des « bons citoyens » contre les « mauvais », fauteurs de désordre, et terminent par une menace non déguisée de recourir à la force si les circonstances l’exigent. Cet avertissement ne sera pas entendu. Dans la nuit du 17 au 18 mars, les troupes du général Vinoy reçoivent l’ordre de reprendre les canons des Parisiens. Mais on avait oublié les chevaux ; et les ménagères ont eu le temps de donner l’alerte. Le comité de vigilance du XVIIIe arrondissement, que dirigent Ferré et Louise Michel, monte à l’assaut de la butte Montmartre. Et l’on voit alors d’étonnantes manifestations : femmes, enfants, gardes fédérés entourent les soldats, qui fraternisent avec la foule joyeuse et pacifique. Cependant, le soir, deux généraux, le général Lecomte qui le matin avait donné, sans être obéi, l’ordre de tirer sur les Parisiens, et le général Clément Thomas, qui avait, en juin 1848, décimé les insurgés, sont fusillés, rue des Rosiers. Devant cette extraordinaire impuissance du pouvoir, Thiers se réfugie à Versailles, et donne aux troupes l’ordre d’abandonner Paris. Étrange victoire remportée sans violence (exception faite de l’exécution des deux généraux), sans combat, et par une foule anonyme. Nulle organisation ne l’a préparée, ni le Comité central de la garde nationale, ni le Comité des vingt arrondissements, ni les comités de vigilance des quartiers, ni l’Internationale ; mais des hommes issus de ces différents mouvements, poussés par la foule anonyme, ont pris des initiatives individuelles et incoordonnées. Le 19 au soir, des hommes inconnus la veille, mais mandatés par le Comité central de la garde nationale, siègent à l’Hôtel de Ville. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? S’agit-il d’un gouvernement révolutionnaire ? À ces questions que se posent les Parisiens, le Comité central répond immédiatement par deux proclamations. Dans l’une, il remercie l’armée de n’avoir pas voulu « porter la main sur l’arche sainte de nos libertés » et appelle Paris et la France à « jeter ensemble les bases d’une république acclamée avec toutes ses conséquences, le seul gouvernement qui fermera pour toujours l’ère des invasions et des guerres civiles ». En conséquence, le Comité central appelle le peuple de Paris à de nouvelles élections. Un appel comparable est adressé aux gardes nationaux. Bien qu’il décide « de conserver, au nom du peuple », l’Hôtel de Ville, le Comité central ne se considère donc pas comme un gouvernement révolutionnaire, mais comme l’agent qui va permettre au peuple d’affirmer sa volonté par de nouvelles élections. Il fixe ces élections au 22 mars, et, en même temps, assume le gouvernement de Paris ; il lève l’état de siège, rétablit la liberté de la presse, abolit les conseils de guerre, accorde l’amnistie à tous les condamnés politiques et assure leur libération. Enfin, il envoie des représentants dans les différents ministères abandonnés par leurs titulaires, qui ont suivi Thiers à Versailles. Par ces mesures, le Comité central agit comme un gouvernement, le gouvernement de Paris, face à celui de Versailles. Mais, ennemi de la guerre civile, il ne prend pas d’initiatives militaires ; il ne s’attaque pas non plus aux puissances d’argent : il emprunte, pour faire face aux dépenses de Paris, cinq cent mille francs à M. de Rothschild et un million à la Banque de France. Les maires de Paris et l’Assemblée nationale, dès sa première séance, condamnent ce gouvernement de factieux. Diverses tractations ont lieu sans aboutir : il ne peut y avoir de conciliation entre le peuple et la bourgeoisie. Le Comité central a, en effet, précisé son programme (23 mars). Il constate d’abord la faillite d’un pouvoir qui a mené la France à la défaite et à la capitulation : « Le principe d’autorité est désormais impuissant pour rétablir l’ordre dans la rue, pour faire renaître le travail dans l’atelier, et cette impuissance est sa négation. » Il faut donc retrouver un ordre et réorganiser le travail sur de nouvelles bases « qui feront cesser l’antagonisme des classes et assureront l’égalité sociale ». L’émancipation des travailleurs et la délégation communale doivent assurer le contrôle efficace des mandataires du peuple chargés par lui des réformes sociales. Ces réformes sociales sont : l’organisation du crédit, de l’échange et de l’association, afin d’assurer au travailleur la valeur intégrale de son travail, c’est-à-dire la disparition du profit capitaliste ; l’instruction gratuite, laïque et « intégrale » ; les libertés des citoyens (réunion, association, presse) ; l’organisation sur le plan communal de la police et de l’armée. Le principe qui doit gouverner la société tout entière, c’est celui qui organise le groupe et l’association. Il y a donc refus de toute autorité imposée du dehors, que ce soit celle d’un administrateur, d’un maire ou d’un préfet, et contrôle permanent de tous les élus. Le 25 mars, le Comité central appelle la population parisienne à choisir ses représentants : « Les hommes qui vous suivront le mieux sont ceux que vous choisirez parmi vous, vivant de votre vie, souffrant des mêmes maux. » Puis, considérant sa mission comme terminée, il se déclare décidé à céder la place aux nouveaux élus. À quoi le gouvernement de Versailles répond en appelant la population parisienne à se grouper autour de son Assemblée, contre les « criminels », les « insensés » qui déshonorent Paris. Malgré ces adjurations, 229 000 Parisiens sur 485 000 inscrits se rendent aux urnes, le 26 mars. La différence entre ces deux chiffres s’explique par la diminution de la population parisienne par suite de la guerre, du siège, des départs en province et à Versailles. D’ailleurs, la participation électorale est plus forte dans les quartiers ouvriers que dans les « beaux quartiers » de l’ouest de Paris. Le 28 mars, à l’Hôtel de Ville, les membres du Comité central remettent leur pouvoir à la Commune, puis l’on proclame la liste des élus. Ces hommes qui composent la Commune sont d’origines diverses. On y trouve des bourgeois riches : ils s’élimineront d’eux-mêmes, en donnant leur démission, et seront remplacés lors des élections complémentaires du 16 avril ; puis les élus issus de la petite et moyenne bourgeoisie : employés, instituteurs, médecins, journalistes, qui avaient déjà milité sous le second Empire dans les rangs du Parti républicain, et qui constituent la majorité de la Commune ; enfin, on dénombre vingt-cinq ouvriers – chiffre inhabituel pour l’époque dans une assemblée élue –, affiliés souvent à l’Internationale, venant du Comité central, et qui se retrouvent généralement unis dans la minorité. Plusieurs tendances en effet s’expriment : la majorité groupe des blanquistes se réclamant du vieux prisonnier, qu’on cherchera par la suite à échanger contre l’archevêque de Paris, Mgr Darboy ; des jacobins, qui ont fait la révolution de 1848, et ont gardé le souvenir de la Révolution de 1789 (Delescluze incarne ce type de républicain) ; des radicaux comme Vallès et Vermorel, qui, partisans d’une république démocratique et sociale, ne décèlent pas nettement les transformations économiques nécessaires qu’elle implique. Du côté de la minorité, les ouvriers ne forment pas un bloc idéologique plus uni. Artisans, d’ailleurs, plus qu’ouvriers de la grande industrie, ils appartiennent le plus souvent au courant proudhonien de l’Internationale (Frankel, lui, est en relation personnelle avec Karl Marx). Mais par leur origine, leur passé de militants dans l’Internationale et les chambres syndicales, les élus formant la minorité de la Commune s’intéressent davantage aux questions sociales qu’aux problèmes politiques. C’est pourquoi on a pu les appeler des « socialistes révolutionnaires ». Mais nulle trace de partis, d’organisations structurées dans tout cela : s’il arrive à des membres de la minorité de voter avec la majorité, l’inverse se produit plus souvent encore. Parmi ces hommes, il y a des personnalités de premier plan : le peintre Courbet, l’écrivain Jules Vallès, le savant Gustave Flourens ; d’admirables figures d’ouvriers, comme Varlin ou Benoît Malon ; de vieux républicains, comme Delescluze qui mourut en héros sur les barricades ; mais aussi des rhéteurs vaniteux et sans scrupules, comme Félix Pyat, qu’on a pu appeler « le mauvais génie de la Commune », des imbéciles comme Allix ou Babick. Tous se trouvèrent brusquement confrontés avec des événements difficiles à vivre et à surmonter, et pour lesquels ils n’étaient nullement préparés. Ce ne sont pas seulement ces hommes qui sont au pouvoir, mais le peuple de Paris tout entier à travers les sections de l’Internationale, les chambres syndicales, les coopératives, les comités d’arrondissement coiffés du Comité central républicain, et les clubs. Ces derniers, qui existaient déjà pendant le siège, se sont multipliés et l’on y discute des problèmes immédiats d’organisation et de défense, mais aussi de questions plus générales : la femme dans la société, les relations du capital et du travail, etc. D’autre part, les femmes ne restent pas inactives : groupées dans l’Union des femmes pour la défense de Paris et les secours aux blessés, fondée par une amie de Marx, Elizabeth Dmitrieff, on les voit aussi dans les comités de vigilance, dans les clubs, et, comme cantinières, ambulancières ou soldats, jusque sur les remparts. Enfin, le Comité central de la garde nationale, qui malgré ses déclarations n’a nullement abdiqué, continue à tenir ses séances et à prétendre diriger la lutte. Il crée ainsi, à côté de la Commune, un second pouvoir, facteur d’anarchie. Dès le 29 mars, la Commune décide de former dix commissions correspondant aux différents ministères que le Comité central avait pris en main, à l’exception de celui des Cultes qui est supprimé. Le 19 avril, dans une déclaration, elle explique ses buts au peuple français : reconnaissance et consolidation de la République, une république non plus centralisée, mais qui serait le résultat de la fédération de toutes les communes de France. Suit l’énumération des droits de la commune : vote du budget communal, organisation de la magistrature, de la police, de l’enseignement, recrutement de tous les fonctionnaires par élection ou concours, administration des biens appartenant à la commune, garantie absolue de la liberté individuelle, de la liberté du commerce, de la liberté du travail, intervention permanente des citoyens dans les affaires de la commune, organisation de la garde nationale par l’élection des chefs. La Commune de Paris se défend de vouloir, comme l’en accuse le gouvernement de Versailles, imposer sa dictature aux autres communes de France, ou poursuivre la destruction du pays. Elle refuse, au contraire, la centralisation « despotique, inintelligente, arbitraire ou onéreuse » qui a été imposée à la France par la monarchie, l’Empire et la république parlementaire. « Nous avons la mission d’accomplir la révolution moderne la plus large et la plus féconde de toutes celles qui ont illuminé l’histoire. » Ce texte essentiel éclaire l’œuvre que la Commune va essayer de réaliser, sans plan ni méthode, dans une suite d’improvisations et dans un délai très court. Il s’agissait, en fait, de détruire la société et le gouvernement traditionnels, et de les remplacer par une société totalement nouvelle visant non plus au gouvernement des hommes, mais à l’administration des choses par les hommes eux-mêmes. Ce projet de décentralisation aurait pu recevoir l’appui d’une partie de la province, s’il y avait été connu. La Commune essaya bien d’envoyer des émissaires dans les départements et de lancer un appel aux paysans. Des villes comme Lyon et Saint-Étienne avaient connu des soulèvements dès le mois de septembre ; le 18 mars avait eu quelque retentissement à Marseille, à Narbonne, à Toulouse, à Grenoble, à Limoges. Mais la situation avait été rapidement reprise en main par le gouvernement. Intoxiquée par la propagande versaillaise, la province, dans son ensemble, resta hostile à Paris. La Commune remet en marche les services publics, désorganisés par le départ d’une grande partie des fonctionnaires et administrés provisoirement par le Comité central. Il faut que Paris, qui a tant souffert de la faim pendant le siège, puisse se nourrir. Viard et la Commission des subsistances prennent des mesures de taxation du pain et de la viande, et, en liaison avec les mairies, assurent le contrôle des halles et marchés. Le service des Postes est rétabli en quarante-huit heures. Un conseil des Postes, créé au début d’avril, comprenant des représentants du personnel, sorte de « commission paritaire » avant la lettre, devait décider du recrutement et de l’avancement des fonctionnaires. Un ouvrier bijoutier, Camelinat, membre de l’Internationale, dirige la Monnaie. Le service de l’Imprimerie nationale imprime les affiches de la Commune. Contrainte de réorganiser le service de santé, la Commune décrète, le 13 avril, la constitution de compagnies d’ambulances. Dans les arrondissements, les bureaux de bienfaisance sont remplacés par l’assistance communale. En ce qui concerne la Justice, la Commune décide la gratuité du recours aux juges et le principe de leur élection, mais doit remettre à plus tard l’exécution de ce décret. Elle supprime, en outre, la vénalité des charges de notaires, d’huissiers et autres officiers publics, qui deviendraient des fonctionnaires : ces mesures auraient eu pour résultat d’enlever à l’exercice de la justice son caractère de classe. Aux Finances, la Commune avait placé un homme particulièrement intègre, un employé de banque, Francis Jourde. Il s’efforça de percevoir les recettes traditionnelles et d’éviter le gaspillage. Mais la Commune recula devant la mesure révolutionnaire qu’aurait été la nationalisation de la Banque de France, erreur qui contribua à sa défaite. Au contraire, sur le plan de l’enseignement, la Commune agit avec vigueur et continuité. Pour forger la société de l’avenir qu’elle souhaitait, il fallait former des hommes et des femmes échappant à l’emprise cléricale. D’où la nécessité de créer un enseignement gratuit, laïque et obligatoire, qui assurât à la jeunesse une formation républicaine. La Commission de l’enseignement et les municipalités de Paris firent appel à toutes les compétences, à toutes les bonnes volontés. La société de l’Éducation nouvelle convie les éducateurs et les parents à discuter des réformes à réaliser dans les programmes et les méthodes d’enseignement. Les discussions préconisent des expériences pédagogiques qui seront appliquées par la suite dans presque tous les pays. Louise Michel propose à la Commune une méthode d’enseignement dans laquelle elle accorde la plus grande importance à la formation morale des enfants. Des écoles congréganistes ont fermé leurs portes : la Commune demande aux citoyens et citoyennes qui voudraient obtenir des postes de présenter leur candidature à la Commission de l’enseignement et confie l’inspection des écoles aux membres de la Commune. Le délégué à l’Enseignement, Édouard Vaillant, invite les municipalités à créer des écoles professionnelles, en particulier pour les jeunes filles. Deux écoles sont ouvertes, l’une rue Lhomond, l’autre rue Dupuytren. La Commune décide en outre de relever les traitements des instituteurs et institutrices. Pour la première fois, on proclame l’égalité des salaires entre les hommes et les femmes. Bien que, sous l’influence proudhonienne, la Commune se montrât souvent hostile aux femmes, en dépit de l’aide incontestable qu’elles lui apportèrent, des mesures sont prises qui ont pour conséquence de reconnaître la famille prolétarienne, telle qu’elle existait réellement, et de faire éclater les structures traditionnelles instituées par les lois civiles et religieuses : pour le paiement des pensions des fédérés tués au combat, la Commune ne fait pas de distinction entre les femmes mariées ou non, entre les enfants légitimes ou naturels. Mais c’est dans le domaine du travail que la Commune de Paris amorce son œuvre la plus profonde de précurseur. La Commission du travail, de l’industrie et des échanges est dirigée par un ami de Marx, Frankel, qui avait reconstitué, avec Varlin, le conseil fédéral de l’Internationale. Une première série de mesures de caractère social concerne les loyers, les échéances et les dépôts au Mont-de-Piété. Dès le 30 mars, la Commune décrète la remise des termes d’octobre 1870, janvier et avril 1871, sans contrepartie pour les propriétaires ; le 25 avril, les locaux abandonnés doivent être réquisitionnés en faveur des habitants dont les appartements ont été endommagés par les bombardements. La Commune décide, après de longues hésitations, que le remboursement des échéances commencera seulement à partir du 15 juillet 1871 et sera étalé sans intérêts sur trois ans. Les objets d’une valeur inférieure à vingt francs, déposés au Mont-de-Piété, « cette banque du pauvre », peuvent être dégagés gratuitement. Le travail de nuit des boulangeries est supprimé le 20 avril, ainsi que la pratique courante des amendes et retenues opérées sur les salaires par les patrons. D’autres mesures vont beaucoup plus loin. Le 16 avril, un décret constitue une commission d’enquête formée par les chambres syndicales. Celles-ci sont chargées de dresser la liste des ateliers abandonnés et de présenter un rapport qui permette de les remettre en marche par les soins d’associations coopératives des ouvriers qui y sont employés. Un jury arbitral devait établir, par la suite, l’indemnité payée aux patrons s’ils revenaient. Malgré cette réserve, ce décret constituait, en fait, une expropriation du capital au profit des coopératives ouvrières. Les ouvriers mécaniciens et métallurgistes, puis les tailleurs, les ébénistes, les cloutiers, les boulonniers nomment des délégués à la Commission d’enquête, qui tient deux séances, les 10 et 18 mai. L’Union des femmes, de son côté, suscite dans le même sens un projet d’organisation du travail des femmes, qui doit éviter le piège des ateliers charitables, tels qu’ils fonctionnèrent en 1848. Elle convie les ouvrières à la réunion du 18 mai, pour contribuer à l’élection des déléguées qui constitueront la Chambre fédérale des travailleuses. Enfin, pour éviter les baisses de salaires, Frankel propose que les marchés d’habillement militaire soient passés directement avec les coopératives ouvrières. Mais la Commune gouverna dans le désordre, oscillant sans cesse entre la dictature et l’anarchie. Les responsables des diverses commissions chargées des services ministériels changèrent à plusieurs reprises, en ce qui concerne particulièrement les affaires militaires. Comme la situation s’aggravait, les « jacobins » de la Commune firent voter, par 45 voix contre 23, la formation d’un Comité de salut public, dont l’intervention dans les affaires de la guerre fut particulièrement malheureuse. Renouvelé, avec l’appui de la minorité cette fois, après la démission du délégué à la guerre Rossel, le nouveau Comité de salut public prit quelques mesures salutaires, mais trop tardives. La lutte entre majorité et minorité, les rivalités de personnes minaient la Commune de l’intérieur ; à l’extérieur, l’ingérence continuelle du Comité central de la garde nationale dans les affaires militaires paralysait son pouvoir. La prolifération anarchique de comités divers, qui soutenaient la révolution, l’affaiblissait en même temps, en particulier en ce qui concerne la défense de la Commune. La Commune se méfiait des militaires qu’elle avait délégués à la guerre : de l’aventurier Cluseret aussi bien que du généreux Rossel. Les gardes nationaux les plus ardents étaient des combattants révolutionnaires, qui répugnaient à une discipline nécessaire. Enfin, des tentatives de conciliation de la part de l’Union des chambres syndicales, de l’Union républicaine des droits de Paris, des députés de Paris, des membres de la franc-maçonnerie, alors qu’il ne pouvait y avoir de conciliation entre la Commune et Versailles, n’eurent pour effet que d’amoindrir la résistance de Paris. Paris n’eut jamais plus de 40 000 combattants, auxquels il faut ajouter des femmes et des adolescents. Thiers, au contraire, avait, avec l’appui de Bismarck, reformé son armée : elle comptait 63 500 hommes, auxquels s’ajoutèrent 130 000 prisonniers libérés d’Allemagne. Jusqu’aux élections de la Commune, il n’y a guère que quelques escarmouches. Mais, le 30 mars, les fédérés sont délogés du rond-point de Courbevoie. Le 2 et le 3 avril, les fédérés essayent de prendre l’offensive. Flourens et Duval sont exécutés par les « versaillais ». À ces exécutions de prisonniers, la Commune répond par le « décret des otages », qui d’ailleurs ne sera pas appliqué. Du 11 avril au 21 mai, la lutte se poursuit autour de Paris. Le général de la Commune, Dombrowski, inflige aux versaillais des pertes importantes. Mais, après une courte trêve qui permet aux habitants de quitter Neuilly en ruines, les versaillais reprennent leurs attaques. Les forts du Sud sont intensément bombardés. Le fort d’Issy, abandonné un moment, est repris par les fédérés. C’est alors que la Commune remplace Cluseret par Rossel (30 avril), qui essaie en vain de réorganiser l’armée fédérée. À partir du 1er mai commence le bombardement systématique de Paris par l’armée versaillaise. Dans la nuit du 3 au 4 mai, la redoute du Moulin-Saquet tombe, puis, le 8, le fort d’Issy, qui n’est plus qu’une ruine. Las, dégoûté, Rossel donne sa démission de délégué à la Guerre ; il est remplacé par un délégué civil, le vieux jacobin Delescluze. Le 13, le fort de Vanves tombe à son tour. Passy, Grenelle, Auteuil, la Muette croulent sous les obus versaillais. Le dimanche 21 mai, les troupes gouvernementales entrent dans Paris par la porte de Saint-Cloud. Pendant une semaine, les combattants de la Commune luttent quartier par quartier, maison par maison, barricade par barricade. Les versaillais fusillent tous ceux qu’ils prennent les armes à la main ; les premières exécutions massives ont lieu à la caserne de la rue de Babylone, tandis que les pompiers de la Commune éteignent l’incendie du ministère des Finances, allumé par des obus versaillais. Il convient de faire le point sur ces incendies de Paris, que l’on a tant reprochés aux communards. En premier lieu, les obus de Thiers avaient déjà endommagé les quartiers de l’Ouest. D’autre part, certains incendies peuvent être attribués à des agents bonapartistes, qui avaient intérêt à faire disparaître des traces de la gestion impériale. Enfin, les incendies allumés par les communards au cours des combats doivent être assimilés à des actes de guerre : ce furent des moyens militaires de s’opposer à l’avance de l’ennemi. La Légion d’honneur, la Cour des comptes, le Conseil d’État ont été ainsi la proie des flammes. Si les communards mettent le feu à la Préfecture de police et à une partie du Palais de justice, des mesures sont prises pour sauvegarder la Sainte-Chapelle et Notre-Dame. Aux massacres des habitants de Paris par les troupes régulières, la Commune répond en faisant exécuter cinquante-deux otages, dont l’archevêque de Paris, Mgr Darboy. Le 26 mai, la résistance est à son comble, tandis que les exécutions sommaires par les versaillais se multiplient à mesure qu’ils avancent dans Paris. Le 27 mai, c’est le massacre des fédérés au milieu des tombes du Père-Lachaise. Cependant, le 28, Ferré, Varlin, Gambon se battent encore au cœur du Paris populaire, entre la rue du Faubourg-du-Temple et le boulevard de Belleville. À une heure, la dernière barricade tombe. Le lendemain, le fort de Vincennes capitule et ses neuf officiers sont fusillés sur-le-champ. Les jours suivants, les cours martiales continuèrent à condamner à mort. Il suffisait qu’une femme fût pauvre et mal vêtue pour être exécutée comme « pétroleuse ». La Seine était devenue un fleuve de sang. Le 9 juin, Paris-Journal écrivait encore : « C’est au bois de Boulogne que seront exécutés à l’avenir les gens condamnés à la peine de mort par la cour martiale. Toutes les fois que le nombre des condamnés dépassera dix hommes, on remplacera par une mitrailleuse le peloton d’exécution. » L’« armée de l’ordre » avait perdu 877 hommes depuis le début d’avril. Mais on ne sait exactement combien d’hommes, de femmes et d’enfants furent massacrés au cours des combats ou sur l’ordre des cours martiales. On peut sans doute avancer le chiffre de trente mille victimes. À Versailles, on avait entassé plus de trente-huit mille prisonniers. On en envoya aussi dans des forts et sur des pontons. Beaucoup moururent de mauvais traitements. Pour juger les vaincus de la Commune, quatre conseils de guerre fonctionnèrent jusqu’en 1874. Il y eut 10 042 condamnations et 3 761 condamnations par contumace. Ferré, Rossel se montrèrent devant les conseils de guerre à la hauteur de leur destin. Ils furent condamnés à mort et fusillés. Le plus grand nombre fut déporté en Nouvelle-Calédonie ou en Guyane. D’autres réussirent à gagner la Belgique, la Suisse et l’Angleterre. L’amnistie, votée en 1880, ramena en France les derniers survivants. Certes, la Commune a commis de lourdes fautes. Elle n’a pu ni organiser sa défense, ni lier son action à celle de la province et de la paysannerie. Sans doute les conditions économiques n’étaient-elles pas mûres encore pour instaurer sur des bases socialistes la nouvelle société qu’elle entrevoyait. Mais, par les décisions prises pour l’organisation du travail (suppression du travail de nuit pour les ouvriers boulangers, suppression des amendes et retenues sur les salaires, réouverture et gestion des ateliers par des coopératives ouvrières) et par diverses mesures sociales, la Commune a tracé la voie à une société qui ne serait plus gérée au profit du capitalisme, dans l’intérêt de la bourgeoisie, mais qui déboucherait sur le socialisme. BRUHAT (J.), DAUTRY (J.), TERSEN (E.): La Commune de 1871, Paris, Editions Sociales, 1960. GAILLARD (J.) : Commune de Paris, Commune de province, Paris, Flammarion, 1971. ROUGERIE (J.) : Paris Libre 1871, Paris, Editions du Seuil, 1971. COMMUNISTE (Le) : Sous ce titre paraît, le 1er novembre 1919, un journal qui se présente comme l’ »organe officiel du parti communiste français et des Soviets adhérants à la section française de la IIIème Internationale de Moscou, des conseils d’ouvrier, paysans et soldats ». Le Communiste disparaît en 1920. COMMUNISTE (Parti) : COMPAYRÉ (Gabriel), 1843-1913 : Universitaire et homme politique. Né à Albi en 1843, Gabriel Compayré professe de philosophie à la faculté de Toulouse en 1874. Député du département du Tarn de 1881 à 1889, recteur à Lyon, puis inspecteur général de l’instruction publique, professeur à l’Ecole normale de Fontenay-aux-Roses, membre de l’Académie des sciences morales (1907), il s’est occupé particulièrement de pédagogie. Son principal ouvrage est une Histoire critique des doctrines de l’éducation en France depuis le XVIème siècle (1879). Il a publié aussi pour les écoles normales primaires une Histoire de la pédagogie (1885) et un Cours de pédagogie théorique et pratique (1886). Il décède en 1913. COMPÈRE-MOREL (Constant-Alphonse-Adéodat Compère, dit), 1872-1941 : Horticulteur et homme politique. Né à Breteuil-sur-Noye (Oise) le 4 octobre 1872, acquis aux idées socialistes, Compère-Morel, à l'exemple de son père qui est conseiller municipal socialiste, se donne dès l'âge de dix-huit ans à la propagande et organise quelques groupes dans le département de l'Oise. Cet horticulteur-pépiniériste accède à la direction de la S.F.I.O. où il est chargé des problèmes du monde paysan. Il se fait le théoricien de la doctrine agraire du socialisme et en est, par la parole, par le journal, la brochure et le livre, le vulgarisateur pendant un demi-siècle. La doctrine agraire de Compère-Morel reposait sur la distinction entre la propriété paysanne mise en valeur par son détenteur, et celle qu'exploite un travail salarié. Le socialisme, disait-il, respecte la première et ne s'attaque qu'à la seconde. Elu successivement député du Gard de 1909 à 1936, il siège constamment à la commission de l'Agriculture de la Chambre des députés et en était le vice-président quand il quitte le Parlement en 1936. Pendant la Première Guerre mondiale, il est un des animateurs de la politique propre de défense nationale du parti socialiste puis, après la scission de 1920, alors que le parti communiste disputait les masses ouvrières à la S.F.I.O., Compère-Morel permet au parti socialiste de se tourner plus résolument vers les travailleurs des champs, en orientant vers eux sa pensée et ses revendications. L'effondrement de 1940 le conduit au ralliement à Pétain. Il décède à Sernhac (Gard) le 3 août 1941. COMPIÈGNE (Louis-Eugène-Henri Dupont, marquis de), 1846-1877 : Voyageur. Né à Fuligny (Aube) en 1846, son goût des voyages pousse cet auditeur au conseil d’Etat à explorer les parties occidentales de l’Afrique équatoriales entre le Gabon et l’estuaire du Congo et lui fait remonter, avec Alfred Marche, jusque chez les Ossyéba, le cours inexploré de l’Ogôoué. Il devient ensuite secrétaire général, puis président de la Société de géographie du Caire (Egypte). Il a publié, en deux volumes, le récit de son voyage sur l’Afrique équatoriale (1875). Il décède au Caire en 1877. COMTE (Jules), 1846-1912 : Administrateur et écrivain. Né à Paris en 1846, Jules Comte est appelé, en 1886, à la direction des bâtiments civils et palais nationaux. C’est sous sa direction qu’est arrêté le programme d’aggrandissement de la Bibliothèque nationale. Il est l’auteur d’un volume sur La Tapisserie de Bayeux et d’études sur Les Musées et les Ecoles d’art en France. Il a fondé la Bibliothèque de l’Enseignement des beaux-arts, et la Revue de l’art ancien et moderne. Membre de l’Institut en 1911, ,il décède à Paris en 1912. CONFÉDÉRATION DE L’INTELLIGENCE ET DE LA PRODUCTION FRANÇAISE (CIPF) : Organisation créée le 21 mars 1920 dans le cadre du mouvement d’Actionfrançaise par George Valois, qui en fixe la doctrine dans son livre L’Economie nouvelle. A la direction de la CIPF, aux côtés de Valois, se trouvent Georges Coquelle (Coquelle-Viance), Hervé Legrand, Maurice Denis, Pierre Dumas. Transformée, la CIPF devient quelques années plus tard, l’Union des corporations françaises. L’organe du groupement s’appelait : la production française. CONFÉRENCES RIVE GAUCHE : A la fois politiques et littéraires, les Conférences rive gauche assuraient avant la Seconde Guerre mondiale, une large audition parmi les jeunes à des conférenciers partisans du rapprochement franco-allemand. On a affirmé qu’Otto Abetz, futur ambassadeur du Reich en France, est l’un des auditeurs assidus de ces conférences. Au comité, siégeaint à la veille de la guerre : René Belin, M.-P. Bertin, Georges Blond, J. Desfossés, G. Godlewsky, Henri Jamet, G. Labbé, Thierry Moulnier, etc. CONGÉS PAYÉS : Les premiers congés payés furent rendus obligatoires par une loi votée sous le Front populaire. Un certain nombre de salariés en bénéficiaient auparavant, surtout depuis le début de XXe siècle, sans que ce fut un droit et selon une grande variété de pratiques : les fonctionnaires, la plupart des employés, mais très peu d’ouvriers- un peu plus de 60 000, répartis dans 876 établissements, d’après une enquête effectuée en 1929 par le ministère du Travail. Les milieux patronaux s’étaient constamment élevés contre l’obligation de « vacances payées » (expression usuelle jusqu’au projet Blum) et le Sénat avait enterré tous les projets de loi déposés en ce sens, notamment le projet Durafour de 1925. Beaucoup d’usines avaient pris l’habitude de fermer une ou deux semaines en août, mais sans payer leurs ouvriers. La revendication des congés payés ne figurait pas au programme du Rassemblement populaire, car le monde ouvrier était alors beaucoup plus préoccupé par le chômage. Elle jaillit comme spontanément des grèves de mai-juin 1936, et lors des accords de Matignon, le 7 juin, Léon Blum annonça le dépôt imminent d’un projet de loi en ce domaine. Votée à la quasi-unanimité par la Chambre des députés (le 11 juin, par 563 voix contre 1), puis par le Sénat (le 17 juin, par 295 voix contre 2), promulguée le 21 juin, la loi instituait un congé payé de quinze jours, dont douze ouvrables, pour les salariés ayant accompli un an de services continus dans l’entreprise (ceux qui n’avaient que six mois d’ancienneté ne bénéficiaient que d’une semaine, dont six jours ouvrables). Le 1er août, un décret édicta une série de mesures transitoires pour l’application immédiate de la loi ; d’autres allaient suivre jusqu’en avril 1938 pour une série de professions particulières. Actif sous-secrétaire d’Etat à « l’Organisation des loisirs et des sports », Léo Lagrange négocia avec les compagnies de chemin de fer l’institution d’un « billet populaire de congé annuel » ; 550 000 personnes en profitèrent en 1936, 907 000 en 1937. L’été 1936 fut la saison des premiers grands départs en bicyclette ou en tandem. Ainsi, grâce aux congés payés (et à la forte augmentation des salaires), de nombreux ouvriers purent prendre de véritables vacances pour les la premier fois de leur vie, et souvent découvrir la mer ou la montagne. Mais il ne faut pas exagérer l’ampleur des départs de 1936 : une série d’études locales a montré que, sauf dans la région parisienne, ils ont été peu nombreux et que la majorité des salariés sont restés chez eux. L’été 1936 fut cependant le point de départ d’une sorte de « révolution culturelle » qui devait prendre sa véritable dimension après la Libération et dans les années 1950. CONGO FRANÇAIS : Ancienne dénomination officielle de l’Afrique Equatoriale française, sous laquelle ont été désignés de 1897 à 1910 les vastes territoires que travallaient à explorer, à organiser et à mettre en valeur Savorgnan de Brazza et ses collaborateurs, en partant du Gabon. C’était le champ d’action de l’ancienne « Mission de l’Ouest africain ». Il avait à sa tête un commissaire général du Gouvernement qu’assistaient en dernier lieu des lieutenants-gouverneurs au Gabon, au Moyen-Congo et dans l’Oubangui-Chari et un commissaire du Gouvernement dans le territoire militaire du Tchad. La rédidence du commissaire général était Brazzaville. Dès 1902, le titre de gouverneur général a été substitué à celui de commissaire général, et le Congo français, qui comptait alors, vraisemblablement, près de 8 millions d’habitants indigènes (Congolais) sur une superficie de quelques 1.733.000 km² - plus de trois fois la France – est devenu en 1910 l’Afrique Equatoriale française. CONGRÈS DE TOURS : Le XVIIIe Congrès de la Section française de l’International ouvrière qui se déroule à Tours du 25 au 30 décembre 1920 marque la fin de l’unité socialiste en France : désormais la gauche est durablement divisée en deux principaux courants, l’un communiste, l’autre socialiste, qui, tout en partageant un idéal commun, entretiennent une relation conflictuelle entrecoupée de moments d’alliances ne dissipant pas une méfiance réciproque. A l’origine de ce bouleversement, la guerre et la révolution russe. La SFIO a été particulièrement marquée par les conséquences sanglantes et destructrices du premier conflit mondial. En outre, elle a perdu son grand leader, Jean Jaurès, assassiné le 31 juillet 1914. Enfin, elle sort de cette épreuve profondément divisée : après avoir été pacifiste, la SFIO a participé aux gouvernements d’union nationale de 1915 à 1917, cependant qu’en son sein l’opposition à la guerre et à l’Union sacrée croissait avec l’afflux de jeunes anciens combattants radicalisés. La « grande lueur » qui s’est levée a l’est en octobre 1917 représente alors un espoir de changement total attirant les quelques François à la porte de Moscou, le capitaine Jacques Sadoul ou le normalien catholique Pierre Pascal qui, en tant que Groupe communiste français, participent au Ier Congrès de l4internationale communiste en mars 1919, ou bien, en France, l’éphémère parti communiste ultra-gauche et anarchiste de Péricat, les syndicalistes révolutionnaires de la Vie ouvrière, le comité de la IIIe Internationale et les intellectuels de Clarté. Ces militants, qui réintègrent à leur façon les proclamations bolcheviques, restent très minoritaires. Tout bascule en 1919-1920 à la suite de deux échecs, celui de la grande vague d’agitation sociale qui déferle sur le pays et celui de la SFIO aux élections législatives de l’automne 1919. Le bolchevisme devient attrayant parce qu’il semble victorieux, en particulier pour la masse des nouveaux venus au parti socialiste. Lui-même cherche a organiser ses soutiens en France, oscillant entre deux démarches, chacune tributaire de sa stratégie de révolution mondiale et de consolidation de l’Etat soviétique, l’une plus souple, l’autre plus restrictive. En février 1920, le Congrès de Strasbourg de la SFIO a rejeté l’adhésion à l’Internationale communiste mais adopté la proposition des « reconstructeurs » qui prévoyait la sortie de la IIe Internationale et la prise de contacts avec Moscou. Marcel Cachin et Louis-Oscar Frossard s’y rendent et s’y engagent dans des tractations à propos des vingt et une conditions d’admission au Komintern. Celles-ci imposent notamment le centralisme démocratique comme principe d’organisation, une forte centralisation, une discipline de fer, une rupture complète avec le réformisme et l’épuration de leurs représentants. Bien qu’elles leur paraissent dures, Cachin* et Frossard* en acceptent les « idées maîtresses et directrices », estimant possibles des compromis. La SFIO entame un large et vaste débat durant tout le second semestre 1920. Trois principales tendances s’affrontent. Les « reconstructeurs », qui bénéficient du soutien des paysans au sein des fédérations, avec Cachin*, Frossard*, mais aussi quantité de jeunes adhérents, tel Paul Vaillant-couturier*, et des militants ayant d’autres sensibilités, à l’instar de Boris Souvarine, veulent rejoindre le mouvement communiste ; les « résistants », Léon Blum en tête, s’y opposent énergiquement ; enfin autour de Jean Longuet, petit-fils de Marx et de Paul Faure, se rassemblent les partisans d’ « une adhésion sous réserves ». Lorsque le Congrès s’ouvre à Tours, l’essentiel des jeux est fait : la majorité des 285 députés est favorable à l’Internationale communiste. Les discussions prennent néanmoins un caractère intense et parfois dramatique. Tous les grands ténors montent à la tribune pour défendre leurs positions, en particulier Léon Blum. Celui-ci dénonce la doctrine et les pratiques des bolchevicks russes et il se présente comme un révolutionnaire, attaché à défendre « la vieille maison » S.F.I.O. Deux coups de théâtre se produisent au cours de ces journées. Le 28 décembre au matin, la lecture du télégramme dit de Zinoviev, en fait signé par le comité exécutif de l’IC, critique vertement la motion Monguet-Faure et qualifie ce groupe d’agents déterminés de l’influence bourgeoise sur le prolétariat ». L’émotion est à son comble et ce texte dissipe les dernières illusions de ce courant, malgré les explications embarrassées et les garanties que donnera Frossard. Le même jour, la révolutionnaire allemande Clara Zetkin, envoyée au Komintern, interdite de séjour en France, fait une apparition tonitruante à la tribune du congrès pour implorer ses camarades français d’adhérer complètement à l’Internationale de Lénine. Les votes sanctionnent les rapports de forces ; plus de 67% des mandats choisissent l’affiliation. Parmi les délégués, se sont plutôt les ouvriers et les instituteurs qui ont effectué ce choix, les fidèles de la SFIO se recrutant davantage chez les journalistes, les professions libérales et surtout les élus. Le 29 décembre 1920, à 2h30 du matin, la scission est consommée. Le Congrès de Tours n’est cependant pas ce moment fondateur, clair et net, séparant révolutionnaires et réformistes, que la mythologie communiste a voulu inventer bien après son déroulement. Du point de vue de l’Internationale communiste, tout reste a faire pour transformer cette majorité composite et hétérogène qui constitue sa section française en un véritable parti communiste. CONSTANS (Jean-Antoine-Ernest), 1833-1913 : Professeur, avocat et homme politique. Né à Béziers (Hérault) le 3 mai 1833, Ernest Constans est d'abord professeur agrégé de droit à la faculté de Toulouse, avocat puis entrepreneur avant d'être adjoint au maire de Toulouse en 1873. Elu député de la Haute-Garonne (circonscription de Toulouse) de 1876 à 1889, siégeant au centre gauche et, réélu en octobre 1877, il est appelé comme ministre de l'Intérieur et des Cultes dans les gouvernement Freycinet et Ferry (17 mai 1880 au 14 novembre 1881). Il mène alors une lutte contre les congrégations, afin, dans un premier temps, d’arracher aux Jésuites « l’âme de la jeunesse française » et, dans un second temps, de créer un enseignement primaire laïque. Il est ministre plénipotentiaire en Chine en 1886 puis, du 16 novembre 1887 à avril 1888, le premier Gouverneur général de l'Indochine, placée sous protectorat français. Il redevient le 22 février 1889, ministre de l'Intérieur dans le gouvernement de Pierre Tirard qui cherchait un républicain qui soit un homme à poigne pour contre-carrer les entreprises du général Boulanger. Constans l'est, et il est en outre franc-maçon ce qui, dans le contexte d'alors, était également une recommandation. Il se signale par sa répression du boulangisme, ordonnant la dissolution de la Ligue des patriotes (3 avril 1889), interdit les candidatures multiples et rétablit le scrutin d’arrondissement. Il fait également courir la rumeur de l'arrestation imminente du général Boulanger et de son jugement en Haute Cour pour « attentat contre la sûreté de l'État » ce qui amènera l'intéressé à s'enfuir en Belgique, non sans se discréditer auprès de l'opinion. Constans démissionne le 1er mars 1890, entraînant avec lui la chute du gouvernement. Il retrouve son portefeuille dans le gouvernement Freycinet le 17 mars 1890. Constans est bientôt confronté a un noyveau problème. Depuis la loi d’amnistie de 1879, la mouvement ouvrier renaît et se manifeste par des grèves violentes à Anzin en 1884 et decazeville en 1886. La célébration du 1er mai donne lieu à des heurts violents avec la police et, en 1891, le ministre de l’Intérieur répond à l’agitation socialiste au prix d’une effusion de sang. Bien que violemment pris à partie par les députés boulangistes et par une partie de la presse, il reste en fonctions jusqu'à la chute du gouvernement le 26 février 1892. Entre-temps, il avait été élu sénateur de la Haute-Garonne le 29 décembre 1889. Le 27 décembre 1898, il est nommé ambassadeur à Constantinople , fonction qu'il occupe jusqu'en juin 1909. Il y mène une diplomatie personnelle largement indépendante de la politique étrangère française, dont on a des raisons de penser qu'elle est avant tout guidée par l'appât du gain, ce qui expliquerait notamment son activisme dans le développement du projet de chemin de fer reliant Constantinople à Bagdad. Il y restera dix ans, conseillant le sultan Abd-Ul-Hamid jusqu’à l’arrivée ua pouvoir des « Jeunes Turcs » qui motive son rappel. Elu sénateur de la Haute-Garonne en 1889, il décède à le ? CONSTANS (Jean-Louis, dit Emile), 1861-1950 : Bâtonnier et homme politique. Né à Bordeaux (Gironde) le 20 juillet 1861, Emile Constant devient bâtonnier en 1892 conseiller municipal de Bazos et conseiller général de la Gironde, puis député de l’union démocratique en 1893 et ce, jusqu’en 1919. Il déploie alors une intense activité à la Chambre qui lui permet d’entrer du 2 mars au 26 juin 1911 dans le gouvernement Monis comme sous-secrétaire d’état à la présidence du Conseil, à l’Intérieur et aux Cultes. Il meurt à Paris le 4 décembre 1950. CONSTANTIN-WEYER (Maurice), 1881-1968 : Ecrivain. Né à Bourbonne-les-Bains en 1881, Maurice Constantin-Weyer fait ses études en France puis en 1904, il part pour le Canada où il devient fermier, cow-boy, bûcheron, trappeur, marchand de chevaux et de fourrures, journaliste. Rappelé en 1914, il se distingue en Champagne, à Verdun, en Macédoine et revient de la guerre avec de nombreuses blessures. Il fait du journalisme en province à Nevers, et à Poitiers. Sous le titre général d’Epopée canadienne, il a publié Vers l’Ouest (1922) ; la Bourrasque (1925) ; Manitoba (1924) ; Cinq éclats de silex (1927) ; Cavelier de la Salle (1927) ; Un Homme se penche sur son passé (1928), ouvrage qui lui vaut le prix Goncourt ; Clairière. Récits du Canada, 1929 ; Morvan, 1929 ; Shakespeare, 1929 ; P.C. de compagnie, 1930 ; La Salamandre, 1930 ; La Vie du général Yusuf, 1930 ; Champlain, 1931 ; Du sang sur la neige, 1931 ; Napoléon, 1931 ; Drapeau rouge, 1931 ; L’Âme du vin, 1932 ; Les Secrets d’une maîtresse de maison, 1932 ; Source de joie, 1932 ; Mon gai royaume de Provence, 1933 ;Une corde sur l’abîme, 1933 ; Vichy ville du charme, 1933 ; Un sourire dans la tempête, 1934 ; Le Voyage de Leif L’Heureux, 1934 ; La Croisière du jour sans fin, 1935 ; Le Flâneur sous la tente, 1935 ; La Demoiselle de la mort, 1936 ; La Loi du nord ou Telle qu’elle était en son vivant, 1936 ; Aime une ombre..., 1937 ; La Marchande de mort, 1938 ; La Nuit de Magdalena, 1938 ; Les Tombes-d’amour, 1938 ; Autour de l’épopée canadienne, 1940. Il décèdera le 18 octobre 1964 à Vichy. CONTENEAU (Georges), 1877-19 : Orientaliste. Né à Laon en 1877, docteur en médecine, docteur ès lettres, conservateur des musées nationaux, Georges Conteneau a dirigé des fouilles à Saïda entre 1914 et 1920. Ses principales publications sont : la Déesse nue babylonienne (1914) ; Contribution à l’histoire économique d’Umma (1915) ; Trente Tablettes cappadociennes (1919) ; Tablettes capadociennes du musée du Louvre (1920) ; la Civilisation assyro-babylonienne (1922) ; la Glyptique syro-hittite (1922) ; la Civilisaton phénicienne (1926) ; Manuel d’archéologie orientale (1927) CONSTITUTION DE 1875 : Les trois lois constitutionnelles qui forment ce que l’on appelle la « Constitution » de la Troisième République, sont votées en février et juillet 1875 par l’Assemblée nationale. Emle comprend : la loi relative à l’organisation du Sénat ; la loi relative à l’organisation des pouvoirs publics et la loi sur les rapports des pouvoirs publics. La constitution ne forme pas un tout et n’est précédée par aucun préambule. Il n’y a pas d’affirmation explicite de la République ni d’énoncé des principes, qui n’auraient pu être que républicains sachant que les membres de l’Assemblée sont majoritairement royalistes. Le pouvoir législatif appartient au Parlement formé de la Chambre des députés et du Sénat ; les noms mêmes des assemblées rappellent la Restauration et l’Empire, non la République. Les 615 députés, âgés de 25 ans au moins, sont élus pour 4 ans ; la candidature multiple est maintenue ; la loi électorale de novembre 1875 fixe leur désignation au scrutin uninominal par les citoyens mâles et majeurs (21 ans) à l’exception des militaires, des faillis, des criminels ; le vote est falcutatif, égalitaire et secret (mais l’enveloppe et l’isoloir ne seront introduits qu’en 1912). Parmi les 300 sénateurs, âgés au minimum de 40 ans, 75 sont inamovibles, désignés par l’Assemblée nationale, puis par cooptation (jusqu’à la révision de 1884). Les 225 sénateurs sont désignés par un collège départemental composé des députés, conseillers généraux et d’arrondissement du département, et de délégués municipaux à raison de un délégué par commune. Ils sont élus pour 9 ans et renouvelés par tiers tous les trois ans. Députés et sénateurs ont des pouvoirs communs et ces pouvoirs particuliers. Les uns et les autres bénéficient de l’immunité, jugent de la validation des lois (proposition de loi), sauf en matière financière, où l’initiative appartient aux députés. Ils procèdent, réunis en Assemblée Nationale, à la révision de la Constitution, votée à la majorité absolue, à l’élection du Président de la République, à la ratification des traités. Les sénateurs donnent en outre leur accord pour la dissolution de la Chambre (sans que le Sénat puisse lui- même être dissout) et peuvent être constitués en Haute Cour pour juger les atteintes à la sûreté de l’Etat. Le pouvoir exécutif appartient au chef de l’Etat, qui prend le nom de Président de la République (amendement Wallon, voté en janvier 1875 par 353 voix contre 352). Elu pour sept ans à la majorité absolue par l’Assemblée Nationale et rééligible, il a l’initiative, par l’intermédiaire de ses ministres (projets de lois), promulgue les lois dans les trois mois, peut demander aux Chambres par un message une nouvelle délibération, possède le droit de grâce (le droit « régalien »), dispose de la force armée, nomme à tous les emplois civils et militaires, dissout la Chambre sur l’avis conforme du Sénat, et fait dans ce cas procéder dans les trois mois à de nouvelles élections, négocie les traités, bénéficie de l’irresponsabilité ; aussi tous ses actes doivent-ils être contresignés par des ministres solidairement responsables devant les Chambres de la politique générale du gouvernement. Le régime est parlementaire, mais les pouvoirs de l’exécutif sont considérables. La Constitution est l’œuvre de notables qui ont chercher a consolider l’ordre politique et social et ébranlé par la Commune. Appuyé sur un Sénat que son mode d’élection et son âge ne peuvent que rendre conservateur, le Président de la République a les moyens, s’il le veut, d’être un roi sans couronne. Mais les députés, plus jeunes, élus directement par le suffrage universel, disposant des finances, ne doivent-ils pas se considérer comme les véritables dépositaires de la souveraineté populaire. COPEAU (Jacques), 1879-1949 : Écrivain, et comédien. Né à Paris le 4 février 1879, Jacques Copeau est de bonne heure orphelin. Il fait de bonnes études secondaires, puis essaie divers métires, et est enfin à même de se consacrer à la critique théâtrale. Dès le début du XXe siècle, il collabore à L’Ermitage, et surtout à la Grande Revue, où il étrille sans pitié les idoles du jour : Bataille, Berstein, etc. Devenu l‘ami de Claudel, de Gide et de Schlumberger, il fonde avec eux la Nouvelle Revue française dont il devient le secrétaire général en 1909. En collaboration avec Jacques Croué, il écrit, en 1911, un drame tiré des Frères Karamazov qui remporte un grand succès. Dns ans plus tard, en 1913, soutenu par Gaston Gallimard, il crée le théâtre du Vieux-Colombier, à la seule fin d’entretenir des chefs-doeuvre, de combattre le mercantilisme, et d’écraser le cabotinage sous toutes ses formes. Avec quelques acteurs obscurs, Copeau y fera triompher l’esprit d’équipe. – en réduisant le décor à quelques trouvailles suggestives. Il y joue Thomas Heywood, comme il y jouera plus tard Claudel, Gide, Sclumberger, Romains, Ghéon, Mazaud, Vildrac, Roger Martin du Gard – sans oublier Shakespeare, Molière et Mérimée. Ce théâtre nouveau répond à un besoin profond. Aussi obtient-il d’emblée l’audience du public. Pendant la Première Guerre mondiale, Copeau effectuera, à le demande de Clemenceau alors président du du Conseil, une tournée en Amérique en 1917. Après la guerre, il fonde l’Ecole dramatique du Vieux-Colombier. Il y monte de nouveaux spectacles notamment sa Maison natale (1924). Par malheur, des difficultés matérielles sans cesse accrues l’obligent à fermer son théâtre la même année. Abandonnant alors Paris, Copeau qui est d’origine bourguignonne, se retire en Bourgogne avec son école. De ses élèves, il en fait des comédiens de campagne qu’il baptise les « Copiaus » : troupe animée d’un esprit médiéval qui longtemps parcourt la France, et même la Suisse et la Belgique. Tant en France qu’à l’étranger, Copeau prend, en outre, l’habitude de lire certains textes qu’il tient pour les plus beaux de la littérature universelle. A partir de mai 1940, il est administrateur de la Comédie française mais ne peut rien faire de valable. Outre la Maison natale, citée plus haut, Copeau nous a laissé Critiques d’un autre temps (1924), Souvenirs du Vieux-Colombier (1931). Jacques Copeau reste avant tout un animateur : l’homme qui, envers et contre tout a donné à la scène française la magistrale leçon dont elle avait besoin. Jusqu’à son dernier jour, il ne cessera d’entretenir ce u’il appelait « la dévotion au Théâtre ». Il décèdera à Pernand Vergelesses (Côtes-d’Or) le 20 octobre 1949. BRASSILACH (R.) : Animateurs de théâtre, 1936. COPIN-ALBANCELLI (Paul-Joseph Copin, dit), 1851-1939 : Journaliste et homme de lettres. Né à Vervins (Aisne) le 23 février 1851, ancien boulangiste et franc-maçon, Copin-Albancelli use de son expérience pour se faire l’un des plus violents dénonciateurs de la franc-maçonnerie qu’il associe, comme plusieurs antidreyfusards de l’époque, à des complots juifs. Au tournant du XXe siècle, il fonde les journaux antimaçonniques et antisémites : À bas les tyrans (avec Louis Dasté), et La Bastille; il également animé la Ligue française anti-maçonnique et la société d'édition La Renaissance française. Copin-Albancelli est également l’un des premiers militants nationalistes et royalistes de l'Action française. Il collabore à la Revue d’Action française qui devient L'Action française sous la direction de Charles Maurras. Parallèlement à ces activités, Copin-Albancelli collabore également à la Revue Internationale des Sociétés Secrètes de Mgr Ernest Jouin, célèbre contempteur de la franc-maçonnerie et dénonciateur de supposées conspirations liées à des forces occultes, il était aussi membre du Mouvement de défense des traditions nationales (ou Entente nationale), regroupant plusieurs royalistes de l'Action Française ou indépendants. Craignant la ruine de l’Occident chrétien au profit d’un « Nouvel Ordre Mondial » (dont les ficelles seraient tirées par les juifs et les franc-maçons), Copin-Albancelli dénoncera jusqu’à sa mort les divers complots judéo-maçonniques qui interfèrent, selon, lui dans la politique mondiale. Croyant que diverses organisations secrètes tentent de constituer un « pouvoir mondialiste », Copin-Albancelli exploite un mythe qu’on retrouve à la même époque dans le Protocole des sages de Sion. Ce faux fut largement instrumentalisé afin de justifier le type de conspiration dont Copin-Albancelli se fait le l'infatigble dénonciateur. Parmi ses nombreux ouvrages, citons : Le Boulangisme du peuple (1891) ; La Franc-Maçonnerie et la question religieuse (1892) ; La Question franc-maçonnique devant les électeurs (1893) ; Comment je suis entré dans la Franc-Maçonnerie et comment j'en suis sorti (1895) ; Le Drame maçonnique. Le Pouvoir occulte contre la France (1908) ; La Question des boys-scouts ou éclaireurs en France (1913) ; Les Éclaireurs de France (1914) ; La Guerre occulte. Les Sociétés secrètes contre des nations (1925). En 1932, il annonce la publication d’un dernier ouvrage qui devait être en quelque sorte son testament politiqie : Le Grand secret de la franc-maçonnerie. Mais l’ouvrage ne voit jamais le jour et il décède à Saint-Cloud (Seine-et-Oise) le 22 mars 1939. COPPÉE (François-Édouard-Joachim), 1842-1908 : Poète, dramaturge, romancier. Né à Paris, le 26 janvier 1842, François Coppée est d’abord un modeste employé au ministère de la Guerre où son père occupe un emploi obscur. Il attend de se faire un nom en tant qu'auteur dramatique ou poète. Inspiré des Parnassiens, son premier recueil, Le Reliquaire, en 1866, ne retient pas l'attention du public. Délaissant ces pères, il adopte un style plus simple. Devenant le poète des réalités quotidiennes, il se révèle avec Les Intimités en 1868, et surtout avec Les Humbles en 1872, recueil dépeignant avec simplicité l'humanité des petites gens. Mais le succès, François Coppée ne le trouve véritablement qu'avec ses pièces de théâtre. Au théâtre, il donne à l'Odéon Le Passant en 1869 et suivi, après la guerre de 1870, de nombreux drames et comédies : Severo Torelli en 1883, Les Jacobites (1885), au Théâtre-Français Le Luthier de Crémone (1877) et Pour la Couronne en 1895 lui confirment l'appui du public. Il continue d’autre part à publier des recueils de vers Le Cahier rouge (1873), Olivier (1876), Récits et élégies (1878), L’Arrière-saison (1887), Les Paroles sincères (1891). Archiviste de la Comédie Française depuis 1878, Coppée démissionne après son élection à l'Académie française qui eut lieu le 21 février 1884. Antidreyfusard convaincu, il entre en 1898 dans la politique militante à l'occasion du procès célèbre et il défend par la plume et par la parole, avec une généreuse ardeur, les institutions militaires, religieuses et sociales qui sont attaquées avec violence. il est à l'initiative de la Ligue de la patrie française, association antisémite avec Barrès et Jules Lemaître. Evincé par ce dernier de son poste de président, il se retire et ses dernières années sont attristées par une longue et douloureuse maladie à laquelle il succombe le 23 mai 1908 à Paris. SCHOEN (H.) : François Coppée, l’homme et le poète, 1909. LE MEUR (Léon) : La Vie et l’œuvre de F. Coppée, 1932. COQUELIN (Constant, dit Coquelin aîné), 1841-1909 : Comédien. Constant Coquelin, dit Coquelin aîné, était un acteur français, né le 25 janvier 1841 à Boulogne-sur-Mer, surnommé ainsi pour le distinguer de son frère Ernest, dit Coquelin cadet, il était un des acteurs comiques les plus notoires de son temps. En 1860, après avoir reçu le premier prix de comédie au Conservatoire, il débuta à la Comédie-Française dans des rôles de valets du répertoire classique. Il en devint sociétaire en 1864. En vingt-cinq années, il y créa plus de quarante rôles. En 1886, il quitta la Comédie-Française et pendant plusieurs années donna des représentations en Europe et en Amérique. Il a ensuite été engagé dans divers théâtres parisiens. En 1891, il revient brièvement à la Comédie-Française, comme pensionnaire, où il créa Thermidor de Victorien Sardou, pièce interdite dès la troisième représentation. En 1895, il entra au théâtre de la Renaissance. L'année suivante, il prit la direction du théâtre de la Porte Saint-Martin avec son fils Jean, jusqu'en 1901 où il la laissa à son fils seul. En 1897, il y créa le rôle de Cyrano de Bergerac, ce qui lui assura une gloire éternelle. En 1900, il est élu à la tête de l'Association des Artistes Dramatiques. Il est également l'auteur de nombreux ouvrages sur le théâtre. Il est décédé d'une crise cardiaque dans la «Maison des Comédiens» de Pont-aux-Dames, une maison de retraite en 1909 à Couilly-Saint-Germain. CORBIN (Eugène), 1867-1952 : Directeur des Magasins Réunis, commanditaire. Fils d'Antoine Corbin (1835-1901), fondateur des Magasins Réunis, Eugène Corbin partage la direction de l'entreprise avec son beau-frère Charles Masson (1858-1929). Attiré par la modernité, il se passionne pour l'Ecole de Nancy dont il devient à Nancy l'un des principaux mécènes. Pour l'agrandissement des Magasins Réunis en 1906, Corbin fait appel à l'architecte Lucien Weissenburger -déjà sollicité de nombreuses fois par la famille Corbin- et y associe Louis Majorelle, Jacques Gruber, Victor Prouvé, Alfred Finot, Jules Cayette et Henri Suhner. Proche des préoccupations d'enseignement et de diffusion de l'Ecole de Nancy, Eugène Corbin participe à la création de plusieurs concours organisés par l'Ecole de Nancy et fonde en 1909 la revue Art et Industrie avec la collaboration d'Emile Goutière-Vernolle. Collectionneur de l'Ecole de Nancy, il fait une importante donation à la ville de Nancy en 1935 comprenant plus de 600 pièces. Cette collection d'abord présentée dans les galeries Poirel, est transférée en 1964 rue Sergent Blandan : l'actuel Musée de l'Ecole de Nancy et ancienne propriété d'Eugène Corbin. BOUTON-CORBIN, Eugène Corbin. Nancy, AAMEN, 2003. CORDIER (Augustin) : 1848-1902 : Journaliste. Né à Villette (Savoie) le 25 juillet 1848, à vingt ans, Augustin Cordier entre dans l’Université et professe la philosophie à Beaune, La-Roche-sur-Yon et Cahors. Pour défendre ses idées, il se fait journaliste. En 1879, il prend la direction du Courrier des Alpes, de Chambéry. Le 10 février 1882, il est à Bordeaux lorsque naît Le Nouvelliste qu’il dirige de longues années. Il résume par cet aphorisme le but de son action : « Pour que la France vive, il faut que la République meure ! ». Il décède à Laroque (Gironde) le 25 mai 1902. CORPECHOT (Lucien), 1871-1944 : Journaliste et écrivain. Né en 1871, Lucien Corpechot est le gendre du général Bonnal, qui fut directeur de l’Ecole de guerre. Sous nom ou le pseudonyme de Curtius, il collabore a de nombreux journaux conservateurs et a été rédacteur en chef du Gaulois, du Figaro et de l’Echo de Paris. Il songe, autour de 1932, à lancer un quotidien, genre Gaulois, avec Pierre Gaxotte, mais y renonce. Ses Souvenirs de journaliste, d’abord publiés dans La Revue universelle, contiennent de précieux renseignements sur la société française et le monde de la presse de la fin du XIXème siècle et de la première partie du XXème siècle. Il a signé, en outre, plusieurs ouvrages, notamment : René Quinton (1911) ; Les Jardins de l’intelligence (1912) ; Souvenirs de la reine Amélie de Portugal (1914) ; Lettres sur la jeune Italie et L’Esprit de la France (1924). Il avait été très lié avec Maurice Barrès, Paul Bourget et Charles Maurras. CORPORATISME : L’idée de corporatisme est confuse parce qu’il y a contradiction entre les deux principaux usages que l’on fait du mot. Selon la doctrine corporatiste, qui donne son premier sens au mot, les intérêts des groupes doivent être subordonnés au bien commun. Dans son usage le plus courant, le mot corporatisme désigne pluôt l’attitude d’artisans, de professionnels ou d’ouvriers, regroupés tantôt dans un syndicat, tantôt dans une corporation, qui font passer leurs intérêts avant le souci du bien commun. Que dit la doctrine? :«Abandonnant tout ensemble le principe de l’individu isolé devant l’État et la pratique des coalitions ouvrières et patronales dressées les unes contre les autres, il [l’ordre nouveau corporatiste] institue des groupements comprenant tous les membres d’un même métier : patrons, techniciens, ouvriers. Le centre du groupement n’est donc plus la classe sociale, patronale ou ouvrière, mais l’intérêt commun de tous ceux qui participent à une même entreprise. » Tel est le corporatisme. On a dit qu’il était un socialisme pour les bourgeois. Ses fondateurs tentèrent de combiner les avantages du capitalisme avec ceux du socialisme. Le corporatisme a la forme extérieure du capitalisme, il admet la propriété et la gestion privée, mais il confie à l’État, comme le fait le socialisme, le contrôle de la circulation des biens matériels. Doctrine prônant une "troisième voie" entre le capitalisme sauvage et le socialisme qui exalte la lutte des classes, le corporatisme cherche une solution à la question sociale, sérieuse dès les années 1870. Tourné vers le passé et la nation, il la voit dans l'organisation des professions, dans la modernisation des corporations d'Ancien Régime, symboles d'une supposée harmonie ancestrale brisée par la Révolution française. La doctrine, qui connaît de multiples tendances, trouve un écho dans les encycliques Rerum novarum (1891) de Léon XIII et Quadragesimo Anno (1931) de Pie XI (Mouvement chrétien-social). Le corporatisme est présent en France dès la fin du XIXe s. dans le courant catholique social et le projet d'"ordre social chrétien". KAPLAN (S.-L.) : La France, malade du corporatisme ? XVIIIe siècle-XXe siècle, Paris, Belin, 2004. CORTOT (Alfred-Denis), 1877-1962 : Musicien. Né à Nyon (Suisse) le 25 septembre 1877, Alfred-Denis Cortot est français par son père. Après débutées en famille, il entre au Conservatoire de Paris dans la classe de piano de Diemer (1er prix en 1896). L’année suivante, il est engagé comme répétiteur de chœurs à Bayreuth, et commence à travailler la direction d’orchestre. Bientôt, il entreprend d’importantes tournées internationales, et dirige à Paris des pags, encore inconnues en France, de Wagner ; e, 1902 Le Crépuscule des Dieux. Il est à l’origine de l’Orchestre symphonique de Paris, puis, plus tard, de la Société de usique de chambre de la société des concerts du conservatoire. Il est, également, membre de l’incomparable trio composé par lui-même, de Jacques Thibaut (violon) et Pablon Casals (violoncelle). Il joue un rôle éminent dans divers mouvements en faveur de la profession musicale et pour la diffusion de la musique française, et est pendant quelques années attaché, puis chef du cabinet du sous-secrétaire d’Etat aux Beaux-Arts. Professeur au conservatoire (1907-1919), il se retire pour fonder l’Ecole normale de musique en 1918. Il s’était constitué une remarquable bibliothèque d’ouvrages musicaux rares, dont il publie le catalogue sous le titre : Bibliothèque d’Alfred Cortot. Il a, d’autre part, publié des ouvrages musicographiques : La Musique française au piano, 3 volumes) ; Cours d’interprétation (1934) et pédagogiques : Principes rationnels de la technique pianistique (1928), et enfin ses éditions de travail des œuvres de chopin, Schumann et Liszt. Il décèdera à Lausanne le 15 juin 1962. COT (Pierre), 1895-1977 : Homme politique. Pierre Cot reste le ministre de l’Air. On lui doit en effet la réorganisation et la modernisation de l’armée de l’air, la nationalistaion de l’industrie aérospatiale et la création de l’aviation populaire. Né à Grenoble (Isère) le 20 décembre 1895, Cot est issu d’une famille très catholique et milite pendant sa jeunesse dans les organisations catholiques. Il s’engage en 1914 et fait la guerre jusqu’en 1918. Après la conflit, il achève ses études de droit et est reçu premier à l’agrégation de droit en 1922. Remarqué par Raymond Poincaré, il est candidat aux législatives de 1924 dans les Hautes-Alpes sous une étiquette de droite. Vaincu, il amorce alors une évolution politique qui s'accentuera avec le temps : il est élu, en 1928, député de Savoie sous l'étiquette radicale, il devient membre des commissions des Affaires étrangères et de l’Aéronautique et intervient largement dans ces deux domaines. Actif au Groupement universitaire pour la Société des nations, Pierre Cot, dès son entrée à la Chambre des députés, se montre comme le spécialiste des problèmes de désarmement et des questions internationales. Sa carrière ministérielle commence, quant à elle, en décembre 1932 lorsqu'il devint sous-secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil et aux Affaires étrangères du 18 décembre 1932 au 30 janvier 1933 dans le gouvernement Paul-Boncour. En quelques semaines, il se familiarise avec la vie gouvernementale et, dans le gouvernement suivant, du 31 janvier 1933 au 8 février 1934, Daladier lui confie le portefeuille de l'Air, nouveau ministère promis à un riche avenir. Passant le brevet de pilote, il se lance avec fougue dans la promotion de l'aviation et réorganise l'aéronautique civile en créant la compagnie nationale Air France et l’École de l’air à Salon-de-Provence. En proposant la création d’une compagnie internationale de transports aériens, il déchaîne des réactions indignées des feuilles de droite Forcé d'abandonner ce portefeuille, il le retrouvera du 4 juin 1936 au 17 janvier 1938, dans le gouvernement de Léon Blum. Il se consacre alors principalement à la nationalisation des industries aéronautiques. Il permet à son chef de cabinet Jean Moulin de faire expédier vers l’Espagne, en lutte contre la rébellion du général Franco, du matériel militaire. Ministre du Commerce (dans le gouvernement Chautemps, puis dans le second gouvernement Blum), de janvier à avril 1938, Pierre Cot poursuit son combat mais refuse de sièger dans le cabinet Daladier d’avril 1938, dans lequel il voit un gouvernement de rupture avec le Front populaire. Profondément touché par la défaite française de mai 1940, il essaiera durant sa vie entière d'en comprendre les raisons et de prouver que l'aviation n'est pas le principal artisan de cette défaite. Pierre Cot gagne Londres, voit Charles de Gaulle (le 17 juin 1940) puis se rend aux États Unis. Pétain le fait déchoir de la nationalité française, il est jugé par contumace au procès de Riom. Après la guerre, il poursuit une carrière politique comme « progressiste », proche du parti communiste. JANSEN (S.) : Pierre Cot - Un antifasciste radical, Paris, Fayard, 2002. COTY (René), 1882-1962 : Bâtonnier et homme politique. COTY (Spoturno-Joseph, dit François), 1874-1934 : Parfumeur. Surnommé le « Napoléon de la Parfumerie », Joseph Spoturno est né à Ajaccio (Corse), en 1875. En 1900, il se dirige vers Paris, change de nom et ouvre une maison de parfum. Pandant la Première Guerre mondiale, c’est grâce au marché américain qu’il fait fortune. Il exporte dans le monde entier et lance avant tout la publicité et le marketing. Considéré également comme un mécène, il est prêt à tout subventionner comme en 1919 où il offre 100.000 francs à l’Action française. Enfin, il se landa dans la politique après la guerre en se faisant élire sénateur au cours d’une élction partielle en Corse en juillet 1923. Sur ses manœuvres financières, Coty se voit annuler son élection. Après avoir acheté le Figaro en 1922 qu’il transforme en 1927 pour en faire un journal en grand tirage, il rachète, en janvier 1928 Le Gaulois qu’il fusionne avec le Figaro. Il lance L’Ami du Peuple en mai 1928 qui revendique ses idées pro-fascistes, est un véritable succès de diffusion, tirant à un million d’exemplaires. Prenant comme exemple Mussolini, Coty inquiète aussi bien la droite que la gauche qui se méfient de lui. Coty ne parvient pas à obtenir le rôle de premier plan qu’il aurait souhaité. Maire d’Ajaccio à partir de 1931, il crée en 1932 la Ligue nationale des Jeunesses françaises. Présentant des candidats aux élections législatives de 1932, ceux-ci ne rassemblent pas plus de 20.000 voix. Ses candidats qui s’étaient opposés à ceux de Tardieu, certains périodiques comme La Liberté commence une campagne de dnigrement contre Coty. Les conséquences sont dramatiques pour lui : ses actions s’effondrent et le Figaro ne veNd plus par jour que 10.000 exemplaires. En 1933, quand Hitler parvient à la chancèlerie, Coty s’en félicite et crée La Solidarité française, nouvelle ligue d’extême-droite. Cette dernière rassemble 25.000 adhérants et participant à l’émeute du 6 février 1934. Coty décèdera le 25 juillet 1934 à Louveciennes. BARILLÉ (E.) : Coty. Parfumeur et visionnaire, Paris, Assouline, 1995. SARRAN (P. de) : François Coty, empereur d’Artigny, Paris, Editions Nouvelle République, 1990. COUPAT (Pierre), 1860 - ?: Ouvrier et homme politique. Né à Saint-Étienne (Loire) le 17 juin 1860, Pierre Coupat est ouvrier métallurgiste syndiqué depuis l’âge de dix-huit ans. Il est nommé vice-président du Conseil supérieur du travail en 1910 après avoir grimpé tous les échelons syndicaux. Ami personnel de Millerand, il entre dans son premier cabinet du 20 janvier au 180 février 1920 et du 19 février 1920 au 15 janvier 1921 comme sous-secrétaire d’Etat à l’Instruction publique et aux Beaux-Arts, chargé de l’Enseignement technique. COURRIER DE L’ALLIER (Le) : Journal fondé en 1843 à Montluçon, puisb transféré à Moulins en 1875. Devenu quotidien du soir en 1873, il est tour à tour monarchiste, bonapartiste et libéral modéré après le Ralliement. Il disparaît au début de la Seconde Guerre mondiale. COURRIER DE L’AUDE (Le) : Journal monarchiste fondé en 1855, ce quotidien paraît d’abord à Carcassonne puis émigre à Narbonne dans les années 1920, et ne paraît que toutes les semaines, avant de disparaître définitivement quelques années avant la Seconde Guerre mondiale. Henri Amigues et Hippolyte de Bordas en étaient les principaux collaborateurs. COURRIER DU MIDI (Le) : Journal hebdomadaire catholique et royaliste, fondé en 1870 et disparu en 1939. Son principal collabrateur était Joseph Amic. COURRIER ROYAL : Journal mensuel fondé en décembre 1934 sous la direction du comte de Paris, fils du duc de Guise, prétendant au trône de France. Cette publication avait pour but de rallier à la cause monarchique les catholiques, auxquels le Vatican avait interdit de lire la journal de Daudet et de Maurras, et un public populaire que certaines campagnes de l’Action française avaient pu indisposer. Il disparaît au moment de la Seconde Guerre mondiale. COURSON (Léon), 1883-1950 : Viticulteur et homme politique. Né à Noyant-de-Touraine (Indre-et-Loire) le 21 octobre 1883, Léon Courson est viticulteur en Touraine. Il est élu député en 1932 et entre dans le quatrième cabinet Chautemps comme sous-secrétaire d’Etat à l’Education nationale, chargé de l’Education physique, du 18 janvier au 12 mars 1938. Il décèdera le 16 mai 1950 à Saint-Symphorien (Indre-et-Loire). COURTELINE (Georges Moinaux, dit Georges), 1858-1929 : Auteur dramatique. Georges Courteline, de son vrai nom Georges Moinaux, naît à Tours le 25 juin 1858. Il est le fils de Jules Moinaux, auteur dramatique, qui lui déconseille d’embrasser la carrière littéraire. Jusqu’à 1870, Georges vit à Tours chez ses grands parents et à Paris avec ses parents, rue de Chabrol dans le faubourg Poissonnière. Entre 1871 et 76, il fait ses études au collège de Meaux et, en 1880, après un service militaire passé à Bar-le-Duc, il devient fonctionnaire parisien, au service des cultes du ministère de l’Intérieur (où il officie jusqu’en 1894). Il passe ainsi quatorze ans dans la fonction publique, ayant tout loisir d’observer ses collègues, avant que le succès de ses œuvres lui permette de se consacrer exclusivement à l’écriture. Ces premières expériences lui ont fourni ses principales sources d’inspiration littéraire. En 1881, adoptant le nom de Courteline, il fonde la revue poétique Paris moderne et, inspiré par Catulle Mendès, il donne notamment dans la poésie érotique. Les introductions de Mendès lui permettent de placer des chroniques régulières dans la presse. À la suite du succès de l’une d’elle, en 1884, puisant dans ses souvenirs de caserne, il écrit une série de chroniques militaires qui deviendront Les Gaietés de l’escadron en 1886. 1891 est l’année où il se lance dans le théâtre, délaissant peu à peu son activité de journaliste et de chroniqueur, qu’il abandonne définitivement en 1896. Il y présente Lidoire (1891) – il s’amuse à tourner en dérision l’armée. Messieurs les Ronds-de-Cuir (1893) s’attaque aux employés de bureau et aux bureaucrates. Boubouroche (1893), sa célèbre nouvelle qu’André Antoine lui demande d’adapter pour son Théâtre-Libre, prend pour cible la petite bourgeoisie. Les œuvres suivantes, récits ou pièces de théâtre, sont des croquis pertinents de différents milieux, saisis sur le vif, mais sans vraie méchanceté. Un client sérieux (1896) et Les Balances (1901) visent le milieu de la justice et des tribunaux. Le commissaire est bon enfant et Le gendarme est sans pitié (1899) dénoncent la bêtise et la méchanceté des forces de l’ordre. Enfin, La Peur des coups (1894), Monsieur Badin (1897) et La Paix chez soi (1903) n’ont d’autre prétention que d’amuser en montrant les ridicules du couple. Dans son œuvre, servi par un style admirable, Courteline a donné une remarquable description des travers de son époque. Pour sa peinture des caractères, il a notamment su utiliser les dialogues dont il a fait un des ressorts essentiels de son comique. Représentants d’une classe sociale déterminée – le magistrat, le sous-officier – ou types d’individu – la bourgeoise, l’avare –, ses personnages sont tous d’une médiocrité rare et remarquable. Ils apparaissent dans des intrigues inspirées du quotidien, mais d’où surgit l’absurde. Auteur apprécié en son temps pour sa verve satirique propre à dépeindre les travers de la petite bourgeoisie, Courteline est décoré de la Légion d’honneur en 1899 et élu à l’académie Goncourt en 1926.La Première Guerre mondiale le pousse à se réfugier à Tours. Ses dernières années sont gâchées par une gangrène qui l’ampute d’une jambe.Il meurt le 25 juin 1929. HAYMANN (E.) : Courteline, Paris, Flammarion, Grandes Biographies, 1990. PORTAIL (J.) : Georges Courteline, l’humoriste français, Paris, Flammarion, 1928.

COUTÉ (Gaston), 1880-1911 : Poète et chansonnier. Né à Beaugency le 23 septembre 1880, Gaston Couté est le fils d'un meunier. Il quitte l'école, qu'il s'était mis à détester à l'adolescence, avant le baccalauréat. Il devient alors commis auxiliaire à la recette générale des impôts d'Orléans, puis travaille pour un journal local, Le Progrès du Loiret. Il commence à publier ses poèmes dans des feuilles locales, et à en composer en patois. Ayant reçu quelques encouragements, il se décide, en 1898, à aller à Paris. Au Carillon, aux Noctambules, à l’Ane rouge, dans d’autres cabarets, il obtient un certain succès à réciter ses poèmes. Il collabore à la revue La Bonne chanson de Théodore Botrel. On peut dire qu'il représentait une version rurale de Jehan-Rictus, lequel l'avait aidé à ses débuts. Il écrivait également des chansons d'actualités pour des journaux anarchistes La Barricade et surtout La Guerre Sociale où il écrit La Chanson de la semaine. Il chante sa terre beauceronne : Chanson de la Beauce (1899) ; Chanson d’un gâs mal tourné (1901-1905) et écrit aussi une pièce en un acte : Leu’ commune (1904). La fin de sa vie va lui être difficile : la tuberculose, l'absinthe, la privation (l'approche de la guerre qui favorisait les chansonniers cocardiers au détriment des anarchistes). Il meurt vingt-quatre heures après avoir été conduit à l'hôpital Lariboisière, le 28 juin 1911. MONCLIN (R.) : Gaston Couté, poète maudit, Paris, Editions Paris-Bruxelle, 1962. Gaston Couté, la vérité et la légende par P.-V. Berthier, Les Cahiers du CPCA (1958, réédité en 1980 puis en 2006 avec de nombreuses notes de Lucien Seroux) Gaston Couté par L. Lanoizelée, autoédition, Paris (1960) Gaston Couté poète maudit, par Roger Monclin, Éd. Paris-Bruxelles (1962) Gaston Couté, l'enfant perdu de la révolte, par R. Ringeas et G. Coutant, Éd. Au Vieux Saint-Ouen (1966)

COUTURAT (Louis-Alexandre), 1868-1914 : Philosophe. Né à Paris le 17 janvier 1868, Couturat, après avoir fait ses études au lycée Condorcet, est admis en 1887 à l’Ecole normale. Agrégé de philosophie en 1890, licencié en mathématiques en 1892, maître de conférence à la faculté de lettres de Toulouse (1894-1895), puis professeur à l’université de Caen jusqu’en 1899, il est reçu, en 1896, docteur en philosophie, et la thèse qu’il soutient - De l’infini mathématique – est considérée comme son chef d’œuvre philosophique. Il quitte l’université en 1899 et ne renoue avec l’enseignement que lorsque Bergson le prie (1905-1906) de le supléer pendant un an au Collège de France. Installé à Paris, Couturat se consacre avec enthousiasme, outre la logique mathématique, à la diffusion d’une langue universelle qui est quelque temps en faveur parmi les savants (notamment le logicien et mathématicien turinois G. Peano) : l’ido, sorte d’esperanto déformé. Couturat a publié divers écrits sur cette question, entre autres : l’Histoire de la langue universelle (en collaboration avec L. Léau, 1903), et Les Nouvelles langues internationales (1900). Cependant, il continue à étudier la théorie et l’histoire de la logique, publiant en 1905 : La Logique de Leibniz (fruit d’une mission à Hanovre pour étudier les inédits du philosophe, qu’il devait publier par la suite) puis, en 1906, Les Principes des mathématiques. Victime d’un accident d’autombile, il meurt à Ris-Orangis le le 3 août 1914.

COUVREUR (Séraphin), 1835-1919 : Sinologue. Né à Varenne (Somme), le 14 janvier 1835, Séraphin Couvreur fait une partie de ses études théologiques au Grand Séminaire d’Amiens avant d’entrer dans la Compagnie de Jésus en 1853. Arrivé en Chine en 1870, ses aptitudes de linguiste s’était vite manifestées, il se met à la composition des grands ouvrages qui lui font un nom parmi les sinologues. Toute une série de travaux lexicographiques paraissent successivement : Dictionnaire franco-chinois (1884), Dictionnaire chinois-français (1890), Dictionnaire chinois-latin (1892)… Il y ajoute une Chrestomathie (1894), et des traductions en français et en latin de la plupart des classiques chinois ; le Chou-King, le Che-King, le Li-ki, le Tch’ouen-ts’iou, le Yi li, parus de 1895 à 1916. Citons soécialement Les Quatre Livres qui forment avec les Cinq King, la base de l’enseignement classique. On lui doit aussi un recueil intitulé Choix de documents, édits et proclamations officielles en faveur de la religion catholique, dont la quatrième édition paraît à Ho-Kien-fou en 1906, et une Géographie ancienne et moderne de la Chine, publiée à Sien-Hsien en 1935. Jusqu’au dernier jour, il a travaillé à ses publications. Il était alors âgé de quatre-vingt-quatre ans, et avait passé tout près de cinquante ans dans la mission, quand il meurt le 19 novembre 1919, à Sien-Hsien. Ces travaux lui avait valu de l’Institut, le prix Stanislas Julien, et du gouvernement français, la distinction d’Officier d’Académie.

COUYBA (Maurice), 1855-1931 : Poète, chansonnier et homme politique. Né à Dampierre-sur-Salon (Haute-Saône) le 22 mai 1855, Maurice Couyba, agrégé de lettres, est d’abord poète puis chansonnier à succès. Il est secrétaire du Sénat lorsque Caillaux lui propose d’enter dans son ministère comme ministre du Commerce et de l’Industrie du 27 juin 1911 au 13 janvier 1912. Il s’occupe notamment du régime des ports de commerce. Ministre du Travail du 13 juin au 26 août 1914 dans le premier cabinet Viviani, il n’a le temps que de présenter son budget à la Chambre. Il décèdera à Paris le 18 novembre 1931.

CRÉMET (Jean), 1892-1973 : Jean Cremet, né en 1892 à La Montagne (Loire-Inférieure) devient ouvrier chaudronnier à l'arsenal d'Indret. Il est le type même du militant anarcho-syndicaliste révolté contre le patronat et toutes les autorités. Intelligent, plein d'énergie, il a été avant 1914 un militant syndical victime de la répression puis un militant socialiste actif. Mobilisé en 1914, envoyé au front, blessé, il sort de la Première Guerre mondiale au comble de la révolte face à l'absurdité du massacre. Il opte presque naturellement pour le PCF lors du congrès de Tours. Premier animateur de la fédération communiste de Loire-Inférieure, il est vite remarqué par les émissaires de l'Internationale communiste et leur patron, Dmitri Manouilsky. Au mois de mai 1923, deux militants communistes de premier plan, sont conviés à Moscou par Dimitri Manouilsky dont Jean Cremet. En février 1923, le militant annamite avait fait paraître une petite annonce pour des travaux artistiques qui constituaient son gagne-pain, dans le journal dont Cremet était l'un des animateurs, La Bretagne communiste. Dès 1924, il est nommé secrétaire général adjoint du PCF et, en 1925, Staline en personne le recommande aux camarades français. Il se dépense sans compter dans l'organisation du PCF en province et surtout dans la campagne des communistes contre la guerre du Rif, au Maroc. En 1926, il est nommé secrétaire du comité exécutif de l'Internationale à Moscou. À Paris, Cremet, conseiller municipal du XIVe arrondissement et secrétaire général du PC, anime un vaste réseau d’espionnage au service de l’Union Soviétique. Parallèlement, et secrètement, il avait été contacté par les services soviétiques qui lui ont demandé de monter un réseau d'espionnage visant en particulier les fabrications de guerre. En 1927, à la suite de dénonciations, la Sûreté a vite fait de repérer et d'arrêter tout le réseau, y compris ses responsables soviétiques à Paris. La Sûreté à ses trousses, il trouve refuge avec sa maîtresse à Moscou où, après avoir été le représentant français à l'Exécutif du Komintern, il s'opposa à Staline et à l'expulsion de Trotsky. Lui sauvant la mise, Dimitri Manouilsky, chef de l'appareil technique du Komintern, l'envoya entreprendre de multiples missions clandestines en Europe, puis en Asie. En 1929, après quelques missions secrètes en Europe et au Moyen-Orient, quelques séjours en sana, où il soigne une tuberculose, et quelques sessions de formation dans des centres spécialisés, il est envoyé à Shanghai comme l'un des principaux responsables de l'Internationale pour l'Extrême-Orient (Chine, Corée, Japon, Indochine). Il est envoyé en Chine, au Japon et en Indochine pour aider à organiser des mouvements communistes locaux. Ils travaillent entre autres avec Hô Chi Minh, et les chefs chinois Zhou Enlaï et Deng Xiaoping. Lors du démantèlement des réseaux du Komintern à Shanghai, Hong Kong et Singapour en 1931, il a disparu. Confronté aux coups terribles que les nationalistes portent aux communistes des grandes villes chinoises, déçu de la tournure des événement à Moscou, il a décidé de rompre. Connaissant les mœurs staliniennes et ce qui pouvait lui en coûter, il décide de plonger dans une " clandestinité de la clandestinité ". Lors d'une ultime mission en Chine, au cours de laquelle il alimentait en armes les maquis de Mao dans le Guangxi, il disparaît de façon mystérieuse. Pendant soixante ans, on l'a dit mort. Une thèse revenait plus souvent que les autres: celle d'un assassinat perpétré par les services spéciaux soviétiques. Un meurtre découlant de son opposition à Staline. En vrai, il n'en était rien. Cremet avait lui-même simulé sa mort… Et il a ensuite tout fait pour se faire oublier, de pseudonymes en pseudonymes, de femmes en femmes, sans jamais cesser le combat. A l'été 1931, André Malraux et Clara Malraux l'ont aidé à rejoindre l'Europe pour y prendre une nouvelle identité. (il devient un des personnages de La Condition humaine, le roman chinois de Malraux). De retour en France, via les États-Unis, Cremet changera d'identité pour se fixer en Belgique. Il a vécu sous un nom d'emprunt jusqu'en 1973 où il est mort à Bruxelles sous le nom de Gabriel Peyrot. À Barcelone, il défend la République espagnole, rencontre George Orwell, puis réapparaît dans L'Espoir, le nouveau livre de Malraux. À Bruxelles, il se cache pendant trente ans grâce à des femmes remarquables, après avoir dirigé un réseau de résistance antinazie dans la Somme. Il va reprendre sa vie tranquille d'employé modèle, puis de retraité. -1973, Bruxelles) FALIGOT (R.) : As tu vu Cremet ?. Paris, Fayard, 1991. KAUFFER (R.) : L’Hermine rouge de Shanghai, Editions Les Portes du large. 2005.

CRÉMIEUX (Décret) : Le 24 octobre 1870, un décret donne la citoyenneté française aux 37.000 juifs d'Algérie. Il peut être considéré comme l'une des premières grandes mesures de la IIIe République. Sa paternité en revient au ministre de la Justice, Isaac Adolphe Crémieux, l'un des chefs du parti républicain. L'auteur du texte, juriste et philanthrope de 74 ans, bénéficie alors d'une grande réputation d'intégrité dans le pays. Déjà, sous le Second Empire, un sénatus-consulte du 1er juillet 1865 avait permis la naturalisation individuelle des indigènes juifs et musulmans d'Algérie qui le souhaitaient, mais n'avait trouvé que peu d'écho. Seuls 133 d’entre eux (sur une communauté de 33.000 personnes) accepte d’abandonner leur statut personnel mosaïque pour la nationalité française. En 1869, Crémieux continue son objectif et réclame du gouvernement Olivier la décision autoritaire d’accorder la nationalité française à l’ensemble de la communauté juive d’Algérie. La chute de l’Empire venant faire échoir ce projet. Membre du gouvernement de la Défense nationale, du 4 septembre 1870 au 17 février 1871, comme ministre de la Justice, Crémieux est chargé par Gambetta des affaires de l’Algérie. Alors que Paris est assiégé par les armées allemandes, il fait promulguer six décrets réglementant la vie en Algérie, dont le décret du 24 octobre 1870, dit Décret Crémieux, accordant d'office la citoyenneté française aux 37.000 Juifs d'Algérie. En contrepartie de ce décret, les Juifs, sont soumis d'office au même statut civil laïque de droit commun que les autres citoyens français (perdant ainsi leur statut civil religieux particulier) et deviennent tous mobilisables au même titre que les autres citoyens français - alors que sous leur régime antérieur d'indigénat, ils n'étaient soumis, comme les musulmans qu'à la conscription. Quant aux musulmans d'Algérie, ils sont ravalés au statut d'indigène. Le décret Crémieux, mesure de décolonisation partielle par voie d'assimilation a été par la suite attaqué par les colonialistes français, qui l'ont présenté comme comme une discrimination entre indigènes juifs et musulmans . En réalité, il avait alors paru impossible d'appliquer immédiatement la même réforme aux musulmans qu'aux juifs, car on pouvait craindre qu'étant peu portés à distinguer le sacré du profane, ils se révoltent contre le remplacement de leur statut civil religieux, par le statut civil laïc français. Il restait d'ailleurs toujours possible aux musulmans qui le souhaitaient de devenir citoyens en optant pour le même statut civil que les autres Français, et en abandonnant leur statut civil coranique. Mais peu d'entre eux le firent. Il n'en reste pas moins qu'une partie des patriotes musulmans des années 20 et 30, derrière l'Emir Khaled, petit fils d'Abd El Kader, puis derrière Fehrat-Abbas, très attaqués alors par les milieux colonialistes, ont revendiqué pour les musulmans, les mêmes mesures que celles du décret Crémieux, mais sans abandon de leur statut civil particulier. Le décret Crémieux, fût momentanément abrogé par le régime de Vichy, qui tenta ainsi de priver les Juifs algériens de leur citoyenneté française. COHEN (J.) : Les Israélites de l’Algérie et le décret Crémieux, Paris, Arthur Rousseau, 1900. ANSKY (M.) : Les juifs d’Algérie du décret Crémieux à la Libération, Paris, Editions du Centre, 1950.

CRÉMIEUX (Isaac-Jacob, dit Adolphe), 1796-1880 : Avocat et homme politique. Né à Nîmes (Gard) le 30 avril 1796, Isaac-Jacob Crémieux, plus connu sous le nom d’Adolphe Crémieux, est le fils d'un commerçant juif de Nîmes. Isaac-Jacob Crémieux était un enfant doué, doté d'une grande mémoire comme d'une vivacité d'esprit. Il ambitionne l'excellence et veut briser les mythes antijuifs vivaces à l'époque et dont il a à souffrir étant enfant comme à l'âge adulte. Français, juif et franc-maçon, Adolphe Crémieux se veut universel et partisan d'aucun sectarisme. Entré comme Franc-maçon à 22ans, il devient avocat au barreau de Nîmes, puis auprès de la Cour de cassation. Se lançant dans la politique, il est élu député de Chinon, de 1842 à 1848 et, le 25 février 1848, il entre, comme ministre de la Justice (jusqu'au 7 juin 1848), au gouvernement provisoire qui s'autoconstitue et proclame la Deuxième République. Après celle-ci, il redevient avocat et reprend sa carrière politique en se faisant elire député de la Drôme au Corps législatif, de 1869 à 1870. Il devint membre du gouvernement de la Défense nationale, du 4 septembre 1870 au 17 février 1871, comme ministre de la Justice. Alors que Paris était assiégé par deux armées allemandes, il fit promulguer six décrets réglementant la vie en Algérie, dont : - Le décret mettant fin à l'administration militaire de l'Algérie. - Le décret interdisant la polygamie aux Juifs d'Algérie. - Le décret du 24 octobre 1870, dit Décret Crémieux, accorde d'office la citoyenneté française aux 35 000 Juifs d'Algérie. Crémieux fût député du département d'Alger, de 1872 à 1875. Au terme de sa longue carrière politique, Crémieux devint sénateur inamovible, de 1875 à sa mort le 10 février 1880 à Paris. COMBES (A.) : Adolphe Crémieux (1796-1880), Paris, Edimaf, 2003. RENAULD (G.) : Adolphe Crémieux. Homme d’Etat français juif et franc-maçon, Paris, Detrad aVs, 2002.

CREUSOT (Grève au) : En 1899, les usines Schneider du Creusot, spécialisées dans la production d’acier Bessemer, constituent la première concentration industrielle du pays. Pendant trente ans – de 1871 à 1899 –, la paix sociale y est solidement établie, facilitée tout à la fois par la croissance soutenue, le calme des ouvriers satisfaits d’appartenir à une grande entreprise à la pointe du progrès et par le paternalisme des dirigeants soucieux du niveau de vie de leurs « employés » et de leur formation professionnelle. Cependant en 1898, toute une série de changements entraîne un bouleversement de la situation : les radicaux gagnent les élections de mai ; Eugène II Schneider, nouveau patron trop absorbé par ses tâches parisiennes, accède à la tête de l’entreprise ; l’afflux des commandes entraîne une accélération des cadences de travail et, aussi, des profits dont les ouvriers sont irrités de ne rien percevoir. Trois grèves se succèdent pourtant de mai 1899 à juillet 1900. Dans un contexte politique rendu favorable par les visées sociales de Waldeck-Rousseau, les ouvriers revendiquent de pouvoir se syndiquer. De mai 1899 à juillet 1900, les usines du Creusot connaissent plusieurs accès de grèves, notamment entre le 31 mai et le 2 juin puis entre le 20 septembre et le 1er octobre. Ils cessent le travail en mai et constituent leur syndicat. Le 2 juin, Eugène Schneider paraît céder à leurs revendications. Le travail reprend. Comme les promesses ayant conduit à la reprise n’ont pas été tenues, la grève reprend le 20 septembre pour “ la reconnaissance du syndicat, la liberté de conscience et la suppression de la police occulte ”. Le 24 septembre 1899 a lieu une grande manifestation réunissant plus de 7 000 personnes, au cours de laquelle les Creusotins remercient leurs voisins de Montchanin pour leur soutien. Une sentence arbitrale signée le 7 octobre 1899 donne gain de cause aux grévistes qui défilent victorieusement dans les rues du Creusot.

CREVEL (René), 1900-1935 : Ecrivain. René Crevel naît le 10 août 1900 dans une famille de la bourgeoisie parisienne. Son père dirige une imprimerie, et sa mère, femme austère et rigide, veille à l'éducation de ses quatre enfants. Il apprend le piano, suit le catéchisme et fréquente le prestigieux lycée Janson-de-Sailly. L'événement qui marque cette enfance demeure assurément le suicide de son père, par pendaison, alors que René a 14 ans. Sa mère ajoute au traumatisme : elle conduit son fils devant le corps du pendu et se répand en invectives. Crevel n'aura désormais qu'une ambition : s'éloigner de ce milieu castrateur. A l'âge de 18 ans Crevel fait le choix de s'inscrire à la Sorbonne en droit, mais aussi en lettres. Il ne suit pas les cours de manière assidue mais passe beaucoup de temps à lire et à discuter avec cette jeunesse qui fréquente les artistes venus du monde entier pour conquérir Paris, capitale de la culture et des arts. Trois ans de service militaire (pratiqué à mi-temps : seules les matinées sont dues à l'armée) lui permettront mieux encore de s'impliquer dans la mouvance littéraire du moment. C'est en effet à la caserne de Latour-Maubourg que Crevel se lie d'amitié avec Marcel Arland, Henri Cliquennois, François Baron, Georges Limbour, Max Morise et Roger Vitrac. Ce groupe de jeunes gens s'intéresse de près aux mouvements d'avant-garde littéraire qui agitent l'Europe (futurisme, dadaïsme, etc.). En 1921, ils font paraître le tout premier numéro de leur revue : Aventure. Rapidement le groupe est frappé par la polémique qui oppose les partisans de Tristan Tzara, chef de fil de Dada, à ceux d'André Breton (les futurs surréalistes). Crevel suit Tzara, mais entretient cependant de bonnes relations avec Breton qui l'invite en septembre 1922 à initier les surréalistes aux sommeils hypnotiques. De là datent les premières frictions avec Robert Desnos, membre qui contribue à tenir Crevel à l'écart du surréalisme. En 1923, Dada est moribond. Par ailleurs, Crevel, irrité par les reproches de Desnos, préfère se détacher des surréalistes. Il est pourtant très attiré par certaines des activités du groupe de Breton, notamment lorsqu'il s'agit de s'engager politiquement (ce qui lui vaut de participer, de manière ponctuelle, à quelques actions communes, avant d'être officiellement exclu du groupe en octobre 1925). En outre, la liaison plus ou moins heureuse qu'il entretient alors avec le peintre américain Eugene MacCown fait resurgir en Crevel de sombres pensées qui accroissent ses incertitudes. Pour la première fois, il décide d'en rendre compte dans un livre. Détours paraît en 1924. Il sera suivi de deux autres romans : Mon Corps et moi (1925) et La Mort difficile (1926) qui participent de la même dynamique. Crevel y transpose, de manière à peine voilée, sa vie et ses angoisses. Le suicide de son père et la haine ressentie pour sa mère s'y trouvent convoqués de manière systématique, sur le ton de la dérision et de l'humour noir. Lorsqu'il ne trouve pas à s'exprimer à travers l'écriture, ce besoin d'explorer les profondeurs de son esprit conduit Crevel, après la mort de sa mère, à consulter un psychanalyste. Ces trois ouvrages présentent aujourd'hui l'intérêt de témoigner fidèlement d'un « mal du siècle » dans lequel se reconnaissait une certaine jeunesse des années folles. Même si, depuis octobre 1925, il est tenu à l'écart des surréalistes, Crevel n'en demeure pas moins convaincu que le groupe de Breton reste le seul à pouvoir changer efficacement les mentalités. Mais il n'approuve pas la totalité de leurs engagements et de leurs recherches. Par exemple, dans divers articles, Crevel dénonce l'inaptitude de l'écriture automatique à rendre compte fidèlement de processus inconscients. De la même façon, persuadé que la mise en écriture, et que l'acte même de l'énonciation en altère l'authenticité, il voit dans les récits de rêves des figures vagues et imparfaites de notre « panorama intérieur ». Aussi va-t-il chercher, à travers les deux romans qui vont suivre, à recomposer grâce à l'art de l'écriture cet « état de rêve » qui fascine depuis 1922 les surréalistes, et dont Freud a entrepris l'étude. Sa première tentative l'amène à visiter l'imaginaire des enfants. La narration de Babylone passe en effet à travers les yeux d'une petite fille qui rêve la réalité autant qu'elle la vit. La révolte de Crevel contre sa famille est encore bien perceptible, et l'on voit assez facilement comment son héroïne, dont le père est parti avec le belle Cynthia qui « ressemble à la mort », est une transposition au féminin de son expérience. Etes-vous fous ? parvient mieux encore à traduire l'univers du rêve. Ce livre, Crevel l'a commencé alors qu'il était en sanatorium en Suisse. Durant les longs mois de solitude que lui impose depuis 1926 la tuberculose, Crevel a eu le temps d'explorer en profondeur son âme, d'analyser les divagations de son esprit. Toujours est-il que ce roman, qui paraît après bien des péripéties en 1929, met en oeuvre une véritable stratégie imitative du rêve : prédominance des analogies, personnages arbitraires, affabulation grossière mêlée d'éléments autobiographiques (sa rencontre amoureuse avec Mopsa Sternheim s'y trouve par exemple évoquée), etc. Avec Etes-vous fous ?, Crevel a véritablement réussi à réconcilier roman et surréalisme. En 1929, l'exil de Trotsky ne laisse pas les surréalistes indifférents. Crevel est invité à s'exprimer sur le sujet. Certes, le rapprochement semble plus facile à présent que Desnos est parti, mais ce sont surtout les nouvelles résolutions du groupe de Breton, plus engagé vers la révolution, qui motivent Crevel. A partir de 1930, et pour autant que la tuberculose le lui permette, il participe avec ardeur aux activités des surréalistes. Il en devient même l'un des membres les plus virulents si l'on en juge par ses pamphlets. Ce besoin d'engagement se lit également dans le choix qu'il fait, à cette même époque, de laisser de côté le genre romanesque pour se consacrer à des essais. Ainsi, de 1930 à 1933, paraissent successivement Paul Klee, Renée Sintenis, Dali ou l'anti-obscurantisme, Le Clavecin de Diderot et Nouvelles vues sur Dali et l'obscurantisme. Les Pieds dans le plat, qui paraît en 1933, reprend la forme du roman. Mais on est bien loin de ses premiers récits qui transposaient à l'envi le traumatisme originel. Le héros de son livre, celui qu'il appelle le « prince des journalistes », est en fait une caricature, tout à fait explicite pour les lecteurs de l'époque, de Léon Bailby, propriétaire du quotidien parisien Le Jour. Guidé par ses lectures de Feuerbach, Hegel, Marx et Lénine, Crevel se livre dans Les Pieds dans le plat à une sévère critique des valeurs bourgeoises de la Troisième République. Sa soif de militantisme l'amène en février 1935 à regagner les rangs de l'A.E.A.R. (association des écrivains et artistes révolutionnaires) assez proche du P.C.F. Par cet acte, que n'imitent pas les autres surréalistes, Crevel s'affranchit définitivement de l'autorité de Breton. Les derniers mois de sa vie sont consacrés à l'organisation du Congrès international des écrivains pour la défense de la culture, dont l'initiative revient à l'A.E.A.R. Crevel s'épuise à force de conférences. De plus, à sa grande déception, les efforts qu'il déploie pour que les surréalistes obtiennent la parole lors du Congrès, malgré l'incident survenu entre Breton et Ehrenbourg, restent vains. Enfin, lui qui se croyait totalement guéri, apprend, le 16 juin, qu'il souffre à présent d'une tuberculose rénale. Le lendemain, dans la nuit du 17 au 18 juin 1935, il se suicide au gaz dans son appartement.

CRISE ÉCONOMIQUE :

CROCÉ-SPINELLI (Bernard), 1871-1932 :

CROISET (Alfred), 1845-1923 ; (Maurice), 1846-1935 : Hellenistes. Nés à Paris, Alfred le 5 janvier 1845 et son frère Maurice le 29 novembre 1846, ils font, à un an d’intervalle, leurs études d’une façon aussi brillante que régulière. Alfred, sans quitter la capitale, est, en 1877, maître de conférence à la Sorbonne, et y occupe en 1884 la chaire de poésie grecque. Maurice reste à Montpellier de 1876 à 1891, comme professeur à l’université de cette ville. Il fait, par la suite, professeur à l’Ecole normale supérieure, professeur au Collège de France de 1893 à 1903, et membre à l’Institut. Les meilleures œuvres du premier (outre les deux dissertations De personis apud Aristophanem et Xénophon, de 1873) sont : La Poésie de Pindare et les lois du lyrisme grec (1880) et Les Démocraties antiques (1909), ainsi que les éditions critiques de Thucydide et de Platon. Les œuvres du second sont : De publicae eloquentiae princiiis apud Graecos in homericis carminibus, Des idées morales dans l’éloquence politique de Démosthène (1874), Essai sur Lucien (1882), Aristophane et les partis à Athène (1906), deux volumes sur La Civilsation hellénique (1922), et Eschyle (1928). Mais la renommée universelle des deux frères est due essentiellement à l’Histoire de la littérature grecque, véritable chef d’œuvre d’érudition et d’études critiques et esthétiques, conçu sur un plan général clair et écrit dans un style très brillant. Des cinq volumes de l’œuvre, qui paraît entre 1887 et 1899, les tomes II, IV et la première moitié du V sont dus à Alfred, tandis que les tomes I, III et la seconde moitié du V sont dus à Maurice. Afred décède à Paris le 8 juin 1923 et Maurice, à Paris le 15 février 1935.

CROISSET (Franz Wiener dit Francis de), 1837-1937 : Auteur dramatique. Né à Bruxelles (Belgique) le 28 janvier 1877, Francis de Croisset est le fournisseur attitré des théâtres du boulevard, grâce à une vulgarisation de Marivaux et de Crébillon fils. Il écrit un certain nombre de comédies dont il ne reste guère que le nom : Chérubin (1901), La Bonne Intention (1905), Le Bonheur, Mesdames (1910), Le Feu du voisin (1911), Le Cœur dispose (1912). S’inspirant ensuite de Bernstein, il donne L’Epervier (1914). Après la Première Guerre mondiale, il devient le collaborateur de R. de Flers pour Les Vignes du Seigneurs (1923), Les Nouveaux Messieurs (1925), Le Docteur Miracle (1926), etc. D’un voyage aux Indes il rapporte un recueil d’impressions qui connaît un certain succès : la Féerie cinghalaise (1926). En 1935, Francis de Croisset fait ses débuts comme romancier avec La Dame de Madacca. Il meurt à l’hôpital américain de Neuilly-sur-Seine le 8 novembre 1937. BARILLET (P.) : Les Seigneurs du rire : Flers - Caillavet - Croisset, Paris, Arthème Fayard, 1999

CROIX-DE-FEU : L'association des Croix-de-Feu ou « Association des combattants de l'avant et des blessés de guerre cités pour action d'éclat », fondée le 26 novembre 1927 par Maurice Hanot dit d'Hartoy, regroupe des anciens combattants français décorés de la Croix de Guerre pour leur bravoure. Les aspirants à l'adhésion devaient apporter la preuve formelle de leurs distinctions et mérites militaires. La présidence d'honneur, fonction honorifique, est confiée à l'écrivain et journaliste Jacques Péricard. A partir de 1929, une association jumelle, les Briscards, permet aux anciens combattants ayant passé au moins six mois au feu de venir grossir les rangs des Croix-de-Feu sans avoir été forcément décoré ou blessé. La création du mouvement, aux buts très vagues, répond au désir de revivre l'esprit de fraternité des tranchées et de réparer un acte jugé ignominieux (la tombe du soldat inconnu ayant été souillée lors d'une manifestation en août 1927). L'insigne du mouvement Croix-de-Feu est une tête de mort superposée sur la Croix de Guerre et sa doctrine est résumée dans le Manifeste Croix-de-Feu. L'association est hébergée, à sa création, dans l'immeuble du figaro par François Coty, parfumeur et patron de presse, et compte approximativement 500 membres en 1928. Les principales activités du mouvement Croix-de-Feu se répartissent en trois types : les réunions patriotiques, les défilés du souvenir au cours des cérémonies sous l'Arc de Triomphe et des pèlerinages sur les champs de batailles. Désigné en 1930, son nouveau président, le lieutenant-colonel de La Rocque va le transformer en ligue d’extrême-droite, en lui adjoignant les « Fils et les filles des Croix-de-Feu », puis les « Volontaires nationaux ». La question de l'appartenance des Croix-de-Feu aux ligues d'extrême-droite est épineuse En effet, si les Croix-de-Feu sont une ligue nationaliste et paramilitaire, puisqu'ils en possèdent certains attributs secondaires (sauf les principaux, à savoir les armes et les uniformes) : stricte discipline, mouvement fortement centralisé, délibérations secrètes, service d'ordre (les Dispos), ils se distinguent radicalement des mouvements d'extrême-droite antiparlementaristes en affichant plusieurs fois leur légalisme et leur indépendance. Il s’agit en fait d’un groupe antiparlementaire, nationaliste qui rêve d’un régime fort et d’une société solidaire, proche des vues du christianisme social. Pour contrer le slogan de l'Action Française, élaboré par Charles Maurras, La Rocque fait adopter à son mouvement la devise « Social d'abord ! ». En décembre 1932, ils refusent de s'associer aux manifestations ultranationalistes diligentées par l'Action Française et les Jeunesses Patriotes contre le paiement de la dette contractée auprès des États-Unis. Lors des manifestations du 6 février 1934 consécutives à l'Affaire Stavisky, le colonel de la Rocque se refuse à attaquer le parlement alors qu'il dispose de la force numérique suffisante pour le faire, il se situe cependant au bord de la Seine avec ses forces, à seulement quelques centaines de mètres des combats. Toutefois, les autres ligues vouent alors la Rocque aux gémonies, parlant volontiers de trahison, et ne décolèrent pas lorsque les Croix-de-Feu refusent d'adhérer au Front National des ligues, constitué fin février 1934, ou de participer aux élections de 1936 pour lutter contre le Front Populaire (ce refus provoquera le départ de plusieurs militants pour le PPF en 1935). La Rocque n'en passe pas moins dans la société de l'époque pour l'incarnation du fascisme français, en dépit d'une certaine hostilité à l'antisémitisme et au nazisme : sa défense de la nation française primait pour lui devant tout autre type d'idées, spécialement si elles provenaient de l'étranger. La gauche voit alors en La Roque le « Mussolini » français et son organisation l’ébauche d’un fascisme. Les Croix de feu sont dissoutes par décret pris en conseil des ministres le 18 juin 1936, en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées, sous le gouvernement du Front Populaire, et subissent ainsi le même sort que la plupart des ligues d'extrême-droite réactionnaires ou fascisantes, dont La Rocque réprouvait l'activisme et l'anti-républicanisme systématique. A l'évidence, la dissolution des Croix-de-Feu provient, d'une part, de la peur suscitée par la capacité du mouvement à mobiliser des foules nombreuses et organisées et, d'autre part, de son programme d'action sociale, très proche de celui du Front Populaire, le menaçant ainsi de lui ravir de nombreux militants parmi la classe ouvrière. Des cendres des Croix-de-Feu, La Roque donne naissance au PSF ou Parti social français qui va refuser toute allaince avec Jacques Doriot et l’extrême-droite pour préconiser la création légale d’un régime fort. La Roque se voit alors la cibles d’attaques provenant de l’extrême-droite, mais son mouvement connaît rapidement un grand succès. A la veille de la guerre, le PSF rassemblait 800.000 membres et attend les életions de 1940 pour confirmer son audiance mais que la guerre allait empêcher. LA ROQUE (F. de) : Pourquoi j'ai adhéré au Parti social français, Paris, Société d'éditions et d'abonnements, décembre 1936. LA ROQUE (F. de) : Disciplines d'action, Clermont-Ferrand, Editions du Petit Journal, 1941. NOBÉCOURT (J.) : Le Colonel de la Rocque, ou les pièges du nationalisme chrétien, Paris, Fayard, 1996. RÉMOND (R.) : La droite en France, Paris, Aubier-Montaigne, 1968. RUDAUX (Ph.) : Les Croix-de-Feu et le PSF, Paris, 1967. SOUCY (R.) : Fascismes français ? 1933-1939 : mouvements antidémocratiques, Paris, Autrement, 2004.

CROIX-VERTE :

CROS (Charles, Hortensius, Émile), 1842-1888 : Poète. Né le 1er octobre 1842 à Fabrezan (Aude), Charles Cros est le fils d’un instituteur de Narbonne. Il fait ses études d’autodidacte avec une prédilection marquée pour les sciences. Entré en 1860 comme répétiteur et professeur de chimie à l’Instituts des Sourds-Muets, il s’en voit une première fois renvoyé à la suite d’un duel entre son frère et un employé de l’établissement. Il reprend alors ses études pendant plusieurs années et présente à l’exposition universelle de 1867 un télégraphe automatique de son invention. Peu après, devenu l’amant de la mondaine Nina de Villard, il rencontre dans son salon les principaux poètes parnassiens, mais se lie plus particulièrement avec François Coppée, Verlaine et Villiers de l’Isle-Adam. C’est dans L’Artiste qu’il fait ses débuts littéraires. En 1871, des poèmes de lui figurent dans le recueil de deuxième Parnasse contemporain, mais en 1876 le troisième Parnasse refuse de l’accueillir. A cette date, Leconte de Lisle avait déjà refusé de recevoir Charles Cros, lequel, en orientaliste érudit, avait été rapidement irrité par ce qu’il appelait les « poses philologiques déplacées » des parnassiens. En octobre 1871, il avait fait la connaissance de Rimbaud et l’avait hébergé quelque temps. Leur entente, pourtant ne dure pas longtemps et, lors de la fuite de ce dernier et de Verlaine en Belgique, Charles Cros prend parti pour l’épouse de Verlaine et rond complètement avec les deux poètes. De la fréquentation d’avec Verlaine, il va cependant garder jusqu’à sa mort le goût d’une vie irrégulière, des stations dans les cafés, des apéritifs. On le voit fréquenter à peu près tous les groupes de la bohème littéraires des années 1872-1885 : le groupe des « Vivants » où il rencontre Richepin, Ponchon, Bouchor et Germain Nouveau ; le café de la Nouvelle-Athènes où il retrouve Alexis, Duranty, Catulle Mendès, Huysmans et Manet qui allait devenir son ami intime ; les « Hydropathes » dont, en 1878, il est un des fondateurs le cercle du Chat noir, celui des « Zutistes » qu’il anime avec Alphonse Allais. Ainsi, devient-il peu à peu une sorte de célébrité du Paris littéraire anecdotique, un personnage burlesque bout-en-train. Cependant, en dépit de l’admiration d’artistes comme Manet, Gustave Kahn, Laforgue, Charles Cros, le poète de l’absurde et de la solitude qui s’était exprimé dans Le Coffret de santal (1873), Le Fleuve (1874), La Science de l’amour (1884), La Vision du Grand Canal Royal des Deux Mers (1888), reste complètement méconnu et même ignoré. Le chercheur scientifique aux vues anticipatrices souvent géniales, l’inventeur, avait connu la même malchance : son mémoire concernant « la description d’un procédé d’enregistrement et de reproduction des phénomènes percus par l’ouïe », procédé que Cros appelait « paléophone », mais qui n’est autre que le premier phonographe, après avoir suscité quelques articles pendant l’automne de 1877, doit être rejeté dans un oubli complet, au mois de mai suivant, Edison ayant présenté son premier appareil à l’Académie des Sciences. Quant au poète, bien qu’il ait donné en 1908 une édition de de ses derniers vers sous le titre : Le Collier de griffes, il ne devait avoir sa revanche posthume que grâce aux surréalistes qui, en 1923, le célèbrent comme un de leurs inspirateurs. Il est décédé à Paris le 9 août 1888. CRUPPI (Jean), 1855-1933 : AVocat, magistrat et homme politique. Né à Toulouse (Haute-Garonne) le 22 mai 1855, Jean Cruppi, avocat puis magistrat, est nommé avocat général à la Cour de cassation à trente ans. Il se fait élire conseiller général de la Haute-Garonne et député républicain radical de ce département. Il conserve son siège au Palais Bourbon de 1898 à 1919, puis entre au Sénat en 1920 et y demeure jusqu’en 1928. Il s’intéresse surtout aux affaires juridiques et soutient fermement la politique anticléricale. Sa femme tient un des principaux salons littéraires et artistiques de l’époque, et son influence va rapidement s’accroître. Siégeant au Conseil supérieur de l'Assistance publique, il présente en 1899 un rapport sur les dépôts de mendicité puis rapporte devant la Chambre des députés une proposition de loi sur les moyens d'assistance et de coërcition propres à prévenir ou à réprimer le vagabondage et la mendicité, remarquée pour sa sévérité. Fort de son expérience de magistrat, il rapporte également de nombreux textes de loi ayant trait à la justice : réforme des expertises médico-légales (1898), réforme de la procédure devant la Chambre des mises en accusation (1899), secret des actes signifiés par huissier (1900), détention préventive (1901), droit de réponse (1901), réforme des justices de paix (1903), proposition de loi sur les garanties de la liberté individuelle et sur la responsabilité des magistrats, officiers de police judiciaire et agents ou dépositaires quelconques de la force publique en cas d'arrestation, de détention ou de perquisition illégales (1905), proposition de loi tendant à supprimer la peine de la dégradation civique (1905), peine de mort (1907). Il s'intéresse également aux questions économiques, rapportant un texte sur l'interdiction de la création de conditions privées en concurrence avec des conditions publiques antérieurement établies (1900), un projet de loi portant modification de la loi du 15 juin 1872 sur les titres au porteur (1901), un texte sur l'exercice de la pharmacie (1903), sur le régime des jeux (1904), sur la protection temporaire de la propriété industrielle dans les expositions internationales (1908), sur les dessins et modèles (1908). Vice-président de la Chambre en 1907, il entre au gouvernement l’année suivantE dans le premier cabinet Clemenceau comme ministre du Commerce et de l’Industrie du 4 janvier 1908 au 23 juillet 1909. Ses domaines d’action sont multiples : réglementation du travail, notamment pour les ouvriers de la soie et les inscrits maritimes, régime commercial avec l’Algérie ou le Canada, droit de douane, médaille du travail, etc. Farouche opposant du ministère Briand de 1911, il fait partie du ministère Monis qui lui succède, comme ministre des Affaires étrangères du 2 mars au 26 juin 1911. Son passage au Quai d’Orsay est marqué par l’expédition de Fez destinée à établir le protectorat sur le Maroc. Enfin, il est garde des Sceaux du 27 juin 1911 au 13 janvier 1912 dans le ministère Caillaux. Il meurt à Fontainebleau (Seine-et-Marne) le 16 octobre 1933.

CUBISME : Le cubisme est un mouvement artistique qui s'est développé de 1906 à 1914 autour de Braque, Picabia et Picasso. Après la Première Guerre mondiale, il s'essouffle un peu, avant de s'éteindre vers les années 20. Le cubisme prend source dans les écrits et dernières œuvres de Paul Cézanne. Les historiens répéteront souvent la phrase tirée d'une lettre de Cézanne à Emile Bernard du 15 avril 1904 :"traitez la nature par le cylindre, la sphère, le cône , le tout mis en perspective, soit que chaque côté d'un objet, d'un plan, se dirige vers un point central." Cette phrase, même sortie de son contexte, est déjà en soi un peu légère pour justifier les théories cubistes. Mais la parenté de ces théories avec les recherches de Cézanne devient franchement douteuse quand on lit la suite de la lettre que les historiens omettent toujours : " les lignes parallèles à l'horizon donnent l'étendue, soit une section de la nature ou, si vous aimez mieux, du spectacle que le Pater Omnipotens Aeterne Deus étale devant nos yeux. Les lignes perpendiculaires à cet horizon donnent la profondeur. Or, la nature, pour nous hommes, est plus en profondeur qu'en surface, d'où la nécessité d'introduire dans nos vibrations de lumière, représentées par les rouges et les jaunes, une somme suffisante de bleutés, pour faire sentir l'air." Quand on lit très simplement ce propos, sans chercher midi à quatorze heure, on s'aperçoit que Cézanne ne fait qu'indiquer une démarche très classique pour aborder la peinture d'un tableau en général, et d'un paysage en particulier : les perpendiculaires donnent la profondeur, les horizontales l'étendue, tout volume arrondi (ce qui n'est pas le cas du cube) a un point culminant vers l'oeil du spectateur, et, pour les couleurs, les rouges et les jaunes donnent les vibrations de lumière tandis que les bleus donnent l'air. C'est relativement très simple, et nul doute que tous les grands peintres avant Cézanne savaient ça, au moins d'instinct. Il n'y a de la part de Cézanne aucune interprétation révolutionnaire du monde, comme on l'a trop dit, et il n'avait sans doute pas ce projet enfantin de tout réduire à des cubes enchevêtrés ou à des figures géométriques. Qu'aurait pensé Cézanne des théories cubistes ? peut être aurait-il dit aux peintres cubistes ce qu'il disait à Emile Bernard en 1904 : "Il [l'artiste] doit redouter l'esprit littérateur, qui fait si souvent le peintre s'écarter de sa vraie voie — l'étude concrète de la nature — pour se perdre trop longtemps dans des spéculations intangibles." Le Cubisme veut aussi se justifier et se rattacher à Cézanne par la recherche d'une solidité et d'une densité en réaction aux recherches des effets lumineux et atmosphériques des Impressionnistes qui, du moins dans un certain nombre de paysages, tendent à noyer et éthérer les volumes dans des papillotements de couleurs. Mais là encore, c'est sans doute aller au-delà de ce que prônait Cézanne. C'est donc vraisemblablement sur un malentendu qu'à partir de 1906 et les Demoiselles d'Avignon (considérées généralement comme le premier tableau cubiste) Picasso et Braque appliqueront leurs théories, non seulement aux paysages mais aussi aux natures-mortes et à la figure humaine. C'est à partir de 1910, avec ce que l'on nommera le cubisme analytique, que ces deux peintres vont affirmer une rupture avec la vision classique déjà entamée depuis quatre ans. Ils abandonnent l'unicité de point de vue du motif pour en introduire de multiples sous des angles divers, juxtaposés ou enchevêtrés dans une même oeuvre. Ils s'affranchissent de la perspective pour donner une importance prépondérante aux plans dans l'éclatement des volumes. Origine du mot [modifier] Le terme cubisme provient d'une réflexion de Matisse (qui, pour décrire un tableau de Braque, parla de « petits cubes ») relayée par le critique d'art Louis Vauxcelles. D'autres disent que c'est par ses formes simples et géométriques mais pourtant travaillées que ce nom lui a été donné. Influence d'Apollinaire [modifier] Grand admirateur de Cézanne, auquel il rêva de consacrer une longue étude qui ne vit jamais le jour, le poète Apollinaire fut le défenseur des peintres cubistes aux premiers jours. C'est lui qui leur inspira ou qui décela ou, plus vraisemblablement, qui imagina dans l'analyse de leurs oeuvres , avec un certain lyrisme, une dimension métaphysique. En 1908, il rédige la préface du catalogue d'une exposition dans laquelle il énonce les trois vertus plastiques, reprise en introduction des Peintres cubistes. L'idéologie cubiste est entièrement contenue dans ce livre ; il est donc suffisant d'en prendre connaissance pour se faire une idée complète des buts du cubisme. L'idée essentiel d'Apollinaire est la nécessité de la destruction de la notion d'un Dieu créateur remplacé par la notion que chaque homme est Dieu lui-même, dans la mesure où il prend conscience de sa divinité, et qu'en conséquence, les hommes n'ont aucune raison pour vouer un culte à la nature, qui n'est alors qu'un aspect minuscule, passager et périssable de l'univers. La grande préoccupation d'Apollinaire est de voir, ainsi qu'il le dit, "la nature terrassée". Il juge le culte de la nature comme le seul obstacle à la possession de ce qu'il nomme la "pureté", le seul obstacle à la conquête de l'absolu par l'humanité. Aux formes terrestres, il oppose "la grandeur des formes métaphysiques"; "en deçà de l'éternité, écrit-il, dansent les mortelles formes de l'amour, et le nom de nature résume leur maudite discipline"1 Cette forme de révolution religieuse ou métaphysique au nom de l'art pictural, et aboutissant dans celui-ci à une rupture avec le respect de la nature, rupture avec la peinture ancienne et de tous les temps, déformation sans limites et non-figuratisme, fut contestée. Léon Gard écrit : "La difficulté de la position d'Apollinaire est que la suppression du culte de la nature n'empêche pas cette nature d'exister, et n'empêche pas que nous en fassions partie. Le véritable obstacle à ce que nous, créatures de la nature, possédions l'absolu, n'est donc pas le culte de la nature mais la nature elle-même. Et si l'on pense, avec quelque apparence de raison, que la nature, aussi grande qu'elle soit, n'est pas l'absolu, il faut ausi penser que les créatures de la nature ne peuvent considérer l'absolu qu'à travers la nature en remontant à son créateur."2 Quatre périodes [modifier] Précubisme, ou cubisme cézannien, nègre ou géométrique (1907-1910). Le peintre s'attache à la représentation en volume de l'objet, à la manière de Cézanne (la perspective est souvent malmenée). Cf. Pablo Picasso, Réservoir à Horta, 1909. Cubisme analytique (1910-1912). L'objet est déconstruit, et toutes ses facettes sont représentées en fragments, sans aucun égard pour la perspective ; cette phase de recherche se caractérise par un chromatisme très peu saturé (gris, brun, vert, bleu terne). En revanche, la lumière occupe une place très importante ; elle se répartit différemment sur chaque fragment. Cf. Pablo Picasso, Le joueur de guitare, 1910. Cubisme synthétique (1912-1914). Cette période est caractérisée par le retour de la couleur et par l'utilisation de la technique du collage (papiers, objets). Le peintre sélectionne les facettes les plus pertinentes de l'objet déconstruit (contrairement à la deuxième phase, où il n'y a pas de sélection). Ces toiles tendent à la stylisation abstraite. Cf. Pablo Picasso, Guitare et bouteille de Bass, 1913. Cubisme orphique. Le nom est donné par Guillaume Apollinaire à propos des deux principaux représentants de cette forme de cubisme: Robert Delaunay et sa femme Sonia Delaunay. La couleur se détache de toute forme et permet la création, dans leurs oeuvres, de cercles concentriques colorés, donnant rythme et vitesse au tableau. CUMONT (Arthur), 1818-1902 : Homme politique. Catholique libéral, Arthur Cumont est né à Angers (Maine-et-Loire) le 19 avril 1818. Ami de Falloux, il attaque fermement le gouvernement de la Défense nationale et est élu député en 1871. Membre influent de la « réunion Colbert » groupant les modérés de droite, il entre dans le cabinet Cissey du 22 mai 1874 au 9 mars 1875 comme ministre de l’Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts. Ses adversaires révèlent qu’il n’est pas bachelier et tout Paris rit des lapsus et de sa visite au Collège de France où il demande à voir les dortoirs ! Mais c’est surtout son attitude vis à vis de son chef de cabinet Chauffard, auquel il décerne la Légion d’honneur au bout de quatre mois, mais lui vaut l’hostilité tout à la fois de l’opposition. Il meurt à Saint-Georges-sur-Loire (Maine-et-Loire) le 10 février 1902.

CUNEO D’ORNANO (Gustave), 1845-1906 :

CUQ (Édouard),1850-1934) : Professeur et chercheur. Édouard Cuq est né à Saint-Flour, dans le Cantal, le 14 décembre 1850. Élève brillant, il suit un cursus scolaire et universitaire sans faute. En 1874, il obtient un doctorat en droit, avec sa thèse sur les Pactes et Obligations naturelles. L'année suivante, il commence à enseigner le droit romain à la faculté de Droit de Bordeaux, tout en poursuivant ses études. Il est ensuite major de sa promotion au concours de l'agrégation en 1876, ce qui lui vaut d'être nommé hors-cadres à l'École française de Rome. Il y séjourne de 1878 à 1879. De retour en France, il retrouve la faculté de Droit de Bordeaux et son emploi de professeur de droit romain. Il occupe ce poste de 1879 à 1885 et s'y fait remarquer par la qualité de son enseignement. Ses cours sur les pandectes notamment sont particulièrement appréciés, tant par ses élèves que par ses pairs. Cette reconnaissance lui vaut d'être nommé titulaire de la chaire de droit romain dès 1880. En 1893, Édouard Cuq quitte Bordeaux pour Paris, où il rejoint la faculté de Droit. Il y est nommé professeur adjoint en 1895, puis professeur titulaire de la chaire de droit public romain en 1898. Cette ascension rapide dans le monde universitaire est en partie la conséquence de ses publications. En effet, en marge de sa charge d'enseignement, Cuq poursuit des recherches et rédige des ouvrages qui font autorité. Travaillant sur l'épigraphie juridique (De quelques Inscriptions relatives à l'Administration de Dioclétien, paru en 1881), sur les juges plébéiens de Narbonne (étude publiée en 1881), sur le mariage de Vespasien (1884), sur les crimes imputés aux chrétiens sous le Haut-Empire (1886) ou sur l'histoire du droit français ancien, il a une production abondante, soit sous forme de livres, soit sous celle d'articles dans la Nouvelle Revue de Droit français et étranger (entre 1886 et 1908). C'est en 1891 que commence la publication de ce qui devait être l'œuvre de sa vie : Les Institutions juridiques des Romains, envisagées d'après leurs Rapports avec l'État social et avec le Progrès de la Jurisprudence. Le premier tome de ce travail magistral est une colossale synthèse des travaux consacrés au droit romain pendant le XIXe siècle. Il lui faut ensuit dix années de labeur pour publier le deuxième tome, en 1902. Celui-ci est d'emblée considéré comme un apport fondamental à l'étude du droit romain et à la méthode historique appliquée au droit. En effet, cette étude déborde largement des cadres stricts de l'histoire du droit pour s'étendre à l'histoire sociale et politique de la Rome antique, à la lumière de laquelle l'auteur peut produire une analyse encore plus pertinente des textes juridiques de l'époque. Par ces travaux, Édouard Cuq fait faire de notables progrès à la connaissance du droit romain et à sa compréhension, mais également à la connaissance de l'histoire romaine dans son ensemble. L'Académie des Sciences Morales et Politiques ne s'y trompe pas, qui lui attribue en 1903 le prix Le Dissez de Penanrun. L'année suivante paraît une nouvelle édition, remaniée, du tome 1 de l'étude. Au fur et à mesure de ses recherches, Cuq est amené à pratiquer l'étude comparée du droit romain et des autres systèmes juridiques de l'Antiquité. C'est ainsi qu'il s'intéresse aux textes babyloniens comme le fameux code d'Hammourabi, mais également au droit hittite, à celui de Suse ou à celui de l'Élam. A partir de 1905, et en marge de ses études sur le droit romain, il publie donc de nombreux textes sur le droit antique et sur l'épigraphie de la Mésopotamie, passant du Mariage à Babylone d'après la Loi d'Hammourabi (en 1905) aux Lois hittites (1924), en passant par l'étude des Koudourrous (pierre-limites chaldéennes) du musée du Louvre... Le 8 décembre 1911, consécration d'une carrière exemplaire, ce grand érudit est admis à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Ses deux dernières études (Le Droit élamite d'après les Actes juridiques de Suse et Le Rescrit d'Auguste sur les Violations de Sépultures), publiées en 1932, sont à elles seules un résumé de l'œuvre de cet esprit éclectique et brillant, entre Rome et l'Orient. Édouard Cuq décède à Paris le 25 mai 1934.

CUREL (François de), 1854-1928 : Auteur dramatique. Né à Metz (Moselle) le 10 juin 1854, il décède à Paris le 26 avril 1928.

CURIE (Pierre), 1859-1906 ; (Marie), 1867-1934 : Physiciens. Marie Curie, ou plutôt Marie Sklodowska, est née à Varsovie, le 7 novembre 1867. Fille d’un professeur de mathématique et d’une institutrice de Varsovie, Marie Curie est élevée entre sens du devoir et manque d'argent. Du décès précoce d'une de ses soeurs, puis de sa mère, elle tire l'agnosticisme qui conforte sa foi en la science. Elève brillante, mûre, au rare pouvoir de concentration, Marie forge le rêve, alors inconcevable pour une femme, de mener une carrière scientifique. Mais l'argent manque et elle devient préceptrice. Pour soutenir sa soeur Bronia, désireuse d'étudier la médecine à Paris, elle se sacrifie financièrement. A charge de revanche. C'est ainsi qu'en 1891, Maria arrive à Paris. Ambitieuse, autodidacte. Obtenant une licence de physique, puis de mathématiques, c'est alors qu’elle rencontre Pierre Curie. Né à Paris le 15 mai 1859 dans une famille républicaine, Pierre Curie est le fils d’un médecin protestant alsacien. Ne fréquentant ni l’école, ni le lycée, ses parents, son frère puis un professeur ami de la famille se chargent de son instruction. Il rejoint finalement la Sorbonne où il passe sa licence de physique à l'âge de dix-huit ans. C’est alors qu’il devient préparateur d’un professeur à la Faculté des Sciences de Paris et c’est sous l’autorité de ce dernier qu’il accomplit ses premiers travaux sur les radiations infrarouges, cependant qu’associé à son frère Jacques, préparateur en minéralogie, il découvre en 1880, le phénomèn de piézo-électricité selon lequel une pression exercée sur un cristal de quartz crée un potentiel électrique. Nommé en 1882 chef de travaux à l’Ecole de physique et de chimie industrielle de Paris, Il travaille d'abord sur la symétrie et les répétitions dans les milieux cristallins puis s'intéresse au magnétisme. Dans sa thèse sur les Propriétés magnétiques des corps à diverses températures, il énonce la loi de Curie et définit le point de Curie, température au-delà de laquelle certains matériaux perdent leurs propriétés magnétiques. Ces travaux lui valent une chaire à l'Ecole de physique et de chimie en 1895. C’est la même année que Pierre Curie épouse Marie Sklodowska. Marie Curie est reçue en 1896 à l’agrégation de sciences physiques et va dès lors se consacrer aux recherches scientifiques. Pionnière, elle décide, en 1897, de faire un doctorat de physique. Elle s'intéresse alors de près aux récentes découvertes de Wilhelm Roentgen sur les rayons X et d'Henri Becquerel qui a découvert la radioactivité en 1896. Marie Curie brasse des tonnes de minerai et s'aperçoit qu'une autre substance, le thorium, est « radioactive », terme de son invention. Pierre Curie décide alors de mettre fin à ses recherches sur le magnétisme pour soutenir sa femme dans l'étude de ce phénomène. Ils prouvent - découverte majeure - que la radioactivité n'est pas le résultat d'une réaction chimique mais une propriété de l'élément, en fait de l'atome. Marie étudie alors la pechblende, minerai uranique dans lequel elle mesure une activité bien plus intense qu'en la seule présence d'uranium. Elle en déduit qu'il existe d'autres matières que l'uranium, très radioactives, le polonium et le radium, qu'elle découvre en 1898. Lors des expériences, Pierre observe les propriétés des rayonnements et Marie purifie plutôt les éléments radioactifs. Leur point commun : une rare ténacité. D'autant plus que leurs conditions de vie sont déplorables. Les époux Curie passent les quatre années suivantes dans leur laboratoire de fortune. Pourtant, avoue Marie : « L'une de nos joies était d'entrer la nuit dans notre atelier ; alors nous percevions de tous côtés les silhouettes lumineuses des flacons et des capsules qui contenaient nos produits. » Malgré leur difficulté à obtenir avancements et crédits, les Curie refusent de déposer un brevet qui aurait pu les protéger financièrement, car permettre à tout scientifique, français ou étranger, de trouver des applications à la radioactivité est à leurs yeux prioritaire. Pierre teste le radium sur sa peau. Brûlure, puis plaie : l'action sur l'homme est prouvée. Bientôt le radium sert à traiter les tumeurs malignes. La curiethérapie est née. En 1903, Marie soutient sa thèse. En commun avec Becquerel, les Curie reçoivent le prix Nobel de physique pour leur découverte de la radioactivité naturelle. Elle est la première femme à recevoir un tel prix. En 1904, Pierre Curie obtient une chaire de physique à la Sorbonne et est admis en 1905 à l'Académie des sciences. Bonheur de courte durée. Le 19 avril 1906, Pierre, affaibli par les rayons, surmené, meurt écrasé par une voiture. Marie doit continuer seule. Elle assume l'éducation de leurs deux filles, reprend le poste que son mari avait enfin obtenu à la Sorbonne, et devient ainsi la première femme à y avoir une chaire. Il lui faut aussi affronter les préjugés de l'époque : refusée en 1911 à l'Académie des sciences en raison de son sexe, peu après, elle obtient le prix Nobel de chimie pour ses travaux sur le radium et ses composés et devient ainsi le premier scientifique à avoir reçu deux prix Nobel. Mais sa vraie joie est de « soulager la souffrance humaine ». La réalisation, en 1914, de l'Institut du radium, par l'université de Paris et l'Institut Pasteur doit le lui permettre. Pendant la Première Guerre Mondiale, elle dirige les services radiologiques de l'armée, entraînant avec elle sa fille, Irène. Les rayons X peuvent localiser éclats d'obus et balles, faciliter les opérations chirurgicales ; il faut éviter le transport des blessés. Aussi, Marie crée-t-elle des voitures radiologiques. Elle ne s'arrête pas là et équipe les hôpitaux. On utilise alors pour toute protection un écran de métal et des gants de tissu. Reste à convaincre des médecins réticents et à trouver des manipulateurs de qualité. Qu'à cela ne tienne. Marie forme 150 manipulatrices. La guerre achevée, elle s'installe dans son institut, la Fondation Curie, avec Irène. Marie dirige le laboratoire de recherche, ou se développent les applications thérapeutiques de la la radioactivité, en particulier dans le traitement du cancer. Marie collecte fonds et matière première - dont les prix flambent - jusqu'aux Etats-Unis, mais accepte mal que prédominent de sombres intérêts économiques. Epuisée, presque aveugle, les doigts brûlés, stigmatisés par « son » cher radium, Marie meurt de leucémie dans un sanatorium de Sancellemoz en 1934. COTTON (E.) : Les Curie, Seghers, 1963. CURIE (M.) : Pierre Curie, Paris, Payot, 1924. CURIE (È) : Madame Curie, Paris, Gallimard, 1938.

CURRIEN (Henri, Georges), 1877-1922 : Employé de scierie et militaire. Né le 20 décembre 1877 à Fresse (Vosges), Georges Curien occupe au Thillot (Vosges) un emploi de sagard (employé de scierie). Il effectue son service militaire au 149e R.I. d’Épinal du 15 novembre 1898 au 21 septembre 1901, période pendant laquelle il devint soldat de première classe le 21 novembre 1899, puis caporal en 1900, avant d’être versé dans la réserve de l’armée d’active pour 11 ans. Il effectue alors deux périodes au sein du 109e R.I., en 1904 et 1907. A l'issue de ce temps de réserviste, il reçut comme tous les hommes de sa génération une affectation dans l’armée territoriale. Il y effectue une période avec le 43e R.I.T. en 1912. Il avait 36 ans lorsqu’il est mobilisé, en août 1914. Il rejoint alors le 2e bataillon du 43e R.I.T. (6e compagnie, 8e escouade). Dès le 1er août 1914, il entame la rédaction de ses mémoires, pour n’y mettre un terme que le 30 décembre 1918. Ce carnet d’un combattant de la Grande Guerre pourrait n’être considéré que comme un témoignage de plus sur ce conflit. Pourtant, si l’on se réfère au recensement des écrits de combattants effectué par Jean-Norton Cru, il s’avère que les souvenirs de soldats de l’infanterie territoriale ne représentent que peu d'ouvrages, qui furent essentiellement le fruit de lettrés (Normaliens, juristes, écrivains). Le carnet de Georges Curien se distingue nettement de ces écrits pour trois raisons. Tout d’abord, il est le témoignage ininterrompu d’un modeste employé de scierie sur la guerre dans les Vosges et en Alsace, de la mobilisation au 22 février 1918. Ensuite, puisque Georges Curien ne peut être soupçonné d’avoir eu le désir d’être publié, son texte a le mérite de l’authenticité car son auteur y a fait état de sa vie au quotidien sans la romancer, et ce dans une langue d’une qualité et d’un style parfois assez étonnants pour un homme de sa condition. Enfin, il prit ses notes sur le vif et elles sont, par là même, empreintes d’une émotion souvent absente des récits composés des mois, voire des années après la guerre. A la mobilisation, le 43e R.I.T. prit à Épinal sa formation de régiment à sept bataillons de quatre compagnies (7.000 hommes) et six compagnies de dépôt (2.000 hommes). Georges Curien, affecté à la défense de la place, connut alors une vie monotone, routinière, véritable vie de caserne à la campagne, qui se poursuivit jusqu’au 19 décembre, date du départ pour le front. Après une période de travaux, la première semaine de l'année 1915 s’écoula en une succession d’ordres, de contrordres, de veilles aux avant-postes et de patrouilles. Peu à peu, l’attente, la lassitude, les intempéries, transformèrent l’ennui en amertume et l’inaction en impatience d’en découdre. Le 12 janvier, il prenait part à une reconnaissance au col de la Chapelotte. Mais ce devait être la seule action de la période : le 21 janvier, il regagnait les cantonnements d’Aydoilles. C’était le morne retour à l’arrière, à l’inaction, à un sentiment d’inutilité. Le 11 février 1915, alors qu’ils se rendaient à une revue anodine, Georges Curien et son bataillon eurent l’occasion de rendre les honneurs à Raymond Poincaré et Alexandre Millerand. Ce fut l’un des rares événements qui vinrent troubler la monotonie des journées passées à attendre le départ vers d’autres cieux, moins cléments certes, mais qui auraient au moins l’avantage de mettre un terme à une inaction de plus en plus insupportable. Le 27 février, le 2e bataillon du 43e R.I.T. quittait Épinal pour Fraize. Après avoir mené quelques patrouilles dans les environs de la Croix-aux-Mines, il se retrouva vite à Saint-Dié pour un paisible séjour. Le 10 mars il se mettait en marche en direction du col du Pré de Raves, où il reçut son baptême du feu en franchissant l’ancienne frontière. Ce n’est pourtant que le 2 avril, s’étant rapproché du village du Bonhomme et de la Tête des Faux, "où la fusillade ne cesse jamais", que Georges Curien aperçut des Allemands pour la première fois depuis le début des hostilités ! Les patrouilles, les gardes, les veilles au poste d’écoute se poursuivirent jusqu’au 19 avril, rendues pénibles par la neige et le froid. Après avoir passé quelques jours à Saint-Dié en service de place, le 2e bataillon prit la direction de Robache, puis de Denipaire afin d’accomplir des travaux aux tranchées. La cote 627, entre les villages de la Fontenelle et de Launois, était un secteur agité depuis septembre 1914. Georges Curien devait en prendre la mesure. Dès le 11 mai, la préparation de l’offensive allemande prit de l’ampleur, mais l’endurcissement éprouvé durant le séjour dans le secteur du Pré de Raves puis du Bonhomme avait porté ses fruits. Le 30 mai, les tranchées furent soumises à un violent bombardement et, pour la première fois, Georges Curien échappa de peu à la mort. Cette première véritable expérience du combat lui donna l’occasion de tempérer ses ardeurs guerrières, et il ne manqua pas d’accueillir comme "un repos bien gagné" la perspective d’un séjour en deuxième ligne à Denipaire, puis plus au calme encore à Saint-Dié, jusqu’au 18 juin. Il y reçut, le 6 juin, sa nomination au grade de sergent. Le 22, il assistait aux combats de la Fontenelle, dont il sortit sain et sauf. Le 6 juillet, il échappa une nouvelle fois à la mort lorsqu’un obus éclata à proximité de lui, en plein déjeuner. Même après les succès français du 24 juillet, le secteur de la Fontenelle ne retrouvait pas le calme, puisque Georges Curien, qui y séjourna jusqu’au 19 août, mentionna des bombardements allemands fréquents sur la position nouvellement conquise. Le 28 septembre, après un mois à Saint-Dié et une semaine en permission, le sergent Curien prit la direction de Celles-sur-Plaine. Il y arriva le 30 septembre 1915, s’attendant à y trouver un environnement moins agité que celui qui avait été le sien depuis le 11 mai précédent. Le 5 octobre, pourtant, il tirait au cours d’un feu de salve ses deux premières cartouches de la guerre ! Mais ce fut ensuite le retour à la morne vie de secteur. Du 24 octobre 1915 au 8 mars 1916, Georges Curien et ses hommes occupèrent la plupart des tranchées des environs de Celles-sur-Plaine. Cette période passée aux avant-postes et en patrouille ne fut pas à proprement parler de tout repos, mais il est intéressant de voir dans le carnet à quel point les bombardements pouvaient avoir perdu de leur impact psychologique, et de quelle manière la mort des hommes avait pu devenir anodine. Embarqué le 9 mars 1916 à Raon-l’Etape à destination de Gérardmer, le bataillon transita par le Collet avant de redescendre en plein bois dans les environs du Reichackerkopf, secteur particulièrement inhospitalier. Le 30 mars, après deux semaines dans ses nouvelles tranchées, le 43e R.I.T. comptait déjà un tué. Les bombardements étaient quotidiens. Du 26 mai au 13 juin, le 2e bataillon se vit octroyer une période de repos à Cornimont, puis retourna au-dessus de la vallée de la Fecht. Le 6 juillet, ce fut l’occupation paisible de positions au-dessus de Soultzeren et, le 29, le retour aux tranchées du Reichackerkopf. C’est dans l’une de ces tranchées que Georges Curien fit une chute le 8 août. Il fut alors dirigé sur l’hôpital de la Poste, à Gérardmer, pour une entorse au pied gauche. Il n’en sortit que le 18 novembre pour retrouver sa compagnie au camp de Tinfronce le 2 décembre, après sa permission de convalescence. Son retour sous l’uniforme fut de courte durée puisqu’il contracta une angine dès le 8 décembre. S’ensuivit un séjour à l’ambulance alpine la plus proche, puis, pour la première fois depuis Noël 1913, des fêtes de fin d’année en famille. Revigoré par cette nouvelle semaine de convalescence passée auprès des siens, Georges Curien était prêt pour une deuxième campagne d’Alsace. Le 16 février 1917, le 2e bataillon du 43e R.I.T. relevait le 1er bataillon dans le secteur du Linge, par un froid glacial. Il poursuivit ses travaux dans les camps Bouquet, Morlière et au Linge même jusqu’au 19 mars. Le 20 mars, le sergent Curien emmenait un petit détachement à la cote 650, au pied du Noirmont. Il venait de quitter un secteur à la mauvaise réputation pour en occuper un qui n’avait rien à lui envier. Le 23 mars, en réponse aux tirs de l’artillerie française, le poste de la cote 650 subit le feu allemand. Un soldat et un caporal furent grièvement blessés. Quant à Georges Curien, sa bonne étoile ne l’avait pas abandonné : il ne souffrit d’aucune blessure alors que la crosse de son fusil avait été percée d’éclats de part en part ! Sa conduite lors de ce "marmitage" lui valut d’être cité à l’ordre du régiment. Le 4 avril, il était versé à la 8e compagnie (la 6e ayant été dissoute) et se rapprochait de la Tête des Faux. Après un printemps plutôt agité (embuscades et coups de main), les mois de juillet, août, et septembre 1917 s’écoulèrent paisiblement : il fut décoré de la Croix de Guerre et bénéficia d’une permission. Le 21 septembre, au jour de la dissolution de son bataillon, il était versé au 250e R.I.T., avec lequel il reprit son périple dans différents secteurs des Vosges. Il fut ensuite affecté au 112e R.I.T. à la date du 17 février 1918. Les mois suivants devaient être mouvementés et Georges Curien allait très vite se retrouver au combat, sans avoir eu le temps de s’y préparer le moins du monde, au sein d’une nouvelle unité et avec une nouvelle mission. Débarqué dans l'Oise le 26 mars 1918, son régiment fut en effet jeté dans l'une des plus terribles batailles de la guerre : celle de Montdidier, au cours de laquelle l'offensive allemande du 21 mars devait être enrayée. C'est dans un contexte tout à fait nouveau pour lui (la guerre de mouvements en plaine) que le sergent Curien participa à des combats enragés autour de la ferme Filescamp. A la suite de cette terrible épreuve, il retrouva la vie habituelle des territoriaux, occupant des secteurs calmes (en forêt de Parroy notamment). Après la dissolution du 112e R.I.T. (septembre 1918), il servit dans un bataillon de pionniers, travaillant derrière le front, dont il suivit la progression jusqu'à l'armistice du 11 novembre. Il termina ensuite son périple dans les Ardennes belges puis au Luxembourg. Georges Curien ne devait pas profiter longtemps de la paix revenue. Il s'éteignait au Thillot le 26 février 1922, à l'âge de 44 ans. CURRIEN (G.) : Carnet de Guerre de Georges Curien, Territorial vosgien, Parçay-sur-Vienne, éditions Anovi, 2001.

CUSENIER (Eugène), (Elisée) Emile, né à Etalans en 1832, mort à Paris en 1894. Elisée, né à Etalans en mars 1851, mort à Besançon le 17 novembre 1928. Parmi les sociétés industrielles qui ont été crées en France dans la seconde moitié du XIXème siècle, il en est peu qui aient fait davantage pour assurer la suprématie du commerce français à l’étranger que la grande distillerie E. Cusenier, Fils aîné et Cie. Par ses établissements d’Ornans, de Paris, de Charenton, de Marseille, de Cognac, de Mulhouse, de Bruxelles, de Londres, de Buenos-Ayres, de Montevideo, de Mexico, de Shangaï, de Calcutta, etc..., et par ses innombrables représentants, elle rayonne sur toute la surface du globe. Mais outre qu’ils ont donné à leur entreprise personnelle une impulsion extraordinaire, les Cusenier, par leur exemple, leurs incitations, ont doté la distillerie française d’une vitalité qu’elle ne connaissait pas auparavant. Dans la fabrication des liqueurs, en effet, on ne sortait pas des sentiers battus de la routine et des formules empiriques, et c’est à eux que revient le mérite d’avoir su appliquer toutes les ressources de la science et de l’art à leur perfectionnement. C’est grâce aux Cusenier, enfin, que la distillation a pu se hausser au rang d’industrie scientifique et se placer au nombre des premières industries nationales. Eugène, l’aîné des frères Cusenier, fut le fondateur de cette puissante maison. Ses débuts dans la distillerie, à Ornans, furent modestes, eu égard aux faibles ressources pécuniaires dont il disposait, mais son intelligence, son activité, son énergie, son opiniâtreté dans le travail et sa grande probité ne tardèrent pas à lui assurer le crédit nécessaire pour donner à cette oeuvre commencée à Ornans en 1858, un développement extraordinaire et lui assurer un prodigieux succès. Eugène Cusenier mourut en 1894, comblé d’honneurs. Elisée Cusenier, non seulement du vivant de ce dernier, collabora à l’oeuvre commune en y apportant le précieux concours de sa grande intelligence des affaires et de sa remarquable activité mais, encore après la mort de son frère, eut le rôle prépondérant, accentuant la vitalité de cette vaste entreprise et ne cessant de lui donner de l’extension à travers le monde et d’accroître sa prospérité. Eugène et Elisée Cusenier eurent comme collaborateurs, outre leurs deux frères Jules et Valentin, divers membres de leur famille, notamment, Charles Cusenier, Dumont-Cusenier, Girardot-Cusenier, Authier-Cusenier, Georges Cusenier et enfin Narcisse Cusenier et Louis Tièche, chimiste distingué et cousin des précédents. Elilsée Cusenier a été directeur général de cette société qui lui doit la création des usines de Marseille et de Buenos-Ayres, entre autres. Il eut l’honneur d’être choisi par ses pairs comme président du jury international des récompenses à l’Exposition universelle de 1900, et fut nommé par le gouvernement membre de la commission extra-parlementaire des alcools. Or, l’homme qui avait su acquérir une situation aussi enviable était doublé d’un philanthrope. Il a secondé bien des efforts comme il a soulagé bien des infortunes avec une discrétion rare, enveloppant toutes ses bonnes oeuvres de silence. Par ailleurs, Elisée Cusenier a joué, dans sa région d’origine, un rôle des plus utiles à l’agriculture. Maire d’Etalans pendant plus de vingt ans, il a été un apôtre des améliorations culturales, prônant les défrichements et l’emploi des engrais chimiques et surtout prêchant d’exemple parce qu’il savait très bien que, pour lutter contre la routine, l’exemple a toujours prévalu sur la théorie. Et, ce qu’il a fait dans sa commune, il l’a préconisé à la Société d’Agriculture du Doubs dont il a été pendant une vingtaine d’années le président et à l’Office départemental d’agriculture à la tête il se trouvait également. Avant de mourir, il a institué pour légataires universels de sa grosse fortune évaluée à plusieurs millions, les établissements de bienfaisance de Besançon et il a fait un legs important à l’hôpital d’Ornans.

 
     
 
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